Grands traités politiques


Traité de paix du Cateau Cambrésis

Date : 3 avril 1559.
Objet : Traité entre le Roi de France Henri II et le Roi d'Espagne Philippe II pour mettre fin aux guerres d'Italie. Henri II renonce à l'aventure italienne entamée par Charles VIII en 1494, qui prétendait avoir des droits sur Naples, et poursuivie sur ses successeurs. La France restitue ses Etats au duc de Savoie, abandonne le Charolais, la Bresse et le Bugey, rend la Corse à la République de Gênes, reconnaît l'Italie centrale et le Milanais aux Habsbourg ou à leurs alliés qui les garderont jusqu'à la Révolution. En revanche, par un autre traité, signé avec l'Angleterre le même jour, elle garde Calais.

Au nom de Dieu le Createur.

A tous ceux qui ces presentes lettres verront salut. Soit notoire, qu'apres tant de dures guerres, dont il a pleu à Dieu par plusieurs fois visiter et chastier les Peuples, Royaumes, Païs, Estats et subjets, estant sous la dition et obeïssance de Tres-Hauts, Tres-Excellents et Tres-Puissants Princes Henry Deuxième de ce nom Roy de France Tres-Chrestien, etc. et Philippe Deuxième de ce nom Roy Catholique des Espagnes, etc. et ceux d'aucuns de leurs amis et Alliez, dont sont sortis les grands maux, dommages et inconveniens au pauvre peuple de tous les deux costez que chacun sçait et connoist tels ; que finalemment sa Divine Bonté meuë de son infinie et immense Misericorde, a daigné tourner son oeil de pitié sur ses pauvres creatures, et si avant toucher les coeurs de ces deux grands Princes, qu'il les a disposez de sa saincte grace de trouver les moyens de mettre fin aux differents, debats, motifs et occasion de ladite guerre, et icelle changer en une bonne, finale, entiere, sincere et durable Paix ; avec ferme intention d'employer le fruit d'icelle à restaurer les dommages sortis de ladite guerre par tous moyens à eux possibles : principalement à l'augmentation de l'honneur de Dieu, accroissance de son benoist nom, propagation de nostre sainste Foy et Religion, repulsion des ennemis de la Republique Chrestienne, et au bien commun, soulagement et repos de leurs peuples et subjets : et pour y parvenir, et icelle Paix, reconciliation et amitié traitter, conclure et arrester, ayent iceux Princes commis et deputé, c'est à sçavoir de la part dudit Seigneur Roy Tres-Chrestien, Illustre Prince Charles du tiltre de Sainct Apollinaire, de la saincte Eglise Romaine, Prestre, Cardinal de Lorraine, Archevesque et Duc de Reims, premier Pair de France, et Legat né du Sainct Siege Apostolique ; Anne Duc de Montmorency, Pair, Connestable et grand Maistre de France, Iacques d'Albon, Sire de Sainct André, Marquis de Fronssac, et Mareschal de France ; Messire Iean de Morvillers, Evesque d'Orleans, Conseiller du Roy en son Conseil privé ; et Claude de l'Aubespine Chevalier, Seigneur de Hauterive, aussi Conseiller dudit Seigneur Roy Tres-Chrestien, son Secretaire d'Estat et de ses Finances : et de celle dudit Seigneur Roy Catholique, Illustres Princes et Seigneurs Don Fernande Alvarez de Toledo Duc d'Alve, etc. grand Maistre d'Hostel du Roy Catholique ; Messire Guillaume de Nassau, Prince d'Orange, etc. Ruy Gomez de Silva Comte de Melito, Sommelier de corps dudit Seigneur Roy Catholique, et Messire Antoine Perrenot Evesque d'Arras, etc. tous du Conseil d'Estat dudit Seigneur Roy Catholique : tous garnis de pouvoirs suffisans, qui seront inserez à la fin des presentes. Lesquels en la presente de Tres-Haute et Puissante Princesse Madame Chrestienne Duchesse de Lorraine, qui a de long-temps travaillé à promovoir cettedite reconciliation entre-eux, et de Tres-Haut et Tres-Puissant Prince Charles Duc de Lorraine son Fils, ont, en vertu de leursdits pouvoirs, tant de la part desdits Seigneurs Roys que de Messeigneurs leurs Enfans, desquels iceux Princes se font fort, et traittent pour eux, leurs hoirs et successeurs ; fait, conclu et accordé les articles qui s'ensuivent.

I.

PREMIEREMENT (sans deroger toutefois aucunement aux Traittez precedents, faits entre leurs predecesseurs, lesquels demeureront en telle force et vigueur, qu'ils estoient auparavant les guerres commencées entre l'Empereur Charles V. et le Roy Tres-Chrestien moderne, l'an mille cinq cens cinquante et un, et continuées depuis entre lesdits Seigneurs Roys Tres-Chrestien et Catholique, et sans aucune altération d'iceux, sinon en tant que par ce present Traitté pourroit estre autrement disposé) est convenu et accordé, que doresnavant entre lesdits Seigneurs Roys, mesdits Seigneurs leurs Enfants, hoirs, successeurs et heritiers, leurs Royaumes, Païs et subjets, y aura bonne, seure, ferme et stable Paix, confederation et perpetuelle alliance et amitié ; s'entr'aimeront comme freres, procurants de tout leur pouvoir le bien, honneur et reputation l'un de l'autre, et eviteront tant qu'ils pourront loyaument, le dommage l'un de l'autre : ne soustiendront et ne favoriseront personne, quelle qu'elle soit, l'un au prejudice de l'autre : et dez maintenant cesseront toutes hostilitez, oublians toutes choses ci-devant mal passées, quelles qu'elles soient, qui demeureront abolies et esteintes, sans que à jamais ils en facent ressentiment quelconque. Renonçant par ce Traitté à toutes pratiques et intelligences qui pourroient, en quelque sorte que ce soit, renoncer au prejudice l'un de l'autre, avec promesse de jamais n'en faire pourchasser par l'un qui puisse tourner au prejudice de l'autre.

II.

Pour le singulier desir que lesdits deux Princes ont toûjours eu au bien de la Chrestienté, et y voir les choses de la Religion s'y maintenir à l'honneur de Dieu et union de son Eglise, meus de mesme rele et sincere volonté ; ont accordé, qu'ils procureront et s'employeront de tous leur pouvoir à la convocation et celebration d'un Sainct Concile Universel, tant necessaire à la reformation et reduction de toute l'Eglise Chrestienne, en une vraye union et concorde. Et estant faite ladite convocation, y feront trouver les Prelats de leurs Provinces, et au demeurant y employeront tous autres bons offices necessaires à un bien tant requs à ladite Chrestienté.

III.

Et par le moyen de ceste dite Paix et estroite amitié, les subjets des deux costez, quels qu'ils soient, pourront, en gardant les loix et coustumes du Païs, aller, venir, demeurer, frequenter, converser et retourner és Païs l'un de l'autre, machandement, et comme mieux leur semblera, tant par mer que par terre et eaux douces, traitter et converser ensemble : et seront soustenus et defendus les subjets de l'un au Païs de l'autre, comme propres subjets, en payant raisonnablement les droits de tonlieux accoustumez, et autres qui par leurs Majestez et les successeurs d'icelles seront imposez.

IV.

Et se suspendent toutes lettres de marques et represailles, qui pourroient avoir esté données à quelque cause que ce soit, et ne s'en donneront doresnavant aucunes par l'un desdits Princes au prejudice des subjets l'un de l'autre, sinon contre les principaux delinquans, leurs biens, et de leurs complices : et ce encore en cas de manifeste denegation de justice ; de laquelle et des lettres de sommation et requisition d'icelle, ceux qui poursuivront lesdites lettres de marques et represailles, devront faire apparoir en la forme et maniere que de droit est requis.

V.

Les Villes, subjets, manans et habitans des Comtez de Flandres et Artois, joüiront des privileges, franchises et libertez, qui leur ont esté accordées par ledit Seigneur Roy Tres-Chrestien et ses predecesseurs Roys de France : et pareillement les Villes, manans, habitans et subjets du Royaume de France, joüiront aussi des privileges, franchises et libertez qu'ils ont au Païs d'iceluy Seigneur Roy Catholique, tout ainsi qu'un chacun d'eux en ont deuëment joüy et usé ; et comme ils en joüissoient avant la rupture de cette guerre, en l'an mille cinq cens cinquante et un.

