Grands Traités de paix


Acte final du Congrès de Vienne

du 9 Juin 1815


Articles 1 à 14  [Pologne]
Articles 15 à 52 [Allemagne]
Articles 53 à 64 [Confédération germanique]
Articles 65 à 73 [Pays-Bas]
Articles 74 à 84 [Suisse]
Articles 85 à 104 [Italie]
Articles 105 à 107 [Portugal]
Articles 108 à 117 [Liberté de navigation fluviale]
Articles 118 à 121 [Dispositions finales]

[Pays-Bas]

Article 65.

Les anciennes Provinces-Unies des Pays-Bas et les ci-devant Provinces Belgiques, les unes et les autres dans les limites fixées par l'article suivant, formeront, conjointement avec les pays et territoires désignés dans le même article, sous la souveraineté de S. A. R. le Prince d'Orange-Nassau, Prince Souverain des Provinces-Unies, le Royaume des Pays-Bas, héréditaire dans l'ordre de succession déjà établi par l'acte de constitution desdites Provinces Unies. Le titre et les prérogatives de la dignité royale sont reconnus par toutes les Puissances dans la Maison d'Orange-Nassau.

Article 66.

La ligne comprenant les territoires qui composeront le Royaume des Pays-Bas, est déterminée de la manière suivante : elle part de la mer, et s'étend le long des frontières de la France du côté des Pays-Bas, telles qu'elles ont été rectifiées et fixées par l'article 3 du Traité de Paris du 30 mai 1814, jusqu'à la Meuse, et ensuite le long des mêmes frontières jusqu'aux anciennes limites du Duché de Luxembourg ; de là elle suit la direction des limites entre ce Duché et l'ancien Évêché de Liège, jusqu'à ce qu'elle rencontre (au midi de Deiffelt) les limites occidentales de ce canton et de celui de Malmedi, jusqu'au point où cette dernière atteint les limites entre les anciens départements de l'Ourthe et de la Roer ; elle longe ensuite ces limites jusqu'à ce qu'elle touche à celles du canton ci-devant français d'Eupen dans le Duché de Limbourg, et en suivant la limite occidentale de ce canton dans la direction du nord, laissant à droite une petite partie du ci-devant canton français d'Aubel, se joint au point de contact des trois anciens départements de l'Ourthe, de la Meuse Inférieure et de la Roer ; en partant de ce point, la ligne suit celle qui sépare ces deux derniers départements jusque là où elle touche à la Worm (rivière ayant son embouchure dans la Roer), et longe cette rivière jusqu'au point où elle atteint de nouveau la limite de ces deux départements, poursuit cette limite jusqu'au midi de Hillensberg (ancien département de la Roer), remonte de là vers le nord, et, laissant Hillensberg à droite, et coupant le canton de Sittard en deux parties à peu près égales, de manière que Sittard et Susteren restent à gauche, arrive à l'ancien territoire Hollandais ; puis laissant ce territoire à gauche, elle en suit la frontière orientale jusqu'au point où celle-ci touche à l'ancienne Principauté autrichienne de Gueldres, du côté de Ruremonde, et, se dirigeant vers le point le plus oriental du territoire Hollandais au nord de Schwalmen, continue à embrasser ce territoire.

Enfin elle va joindre, en partant du point le plus oriental, cette autre partie du territoire hollandais où se trouve Venloo ; elle renfermera cette ville et son territoire. De là, jusqu'à l'ancienne frontière hollandaise près de Mook, situé au-dessous de Gennep, elle suivra le cours de la Meuse, à une distance de la rive droite telle, que tous les endroits qui ne sont pas éloignés de cette rive de plus de mille perches d'Allemagne (Rheinlandische Ruthen), appartiendront avec leurs banlieues au Royaume des Pays-Bas ; bien entendu toutefois, quant à la réciprocité ce principe, que le territoire prussien ne puisse, sur aucun point, toucher à la Meuse, ou s'en approcher à une distance de huit cents perches d'Allemagne.

