Le gouvernement de la France libre
et de la France combattante



Décret portant nomination de commissaires nationaux

Le général de Gaulle, Chef des Français libres,
Président du Comité national,
Vu l'ordonnance n° 16 du 24 septembre 1941 portant organisation nouvelle des pouvoirs publics de la France libre,

Vu le décret du 24 septembre 1941 relatif à la constitution du Comité national ;

Décrète :

Article premier.

Sont nommés :
Commissaire national à l'Économie, aux finances et aux colonies : M. Pleven ;
Commissaire national aux Affaires étrangères : M. Déjean ;
Commissaire national à la Guerre : M. le général Legentilhomme ;
Commissaire national à la Marine et à la marine marchande : M. le vice-amiral Muselier ;
Commissaire national à la Justice et à l'instruction publique : M. le professeur Cassin ;
Commissaire national à l'Intérieur, au travail et à l'information : M. Diethelm ;
Commissaire national à l'Air : M. le général Valin ;
Commissaire national sans département : M le capitaine de vaisseau Thierry d'Argenlieu.

Article 2.

M. Pleven, commissaire national à l'Économie, aux finances et aux colonies est chargé de la coordination des départements administratifs civils.

Article 3.

Le présent décret sera publié au Journal officiel de la France libre.
Fait à Londres, le 24 septembre 1941.
Ch. de Gaulle.

Par décret n° 168 du 4 mars 1942, le contre-amiral Auboyneau est nommé commissaire national à la marine en remplacement du vice-amiral Muselier démissionnaire
Par décret n° 171 du 4 mars 1942, le général d'armée Catroux, délégué général et Commandant en chef au Levant est nommé Commissaire national en mission tous en conservant ses fonctions.
Le comité national est réorganisé par décret n° 362 du 28 juillet 1942, et par décret n° 363 :
René Pleven est nommé commissaire national à l'économie, aux colonies et à la marine marchande,
André Philip, député, commissaire national à l'intérieur et au travail,
André Diethelm, commissaire national aux finances et aux pensions,
Jacques Soustelle commissaire national à l'information.
Par décret n° 381 du 3 août 1942, René Pleven est nomme vice-président du Comité national en l'absence du général de Gaulle.

Nouvelle organisation par décret n° 518 du 17 octobre 1942 et nominations par décret n° 519 :
Pleven commissaire national aux affaires étrangères et aux colonies,
Diethelm commissaire national aux finances, à l'économie et à la marine marchande.

Nouvelle organisation par décret n° 726 et nominations par décret n° 727 du 5 février 1943 :
René Pleven, commissaire national aux colonies,
René Massigli, commissaire national aux affaires étrangères.


Télégramme du général de Gaulle au général Catroux ; 
au gouverneur général Eboué ; 
à l'amiral d'Argenlieu, haut commissaire au Pacifique ; 
aux délégués de la France combattante auprès des gouvernements alliés.

L'excitation mondiale provoquée par l'entreprise américaine en Afrique du Nord française et les nouvelles lancées en tous sens à ce sujet, surtout de Washington, ne doivent pas nous empêcher de voir clair.
Voici quelles sont, à ma connaissance, les données de cette affaire :

Pour préparer leur arrivée, les Américains avaient noué des intelligences sur place tout en tenant la France combattante en dehors de leur action. Les gaullistes ont aidé les Américains, croyant que ceux-ci étaient d'accord avec nous. Certaines autorités locales ont eu, avant l'attaque, des rapports avec eux calculant qu'en tout cas cela pourrait être utile.

Pour influencer l'armée et la détourner de résister et aussi pour susciter une autorité française qui serait dans leurs mains, les Américains ont fait apparaître le général Giraud. En même temps, ils négociaient avec Darlan qui était à Alger.

En fait les troupes d'Afrique et la marine ont résisté partout aux Américains. Au Maroc, leur résistance a même été acharnée. L'influence de Giraud s'est révélée inefficace. D'autant plus que, d'une part, il s'était handicapé par une lettre écrite naguère au Maréchal et par laquelle il s'engageait sur l'honneur à l'obéissance et que, d'autre part, il n'avait fait aucun accord avec nous. Enfin, tous les partis trouvent fâcheux qu'il tienne ses pouvoirs uniquement du bon plaisir américain.