VI.

Et retourneront lesdits subjets et serviteurs d'un costé et d'autre, tant ecclesiastiques que seculiers, nonobstant qu'ils ayent servy en party contraire, pleinement en la joüissance de tous et chacuns leurs biens immeubles, rentes perpetuelles, voyageres, et à reachapt, saisis et occupez à l'occasion de cette dite guerre, pour en joüir dez la publication de cette Paix sans rien quereller toutefois ny demander des fruicts perceus dez le saisissement desdits biens immeubles jusques au jour et date de ce present Traitté, ny des debts qui auront esté confisquez avant ledit jour. Et se tiendra pour bon et valable le repartement qu'en aura fait ou fera le Prince, son Lieutenant, ou Commis, riere la jurisdiction duquel ledit arrest sera fait : et ne pourront jamais les crediteurs de tels debts ou leurs ayans cause estre receus à en faire quelque poursuite en quelque maniere, et par quelque action que ce soit, contre ceux auxquels lesdits dons auront esté faits ; ny contre ceux qui par vertu de tels dons et confiscations les auroient payez pour quelque cause que lesdits debts puissent estre, nonobstant quelques lettres obligatoires que lesdits Crediteurs en puissent avoir ; lesquelles pour l'effet de ladite confiscation seront et demeureront par cedit Traitté cassées, annullées et sans vigueur.

VII.

Et se fera ledit retour des subjets et serviteurs d'un costé et d'autre à leurs biens immeubles comme dessus, nonobstant toutes donations, concessions, declarations et confiscations, et commises, sentences données par contumace, et en l'absence des parties, et icelles non ouyes à l'occasion de cettedite guerre, comme qu'il soit ; remettant iceux subjets quant à ce pleinement, et cessans tous contredits ou empeschemens au droit qu'ils avoient au temps de l'ouverture de ladite guerre. Et s'entend le cotenu en ce present article en tous lieux et endroits de la subjection desdits Seigneurs Roy Tres-Chrestien et Catholique : sauf quant aux foricides de Naples, Sicile, et de la Duché de Milan, lesquels ne seront compris en ce present Traitté, ny joüiront du benefice d'iceluy.

VIII.

Ceux qui auront esté pourveus d'un costé et d'autre des benefices estans à la collation, presentation, ou autre disposition desdits Seigneurs Roys et personnes laiz, seront et demeureront en la possession, joüissance et droit de proprieté desdits benefices, comme bien et deuëment pourveus d'iceux.

IX.

Le Roy Dauphin entrera le jour de la publication de ce present Traitté en la possession de la Seigneurie de Crevecoeur, ses appartenances et appendances, pour en joüir comme il faisoit auparavant la guerre ; sans prejudice toutefois du droit de possession et proprieté pretendu par le Seigneur de Cruninghen, heritier de feu le Seigneur de Beures dernier decedé : lequel sera reintegré aux droits et actions qu'avoit feu Messire Adolphe de Bourgongne pere, et ledit feu Seigneur de Beures fils, auxdits Chasteau, terres et appartenances de Crevecoeur, Herleux, Rebilly, Saint Souplet, et Chatellenie de Cambray : et que les Commis desia ayans vaqué à l'instruction, vuidange et decision du procés et different, ou autres, se trouveront au jour premier d'Aoust en ce lieu du Chasteau en Cambresis pour le determiner. Et s'ils ne s'en peuvent accorder, s'adjoindra avec eux un personnage non suspect, qui sera choisi par les Commis à la pacification sur le fait des limites, dont en ce Traitté se fait mention : et sera tenu ledit Commis, qui s'adjoindra, jurer aux Saincs Evangiles de Dieu, de bien et loyaument entendre à la dite decision, et sans faveur de l'une ou de l'autre des parties.

X.

Ayant pleu à Dieu appeller à soy la Roine Tres-Chrestienne Doüairiere Madame Eleonore, dernierement decedée, delaissant l'Infante de Portugal Madame Marie sa Fille unique ; ledit Seigneur Roy Tres-Chrestien traitera bien et favorablement ladite Dame Infante, et joüira du dot que ladite feuë Roine avoit en France, sans y faire aucune nouvelleté ; et tout ainsi que ladite Dame faisoit à l'heure de son trespas. Et quant à ce qui luy peut estre deu de son doüaire ou supplement d'iceluy, jusques au jour de sondit trespas ; lui en sera faite telle raison, qu'elle aura occasion de contentement. Et au demeurant aura iceluy Seigneur Roy pour singulierement recommandée ladite Dame Infante en tous les affaires et procés qu'elle a et pourra avoir en France ; et luy fera sur ce faire et administrer bonne et prompte justice.

XI.

En faveur et contemplation de cettedite Paix, et pour donner par lesdits Seigneurs reciproque contentement l'un à l'autre ; est convenu et accordé, qu'ils rendront et restitueront realement et de fait, c'est à sçavoir, ledit Seigneur Roy Tres-Chrestien audit Seigneur Roy Catholique, les places, Villes et Chasteaux de Thionville, Mariembourg, Yvoix, Dampvillers et Montmedy, leurs appartenances et dépendances ; et generalement tous les autres Chasteaux, lieux, bourgs, forts et places par luy et ses subjets et serviteurs aussi occupées sur ledit Seigneur Roy Tres-Catholique et ses subjets et serviteurs, et dont ils joüissoient auparavant les dernieres guerres qui ont eu cours dez et depuis l'an mille cinq cens cinquante et un. Et ledit Seigneur Roy Catholique restituera aussi audit Seigneur Roy Tres-Chrestien, les Villes, places et Chasteaux de Sainct Quentin, le Chastelet et Han, leurs appartenances et dependances ; ensemble tous les autres Chasteaux, lieux, bourgs, forts et Villages à luy et ses subjets appartenans, en quelque lieu qu'ils soient situez et assis, par luy et ses subjets et serviteurs occupez sur ledit Seigneur Roy Tres-Chrestien et ses subjets et serviteurs, dez et depuis le temps dessusdit : sans rien en reserver d'un costé ny d'autre, pour retourner par lesdits Seigneurs Roys et leursdits subjets respectivement en la possession paisible desdites choses occupées, et joüir de tous leurs droits, qu'ils avoient auparavant lesdites guerres. Et neantmoins poura chacun desdits Princes faire oster et enlever desdites places qu'ils rendront, comme dit est, toute l'artillerie, poudre, boulets, armes, vivres et autres munitions qui se trouveront esdites places au temps de ladite restitution ; laquelle se fera en l'estat auquel elles sont presentement, sans rien démolir à la fortification, ny aucunement les affoiblir, en quelque sorte que ce soit : le tout de bonne foy, et comme appartient à Prince d'honneur.

XII.

Et pource que lors que la Ville et Cité de Teroüane fut prise par ledit Seigneur Roy de France, elle fut ruinée et demolie ; au moyen de quoy il ne sera possible audit Seigneur Roy d'Espagne la restituer en l'estat qu'elle estoit : a esté convenu et accordé par lesdits Seigneurs Deputez, que le lieu et territoire, où estoit assise ladite Ville, ensemble ce qui en dépend, et dont ledit Seigneur Roy de France estoit en possession avant le commencement de ces guerres, sera remis et restitué en son obeïssance, pour en joüir et disposer pour luy, ses hoirs et successeurs et ayans cause, à toûjours perpetuellement, tout ainsi qu'il souloit faire auparavant lesdites dernieres guerres. Et neantmoins sera loisible audit Seigneur Roy Tres-Chrestien, attendu ladite demolition, faire ruiner et demolir la fortification, closture et murailles de la Ville d'Yvoix, avant en faire restitution : laquelle Ville ledit Seigneur Roy Catholique ne pourra retourner à fortifier ; comme aussi ne pourra ledit Seigneur Roy Tres-Chrestien faire aucun Fort au pourpris dudit Teroüane.

XIII.