Du point où la ligne qui vient d'être décrite atteint l'ancienne frontière hollandaise jusqu'au Rhin, cette frontière restera, pour l'essentiel, telle qu'elle était en 1795, entre Clèves et les Provinces-Unies. Elle sera examinée par la commission qui sera nommée incessamment par les deux gouvernements de Prusse et des Pays-Bas, pour procéder à la détermination exacte des limites, tant du Royaume des Pays-Bas que du Grand-Duché de Luxembourg, désignées dans l'article 68 ; et cette Commission réglera, à l'aide d'experts, tout ce qui concerne les constructions hydrotechniques et autres points analogues, de la manière la plus équitable et la plus conforme aux intérêts mutuels des États prussiens et de ceux des Pays-Bas. Cette même disposition s'étend sur la fixation des limites dans les districts de Kyfwaerd, Lobith, et de tout le territoire jusqu'à Kekerdom.

Les enclaves Huissen, Malburg, le Lymers avec la ville de Sevenaer et la Seigneurie de Weel, feront partie du Royaume des Pays-Bas ; et S. M. Prussienne y renonce à perpétuité pour elle et tous ses descendants et successeurs.

Article 67.

La partie de l'ancien Duché de Luxembourg, comprise dans les limites spécifiées par l'article suivant, est également cédée au Prince Souverain des Provinces- Unies, aujourd'hui Roi des Pays-Bas, pour être possédée à perpétuité par lui et ses successeurs en toute propriété et souveraineté. Le Souverain des Pays-Bas ajoutera à ses titres celui de Grand-Duc de Luxembourg, et la faculté est réservée à S. M. de faire, relativement à la succession dans le Grand Duché, tel arrangement de famille entre les princes ses fils qu'elle jugera conforme aux intérêts de sa monarchie et à ses intentions paternelles.

Le Grand-Duché de Luxembourg servant de compensation pour les Principautés de Nassau-Dillenbourg, Siegen, Adamar et Dietz, formera un des États de la Confédération germanique, et le Prince Roi des Pays-Bas entrera dans le système de cette Confédération comme Grand-Duc de Luxembourg, avec toutes les prérogatives et privilèges dont jouiront les autres Princes allemands.

La ville de Luxembourg sera considérée, sous le rapport militaire, comme forteresse de la Confédération. Le Grand-Duc aura toutefois le droit de nommer le gouverneur et commandant militaire de cette forteresse, sauf l'approbation du pouvoir exécutif de la Confédération, et sous telles autres conditions qu'il sera jugé nécessaire d'établir en conformité de la constitution future de ladite Confédération.

Article 68.

Le Grand-Duché de Luxembourg se composera de tout le territoire situé entre le Royaume des Pays-Bas, tel qu'il a été désigné par l'article 66, la France, la Moselle jusqu'à l'embouchure de la Sure, le cours de la Sure jusqu'au confluent de l'Our, et le cours de cette dernière rivière jusqu'aux limites du ci-devant canton français de Saint-Vith, qui n'appartiendra point au Grand-Duché de Luxembourg.

Article 69.

S. M. le Roi des Pays-Bas, Grand-Duc de Luxembourg, possédera à perpétuité, pour lui et ses successeurs, la souveraineté pleine et entière de la partie du Duché de Bouillon non cédée à la France par le Traité de Paris ; et, sous ce rapport, elle sera réunie au Grand-Duché de Luxembourg.

Des contestations s'étant élevées sur ledit Duché de Bouillon, celui des compétiteurs dont les droits seront légalement constatés, dans les formes énoncées ci-dessous, possédera en toute propriété ladite partie du Duché, telle qu'elle l'a été par le dernier Duc sous la souveraineté de S. M. le Roi des Pays-Bas, Grand-Duc de Luxembourg.

Cette décision sera portée sans appel par un jugement arbitral. Des arbitres seront à cet effet nommés, un par chacun des deux compétiteurs, et les autres, au nombre de trois, par les Cours d'Autriche, de Prusse et de Sardaigne. Ils se réuniront à Aix-la-Chapelle aussitôt que l'état de guerre et les circonstances le permettront, et leur jugement interviendra dans les six mois à compter de leur réunion.

Dans l'intervalle, S. M. le Roi des Pays-Bas, Grand-Duc de Luxembourg, prendra en dépôt la propriété de ladite partie du Duché de Bouillon pour la restituer, ensemble le produit de cette administration intermédiaire, à celui des compétiteurs en faveur duquel le jugement arbitral sera prononcé. Sadite Majesté l'indemnisera de la perte des revenus provenant des droits de souveraineté, moyennant un arrangement équitable ; et si c'est au Prince Charles de Rohan que cette restitution doit être faite, ces biens seront entre ses mains soumis aux lois de la substitution qui forme son titre.

