Le gouvernement de la France libre
et de la France combattante

Accord du 7 août 1940 entre la France libre et le Royaume-Uni

Mémorandum du général de Gaulle, 26 juin 1940
Lettre du premier ministre britannique au général de Gaulle
Réponse du général de Gaulle
Accord entre le Gouvernement de Sa Majesté et le général de Gaulle

Lettre du Premier ministre britannique au général de Gaulle

7 août 1940
    Mon cher Général,

Vous avez bien voulu me faire connaître vos idées relativement à l'organisation, à l'utilisation et aux conditions de service de la force de volontaires français actuellement en cours de constitution sous votre commandement, cela en votre qualité, qui vous est reconnue par le Gouvernement de Sa Majesté dans le Royaume-Uni, de chef de tous les Français Libres, où qu'ils soient, qui se rallient à vous pour défendre la cause alliée.

Je vous envoie maintenant un mémorandum qui, si vous l'acceptez, constituera un accord entre nous relativement à l'organisation, à l'utilisation et aux conditions de service de vos forces.

je saisis cette occasion pour déclarer que le Gouvernement de Sa Majesté est résolu, lorsque les armes alliées auront remporté la victoire, à assurer la restauration intégrale de l'indépendance et de, la grandeur de la France.

Sincèrement à vous,

        Winston Churchill


Réponse du Général de Gaulle au Premier ministre

7 août 1940
Monsieur le Premier Ministre,
Vous avez bien voulu m'envoyer un mémorandum relatif à l'organisation, à l'utilisation et aux conditions de service de la force de volontaires français actuellement en cours de constitution sous mon commandement.

En ma qualité reconnue par le Gouvernement de Sa Majesté dans le Royaume-Uni, de chef de tous les Français Libres où qu'ils soient, qui se rallient à moi pour défendre la cause alliée, je viens vous faire connaître que j'accepte ce mémorandum. Il sera considéré comme constituant un accord conclu entre nous, relativement à ces questions.

Je suis heureux qu'à cette occasion le Gouvernement Britannique ait tenu à affirmer qu'il est résolu, lorsque les armes alliées auront remporté la victoire, à assurer la restauration intégrale de l'indépendance et de la grandeur de la France.

De mon côté, je vous confirme que la force française en voie de constitution est destinée à participer aux opérations contre les ennemis communs (Allemagne, Italie, ou toute autre puissance étrangère hostile), y compris la défense des territoires français, et la défense des territoires britanniques, de leurs communications et des territoires sous mandat britannique.

Veuillez agréer, Monsieur le Premier Ministre, l'assurance de ma haute considération,

Général de Gaulle



Accord entre le Gouvernement de Sa Majesté
et le général de Gaulle

I

1. Le général de Gaulle procède à la constitution d'une force française constituée de volontaires. Cette force, qui comprend des unités navales, terrestres, aériennes et des éléments techniques et scientifiques, sera organisée et utilisée contre les ennemis communs.

2. Cette force ne pourra jamais porter les armes contre la France.
 

II

1 . Cette force conservera, dans toute la mesure du possible, le caractère d'une force française, en ce qui concerne le personnel, particulièrement ce qui a trait à la discipline, la langue, l'avancement et les affectations.

2. Dans la mesure où son équipement l'exigera, cette force aura la priorité d'attribution, en ce qui concerne la propriété et l'usage du matériel (particulièrement des armes, avions, véhicules, munitions, machines et approvisionnements) déjà apporté par des forces françaises de toute origine ou qui pourra être apporté par de telles forces dans les territoires placés sous l'autorité du Gouvernement de Sa Majesté dans le Royaume-Uni ou dans ceux sur lesquels le Haut Commandement britannique exerce son autorité. Dans le cas où le commandement d'une force française aura été délégué par le Général de Gaulle à la suite d'un accord avec le Haut Commandement britannique, aucun transfert, échange ou ré-attribution des équipements, biens et matériels en possession de cette force, ne sera ordonné par le Général de Gaulle sans consultation préalable et accord avec le Haut Commandement britannique.

3. Le Gouvernement de Sa Majesté fournira à la force française - dès que cela sera réalisable - le complément de matériel indispensable pour doter ses unités d'un équipement équivalent à celui des unités britanniques du même type.