Et pour autant, qu'estant ladite Ville et Eglise de Teroüane, ainsi que dit est, du tout ruïnée et demolie, le service Divin n'y peut estre celebré comme il appartient ; aussi que ja dez long-temps l'on a procuré la division de l'Evesché, Chapitre et Diocese de Teroüane : il a esté convenu et accordé entre les Deputez desdits deux Princes, en vertu de leurdit pouvoir, que l'on deputera pour le premier du mois de Iuin prochain de chacun costé d'iceux, deux Commissaires à ce connoissants ; lesquels avec l'intervention de celuy que deputera l'Archevesque de Reims Metropolitain, se treuveront tous ensemble ledit jour à Aire, comme lieu plus commode à cet effet : et là s'accorderont par ensemble du moyen qu'il devront tenir pour faire égal repartement et division de toute la rente de la table, tant Episcopale que Capitulaire ; et generalement de tous les biens et revenus appartenans à l'Evesché, Chapitre et Eglise dudit Teroüane, où qu'ils soient assis, et des dignitez, offices, prebendes et autres benefices des droits, tant de collation que autres, et aussi de tout le Diocese ; pour attribuer la moitié à l'Evesché qui s'erigera au Païs du Roy Tres-Chrestien, soit à Bolongne ou ailleurs, où bon luy semblera ; et l'autre moitié à l'Evesché qui s'erigera à Sainct Omer ou autre Ville és Païs du Roy Catholique, que bon luy semblera aussi : et porteront les uns et les autres la moitié des charges, suivant la division que lesdits Commissaires en feront, et supplieront lesdits Seigneurs Roys à Nostre Sainct Pere le Pape, et luy feront commune instance, d'appreuver ladite division, et de faire l'erection de ces deux Eveschez au lieu d'une, pour le service de Dieu et plus grand benefice du Diocese.

XIV.

Aussi se rendra la Ville de Covines à Monsieur de Liege, ses appartenances et dependances, et Fraisne, et generalement tout ce qui presentement s'occupe par ledit Seigneur Roy Tres-Chrestien, ou par gens tenans son party, de ce que devant le commencement de cette presente guerre possedoit l'Evesque, Chapitre, Eglise et Païs de Liege, et specialement le Chasteau de Boüillon, sans rien en reserver, pleinement et de bonne foy, en l'estat qu'il se treuve, sans rien demolir ; y delaissant l'artillerie treuvée dedans au temps de l'occupation derniere, à sçavoir celle qui se treuve encore presentement ; en retirant, si bon luy semble, toute autre artillerie, quidepuis l'occupation y a esté mise, avec les poudres, munitions et vivres. Et ce sans prejudice du droit que le Seigneur de Sedan, et ceux de la maison de la Marck y peuvent pretendre ; ains se faisant ladite restitution, leur seront reservées leurs actions, et ausdits Evesque et Chapitre de Liege demeurent reservées leurs exceptions, pour par voye de justice s'en pouvoir servir respectivement les uns et les autres, et non autrement. Et pour vuider plus brievement lesdits differens qui sont entre lesdits Evesque, Chapitre et Communauté de Liege, et lesdits Seigneurs de Sedan ; se choisiront deux arbitres, l'un par ledit Seigneur Evesque, Chapitre et Communauté de Liege, et l'autre par lesdits Seigneurs de Sedan, lesquels se denommeront par les parties dans deux mois, pour se treuver dans la Ville de Cambray le premier de Septembre ; où sommairement et de plein, et au plustost que faire se pourra, ils vuideront desdits differents, et tous autres que lesdits Seigneurs de Sedan ont eu, peuvent avoir à l'encontre du corps et Communauté de ladite Ville. Et pource que Madame la Comtesse de Breune et ses coheritiers pretendent plusieurs choses à l'encontre du corps de ladite Communauté de Liege ; est aussi accordé, que les mesmes arbitres auront pouvoir et charge de composer et vuider les differents entre eux.

XV.

Hesdin et le Bailliage avec toutes ses appartenances et dépendances demeureront audit Seigneur Roy Catholique entierement, en la mesme forme et maniere que ses predecesseurs le possedoient avant qu'il fust occupé par le feu Roy François, sans contredit quelconque : et n'y pourra ledit Seigneur Roy Tres-Chrestien, ses hoirs, successeurs et ayans cause quereller aucune.

XVI.

Et pour mieux terminer les occasions de toutes querelles pour l'Abbaye et Monastere de Saint Iean au Mont ; les Princes pourront choisir quatre personnes arbitres, pour le procés par eux instruit, et mesme pris un Superarbitre en cas de discorde, en vuider au profit de celle des parties pretendantes en l'Abbaye qu'il appartiendra : et durant la discussion dudit procés, celuy qui est denommé par ledit Seigneur Roy Tres-Chrestien joüira des biens situez en France, et celuy nommé par ledit Seigneur Roy Catholique joüira des biens estans en son Païs. Et moyennant ce, la main sera levée par ledit Seigneur Roy Tres-Chrestien des biens appartenans aux Abbayes de Sainct Vaast d'Arras, de Sainct Bertin et Arroüaige, saisis par represaille ; esquels ils reviendront du jour de la publication de cette Paix.

XVII.

Et au regard des choses qui dez le Traitté de Crespy, auparavant la guerre se pretendent estre faits d'un costé et d'autre, au prejudice l'un de l'autre, et contre les Traittez : et davantage les differents qui ont esté ci devant mis en avant entre lesdits Seigneurs Princes, tant sur les limites qu'autres ; lesquels avant la rupture de la guerre n'ont esté vuidez, et dont l'esclaircissement ne sera pris par ce present Traitté : se remettront à la decision des Ministres qui des deux parts s'assembleront avec pouvoirs suffisans, pour communiquer et vuider iceux en ce lieu de Chasteau en Cambresis le premier de Septembre prochain. Bien entendu toutefois, que pendant que lesdits differents se vuideront par les Deputez d'un costé et d'autre, toutes choses non vuidées demeureront au mesme estat qu'elles estoient avant la rupture de l'an mille cinq cens cinquante et un : et seront chastiez severement ceux qui d'un costé ou d'autre feront aucune nouvelleté.

XVIII.

La Dame de Touteville reprendra la Comté de Sainct Pol dudit Seigneur Roy Catholique, pour en joüir et posseder, comme ses predecesseurs en ont joüy et possedé avant la guerre ; et specialement comme ils en joüissoient avant le change fait de ladite Comté de Sainct Pol avec celle de Montfort l'an quinze cens trente six : et ce, nonobstant tout ce qui depuis pourroit estre advenu au contraire. Et quant au droit de reprise, que ledit Seigneur Roy Tres-Chrestien pretend luy appartenir, ses actions luy demeurent reservées ; comme aussi audit Seigneur Roy Catholique les siennes, pour s'en servir chacun au soustenement de leur pretendu respectivement. Et pour en connoistre, se deputeront dedans six mois deux Commis de chacun costé desdits Princes, avec pouvoirs suffisans ; ausquels iceux Princes se soubmettront pour oüir ce que de la part de l'un et de l'autre luy voudra proposer et pretendre les fondemens et allegations des parties, instruire le procés sur ce, et le vuider s'ils peuvent : et sinon, que dans un an aprés le procés instruit, lesdits Seigneurs Princes s'accorderont d'un Superarbitre, qui se choisira en la maniere qui entre les autres Deputez a esté pourparlée ; à sçavoir, que chacun des Princes nommera dix ou douze Princes ou Potentats qui ne soient leurs Subjets, ny trop evidemment suspects à l'autre ; pour en choisir l'un de ceux esquels ils rencontreront sur quelque personne nommé des deux costez : lequel Superarbitre ait tout pouvoir et authorité, pour avec les dessusdits à pluralité de voix le decider. Et pendant ledit procés, les parties demeureront és droits, et en la mesme possession en laquelle icelles ont esté dez le dernier Traitté de Crespy, jusques à la rupture de la guerre l'an mille cinq cens cinquante et un, sans rien innover d'un costé ny d'autre. Bien entendu, que ledit Seigneur Roy Catholique ne se pourra servir pardevant lesdits Commis de la reprinse que ladite dame de Touteville fera en ce present article ; ny le Roi tres-Chrestien d'autre quelconque, que ladite Dame luy puisse avoir faite. Et si sera tenuë en surseance ladite Dame, faisant la reprinse avantdite quant aux payemens des droits Seigneuriaux et de relief, jusques à ce que le different vuidé, l'on voye s'ils seront deus ou non.

XIX.