Article 70.

S. M. le Roi des Pays-Bas renonce à perpétuité, pour lui et ses descendants et successeurs, en faveur de S. M. le Roi de Prusse, aux possessions souveraines que la Maison de Nassau-Orange possédait en Allemagne, et nommément aux Principautés de Dillenbourg, Dietz, Siegen et Hadamar, y compris la Seigneurie de Beilstein, et telles que ces possessions ont été définitivement réglées entre les deux branches de la Maison de Nassau par le Traité conclu à la Haye le 14 juillet 1814. S. M. renonce également à la Principauté de Fulde et aux autres districts et territoires qui lui avaient été assurés par l'article 12 du recès principal de la députation extraordinaire de l'empire, du 25 février 1803.

Article 71.

Le droit et l'ordre de succession établi entre les deux branches de la Maison de Nassau par l'acte de 1783, dit Nassauischer Erbverein, est maintenu et transféré des quatre Principautés d'Orange-Nassau au Grand-Duché de Luxembourg.

Article 72.

S. M. le Roi des Pays-Bas, en réunissant sous sa souveraineté les pays désignés dans les articles 66 et 68, entre dans tous les droits et prend sur lui toutes les charges et tous les engagements stipulés relativement aux provinces et districts détachés de la France dans le Traité de paix conclu à Paris le 30 mai 1814.

Article 73.

S. M. le Roi des Pays-Bas ayant reconnu et sanctionné, sous la date du 21 juillet 1814, comme bases de la réunion des Provinces Belgiques avec les Provinces-Unies, les huit articles renfermés dans la pièce annexée au présent Traité, lesdits articles auront la même force et valeur comme s'ils étaient insérés de mot à mot dans la transaction actuelle.
 

[Suisse]

Article 74.

L'intégrité des dix-neuf Cantons, tels qu'ils existaient en corps politique lors de la convention du 29 décembre 1813, est reconnue comme base du système Helvétique.

Article 75.

Le Valais, le territoire de Genève, la Principauté de Neuchâtel, sont réunis à la Suisse et formeront trois nouveaux Cantons. La vallée des Dappes ayant fait partie du Canton de Vaud lui est rendue.

Article 76.

L'Évêché de Bâle et la ville et le territoire de Bienne seront réunis à la Confédération Helvétique, et feront partie du Canton de Berne.

Sont exceptés cependant de cette dernière disposition les districts suivants :

1°) Un district d'environ trois lieues carrées d'étendue, renfermant les communes d'Altschwaller, Schoenbuch, Oberweller, Terweiller, Ettingen, Fürstenstein, Plotten, Pfaeffingen, Aesch, Bruck, Reinach, Arlesheim, lequel district sera réuni au Canton de Bâle ;

2°) Une petite enclave située près du village neuchâtelois de Lignières, laquelle étant aujourd'hui, quant à la juridiction civile, sous la dépendance du Canton de Neuchâtel, et quant à la juridiction criminelle, sous celle de l'évêché de Bâle appartiendra en toute souveraineté à la Principauté de Neuchâtel.

Article 77.

Les habitants de l'Évêché de Bâle et ceux de Bienne réunis aux Cantons de Berne et de Bâle, jouiront à tous égards, sans différence de religion (qui sera conservée dans l'état présent) des mêmes droits politiques et civils dont jouissent et pourront jouir les habitants des anciennes parties desdits cantons. En conséquence, ils concourront avec eux aux places de représentants et aux autres fonctions, suivant les constitutions cantonales. Il sera conservé à la ville de Bienne et aux villages ayant formé sa juridiction, les privilèges municipaux compatibles avec la constitution et les règlements généraux du canton de Berne.

La vente des domaines nationaux sera maintenue, et les rentes féodales et les dîmes ne pourront point être rétablies.

Les actes respectifs de réunion seront dressés, conformément aux principes ci-dessus énoncés, par des Commissions composées d'un nombre égal de députés de chaque partie intéressée. Ceux de l'Évêché de Bâle seront choisis par le canton directeur parmi les citoyens les plus notables du pays. Lesdits actes seront garantis par la Confédération suisse. Tous les points sur lesquels les parties ne pourront s'entendre seront décidés par un arbitre nommé par la Diète.

Article 78.

