Projet de Constitution, dit de la Malmaison, du 29 mai 1801.
Titre I.
Titre II.
Titre III.
Titre IV. Organisation Cantonale.
Titre V. Conditions d'éligibilité.
Décret du 27 Octobre 1801, revêtant trois membres du Conseil exécutif, qui ne sont pas en même tems membres de la Diète, des pouvoirs et des attributions délégués à l'Autorité exécutive suprême.
Loi du 28 Octobre 1801. Dissolution de la Diète Helvétique. Constitution publiée le 29 Mai 1801, mise en exécution, pour ce qui regarde l'organisation des Autorités centrales. Liste de 25 membres, devant former le Sénat, à proposer par une Commission de cinq membres nommés dans le sein du Corps législatif. Diète à convoquer.
En 1797, la Confédération réunit 13 cantons : Zurich, Berne, Lucerne, Uri, Schwyz, Unterwald, Zug, Glaris, Bâle, Fribourg, Soleure, Schaffouse, Appenzell ; des pays alliés : Saint-Gall, Bienne, Grisons, Valais, Genève, Neuchâtel, évêché de Bâle ; ainsi que des pays sujets d'un ou de plusieurs cantons : Landgraviat de Thurgovie, Rheinthal, Pays de Sargans, Gaster, Uznach, Rapperschwyl, Bade, Morat, Grandson, bailliages italiens. Si les Waldstätten restent fondés sur des principes démocratiques, les autres cantons ont un régime aristocratique et tous usent du droit féodal avec les pays sujets. Cette vieille structure est ébranlée par les changements que la Révolution française provoque à ses frontières, et par le passage des troupes françaises et du général Bonaparte.
Le mouvement des patriotes débute à Lausanne le 2 janvier 1798 et l'indépendance du pays de Vaud, qui dépendait alors de Berne, est proclamée le 24. A Mulhouse, alors pays allié de la Confédération, le 4 janvier, le Conseil se prononce pour le rattachement à la France. A Bâle, l'égalité entre les citoyens est proclamée le le 20 janvier. Le 4 février le prince-abbé de Saint-Gall renonce à la souveraineté en faveur du peuple. Un peu partout des arbres de la liberté sont plantés.
Cependant, un projet de Constitution est négocié à Paris par le député bâlois Pierre Ochs et accepté par le Directoire. Il est adopté dès le 9 février par les Vaudois, refusé par les députés de Berne, Soleure et Fribourg. Les troupes françaises appuyées par les patriotes renversent les gouvernements oligarchiques. Pendant quelques jours, le général Brune, commandant les troupes françaises, envisage de diviser la Suisse en trois républiques : République rhodanique (Moniteur du 9 germinal an VI/29 mars 1798), République helvétique (Proclamation de Brune, 29 ventôse/19 mars) et Tellgau - les Waldstätten - (16 mars), mais y renonce dès le 31 mars (Moniteur du 11 germinal).
Le projet de Constitution de Paris, également appelé le livret helvétique (Helvetisches Büchlein), est alors accepté le 12 avril par les députés de 10 cantons (Argovie, Bâle, Berne, Fribourg, Léman, Lucerne, Oberland, Schaffouse, Soleure et Zurich, mais les Waldstätten ne sont pas représentés), réunis à Aarau, qui proclament « l'indépendance de la République helvétique, une, indivisible, démocratique, représentative » (Bulletin des loix et décrets du Corps législatif de la République helvétique, 1er cahier, Lausanne, 1798, p. 3).
Cependant, l'instabilité de la situation internationale et les troubles intérieurs rendent l'application de la Constitution difficile ; dans les territoires occupés par les Alliés, l'ancien régime est même rétabli. A la suite du coup d'État de Brumaire en France, le 7 janvier 1800, un premier coup d'État met fin au Directoire helvétique, renversé et remplacé par un comité exécutif, tandis qu'une révision de la Constitution est engagée, sans succès. Un deuxième coup d'État, le 7 août, établit un régime provisoire et en janvier 1801, une mission dirigée par un membre de l'exécutif, Glayre, est envoyée à Paris pour soumettre un nouveau projet de Constitution. Après la Paix de Lunéville, le 9 février 1801, Bonaparte le juge inapproprié à la situation de la Suisse et transmet à la délégation (30 avril) un projet de Constitution, dit de la Malmaison, puis une nouvelle version le 9 mai, que Glayre est chargé de faire adopter par les autorités helvétiques. C'est cette version que le Conseil législatif décide, le 29 mai 1801, de proposer à une Diète générale.