Ledit Seigneur Roy d'Espagne rentrera en la joüissance et possession de la Comté de Charrolois, pour en joüir et ses successeurs pleinement et paisiblement ; et le tenir sous la Souveraineté dudit Seigneur Roy de France.

XX.

Pour autant qu'il y a aucunes terres tenuës en surseance entre la Comté de Bourgongue, et les terres à present possedées par ledit Seigneur Roy Tres-Chrestien ; qui pour non reconnoistre un costé ou l'autre, sont cause et occasion de grands maux, tant pour le refuge qu'y prennent les malfacteurs, que autres raisons : l'on a convenu et accordé, que de la part desdits Seigneurs Roys Tres-Chrestien et Catholique se deputeront Commis des deux costez brievement ; lesquels se trouvans sur les lieux, et visitans iceux, seront de commun consentement, ouïes les parties qui y peuvent avoir interest, égal departement desdites terres de surseance ; pour mettre la moitié plus voisine à sa Comté de Bourgongne ; et l'autre moitié d'icelle, plus proche et à propos, en obeïssance dudit Seigneur Roy Tres-Chrestien : sans toutefois aucune chose determiner, sinon aprés avoir entendu l'intention des Princes, et par leur ordonnance. Lesquels Commis communiqueront aussi sur ce que ceux de ladite Comté de Bourgongne pretendent devoir joüir de l'exemption des gabelles et impositions foraines, qui se levent en la Duché de Bourgongne, comme ceux de ladite Duché ne les payent en ladite Comté ; sans aussi aucune chose ordonner ny decider, sinon par commandement desdits Seigneurs Roys.

XXI.

Et se restituera au Duc de Mantouë entieremennt le Marquisat de Montferrat, sans rien reserver ny detenir d'iceluy, de ce que lesdits Seigneurs Roys Tres-Chrestien et Catholique, ou qui que ce soit de leur costé, en occupent presentement ; demeurant en son entier audit Duc le droit et action qu'il a sur iceluy, ses appartenannces et dépendances : sans préjudice toutefois des exceptions ou actions qu'autres y peuvent avoir ; lesquelles, par qui que ce soit, ne se pourront poursuivre que par voye de justice, et non par la force ; en retirant toutefois par eux l'artillerie, vivres et munitions qui seront esdites places, autres que celles qui se pourront trouver appartenir ausdits Seigneurs Marquis de Montferrat. Et pourront aussi, si bon leur semble lesdits Seigneurs Roys, démolir et abattre les fortifications qu'ils y ont faites, promettans lesdits Seigneurs Roys, et chacun d'eux respectivement, qu'à l'advenir ils ne mettront audit Païs de Montferrat aucunes gens de guerre, ny s'aideront des places, molesteront ne travailleront les subjets du dit Païs ; ains les laisseront vivre paisiblement, sans aucune chose entreprendre ny attenter en iceluy Païs, en quelque maniere que ce soit.

XXII.

Et davantage, afin que les subjets dudit Montferrat, et par especial les manans et habitans de la ville de Casal, ne puissent estre molestez ny travaillez pour avoir suivy l'un ou l'autre party, et obey à ce qui leur a esté commandé durant le temps qu'ils ont esté sous la puissance de l'un ou de l'autre desdits Seigneurs Roys : est accordé, que ladite Dame et leur Marquis, en leur faisant ladite restitution, remettront et pardonneront par expresse declaration et serment à tous les subjets, manans et habitans dudit Marquisat de Montferrat, et nommément à ceux de la Ville de Casal, toute desobeïssance, offense et contravention, que lesdits Dame, Marquis et Seigneur Duc de Mantouë pourront pretendre à l'encontre d'eux, pour avoir obey, suivy et servy lesdites deux Majestez respectivement, leurs Lieutenans et Officiers ; sans que pour ce on les en puisse poursuivre, punir, molester ny travailler, ny en quelque maniere que ce soit leur en rien imputer ou reprocher à eux, ny aux leurs à l'advenir, ains les laisseront vivre en paix et repos, et joüir de leurs biens, sans aucun empeschement. Et de ce que dessus, bailleront leurs lettres patentes en bonne et valable forme, et sans que l'on leur puisse aucune chose demander des droits, devoirs, revenus, censes, rentes ou autres contributions, esquels ils seront demeurez redevables envers ledit Duc, jusques au jour de ce present Traitté, dont ils demeureront quites et deschargez.

XXIII.

Aussi se departira ledit Seigneur Roy Tres-Chrestien de la Ville de Valence, qui est de la Duché de Milan ; laquelle sera remise és mains dudit Seigneur Roy Catholique en l'estat auquel presentement elle se trouve, et sans y rien demolir, le tout de bonne foy : retirant ledit Seigneur Roy Tres-Chrestien prealablement l'artillerie, les munitions et vivres. Et le mesme fera-t-il de tout ce que devant la publication de ce present Traitté il pourroit avoir occupé ou occuper sur les Païs possedez par Sa Majesté Catholique comme aussi se fera de la part dudit Seigneur Roy Catholique, de tout ce qui pourra avoir esté occupé jusques au jour de ladite publication en tous autres Estats dudit Seigneur Roy Tres-Chrestien.

XXIV.

Ledit Roy Tres-Chrestien recevra en faveur de cettedite Paix, et pour plus grand repos de la Chrestienté, les Genevois en sa bonne grace et amitié ; oubliant toutes causes des ressentimens qu'il pourroit avoir à l'encontre d'eux : et en cette consideration, leur restituera toutes les places que presentement il tient en l'Isle de Corsique, et qui y ont esté par luy occupées, detenuës et fortifiées depuis la derniere guerre, en l'estat qu'elles sont, sans rien demolir ; retirant prealablement les gens de guerre, munitions et vivres qu'il a esdites places. Bien entendu, que doresnavant lesdits Genevois tiendront le respect qu'ils doivent audit Seigneur Roy Tres-Chrestien, vivans en bonne amitié tant avec luy qu'avec ses subjets : et pourront respectivement, tant ceux dudit Roy que d'eux, hanter et converser librement et marchandement les uns avec les autres ; non toutefois à mains fortes et ports d'armes, qui puissent donner ombre de soupçon és parts et Païs les uns avec les autres, où ils seront favorablement traittez en la sorte et maniere que propres subjets pourroient estre : à la charge aussi que lesits Genevois ne pourront directement ny indirectement user de ressentiment quelconque à l'encontre de leursdits subjets, soit de ladite Isle de Corsique ou autres, à l'occasion du service, que comme qu'il soit, ils peuvent avoir fait audit Seigneur Roy Tres-Chrestien et à ceux de son costé en cettedite guerre, ou pour avoir suivy son party ; ains en demeureront absous et quites, et joüiront paisiblement de tous et chacuns leurs biens, sans que par voye de justice ny autrement on leur puisse demander aucune chose, ny aucunement pour ce les inquieter. Et seront tenus iceux Genevois, s'ils veulent joüir du benefice de ce que dessus est disposé en leur faveur par ce Traitté, bailler ratification, contenant expresse obligation d'observer inviolablement le contenu.

XXV.

A esté conclu et arresté aussi par cedit Traitté, que ledit Roy Tres-Chrestien retirera tous les gens de guerre, de quelque nation qu'ils soient, qu'il a dedans la Ville de Montalcino et autres places du Siennois et de Toscane : et se departira et desistera de tous droits qu'il peut pretendre esdites Villes et Païs, en quelque maniere que ce soit ; en retirant préalablement l'artillerie, armes, vivres, et toutes autres munitions qui y sont. Est aussi convenu et accordé, que tous Gentilshommes Siennois et autres Subjets dudit Estat, qui se determineroient à se soubmettre au Magistrat estably au gouvernement de la Republique de Sienne, y seront receus : et leur sera pardonné tout ce que l'on pourroit pretendre à l'encontre d'eux, pour s'estre retirez audit Montalcino et ailleurs.

XXVI.