La cession qui avait été faite par l'article 3 du Traité de Vienne, du 14 octobre 1809, de la seigneurie de Razüns, enclavée dans le pays des Grisons, étant venue à cesser, et S. M. l'Empereur d'Autriche se trouvant rétabli dans tous les droits attachés à ladite possession, confirme la disposition qu'il en a faite, par déclaration du 20 mars 1815, en faveur du canton des Grisons.

Article 79.

Pour assurer les communications commerciales et militaires de Genève avec le canton de Vaud et le reste de la Suisse, et pour compléter à cet égard l'article 4 du Traité de Paris du 30 mai 1815, S. M. Très-Chrétienne consent à faire placer la ligne de douanes de manière à ce que la route qui conduit de Genève, par Versoy en Suisse, soit en tout temps libre, et que ni les postes, ni les voyageurs, ni les transports de marchandises, n'y soient inquiétés par aucune des douanes, ni soumis à aucun droit. Il est également entendu que le passage des troupes suisses ne pourra y être aucunement entravé.

Dans les règlements additionnels à faire à ce sujet, on assurera, de la manière la plus convenable aux Genevois, l'exécution des Traités relatifs à leurs libres communications entre la ville de Genève et le mandement de Peney. S. M. Très-Chrétienne consent en outre, à ce que la gendarmerie et les milices de Genève passent par la grande route du Meyrin, dudit mandement à la ville de Genève, et réciproquement, après en avoir prévenu le poste militaire de la gendarmerie française le plus voisin.

Article 80.

S. M. le Roi de Sardaigne cède la partie de la Savoie qui se trouve entre la rivière d'Arve, le Rhône, les limites de la partie de la Savoie cédée à la France, et la montagne de Salève, jusqu'à Veiry inclusivement ; plus celle qui se trouve comprise entre la grande route dite du Simplon, le lac de Genève et le territoire actuel du canton de Genève, depuis Vénézas jusqu'au point où la rivière d'Hermance traverse la susdite route, et de là, continuant le cours de cette rivière jusqu'à son embouchure dans le lac de Genève, au levant du village d'Hermance (la totalité de la route dite du Simplon continuant à être possédée par S. M. le Roi de Sardaigne) pour que ces pays soient réunis au canton de Genève, sauf à déterminer plus précisément les limites par des commissaires respectifs, surtout ce qui concerne la délimitation au dessus de Veiry et sur la montagne de Salève, renonçant, Sadite Majesté, pour elle et ses successeurs, à perpétuité, sans exception ni réserve, à tous droits de souveraineté et autres qui peuvent lui appartenir dans les lieux et territoires compris dans cette démarcation.

S. M. le Roi de Sardaigne consent, en outre, à ce que la communication entre le Canton de Genève et le Vallais, par la route dite du Simplon, soit établie de la même manière que la France l'a accordée entre Genève et le Canton de Vaud, par la route de Versoy. Il y aura aussi en tout temps une communication libre pour les troupes genevoises entre le territoire de Genève, et le mandement de Jussy, et on accordera les facilités qui pourraient être nécessaires, dans l'occasion, pour arriver par le lac à la route dite du Simplon.

De l'autre côté, il sera accordé exemption de tout droit de transit à toutes les marchandises et denrées qui, en venant des États de S. M. le Roi de Sardaigne et du port franc de Gênes, traverseraient la route dite du Simplon dans toute son étendue par le Vallais et !'État de Genève, Cette exemption ne regardera toute fois que le transit, et ne s'étendra ni aux droits établis pour l'entretien de la route, ni aux marchandises et denrées destinées à être vendues ou consommées dans l'intérieur. La même réserve s'appliquera à la communication accordée aux Suisses entre le Vallais et le Canton de Genève ; et les gouvernements respectifs prendront à cet effet, de commun accord, les mesures qu'ils jugeront nécessaires, soit pour la taxe, soit pour empêcher la contrebande, chacun sur son territoire.

Article 81.

Pour établir des compensations mutuelles, les cantons d'Argovie, de Vaud, du Tessin et de Saint-Gall, fourniront aux anciens cantons de Schwitz, Unterwald, Uri, Zug, Glaris et Appenzell (Rhode intérieure) une somme qui sera appliquée à l'instruction publique et aux frais d'administration générale, mais principalement au premier objet dans lesdits Cantons.