Mais la Diète générale, convoquée pour le 7 septembre 1801 afin d'adopter le projet de Constitution, se transforme en Assemblée constituante et le projet modifié dans un sens unitaire est adopté le 24 octobre. Un troisième coup d'État a lieu le 27 octobre, organisé par la minorité des conservateurs avec l'appui des troupes françaises. L'exercice du pouvoir exécutif est confié à trois de ses membres et le lendemain, le Diète est dissoute, et la Constitution mise en vigueur dans sa version initiale du 29 mai.
Le Gouvernement du 28 octobre 1801 tente de restaurer l'Ancien Régime et prépare une Constitution d'inspiration fédéraliste, que le Sénat, par décret du 27 février 1802, décide de soumettre aux diètes cantonales (13 voix contre 11), mais la procédure sera interrompue par le quatrième coup d'État du 17 avril suivant.
Voir la Constitution des notables du 25 mai 1802.
Voir l'Acte de médiation du 19 février 1803.
Sources : A. de Tillier, Histoire de la République helvétique, tome premier, Genève, Paris, 1846, p. 195 et s. Voir également le Recueil des loix, arrêtés, proclamations, traités... pour servir à l'histoire de la révolution, 2 vol., Lausanne, 1799. Les textex ci-dessous sont tirés du Bulletin des loix, tome 5, p. 396 et s., puis 551 et s. L'orthographe et la ponctuation d'origine ont été respectées.
Loi du 29 mai 1801.
Projet de Constitution à présenter à la sanction d'une Diète générale Helvétique à convoquer.
Le Conseil législatif, sur les messages du Conseil exécutif, du 12, 18 et 26 Mai 1801, et ayant entendu le rapport de son Comité de Constitution,
Ordonne :
Le Projet de. Constitution suivant, sera présenté à la sanction d'une Diète générale Helvétique, qui srra convoquée dans le courant du mois de Septembre prochain.
PROJET DE CONSTITUTION.
Titre I.
La République Helvétique est une.
Berne est la capitale de l'Helvétie ; son territoire est divisé en Cantons.
Ces Cantons sont :
1. Berne, dans ses anciennes limites, moins le Pays-de-Vaud et l'Argovie.
2. Zurich, dans ses anciennes limites.
3. Lucerne, idem.
4. Uri idem.
5. Schwitz idem.
6. Unterwalden idem.
7. Zug idem.
8. Glaris, aggrandi par les bailliages de Sargans, Werdenberg, Gaster, Utznach et Rapperschwyl.
9. Appenzel, aggrandi par le Tockenbourg, St. Gall, le Reinthal.
10. Soleure, dans ses anciennes limites.
11. Fribourg, aggrandi par les bailliages jadis communs de Morat et de Schwarzenbourg.
12. Bâle, aggrandi par la partie inférieure du Frickthal, jusques à Sekirgen.
13. Schaffouse, réuni à la Thurgovie.
14. Argovie, réunie à Eaden et à la partie supérieure du Frickthal.
15. Le Pays-de-Vaud, dans ses anciennes limites.
16. Les Grisons.
17. Les Bailliages Italiens.
La portion du Vallais qui n'aura pas été cédée à la France, sera réunie à un Canton voisin.
Titre II.
Il y a une organisation centrale pour l'exercice de la souveraineté nationale, et une organisation cantonale.
L'organisation centrale comprend :
La haute Police générale.
La force armée pour la protection intérieure et extérieure de la République.
Les rapports politiques et diplomatiques avec l'étranger.
L'administration uniforme de la justice civile et criminelle.
La détermination du contingent que chaque Canton doit payer au trésor public.
Les Régies nationales, Sel, Postes, Mines, Douanes et Péages ; la confection et la police des monnoies, réglemens et police du commerce.
Les établisscmens généraux d'instruction publique.
L'organisation particulière de chaque Canton comprend l'assiète et le mode de répartition des contributions foncières.
La détermination des besoins du Canton et le moyen d'y pourvoir par des cotisations locales.
La Police correctionnelle.
L'administration des biens et domaines nationaux compris la dixme et les censes.
Le culte, les indemnités de ses Ministres, les établissemens particuliers d'éducation et instruction publique auxquelles dépenses seront spécialement affectés les revenus provenans des domaines, dixmes et cens cantonaux.
Titre III.
L'organisation générale de la République se compose d'une Diète et d'un Sénat.
Diète.
La Diète est formée par la réunion des Représentans de chaque Canton, dans la proportion suivante :
Berne 9.
Zurich 8.
Schaffouse 6.
Grisons 6.
Appenzell 6.
Lucerne 5.
Glaris 5.
Italiens 5.
Fribourg 4.
Pays-de-Vaud 7.
Argovie 6.
Basle 3.
Soleure 3.
Uri 1.
Schwitz 1.
Zug 1.
Unterwalden 1.
Total 77.