Sans qu'à cette occasion, ny pour avoir pris les armes en cette presente guerre contre qui que ce soit, ou pour avoir suivy le party dudit Seigneur Roy Tres-Chrestien, on les puisse travailler ny endommager en corps et biens ou autrement, en façon quelconque. Et si pour raison de ce leursdits biens avoient esté pris et saisis, leur seront rendus et restituez, pour en joüir pleinement et paisiblement. Et pour l'acomplissement et seureté de ce que dessus, le Duc de Florence sera tenu de ratifier le contenu dedans ledit temps, et en bailler ses lettres patentes en bonne et valable forme. Et de mesme sera pardonné à tous ceux qui en Toscane auront en cette guerre suivy le party de feu l'Empereur, Pere dudit Seigneur Roy Catholique, le sien, et dudit Duc de Florence : et seront remis en tous les biens, desquels ils avoient esté déjettez durant cette guerre, et à l'occasion d'icelle : le tout de bonne foy ; et ne seront à cette cause inquietez en corps ny en biens, en façon quelconque.

XXVII.

Et pour plus grande confirmation de cette Paix, et rendre l'amitié, union et confederation plus ferme et indissoluble ; les Deputez avantdits, en vertu de leurs dits pouvoirs, au nom desdits Princes, et se faisans fort lesdits Deputez du Roy Tres-Chrestien, de Madame Elizabeth Fille aisnée dudit Seigneur Roy, au nom d'icelle, ont traitté et accordé mariage qui se fera par Procureurs par paroles de present, incontinent et au plustost que faire se pourra, d'entre ledit Seigneur Roy Catholique et ladite Dame Elizabeth, en la forme et suivant les constitutions et ordonnances de Nostre Mere la Sainte Eglise.

XXVIII.

Et sera ladite Dame conduite et renduë aux frais dudit Seigneur Roy Tres-Chrestien, accompagnée et traittée comme convient à Dame de telle qualité et à l'alliance qu'elle prend, jusques aux frontieres des Royaumes d'Espagne dudit Seigneur Roy Catholique ; lequel lla fera recevoir en l'un ou en l'autre desdits Païs honorablement ; et le traittera comme requiert sadite qualité, et appartient à Dame de si haute maison et parentage. Et aura ladite Dame en dot quatre cens mille escus soleils pour tous droits paternels et maternels : laquelle somme sera payée à qui ledit Seigneur Roy Catholique deputera pour la recevoir ; à sçavoir le tiers au temps de la consommation du mariage ; l'autre tiers au bout de l'an du jour de ladite consommation ; et l'autre tiers six mois apres : de maniere que le payement entier de ladite somme de quatre cens mille escus se fera en dedans dix huit mois, aux termes et par les portions cy dessus specifiées ; et ce en la Ville d'Anvers ; comptant chacun desdits escus soleils au prix de quatre vingt gros monnoye de Flandres chacune piece. Et sera ledit dot assigné, à la mesure qu'il se recevra, bien et convenablement sur bons et suffisans assignaux, au raisonnable contentement et satisaction des Ministres dudit Seigneur Roy Tres-Chrestien, qui à cet effet se pourront deputer. Bien entendu, que ladite assignation se fera si avant, qu'elle se contente de l'hypothèque sur Villes et places pour seureté desdits deniers, sans joüir des assignaux par ses mains, au denier quatorze : et si elle en veut joüir par ses mains, au denier dixhuict, au choix et option de ladite Dame.

XXIX.

Et ne pourra ladite Dame Elizabeth pretendre, avoir, quereller ny demander autre chose quelconque és biens, hoirie et succession dudit Seigneur Roy Tres-Chrestien son Pere, ni de la Roine sa Mere : à quoy dès maintenant elle renonce expressément ; et si en baillera le lendemain de la solemnisation et consommation dudit mariage bonne et valable renonciation et quitance, au profit dudit Seigneur Roy Tres-Chrestien et des siens. Et pour ce fait sera suffisamment et expressément authorisée par ledit Seigneur Roy Catholique son futur espoux et mary : sauf toutefois et reservée tant seulement à ladite Dame Elizabeth les escheutes et successions collaterales.

XXX.

Et si sera ladite Dame Elizabeth joyelée par ledit Seigneur Roy son futur mary jusques à la somme de cinquante mille escus, qui sortiront nature d'heritages ; comme aussi seront les autres bagues, joyaux, qu'elle portera ; lesquels luy demeureront pour elle, ses successeurs, et ayns cause.

XXXI.

Et se donnera par ledit Seigneur Roy Catholique à ladite Dame entretenement tel qu'à Fille et Femme de si grands Roys appartient : et iceluy deuëment assigné sur Villes et places, dont elle joüira par ses mains, y pourvoyant tous offices et benefices, pourveu que ce soit aux naturels du Païs, et conforme aux ordonnances et constitutions d'iceluy.

XXXII.

Et au lieu de doüaire, dont l'on n'a accoustumé user aux Royaumes d'Espagne, elle aura pour arres, selon l'usage et façon desdits Païs dudit Roy Catholique son futur espoux, cent trente trois mille trois cens trente trois escus, et un tiers d'escu, revenans au tiers de son dot ; estimé chacun escu desdites arres, comme ci dessus sont estimez et avaluez ceux de son dot. Lesquelles arres, dissolu le mariage, et icelle Dame survivante, sortiront nature d'heritage pour elle et les siens audit cas qu'elle survive : et lors en pourra disoser soit entre vifs, ou par derniere volonté, suivant l'usage et coustume d'Espagne : et luy sera ladite dez maintenant assignée, ledit cas d'arres advenant, en la mesme maniere que dessus a esté dit de sondit dot.

XXXIII.

Et si pourra ladite Dame Elizabeth, ledit cas de dissolution de mariage advenant, predecedant ledit Seigneur Roy Catholique, partir et soy retirer librement et franchement des Royaumes et Païs dudit Seigneur Roy Catholique sondit futur mary, toutes et quantes fois qu'il luy plaira et bon luy semblera ; et avec elle tous ses Officiers, serviteurs et familiers ; et s'en retourner au Royaume de France et Païs du Seigneur Roy Tres-Chrestien ; faire emmener et emporter avec soy tous et chacuns ses biens, joyaux, accoustremens, vaisselles et autres meubles quelconques ; sans que pour quelque occasion que ce soit ou pourroit survenir, soit fait ou mis, directement ou indirectement, aucun contredit, empeschement ou retardement de sondit partement ; ny à la joüissance de sesdites arres et assignal des deniers de sondit mariage. Et à cette fin sera baillée devant la solemnisation dudit mariage par ledit Seigneur Roy Catholique asseurance séellée de Sa Majesté, avec soubmission et obligation pour y estre contraint par arrest et detention de toutes personnes des Royaumes dudit Seigneur Roy Catholique, de quelque estat ou qualité qu'ils soient. Et pour l'execution de ce que dessus, se depescheront de la part dudit Seigneur Roy Catholique toutes lettres et depsches necessaires.

XXXIV.

