République du Congo


Acte fondamental du 31 décembre 1968.

Acte fondamental.

Annexe 1. Dispositions de la Constitution du 8 décembre 1963 restant applicables.

Annexe 2. Acte créant le Conseil national de la Révolution.

    Les « Trois Glorieuses congolaises », les 13, 14 et 15 août 1963, au cours desquelles d'importantes manifestations, soutenues par une partie de l'armée, qui refuse de tirer sur les manifestants, conduisent à la démission du président Fulbert Youlou et à l'abrogation de la Constitution de 1961.
    L'armée et les syndicats appellent Alphonse Massamba-Débat à la tête du gouvernement provisoire. Une nouvelle Constitution est adoptée par référendum le 8 décembre 1963. Alphonse Massamba-Débat, président du Conseil national de la Révolution, devient alors président de la République et nomme Pascal Lissouba premier ministre. En août 1964, le  Mouvement National de la Révolution est institué parti unique. Le régime se rapproche de Cuba et de la Chine et se propose d'instaurer un « socialisme bantou ».
    Les conflits entre les différentes factions représentées au Conseil national de la Révolution provoquent des tensions graves et les premiers assassinats politiques. La crise permet aux officiers progressistes dirigés par Marien Ngouabi de s'emparer du pouvoir. Le 5 août 1968, un nouveau Conseil national de la Révolution est formé. Le 14 août, un acte fondamental réorganise les pouvoirs publics. La majeure partie de la Constitution de 1963 est abrogée, quant à la partie relative aux libertés publiques, qui demeure en principe applicable, elle sera allègrement violée par les nouveaux dirigeants. Le capitaine Alfred Raoul devient premier ministre. Massemba-Débat doit démissionner et il est emprisonné.
Massemba-Débat qui reste d'abord présidet de la République doit démissionner et il est emprisonné. Le premier ministre devient chef de l'Etat par interim, mais c'est le capitaine Ngouabi, en tant que président du Conseil national de la Révolution qui détient le pouvoir.
    L'acte fondamental est modifié le 31 décembre et une nouvelle version est publiée par le Journal officiel du 1er janvier 1969. Ngouabi devient alors chef de l'État et confirme Raoul comme premier ministre. Cependant il n'occupe pas le palais présidentiel et réside au quartier général de l'armée populaire. Son pouvoir est menacé et il doit faire face à une dizaine de tentatives de coup d'État. Il fonde le Parti congolais du travail, parti unique d'inspiration marxiste-léniniste, dont le congrès constitutif se tient du 29 au 31 décembre 1969. Le congrès adopte une nouvelle Constitution le 30 décembre et le Congo devient la République populaire du Congo.

Sources : Journal officiel de la République du Congo, 11e année, n° 16, 15 août 1968, Brazzaville, p. 382, 383  ; 12e année, n° 1, 1er janvier 1969, p. 3 à 5.



Acte fondamental.

(version publiée par le JO du 1er janvier 1969)

Préambule.

Article premier.

L'acte fondamental détermine l'organisation et le fondement des pouvoirs publics  jusqu'à la promulgation d'une nouvelle constitution. A ce titre les dispositions de la constitution du 8 décembre 1963 non conformes au présent acte sont abrogées.

Article 2.

Sont et demeurent applicables le titre n° II sauf article 12, alinéa 4 et 5  (voir en annexe), le titre VIII, sauf article 61 (voir en annexe) et le titre IX modifié de la constitution du 8 décembre 1963 (voir en annexe).

Titre premier.
Du Conseil national de la révolution.

Article 3.

Le  C.N.R.  reste  garant  de  la  continuité  du  pouvoir  de  l'État  et  des institutions révolutionnaires jusqu'à la mise en place des institutions nouvelles.

Article 4.

Le C.N.R. dirige, oriente et contrôle l'action de l'État.

Titre II. Chef de l'État.

Article 5.

Le  Président  du  C.N.R. est Chef de l'État. Il incarne l'Unité Nationale. Il veille au respect des décisions et actes du C.N.R. et du Gouvernement, et des traités et accords internationaux.

Article 6.

Le  Président  du  C.N.R., Chef de l'État nomme le Premier  ministre  sur proposition du Conseil National de la Révolution.

Article 7.

Le   Premier   ministre   nomme   les   membres   du  Gouvernement   sur proposition  du  Conseil  National  de  la  Révolution.  Les  membres  du  Gouvernement  sont responsables devant le Premier ministre.

Article 8.

Les  actes du Président du C.N.R., Chef de l'État sont contresignés par le Premier ministre.

Article 9.

Le Président du C.N.R., Chef de l'État proclame, lorsque les circonstances l'exigent,  l'état d'urgence  et  l'état  de  siège  sur  décision  du  Conseil  National  de  la Révolution.