4. Les navires de la flotte française seront affectés de la manière suivante :

a) La force française armera et mettra en service tous les navires pour lesquels elle pourra fournir des équipages ;

b) L'affectation des navires armés et mis en service par la force française en vertu de l'alinéa a) sera l'objet d'un accord entre le Général de Gaulle et l'Amirauté britannique, accord qui sera revu de temps à autre ;

c) Les navires qui ne seraient pas affectés à la force française, en vertu de l'alinéa b) deviendront disponibles pour être armés et prendre service sous la direction de l'Amirauté britannique ;

d) Parmi les autres navires mentionnés sous c), les uns pourront être mis en service sous le contrôle direct de l'Amirauté britannique, tandis que certains autres pourront être mis en service par d'autres forces navales alliées ;

e) Les équipages de navires mis en service sous le contrôle britannique comprendront, quand ce sera possible, une proportion d'officiers et de marins français ;

f) Tous les navires de la flotte française restent propriété française.

5. L'utilisation possible des navires de commerce français et de leurs équipages, en tant qu'elle aura pour objet des opérations militaires, de la force du Général de Gaulle donnera lieu à des arrangements entre le Général et les Ministères britanniques intéressés. Une liaison régulière sera établie entre le Ministère du Shilling et le Général de Gaulle pour ce qui concerne l'utilisation du reste des navires et des marins de commerce.

6. Le Général de Gaulle, qui a le commandement suprême de la force française, déclare, par les présentes, qu'il accepte les directives générales du Commandement britannique. En cas de besoin, il déléguera, d'accord avec le Haut Commandement britannique, le commandement immédiat de telle ou telle partie de sa force, à un ou à plusieurs officiers britanniques de rang approprié, sans que ceci affecte ce qui est dit à la fin de l'article 1.
 

III

Le statut des volontaires français sera établi de la manière suivante :

1. Les volontaires s'engageront pour la durée de la guerre, afin de combattre les ennemis communs.

2. Ils recevront une solde dont la base sera déterminée séparément par accord entre le Général de Gaulle et les Ministères intéressés. La période de temps pendant laquelle le taux de ces soldes sera applicable sera fixée par voie d'accord entre le Général de Gaulle et le Gouvernement de Sa Majesté.

3. Le Général de Gaulle aura le droit de créer un organisme civil comportant les services administratifs nécessaires à l'organisation de sa force. Les effectifs et les émoluments des membres de cet organisme seront fixés en consultation avec la Trésorerie britannique.

4. Le Général a également le droit de recruter un personnel technique et scientifique travaillant à la guerre. Les effectifs, le mode de rétribution et l'utilisation de ce personnel seront fixés en consultation avec les Ministères intéressés du Gouvernement de Sa Majesté.

5. Le Gouvernement de Sa Majesté dans le Royaume-Uni fera tous ses efforts, lors de la conclusion de la paix, pour aider les volontaires français à rentrer dans tous les droits, y compris la nationalité, dont ils pourront avoir été privés en conséquence de leur participation à la lutte contre l'ennemi commun. Le Gouvernement de Sa Majesté est disposé à fournir à ces volontaires des facilités spéciales pour acquérir la nationalité britannique et se fera donner tous les pouvoirs nécessaires à cet effet.
 

IV

1. Toutes les dépenses engagées pour la constitution et l'entretien de la force française suivant les prévisions du présent accord seront provisoirement à la charge des Ministères intéressés du Gouvernement de Sa Majesté dans le Royaume-Uni : ceux-ci auront le droit de procéder à tous examens et vérifications nécessaires.

2. Les montants payés à ce titre seront considérés comme des avances et comptabilisés à part. Toutes les questions relatives au règlement final de ces avances, ainsi que des montants qui auront pu être crédités en contrepartie d'un commun accord, seront l'objet d'un arrangement ultérieur.
 

V

Le présent accord sera considéré comme produisant effet à compter du 11 juillet 1940.

signé  :
Le Général de Gaulle,
Commandant la Force Française.

Le Premier Ministre du Gouvernement de Sa Majesté dans le Royaume-Uni.



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Jean-Pierre Maury