Item, d'autant que la plus grande partie des guerres qui ont eu cours depuis plusieurs années en çà, sont procedées à cause des droits et pretensions, que Sadite Majesté Tres-Chrestienne maintient avoir sur les Païs de Savoye, Bresse, Piedmont, et autres que tenoient les Ducs de Savoye : et que Tres-Excellent Prince Emmanuel Philibert de Savoye luy a fait entendre et remonstrer la bonne intention qu'il a de luy en faire raison, et comme son Tres-Humble parent, le reconnoistre de tout l'honneur, service et observation d'amitié qu'il luy sera possible, pour le rendre à l'advenir plus content de luy et de ses actions, que le temps et les occasions passées ne luy en ont donné le moyen ; le suppliant qu'il veüille, pour plus fermement establir cette reconciliation, affinité et amitié qu'il cherche et desire de Sa Majesté, trouver bon et avoir pour agreable, que le mariage de Tres-Excellente Princesse Madame Marguerite de France sa Soeur unique, Duchesse de Berry, et luy, se puisse faire à l'honneur d'une telle Princesse qu'il desire singulierement, tant pour la proximité du sang, dont elle touche à Sadite Majesté, que pour les dignes, excellentes et rares vertus qui sont enn elles ce que Sa Majesté comme Prince d'honneur, et aimant le bien et repos de la Chrestienté, ainsi qu'il l'a demonstré en toutes choses, a receu à grand plaisir, et de voir le bon devoir, en quoy ledit Seigneur Duc de Savoye offre se mettre ; desirant de sa part le gratifier dudit mariage et de toutes autres choses, qui pourront servir à fortifier cette reconciliation, pour l'asseurance qu'il a aussi de l'honneur et bon traittement que madite Dame sa Soeur, qu'il aime et tient chere comme sa propre fille, en recevra de Sadite Majesté toute satisfaction, contentement et parfaite amitié. Pour ces causes le voulant reconnoistre comme parent et de son sang, et pour de plus en plus corroborer et confirmer cette Paix ; ont lesdits Seigneurs Deputez, en vertu de leursdites pouvoirs, convenu et accordé, que ledit Seigneur Duc de Savoye aura à femme ladite Dame Marguerite ; à laquelle Sadite Majesté Tres-Chrestienne laissera pour son entretenement la joüissance sa vie durant de ladite Duché de Berry, et autres terres et revenus dont elle joüit à present : et davantage luy baillera en dot pour tous ses droits paternels, maternels et autres, qui luy peuvent appartenir et sont escheus, ausquels moyennant ce elle renoncera, la somme de trois cens mille escus ; payables c'est à sçavoir, la somme de trois cens mille escus ; payables c'est à sçavoir, cent mille escus comptans, le jour de la consommation dudit mariage : autres cent mille escus, un an aprés ladite consommation ; et les autres cent mille escus, six mois aprés ledit an revolu. Recevant laquelle somme, ou partie d'icelle par le dit Seigneur de Savoye, il sera tenu l'assigner bien et convenablement sur le Duché de Savoye, peage et dace de Suze et gabelles de Nice de proche en proche ; dont ladite Dame, ses hoirs et successeurs, jusques à l'entiere restitution de ladite somme, ou de ce que receu en aura esté. Et advenant que ledit Seigneur Duc de Savoye aille de vie à trespas avant ladite Dame, elle aura pour son doüaire la somme de trente mille livres par an, ny luy est et sera assignée sur les Païs de Bresse, Baugey et Veromey, et autres Païs du Duc de Savoye, aussi de proche en proche ; dont elle joüira par ses mains sa vie durant seulement, avec la provision et disposition des offices et benefices desdits lieux. Et si aura pour sa demeure et habitation la maison de Bourg en Bresse, ou de Pontdain, à son choix et option : le tout avec les clauses et conditions, qui seront apposées au contract de mariage qui en sera dressé.

XXXV.

Sera ledit mariage solemnisé en face de Saincte Eglise, et consommé entre-eux dedans deux mois prochainement venants : et à cette fin s'obtiendra la dispense de nostre Sainct Pere le Pape. Et dez lors sera baillé et delaissé audit Seigneur de Savoye, pour luy, ses hoirs, successurs et ayans cause, l'entiere pleine possession paisible tant de la Duché de Savoye, Païs de Bresse, Baugey, Veromey, Maurienne, Tarentaise et Vicairie de Barcelonnette, comme de la Principauté de Piedmont, Comté d'Ast, Marquisat de Ceve, Comté de Cocoval, des Terres de Languet, de Gattieres et Terres de la Comté de Nice delà du Bar ; que ledit Seigneur Roy Tres-Chrestien, ou autre, quel qu'il soit de ses serviteurs et subjets tient et possede ; que de tout ce que le feu Duc Charles son Pere tenoit, quand il fut mis hors de ses Paîs du vivant du feu Roy François : fors et exceptes les Villes et places de Turin, Quiers, Pignerol, Chivas et Villeneufve d'Ast, ainsi qu'ils s'entendent et comportent : et de celles dudit Pignerol et Quiers, des finages, territoires, mandemens et jurisdiction, tant et si avant que ledit Seigneur Roy Tres-Chrestien connoistra estre necessaire pour la nourriture et munition de toutes leursdites places ; Y compris les vivres qui se tireront desdites trois places et leursdits territoires ; le tout de bonne foy : ce qui demeure à son arbitre et bon plaisir, pour icelles places, finages, territoires, mandemens, jurisdiction, et leursdites appartenances tenir par ledit Seigneur Roy Tres-Chrestien, ainsi que dessus est dit : jusques à ce que les differens sur les droits par Sa Majesté pretendus contre ledit Seigneur de Savoye soient vuidez et determinez : ce que lesdits Seigneurs s'obligent de faire dedans trois ans pour le plus tard, sans autre prolongation ny retardement. Et iceux differens vuidez, et ledit temps de trois ans escheus, en laissera Sadite Majesté Tres-Chrestienne la possession libre audit Seigneur de Savoye, pour en joüir ainsi que de ses autres Terres : pourveu toutefois qu'il n'y ait retardement ou refus aucun procedant dudit Seigneur de Savoye : comme aussi le Roy Tres-Chrestien promet n'en faire aucun de sa part ; à peine de descheoir desdites pretensions et possessions : n'entendant toutefois ce present article aucunement prejudicier aux droits et raisons dudit Seigneur de Savoye. Lesquels differens se vuideront selon les concordats, et ainsi qu'il a esté accoustumé, quand aucuns differens se sont offerts entre ceux de la maison de France et celle de Savoye : et là où ils ne pourront estre determinez par ledit moyen, seront dedans six mois aprés la consommation dudit mariage choisis et deputez arbitres de commun accord et consentement, pour proceder le plûtost que faire se pourra à la determination d'iceux differens.

XXXVI.

Et neantmoins sera loisible audit Seigneur Roy Tres-Chrestien en baillant audit Seigneur de Savoye la possession desdits Païs, faire démolir et abattre toutes faites en iceux, tant par luy que par le feu Roy son Pere ; et se retirer l'artillerie, vivres et autres munitions qui y seront, pour en faire ce que bon leur semblera.

XXXVII.

ITEM, est semblablement traitté, que tous ceux qui ont esté pourveus par mort ou resignation ou autrement legitimement des benefices desdits Païs, durant que lesdits Seigneurs Roys Tres-Chrestiens Pere et Fils les ont tenus et possedez, demeureront au droit et possession d'iceux, et en joüiront tout ainsi qu'ils font à present, sans y estre aucunement inquietez, empeschez ou molestez en quelque maniere que ce soit par ledit Seigneur de Savoye, ses gens et Officiers. Et quant à ceux qui ont esté aussi par lesdits Seigneurs Roys, pourveus des offices desdits Païs durant ledit temps ; iceluy Seigneur Duc les aura pour bien et favorablement recommandez, selon leurs merites.

XXXVIII.

Aussi, que toutes procedures, jugemens et arrests donnez par les Cours Souveraines desdits Païs, Grand Conseil, et autres Iuges de Sadite Majesté tres-Chrestienne, pour raison des differens et procés poursuivis, tant par les subjets desdits Païs de Piedmont, Savoye, qu'autres, durant le temps qu'ils ont esté sous l'obeïssance dudit Seigneur Roy Tres-Chrestien et dudit Seigneur Roy son Pere, auront lieu, et sortiront leur plein et entier effet, tout ainsi qu'ils feroient, si ledit Seigneur Roy demeuroit Seigneur et possesseur desdits Païs. Et ne pourront estre lesdits jugemens et arrests revoquez en doute, annullez, ny l'execution d'iceux autrement retardée ou empeschée: bien sera loisible aux parties se pourvoir par revision, et selon l'ordre et disposition du droit des loix et ordonnances ; demeurant neantmoins les jugemens cependant en leur force et vertu.

XXXIX.

ITEM, et pour obvier à toute occasion de trouble qui peut alterer la bonne volonté desdits Princes l'un envers l'autre, et faire cesser toutes querelles et plaintes ; est convenu et accordé, que ledit Seigneur de Savoye jurera et promettra de remettre, oublier et pardonner toute haine et rancune qu'il pourroit avoir conceuë, et offense pretenduë à l'encontre des subjets et autres manans et habitans desdits Païs ou aucun d'eux, de quelque estat, nation, qualité ou condition qu'ils soient, pour avoir suivy, obeï et servy lesdits Seigneurs Roys Tres-Chrestiens, leurs Lieutenans, Gouverneurs et Officiers, durant le temps qu'ils ont possedé lesdits Païs, et que pour raison de ce, ne les molestera, ny fera poursuivre, inquieter, molester ny travailler en leurs personnes ny biens, directement ou indirectement, en quelque sorte ny maniere que ce soit : ains les laissera et permettra avec leurs familles vivre en tout repos et liberté, et joüir de leurs biens paisiblement, sans empeschement ny reproche quelconque : et de ce baillera ses lettres patentes en bonne et valable forme : et le semblable fera ledit Seigneur Roy Tres-Chrestien reciproquement, pour le regard de ceux qui ont servy et suivy ledit Seigneur Duc de Savoye, et ledit feu Duc son Pere, autres que subjets naturels de Sa Majesté Tres-Chrestienne ; qui demeureront exclus du benefice du present Traitté.