Article 10.

Le  Président  du  C.N.R., Chef de l'État accrédite les  ambassadeurs  et envoyés extraordinaires auprès des puissances étrangères. Les ambassadeurs et envoyés extraordinaires sont accrédités auprès de lui.

Article 11.

Le Président du C.N.R., Chef de l'État, exerce le droit de grâce.

Titre III. Du Gouvernement.

Article 12.

Le Gouvernement conduit la politique de la Nation et rend compte de ses activités au Conseil National de la Révolution.

Article 13.

Le  Premier  ministre,  Chef  du  Gouvernement  préside  le  conseil  des ministres.

Le Premier ministre est responsable devant le Conseil National de la Révolution.

Article 14.

En conseil des ministres, le Premier ministre légifère par ordonnance et exerce le pouvoir réglementaire.

Article 15.

Le  Premier  ministre  nomme  en  conseil  des  ministres  aux  hautes fonctions civiles et militaires sur décision du Conseil National de la Révolution.

Un  décret  détermine  les  emplois  pour lesquels  le  pouvoir  de  nomination  du Premier ministre peut être délégué par lui pour être exercé en son nom.

Article 16.

Le Premier ministre, sur avis du C.N.R., négocie et ratifie les traités

Article 17.

Les  membres  du  Gouvernement  assistent  aux  séances du  Conseil National de la Révolution en qualité d'observateurs sur convocation.

Article 18.

Les  actes  du  Premier  ministre  sont  contresignés  par  les  ministres  des départements intéressés.

Titre IV. Dispositions spéciales.

Article 19.

Les  lois,  ordonnances et règlements actuellement en vigueur, lorsqu'ils ne sont pas contraires au présent acte demeurent applicables tant qu'ils n'auront pas été modifiés ou abrogés par le Gouvernement de la République.

Article 20.

Le présent acte qui entrera en vigueur selon la procédure d'urgence sera publié au Journal officiel, et abrogé après la promulgation de la nouvelle Constitution.



Annexe 1.

Dispositions de la Constitution du 8 décembre 1963 restant applicables.

 Titre II. Des libertés publiques et de la personne humaine.

Article 5.

La personne humaine est sacrée. L'Etat a l'obligation de la respecter et de la protéger.

Chacun a droit au libre développement de sa personnalité dans le respect des droits d'autrui et de l'ordre public.

La liberté de la personne humaine est inviolable.

Nul ne peut être arrêté et détenu si ce n'est sur l'ordre d'une autorité légitime.

Nul ne peut être inculpé, arrêté ni détenu que dans les cas déterminés par une loi promulguée antérieurement à l'infraction qu'elle réprime.

Article 6.

Le domicile est inviolable.

Il ne peut être ordonné de perquisitions que dans les formes et conditions prévues par la loi.

Article 7.

Le secret des correspondances est garanti par la loi.

Article 8.

Le droit de propriété est intangible.

Nul ne peut être privé de son droit de propriété que pour cause d'utilité publique et contre dédommagement ou compensation dans les conditions prévues par la loi.

Article 9.

Nul ne doit être inquiété pour ses opinions dans la mesure où leur manifestation ne trouble pas l'ordre public établi par la loi.

La libre communication des pensées et des opinions s'exerce par la parole et par la presse dans le respect des lois et des règlements.

Article 10.

La liberté d'association est garantie à tous, dans les conditions fixées par la loi.

Les rassemblements et groupements dont le but ou l'activité seraient illicites ou contraires à l'ordre public sont prohibés.

Article 11.

Le mariage et la famille sont la base naturelle de la société.

Ils sont placés sous la protection de la loi.

Article 12.

L'Etat garantit l'égal accès de l'enfant et de l'adulte à l'instruction, à la formation professionnelle et à la culture.

Tout enfant a droit à l'instruction et à l'éducation.

L'Etat, les collectivités publiques, créent les conditions préalables et les institutions publiques qui garantissent l'éducation des enfants.

Article 13.

La liberté de conscience et de religion est garantie à tous sous réserve de l'ordre public. Les institutions et les communautés religieuses ont le droit de se développer sans entraves dans le respect des lois et des règlements.

Article 14.

Chacun a le devoir de travailler et le droit d'obtenir un emploi. Nul ne peut être lésé dans son travail en raison de ses origines, de ses croyances, de ses opinions.

Tout homme peut défendre ses droits et ses intérêts par l'action syndicale et adhérer au syndicat de son choix.

Les libertés syndicales s'exercent dans le cadre des lois qui les réglementent.

Tout travailleur participe, par l'intermédiaire de ses délégués syndicaux à la détermination collective des conditions de travail.

La loi détermine les conditions d'assistance et de protection que la société accorde aux travailleurs.

Article 15.