La quotité, le mode de payement et la répartition de cette compensation pécuniaire, sont fixés ainsi qu'il suit :

Les cantons d'Argovie, de Vaud et de Saint-Gall fourniront aux Cantons de Schwitz, Unterwald, Uri, Zug, Glaris et Appenzell (Rhode intérieure), un fonds de cinq cent mille livres de Suisse.

Chacun des premiers payera l'intérêt de sa quote-part à raison de cinq pour cent par an, ou remboursera le capital, soit en argent, soit en biens-fonds, à son choix.

La répartition, soit pour le payement, soit pour la recette de ces fonds, se fera dans les proportions de l'échelle de contribution réglée pour subvenir aux dépenses fédérales.

Le canton du Tessin payera chaque année au Canton d'Uri la moitié du produit des péages dans la vallée Levantine.

Article 82.

Pour mettre un terme aux discussions qui se sont élevées par rapport aux fonds placés en Angleterre par les Cantons de, Zurich et de Berne, il est statué :

1° Que les Cantons de Berne et de Zurich conserveront la propriété du fonds capital, tel qu'il existait en 1803, à l'époque de la dissolution du Gouvernement Helvétique, et jouiront, à dater du 1er janvier 1815, des intérêts à écheoir ;

2° Que les intérêts échus et accumulés depuis l'année 1798, jusque et y compris l'année 1814, seront affectés an payement du capital restant de la dette nationale, désignée sous la dénomination de dette helvétique ;

3° Que le surplus de la dette helvétique restera à la charge des autres Cantons, ceux de Berne et de Zurich étant exonérés par la disposition ci-dessus. La quote-part de chacun des Cantons qui restent chargés de ce surplus, sera calculée et fournie dans la proportion fixée pour les contributions destinées au payement des dépenses fédérales ; les pays incorporés à la Suisse depuis 1813, ne pourront pas être imposés en raison de l'ancienne dette helvétique.

S'il arrivait qu'après le payement de la susdite dette, il y eût un excédant, il serait réparti entre les Cantons de Berne et de Zurich, dans la proportion de leurs capitaux respectifs.

Les mêmes dispositions seront suivies à l'égard de quelques autres créances dont les titres sont déposés sous la garde du président de la Diète.

Article 83.

Pour concilier les contestations élevées à l'égard des lands abolis sans indemnité, une indemnité sera payée aux particuliers propriétaires des lands. Et afin d'éviter tout différend ultérieur à ce sujet entre les Cantons de Berne et de Vaud, ce dernier payera au Gouvernement de Berne la somme de trois cent mille livres de Suisse, pour être ensuite répartie entre les ressortissants bernois, propriétaires des lands. Les payements se feront à raison d'un cinquième par an, à commencer du 1er janvier 1816.

Article 84.

La déclaration adressée, en date du 20 mars, par les Puissances qui ont signé le Traité de Paris, à la Diète de la Confédération Suisse, et acceptée par la Diète, moyennant son acte d'adhésion du 27 mai, est confirmée dans toute sa teneur, et les principes établis, ainsi que les arrangements arrêtés dans la dite déclaration, seront invariablement maintenus.

[Italie]

Article 85.

Les limites des États de S. M. le Roi de Sardaigne, seront :

Du côté de la France, telles qu'elles existaient au 1er janvier 1792, à l'exception des changements portés par le Traité de Paris du 30 mai 1814.

Du côté de la Confédération Helvétique, telles qu'elles existaient au 1er janvier 1792, à l'exception du changement opéré par la cession faite en faveur du Canton de Genève, telle que cette cession se trouve spécifiée dans l'article 80 du présent acte.

Du côté des États de S. M. l'Empereur d'Autriche, telles qu'elles existaient au 1er janvier 1792 ; et la Convention conclue entre LL. MM. l'Impératrice Marie-Thérèse et le Roi de Sardaigne, le 4 octobre 1751, sera maintenue, de part et d'autre, dans toutes ses stipulations.

Du côté des États de Parme et de Plaisance, la limite, pour ce qui concerne les anciens États de S. M. le Roi de Sardaigne, continuera a être telle qu'elle existait au 1er Janvier 1792.

Les limites des ci-devant États de Gênes et des pays nommés fiefs impériaux, réunis aux États de S. M. le Roi de Sardaigne d'après les articles suivants, seront les mêmes qui, le 1er Janvier 1792, séparaient ces pays des États de Parme et de Plaisance, et de ceux de Toscane et de Massa.