XL.

Et afin que ledit Seigneur Duc de Savoye ait entiere cause de contentement, et qu'il ne demeure aucun scrupule és choses qui pourroient alterer ce public bien de Paix, et de nouër ce noeud d'amitié que lesdits Princes veulent fermer ensemble ; a esté convenu et accordé, que au mesme temps de la consommation dudit mariage dudit Seigneur de Savoye et de madite Dame Marguerite, ledit Seigneur Roy des Espagnes laissera aussi ledit seigneur de Savoye en l'entiere et libre possession de toutes les Villes, Places, Chasteaux et Forteresses de ses Païs, esquelles ledit Seigneur Roy des Espagnes tient garnison et gens de guerre ; dont les fera sortir et vuider incontinent, pour en joüir par ledit Seigneur de Savoye, ses hoirs et ayans cause, franchement, librement, paisiblement et sans aucun empeschement, tout ainsi que faisoit auparavant le commencement des guerres le feu Duc son Pere. Bien pourra iceluy Seigneur Roy Catholique du gré et consentement dudit Seigneur de Savoye, tenir garnison de gens de guerre à ses despens dedans les Villes et Places de Vercelles et Ast, pendant le temps que ledit Seigneur Roy Tres-Chrestien tiendra lesdites cinq places tant seulement aprés lequel il sera tenu les en retirer, et en laisser l'entiere et libre joüissance et administration audit Seigneur de Savoye ; qui cependant ne laissera d'y avoir toute authorité et préeminence, pour des droits, profits, revens et emolumens d'icelles, et de leurs appartenances et dépendances joüir, user et disposer par luy, comme de sa propre chose et tout ainsi que si lesdites forces n'y estoient point : demeurant au surplus ledit Seigneur de Savoye avec ses Terres, Païs et subjets, bon Prince, neutre et amy commun desdits Seigneurs Roys Tres-Chrestien et Catholique.

XLI.

ITEM, est accordé, que de tous dons, graces, concessions et alianations, que lesdits Seigneurs Roys Tres-Chrestiens ont fait du domaine et patrimoine desdits Païs durant qu'ils les ont possedez, et des Vassaux et subjets dudit Seigneur de Savoye ; seront et demeureront cassées et annullées, et en la possession d'iceux biens, ceux ausquels ils appartenoient seront remis sans toutefois qu'ils puissent aucune chose quereller ny demander des fruits et meubles perceus, en vertu desdits droits de confiscation.

XLII.

ITEM, est aussi accordé, que tous autres dons, graces, remissions, concessions et alienations faites par ledit Seigneur roy tres-Chrestien et le feu Roy son Pere durant ledit temps, des choses qui leur sont escheuës et advenuës, ou auront esté adjugées, soit par confiscation pour cas de crime et commise autre que de guerre, pour avoir suivy et servy ledit Seigneur de Savoye, reversion de fief, faute de legitimes successeurs ou autrement, seront et demeureront bonnes et valables ; et ne se pourront revoquer, ny ceux ausquels ils ont esté faits, inquieter ny molester en la joüissance d'iceux.

XLIII.

Aussi, que ceux qui durant ledit temps auroient esté receus en foy et hommage par le Roy ou ses Officiers ayans pouvoir, à ceux d'aucuns fiefs et Seigneuries tenuës et mouvantes des Villes, Chasteaux et lieux possedez par ledit Seigneur audit païs, et d'iceux auroient payé les droits Seigneuriaux, ou que ledit Seigneur Roy leur en eust fait don et remission : ne pourront estre molestez ny inquietez pour raison desdits droits et devoirs ; ains demeureront quites, sans qu'on leur en puisse rien demander,en quelque maniere que ce soit.

XLIV.

Et se fera la restitution, qui se doit faire d'un costé et d'autre suivant ce present Traitté, en cette sorte ; à sçavoir que le Roy Tres-Chrestien rendra tout ce qu'en vertu de cedit Traitté il doit rendre, tant des Païs de Monseigneur le duc de Savoye par-deça, qu'en Italie, Corsique et ailleurs, où que ce soit, en-dedans deux mois dez la date de ce present Traitté : et se commencera à faire ladite restitution en dedans un mois : et devant que ce commencer de restituer, se donneront pour Ostages, pour l'asseurance de l'acomplissement des restitutions, de la part dudit Seigneur Roy Catholique, quatre Ostages, tels que le Roy Tres-Chrestien voudra choisir, subjets de Sa Majesté Catholique : et dans un mois aprés ladite restitution faite par ledit Seigneur Roy Tres-Chrestien, devra ledit Seigneur Catholique achever de restituer ce que aussi en vertu de ce present Traitté il doit rendre, tant pardeça que pardelà les monts, où que ce soit : Et commencera ce mois par ledit Seigneur Roy Catholique avoir cours, dez qu'il sera certifié que la restitution du costé dudit Seigneur Roy Tres-Chrestien sera faite : laquelle restitution achevée, lesdits Ostages se rendront et mettront en entiere delivrance, de bonne foy, et sans contredit, delay ou difficulté quelconque.

XLV.

En cette paix, alliance et amitié seront compris de commun accord et consentement desdits Roys Tres-Chrestien et Catholique, si compris toutefois y veulent estre ; premierement, de la part du Seigneur Roy Catholique, Nostre Sainct Pere le Pape, le Sainct Siege Apostolique, l'Empereur des Romains, Messeigneurs ses Enfants, leurs Royaumes et Païs, les Electeurs Princes, Villes et Estats du Saint Empire obïssans à iceluy ; et specialement l'evesque de Liege, le Duc de Cleves, l'Evesque et cité de Cambray et Païs de Cambresis, les Villes maritimes et les Comtez d'Oostfrise. Et renoncent lesdits Princes à toutes pratiques, promettant de n'en faire ci-aprés aucunes, ny en la Chrestienté, ny hors d'icelle, où que ce soit, qui puissent estre prejudiciables ny ausdits Seigneurs Empereurs, ny ausdits membres et Estats du Saint Empire ; ains qu'ils procureront de leur pouvoir le bien et repos d'iceluy ; pourveu que ledit Seigneur Empereur et lesdits Estat se comportent respectivement amiablement avec lesdits Seigneurs Roys Tres-Chrestien et Catholique, et ne facent rien au prejudice d'iceux. Et de mesme y seront compris Messeigneurs des Cantons des Ligues des hautes Allemagnes, et les ligues Grises et leurs alliez : et davantage la Roine d'Angleterre, suivant ce qui a esté capitulé entre ledit Seigneur Roy Tres-Chrestien, les Roy et Roine Dauphine, Roi et Roine d'Ecosse, et elle : se reservant expressement par cedit Traitté la capitulation que le Roy Catholique a avec les Roys et Royaume d'Angleterre. Aussi se comprend expressement en cedit Traitté le Roy de Portugal, le Roy de Pologne, le Roy de Danemarck, le Duc de Savoye, le Duc de Lorraine et Madame la Duchesse sa Mere, le Duc et seigneurie de Venise, les Republiques de Gennes et de Luques, les Ducs de Florence et de Ferrare : bien entendu, que cette comprehension soit sans prejudice du Traitté qu'il a fait à Sa Majesté Catholique, et de l'acomplissement d'iceluy. Outre ce, se comprendront les Ducs de Mantouë et d'Urbin, le Duc de Parme et de Plaisance, les Reverendissimes Cardinaux Farnese et Santangelo ses Frères, et aussi le Cardinal Camerlengo, le Comte de Saincte Fleur et autres ses Freres, Reverendissimes Cardinaux Carpi, et Perosa, Marco Antonio Colona, Paolo Iordain Orsino, Vespasian Gonzaga, le Seigneur de Monaco, le Marquis de Final, le Marquis de Massa, le Seigneur Bertholdo Farnese, l'Evesque de Pavie et ses Freres, le Seigneur de Plombin, le Comte de Sala, le Comte de Colorino, Sinolpho, Seigneur de Castellothiery ; pour joüir pareillement du benefice de cette Paix, et en vertu de ce present Traitté de tous et chacun leurs biens Ecclesiastiques et temporels qu'ils ont aux Païs dudit Seigneur Roy Tres-Chrestien ; avec declaration expresse, que ledit Seigneur Roy Tres-Chrestien ne pourra directement ny indirectement travailler par soy ou par autres, aucuns d'iceux. Et que si ledit Seigneur Roy Tres-Chrestien pretend aucunes choses à l'encontre d'eux, il les pourra seulement poursuivre par droit devant Iuges competans, et non par la force en maniere que ce soit.