C'est alors que Darlan est entré en scène. S'étant laissé faire, pour commencer, prisonnier des Américains, il a négocié avec eux la reddition d'Alger. Puis, il vient d'ordonner de cesser le combat en proclamant qu'il exerçait l'autorité en Afrique du Nord au nom du Maréchal, que tous les chefs actuels restaient en place et que les troupes devaient garder la neutralité. Les Américains, pressés d'en finir, et espérant qu'un jour Darlan se joindra activement à eux, inclinent maintenant à trouver cette solution satisfaisante. D'ailleurs la flotte de la Méditerranée est restée à Toulon dont les Allemands sont tout près. Il en résulte que les Américains jugent bon de ne pas négliger Darlan, croyant qu'éventuellement il pourrait empêcher la flotte de marcher avec les Allemands.

Tout se passe donc comme si une sorte de nouveau Vichy était en train de se reconstituer en Afrique du Nord, sous la coupe des États-Unis.

Naturellement, j'ai eu comme souci dominant de ne pas nous diminuer ou salir dans cette affaire. Nous sommes soutenus, d'ailleurs discrètement, par le gouvernement britannique, que le comportement américain inquiète et blesse. Quant aux Russes, il sont, bien entendu, furieux de l'action de Washington. D'autre part, toutes nos associations de résistance en France m'ont fait savoir que le peuple français n'admettrait pas de combinaison politique Giraud ou Darlan qui désorienterait et irriterait les patriotes et qui les jetterait dans les bras des communistes.

Je suis convaincu, qu'après qu'aura passé ce fleuve de boue, nous apparaîtrons comme la seule organisation française propre et efficace.

Je vous prie d'orienter votre propagande, notamment par radio, et éventuellement vos déclarations dans le sens de ce qui précède et avec la discrétion convenable.


Ordonnance n° 55 
portant modification de l'ordonnance n° 16 du 24 septembre 1941

Rapport au Président du Comité national

Au moment où vous vous rendez en Afrique du Nord pour sceller par un accord formel la réunion des territoires français maintenus dans la lutte par vous-même et par le Comité national et des parties de l'Empire qui sont rentrées dans la guerre depuis novembre dernier, et pour procéder à l'unification de toutes les forces résistantes et combattantes de la Nation, à l'intérieur comme à l'extérieur, vous devez pouvoir prendre sur place et sans retard toutes les mesures nécessitées par la nouvelle situation.

Il est donc nécessaire de vous habiliter, par dérogation aux prescriptions de l'ordonnance n° 16, du 24 septembre 1941, à prendre ces mesures sur la seule délibération des membres du Comité national présente à vos côtés.

Il va sans dire que la nouvelle organisation devra représenter l'unité française et garantir la souveraineté nationale. Elle assurera la continuité des pouvoirs publics en reprenant à son compte tous les actes, tous les droits et tous les engagements de la France combattante.

C'est dans ces conditions que j'ai l'honneur de soumettre l'ordonnance ci-jointe à la discussion du Comité national et à votre signature.

Le Commissaire national à la justice et à l'instruction publique
René Cassin

Le Général de Gaulle,
Chef de la France combattante,
Président du Comité national,
Vu les ordonnances des 27 octobre et 12 novembre 1940 ;
Vu l'ordonnance n° 16 du 24 septembre 1941, portant organisation nouvelle des pouvoirs publics de la France libre ;

Le Comité national en ayant délibéré le 30 avril 1943,

Ordonne,

Article premier.

Le Général de Gaulle, Président du Comité national, est habilité à prendre par ordonnance, sur la délibération des seuls commissaires nationaux présents en Afrique du Nord, toutes les mesures nécessaires pour adapter à la situation nouvelle existant en Afrique du Nord et en Afrique occidentale françaises l'organisation des pouvoirs publics de la France combattante, actuellement régie par l'ordonnance n° 16 du 24 septembre 1941 et les textes qui en découlent.

Article 2.

L'organisation modifiée ou nouvelle aura pour but de représenter l'unité française et d'assurer l'exercice de la souveraineté nationale. Elle devra être conforme aux principes fondamentaux de la République.

Article 3.

Elle assurera la continuité des pouvoirs publics et ménagera les dispositions propres à permettre à la Nation d'exprimer sa volonté dans le plus bref délai possible.

Article 4.

La présente ordonnance sera publiée au Journal officiel de la France libre.
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Jean-Pierre Maury