La révision de la Constitution de 1946 est alors envisagée depuis plusieurs années et, avant même la crise du 13-Mai, plusieurs projets et propositions de révision ont vu le jour. Dès le début de l'année 1958, le gouvernement de Félix Gaillard motivait ainsi un projet de révision par « une crise de régime dont il serait vain de dissimuler la gravité ». Les deux chambres avaient adopté le principe de la révision de plusieurs articles de la Constitution. Les débats parlementaires de la IVe République finissante ont ainsi favorisé les desseins plus ambitieux du général de Gaulle : fonder un nouveau régime.
Après la
révision du 7 décembre 1954, une nouvelle procédure
de révision est enclenchée, tendant justement à simplifier
l'article 90, jugé trop complexe par de nombreux parlementaires
(rapport Defos du Rau, AN, n° 10737, séance du 13 mai 1955).
L'Assemblée nationale adopte ainsi, le 24
mai 1955, une résolution étendant
le projet à la révision des articles 17, 49, 50, 51 et 90,
ainsi que du titre VIII (portant sur l'Union française) de la Constitution
de 1946.
Cette résolution, transmise au Conseil de
la République, est adoptée par celui-ci dans les mêmes
termes, sur le rapport de Michel Debré (rapport n° 373, session
de 1955), le 19 juillet 1955. Mais le Conseil de la République adopte
en même temps une motion tendant à
réviser par priorité l'article 90.
À la suite de de cette résolution,
plusieurs projets voient le jour.
Tout d'abord, un projet de loi portant révision
des articles 17, 49, 50 et 51 est présenté le 16 janvier
1958 par le gouvernement de Félix Gaillard
(n° 6327, séance du 16 janvier 1958). L'Assemblée
nationale apporte quelques modifications au projet et l'adopte en première
lecture le 21 mars 1958.
Investi à la suite du mouvement du 13 mai
à Alger, le gouvernement de Pierre Pflimlin
prépare ensuite un projet de révision des articles 9, 12,
13, et 45, qui est adopté, le 22 mai 1958, par le Conseil des ministres.
Dès le 23 mai, il dépose devant l'Assemblée nationale
un projet de résolution : une révision constitutionnelle
urgente devrait donner au Gouvernement les moyens de gouverner. L'Assemblée
adopte le 27 mai 1958 une résolution
autorisant une révision de grande ampleur.
Mais l'évolution de la crise ne devait pas permettre aux assemblées de délibérer sur ces projets. Le mouvement lancé à Alger s'est amplifié et radicalisé. La Corse s'est ralliée. On craint à Paris l'arrivée de parachutistes et un coup d'État militaire. Pour rétablir l'autorité de l'État, le nom du général de Gaulle a été lancé. Le 26 mai au soir, Pierre Pflimlin rencontre secrétement le général de Gaulle, celui-ci publie un communiqué le 27 juin pour confirmer qu'il se tient prêt.
Le nouveau gouvernement du général
de Gaulle ne donne pas suite aux projets de révision partielle de
la Constitution de 1946 qui pourraient donner un répit au régime.
Il revient à l'idée d'une modification du seul article 90,
afin de permettre au gouvernement d'élaborer une nouvelle Constitution
qui serait directement soumise à la décision du peuple français
par la voie du référendum. C'est l'objet du projet établi
le 31 mai 1958.
Ce projet, corrigé
sur deux points afin de tenir compte de l'avis du Conseil d'État,
est adopté par le Conseil des ministres le dimanche 1er
juin 1958, en soirée, après que le gouvernement dirigé
par le général de Gaulle ait obtenu la confiance de l'Assemblée
nationale par 339 voix contre 224, vers 21 heures 30. Il est déposé
aussitôt à l'Assemblée nationale (n° 7233), où
la commission du suffrage universel, des lois constitutionnelles, du règlement
et des pétitions a déjà entamé ses délibérations.
Afin de répondre à certaines objections,
le projet gouvernemental est modifié par une lettre
rectificative du 2 juin (n° 7238). Mais l'Assemblée nationale,
toujours le 2 juin, est saisie par le rapport de M. de Bailliencourt (n°
7239) d'un texte profondément remanié.
Finalement, un amendement de Sourou Migan Apithy (le futur président
du Dahomey) reprend pour l'essentiel le texte gouvernemental, et c'est
ce texte qui est adopté, la majorité des trois cinquièmes
étant requise, par 350 voix contre 161.
Le Conseil de la République, saisi le 3 juin,
sur rapport de Gilbert Jules (n° 486), approuve sans modification par
256 voix contre 30, le texte qui devient la loi
constitutionnelle du 3 juin 1958.
Les documents de la digithèque sont extraits de l'ouvrage établi par le Comité national chargé de la publication des travaux préparatoires des institutions de la Cinquième République : Documents pour servir à l'histoire de la Constitution du 4 octobre 1958, 3 volumes, La Documentation française, Paris, 1987, 1988 et 1991.
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