XLVI.

Et de la part dudit Seigneur Roy Tres-Chrestien sera compris en ce present Traitté Nostre Sainct Pere le Pape, le Sainct Siege Apostolique, l'Empereur, les Electeurs Princes Ecclesiastiques et Seculiers, Villes, Communautez et Estats du Sainct Empire : et par especial Messeigneurs les Ducs Hans-Frederic et Jean Guillaume de Saxe, le Duc de Wirtemberg, le Landtgrave de Hessen et ses Enfans, la Comtesse de Frise Orientale et son Fils: ensemble les Villes maritimes, selon les anciennes alliances : le Roy Dauphin et la Roine Dauphine, Roy et Royne d'Ecosse, La Roine Doüaigiere Regente d'Ecosse, ledit Royaume d'Ecosse, selon les anciens Traittez, alliances et confederations qui sont entre le Royaume de France et d'Escosse : le Roy de Boheme, Messeigneurs les Archiducs ses Freres, Enfans dudit Seigneur Empereur, leurs Royaumes, Païs, Terres et Seigneuries : les Roys de Portugal, Polongne, Danemarck et Suede, la Roine Elisabeth vesve du feu Roy Iean Voyvoda, et le Roi son Fils, le Duc et Seigneurie de Venise, les treize cantons des Ligues de Suisse, les Seigneuries des Ligues Grises, Valay, Sainct Gal, Torquemborg, Mulhausen, et autres alliez et confederez desdits Seigneurs des Ligues, Monseigneur le Duc de Lorraine, Madame la Duchesse Doüairiere de Lorraine, Monseigneur le Duc de Savoye, Monseigneur le Duc de Ferrare, Messeigneurs ses Enfans, Messieurs le Cardinal de Ferrare et Don Francisco d'Est ; pour joüir du benefice de ce present Traitté, et en vertu d'iceluy de tous les biens temporels et Ecclesiastiques qu'ils ont és Païs dudit Seigneur Roy Catholique : les Marquise de Montferrat, Duchesse Doüaigiere et le Duc de Mantouë, le Seigneur Ludovico Gonzaga son Frere, la Republique de Luques, les Evesque et Chapitres de Metz, Toul et Verdun, l'Abbé de Gorze (sans par cette comprehension faire aucun prejudice au droit de celuy que de la part du Roy Catholique l'on pretend estre Abbé de Gorze, auquel demeurent ses droits saufs et reservez) les Seigneurs de la maison de la Marck, le Duc de Palliano, les Comtes de la Mirandole et de Perillan, le Seigneur Iordan Ursin, Camillo et Paolo Ursin, le Seigneur Cardinal Strozzi, Philippe et Robert Strozzi, l'Evesque de Sainct Papoul, Salviati, le Seigneur Cornelio Bentivoglio et ses Freres, le Seigneur Adrien Baillon, pour joüir pareillement du Benefice de cette Paix, et en vertu de ce present Traitté, de tous et chacuns leurs biens Ecclesiastiques et temporels, qu'ils ont és Païs dudit Seigneur Roy Catholique. Bien entendu toutefois, que le consentement, que ledit Seigneur Roy Catholique donne à la comprehension de la Comtesse de la Frise Orientale et son Fils, soit sans prejudice du droit que Sa Majesté Catholique pretend sur les Païs d'iceux. Comme aussi demeurent reservées à l'encontre, les deffenses, droits et exceptions de ladite Dame et de son Fils aussi : avec declaration expresse, que ledit Seigneur Roy Catholique ne pourra directement ou indirectement travailler, par soy ou par autres, aucuns de ceux qui de la part dudit Seigneur Roy Tres-Chrestien ont ici esté compris. Et que si ledit Seigneur Roy Catholique pretend aucune chose à l'encontre d'eux, ils les pourra seulement suivre par droit par devant Iuges competans, et non par la force, en maniere que ce soit.

XLVII.

Et aussi seront compris en ce present Traitté tous autres, qui de commun consentement desdits Seigneurs Roys Tres-Chrestien et Catholique se pourront denommer ; pourveu que six mois aprés la publication de ce Traitté, ils donnent leurs lettres declaratoires et obligatoires en tel cas requises respectivement.

XLVIII.

Et pour plus grande seureté de ce Traitté de Paix et de tous les points y contenus, ledit Seigneur Roy Tres-Chrestien le fera jurer, appreuver et ratifier par Monseigneur le Roy Dauphin son Fils, et le fera verifier et interiner en la Cour de Parlement à Paris, et en tous autres Parlements du Royaume de France, avec l'intervention et en presence des Procureurs Generaux esdites Cours de Parlement : ausquels ledit Seigneur baillera pouvoir especial et irrevocable pour en son nom comparoir esdites Cours de Parlement, et de illec consentir aux interinemens, et eux soubmettre volontairement à l'observance de toutes les choses contenuës esdits Traitez, et chacun d'iceux respectivement : et qu'en vertu d'icelle volontaire soubmission, ils soient en ce condamnez par arrest et sentence diffinitive desdits Parlemens, en bonne et convenable forme. Et sera aussi ledit Traitté de Paix verifié et enregistré en la Chambre des comptes audit Paris, en presence et du consentement dudit Seigneur Roy, pour l'effectuelle execution et accomplissement d'iceux, et validation des quitances, renonciations et soubmissions, et autres choses contenuës et declarées esdits Traittez. Lesquelles ratifications, interinemens, verifications et autres choses dessusdites, seront faites et parfournies par ledit Seigneur Roy Tres-Chrestien, et les depesches d'icelles en forme deuë delivrées és mains dudit Seigneur Roy Catholique en dedans trois mois. Et si pour les interinemens et verifications que dessus, estoit requis et necessaire aux Officiers dudit Seigneur Roy Tres-Chrestien avoir relaxation de luy des sermens qu'ils peuvent avoir faits, de ne consentir ne souffrir aucunes alienations de la Couronne ; iceluy Seigneur roy la leur baillera. Et ledit Seigneur Roy Catholique fera faire en son grand Conseil et autres ses Consaux et Chambres des comptes en ses Païs d'embas, semblables interinemens et verifications, avec relaxation des sermens des Officiers, en dedans le terme que dessus ; et en dedans six mois, le fera aussi ratifier par Monseigneur le Prince des Espagnes son Fils.
Lesquels points et articles ci-dessus compris, et chacun d'iceux, ensemble tout le contenu, ont esté traittez, accordez, passez et stipulez reciproquement entre lesdits Deputez au nom que dessus, et en vertu de leurs pouvoirs. Et ont promis et promettent sous l'obligation de tous et singuliers leurs biens presens et à venir de leursdits Maistres, qu'ils seront par iceux inviolablement observez et acomplis ; et de leur faire ratifier, et en bailler et delivrer les uns aux autres lettres authentiques signées et scellées, où tout le present Traitté sera inseré de mot à autre, et ce en dedans huict jours prochains. Et d'abondant ont accordé lesdits Procureurs (à sçavoir ceux dudit Seigneur Roy Catholique) que le plustost que convenablement faire se pourra et en presence de tel qu'il plaira audit Seigneur Roy Tres-Chrestien deputer, ledit Seigneur Roy Catholique jurera solemnellement sur la Croix et Saincts Evangiles de Dieu, et Canon de la Messe, et sur son honneur, d'observer et acomplir pleinement et realement le contenu esdits articles. Et le semblable fera ledit Seigneur Roy Tres-Chrestien, le plustost aussi que la commodité s'en donnera, en presence de tel qu'il plaira audit Seigneur Roy Catholique deputer.

En tesmoin desquelles choses ont les Deputez souscrit le present Traitté, signé leurs noms, au lieu de Chasteau en Cambresis, le troisiéme jour du mois d'Avril l'an mille cinq cens cinquante neuf, puis Pasques.


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Jean-Pierre Maury