La défense de la Patrie et de l'intégrité du territoire de la République est un devoir pour chaque citoyen.

Article 16.

Tous les citoyens de la République du Congo ont le devoir de se conformer à la Constitution et aux lois de la République, de s'acquitter de leurs contributions fiscales et de remplir honnêtement leurs obligations sociales.

[...]

Titre VIII. Des relations internationales.

Article 60.

La République du Congo se conforme aux règles du droit international.

[...]

Article 62.

Les traités et accords régulièrement ratifiés ont dès leur publication une autorité supérieure à celle de la loi sous réserve de leur application par l'autre partie.

Article 63.

Nulle cession, nul échange, nulle adjonction de territoire n'est valable sans le consentement des populations intéressées.

Titre IX. De l'autorité judiciaire.

Article 64.

La justice est rendue sur le territoire de la République au nom du peuple congolais.

Article 65.

Les juges ne sont soumis dans l'exercice de leurs fonctions qu'à l'autorité de la loi.

Article 66.

Le conseil supérieur de la magistrature est composé de membres de droit et de membres nommés par décret en conseil des ministres.

Sont membres de droit du conseil supérieur :

Président : Le Président du C.N.R., Chef de l'État.

Vice-président : Le garde des sceaux, ministre de la justice.

Membres:

Le Président de la cour suprême ;
Le Président de la cour d'appel de Brazzaville.

Sont nommés par décret en conseil des ministres :
Un magistrat du siège de la cour d'appel ;
Un magistrat du siège des tribunaux de grande instance ;
Un magistrat du siège des tribunaux d'instance ;
Trois suppléants sont désignés dans les mêmes conditions.

Les décisions du conseil supérieur de la magistrature sont prises à la majorité des suffrages. En cas de partage des voix celle du Président est prépondérante.

Article 67.

Le  Président  du  C.N.R.,  Chef  de  l'État nomme sur présentation du conseil supérieur de la magistrature, et  après  avis  du  conseil  des  ministres, les magistrats, à l'exception de ceux du parquet.

Le conseil supérieur de la magistrature est saisi par le garde des sceaux, ministre de la justice.

Le conseil supérieur de la magistrature, assure conformément à la loi, la discipline de ces magistrats, leur indépendance et l'administration des tribunaux judiciaires.

Les magistrats du siège sont inamovibles.

Article 68.

Lorsque le conseil supérieur siège comme juridiction disciplinaire, il est présidé par le Président de la cour suprême.

Article 69.

Une loi organique porte statut de la magistrature.

Article 70.

Nul ne peut être arbitrairement arrêté ou détenu. L'autorité judiciaire gardienne de la liberté individuelle, assure le respect de ce principe dans les conditions prévues par la loi.



Annexe 2.

Acte créant le Conseil national de la Révolution.

Titre premier. Création et définition.

Article premier.

Jusqu'à la mise en place des nouvelles institutions nationales il est créé un Conseil National de la Révolution.

Article 2.

Le C.N.R. est l'organe suprême de la Révolution et comprend 28 membres. A ce titre il conçoit, dirige, contrôle et coordonne l'action du parti et de l'État.

Titre II. De l'organisation.

Article 3.

Le C.N.R. comprend:
Un directoire, organe d'exécution comprenant 8 membres ;
Une ou plusieurs commissions techniques.

Article 4.

Le directoire comprend 8 membres et est composé comme suit :
Un Président, Chef de l'État ;
Un Premier ministre, chargé de la Présidence du Conseil du Gouvernement ;
Un secrétaire chargé de l'organisation du Parti et des relations avec les organismes du parti ;
Un secrétaire chargé des relations avec l'extérieur ;
Un secrétaire chargé de l'éducation populaire et de la propagande ;
Un secrétaire chargé de la défense et la sécurité ;
Un secrétaire chargé des finances et matériels ;
Un secrétaire permanent.

Article 5.

La  sécurité,  la  défense  nationale  et  la  propagande  sont  rattachées  au C.N.R. et constituent des commissions techniques.

Titre III. Les attributions.

Article 6.

Sur proposition du C.N.R. le Président du C.N.R.,Chef de l'État nomme et révoque le Premier ministre.

Article 7.

Le  C.N.R.  élabore  le  texte  fondamental  relatif  à  l'organisation  et  au fonctionnement de l'État.

Article 8.

Un  règlement  intérieur  pris  par  le  Conseil  National  de la  Révolution définira les méthodes de travail en son sein.

Article 9.

Toute proposition de révision du présent acte devra recueillir l'accord d'au moins 1/3 des membres composant le C.N.R. La révision doit être acceptée à la majorité du 2/3 des membres composant le Conseil.


Pour obtenir davantage d'informations sur le pays et sur le texte ci-dessus,
voir la fiche Congo.