Les membres de la Diète pqurront être indemnisés par leurs Cantons.
Ils sont cinq ans en fonctions.
La Diète est chargée de procéder à la nomination des places vacantes dans le Sénat.
Elle approuve les comptes de la Trésorerie, fait droit aux plaintes des Gantons contre les Actes du Sénat.
Le Sénat convoque la Diète sur la demande de la majorité des Cantons.
Il est également obligé de la convoquer lorsqu'un Canton porte plainte contre lui et que sa plainte est appuyée par quatre autres Cantons.
On y discute et adopte la Loi, lorsqu'un projet de Loi présenté par le Sénat aux Cantons, n'a pas obtenu l'approbation de douze Cantons, et que le Sénat persiste dans ce projet.
Au commencement de chaque session, le Sénat en spécifie la durée.
Sénat.
Le Sénat est composé de deux Landammans, de vingt-trois Conseillers : il ne peut y avoir plus de trois Membres pris dans le même Canton.
Le Sénat prépare les projets de Loix et les propose à l'acceptation des Cantons.
Il arrête les mesures et réglemens d'administration et de police générale.
Il déclare la guerre, conclut la paix, forme des alliances et ratifie les traités.
Il juge les différens entre les Cantons.
Il dénonce à la Diète les Autorités cantonales pour les atteintes portées par elles à la Constitution générale.
Il choisit parmi ses membres les deux Landammans. Ceux-ci sont dix ans en place, les simples Sénateurs cinq ans.
Les Landammans président le Sénat alternativement chacun une année.
Celui qui n'est pas en activité est le lieutenant de l'autre, en cas de maladie ou d'absence.
Le Sénat composé, de membres pris dans son sein, un petit Conseil.
Ils sont au nombre de quatre et présidés par le premier Landamman.
Ce Conseil est chargé de l'exécution des Loix, il prépare les projets d'Arrêtés ou de réglemens administratifs qui sont ensuite sanctionnés par le Sénat en corps. Le Conseil pourvoit à leur exécution.
Chacun des quatre membres de ce Conseil est chargé d'un département, intérieur, justice, finances et la guerre.
Tous les Agens de l'Administration générale lui sont subordonnés et sont à sa nomination, excepté les Préfets.
Le Landamman en exercice reçoit une indemnité de trente mille francs de Suisse.
Le second Landamman et les quatre Conseillers Ministres en reçoivent une de six mille.
Le Landamman ert exercice nomme les Préfets de Canton, le petit Conseil les révoque.
Le Landamman a la direction des affaire» extérieures. Il a sous lui un Secrétaire d'Etat chargé du département et de la correspondance. Il le nomme et le choisit hors du Sénat.
Il nomme les Agens diplomatiques.
Le Sénat peut s'ajourner pour un espace de tems qui ne peut être plus long de six mois.
Pendant l'ajournement, le petit Conseil est dépositaire du Pouvoir exécutif et l'exerce dans sa plénitude, sauf les projets de Loix.
Cet ajournement ne peut avoir lieu que six semaines avant ou six semaines après l'assemblée de la Diète.
Le Sénat peut demander compte au petit Conseil de sa gestion pendant son ajournement, il peut lui donner des instructions.
Les simples membres du Sénat reçoivent des indemnités du trésor public, elles ne peuvent être au-dessus de quatre mille francs de Suisse.
Titre IV.
Organisation Cantonale.
Il y a dans chaque Canton un Préfet nommé par le Landamman, et chargé de l'exécution générale des Loix de la République dans le Canton, et de la haute police.
Chaque Canton a son organisation administrative particulière, avec les attributions ci-dessus déterminées.
Elle sera adaptée aux convenances locales.
L'Administration de chaque Canton discute les projets de Loix qui lui sont présentés par le Sénat ; les accepte ou les rejette et envoye son vote au Sénat.
Titre V.
Conditions d'éligibilité.
Nul ne peut être admis à nommer ou être nommé aux fonctions nationales ou cantonales
1. S'il n'est citoyen Helvétique.
2. S'il n'est propriétaire en Helvétie ou exerçant une profession indépendante.
3. S'il ne paye une contribution.
( Chaque Canton réglera la quote de cette Contribution. )
Elle doit être pour les Autorités de Cantons double de celle de District, et pour les Autorités Nationales triple de celle des Autorités cantonales.
Résolue par le C. L. le 29 Mai 1801.
Le Conseil Exécutif arrête : etc.
Berne le 29 Mai 1801.
Président, Zimmermnn.Le Secrétaire général, Mousson.
Décret du 27 Octobre 1801.
Revêtant trois membres du Conseil exécutif, qui ne sont pas en même tems membres de la Diète, des pouvoirs et des attributions délégués à l'Autorité exécutive suprême.
Le Conseil législatif, sur l'avis donné par un membre, que la Diète Helvétique non seulement en contravention à la Loi sur sa convocation, et en s'écartant dans ses délibérations du Projet de Constitution, s'est érigée en Assemblée constituante ; mais qu'elle a encore procédé et achevé sous date de ce jour, les élections d'un Sénat ;
Considérant les dangers sans nombre, auxquels la Patrie se trouve exposée par ces opérations ;
Considérant, que trois membres du Conseil exécutif, comme membres de la Diète y ont pris part;
O R D O N N E :
1. L'exercice du Pouvoir, attribué an Conseil exécutif, est conféré provisoirement aux trois membres de ce Conseil, qui ne sont pas membres de la Diète Helvétique, ou à la majorité de ces membres, savoir : aux citoyens Dolder, Savary et Ruttimam.
2. Ils sont chargés de pourvoir à la sureté et à la tranquillité publique.
Berne le 27 Octobre 1801.
Le Président du Conseil législatif, Marcacci.
Luthard, Stockar. vice-Secrét.
Pour copie conforme.
Le Secretaire du Pouvoir exécutif, Mousson,
Loi du 28 Octobre 1801.
Dissolution de la Diète Helvétique. Constitution publiée le 29 Mai 1801, mise en exécution, pour ce qui regarde l'organisation des Autorités centrales. Liste de 25 membres, devant former le Sénat, à proposer par une Commission de cinq membres nommés dans le sein du Corps législatif. Diète à convoquer.
Le Conseil Législatif, considérant, les maux dont la Patrie se voit menacée par l'incohérence des travaux de la Diète Helvétique et la partialité manifeste qui a présidé à ses délibérations.
Considérant que cette Diète a méconnu ses devoirs et dépassé les limites de ses attributions, en s'occupant d'un nouveau projet de Constitution et s'arrogeant par le fait les fonctions d'une assemblée constituante.
Considérant qu'une telle marche n'est justifiée par aucun pouvoir légitimement délégué, qu'elle est même formellement opposée aux Loix organiques ainsi qu'aux vœux de l'Helvétie tacitement énoncés par la convocation des assemblées cantonales.
Considérant que par la retraite de seize membres de cette assemblée, plusieurs Cantons n'y étant point représentés et d'autres ne l'étant que partiellement, elle a cessé d'être la Diète générale Helvétique, et n'a pu légitimement continuer ses travaux.
Considérant enfin, que le devoir impérieux du Gouvernement provisoire est de prevenir les déchiremens intérieurs et tous les maux de l'anarchie.
Décrète :
Article 1. L'Assemblée siégeante à Berne sous le nom de Diète Helvétique, est déclarée dissoute et ses travaux seront regardés comme nuls et non avenus.
2. La Constitution publiée le 29 Mai 1801 sera dès à présent mise en exécution pour ce qui regarde l'organisation des Autorités centrales.
3. Il sera nommé dans le sein du Corps Législatif une Commission de cinq membres, chargés de proposer, séance tenante, une liste de vingt-cinq membres devant former le Sénat. Le Corps législatif procédera de suite aux nominations.
4. Aussitôt après s'être réuni en majorité, le Sénat entrera en fonctions, et dès ce moment l'autorité du Gouvernement provisoire cessera.
5. Le Sénat exercera les attributions et les pouvoirs qui lui sont délégués par la Constitution.
6. Il est spécialement chargé de faire toutes les dispositions nécessaires pour la convocation de la Diète constitutionnelle qui devra s'assembler dans trois mois au plus tard.
7. Le Sénat est en outre chargé de préparer pour cette Diète un préavis sur les améliorations dont la Constitution seroit susceptible, ainsi que les Loix organiques nécessaires à sa mise en activité.
8. Il constatera les vœux énoncés en faveur de tel ou tel changement à apporter dans la division du territoire et en fera rapport à la Diète.
9. Il est enfin chargé d'examiner les projets d'organisations cantonales et d'en faire rapport à la Diète ; jusques à ce que celle-ci les ait approuvés et enregistrés, les Autorités actuellement existantes dans les Cantons, continueront leurs fonctions.
10. Indépendamment des travaux ci-dessus, le Sénat rendra compte à la Diète, de l'état de la République et de la manière dont il a gouverné depuis son installation jusques alors.
11. La Diète aura le droit de confirmer le Sénat ou de procéder à une nouvelle élection.
Résolue par le C. L. le 28 Octobre 1801.
Le Pouvoir exécutif arrête : etc. B
Berne le 28 Octobre 1801.
Les membres du Pouvoir exécutif
Dolder, Savary.
Le Secrétaire du Pouvoir exécutif,
Mousson.
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