L'ile de Capraja ayant appartenu à l'ancienne République de Gênes, est comprise dans la cession des États de Gênes à S. M. le Roi de Sardaigne.

Article 86.

Les États qui ont composé la ci-devant République de Gênes, sont réunis à perpétuité aux États de S. M. le Roi de Sardaigne, pour être, comme ceux-ci, possédés par elle en toute souveraineté, propriété et hérédité, de mâle en mâle, par ordre de primogéniture dans les deux branches de sa maison, savoir : la branche Royale et la branche de Savoie-Carignan.

Article 87.

S. M. le Roi de Sardaigne joindra. à ses titres actuels celui de Duc de Gênes.

Article 88.

Les Génois jouiront de tous les droits et privilèges spécifiés dans l'acte intitulé : Conditions qui doivent servir de bases à la réunion des États de Gênes à ceux de S. M. Sarde ; et le dit acte, tel qu'il se trouve annexé à ce Traité général, sera considéré comme partie intégrante de celui-ci, et aura la même force et valeur que s'il était textuellement inséré dans l'article présent.

Article 89.

Les pays nommés fiefs impériaux, qui avaient été réunis à la ci-devant République Ligurienne, sont réunis définitivement aux États de S. M. le Roi de Sardaigne, de la même manière que le reste des États de Gênes ; et les habitants de ces pays jouiront des mêmes droits et privilèges que ceux des États de Gênes désignés dans l'article précédent.

Article 90.

La faculté que les Puissances signataires du Traité de Paris du 30 mai 1814 se sont réservée par l'article 3 dudit Traité, de fortifier tel point de leurs États qu'elles jugeront convenable à leur sûreté, est également réservée sans restriction à S. M. le Roi de Sardaigne.

Article 91.

S. M. le Roi de Sardaigne cède au Canton de Genève les districts de la Savoie désignés dans l'article 80 ci-dessus, et aux conditions spécifiées dans l'acte intitulé : Cession par S. M. le Roi de Sardaigne au Canton de Genève. Cet acte sera considéré comme partie intégrante du présent Traité général, auquel il est annexé, et aura la même force et valeur que s'il était textuellement dans l'article présent.

Article 92.

Les provinces du Chablais et du Faucigny, et tout le territoire de Savoie au nord d'Ugine, appartenant à S. M. le Roi de Sardaigne, feront partie de la neutralité de la Suisse, telle qu'elle est reconnue et garantie par les Puissances.

En conséquence, toutes les fois que les Puissances voisines de la Suisse se trouveront en état d'hostilité ouverte ou imminente, les troupes de S. M. le Roi de Sardaigne qui pourraient se trouver dans ces Provinces, se retireront, et pourront à cet effet passer par le Vallais, si cela devient nécessaire ; aucunes autres troupes armées d'aucune autre Puissance ne pourront traverser ni stationner dans les provinces et territoires susdits, sauf celles que la Confédération Suisse jugerait à propos d'y placer ; bien entendu que cet état de choses ne gêne en rien l'administration de ces pays, où les agents civils de S. M. le Roi de Sardaigne pourront aussi employer la garde municipale pour le maintien du bon ordre.

Article 93.

Par suite des renonciations stipulées dans le Traité de Paris du 30 mai 1814, les Puissances signataires du présent Traité reconnaissent S. M. l'Empereur d'Autriche, ses héritiers et successeurs, comme souverain légitime des provinces et territoires qui avaient été cédés, soit en tout, soit en partie, par les Traités de Campo-Formio de 1797, de Lunéville de 1801, de Presbourg de 1805, par la Convention additionnelle de Fontainebleau de 1807, et par le Traité de Vienne de 1809, et dans la possession desquels provinces et territoires S. M. I. et R. A. est rentrée par suite de la dernière guerre, tels que 1'lstrie tant Autrichienne que ci-devant Vénitienne, la Dalmatie, les îles ci-devant Vénitiennes de l'Adriatique, les bouches du Cattaro, la ville de Venise, les lagunes, de même que les autres provinces et districts de la terre ferme des États ci-devant vénitiens sur la rive gauche de l'Adige, les Duchés de Milan et de Mantoue, les Principautés de Brixen et de Trente, le Comté de Tyrol, le Vorarlberg, le Frioul Autrichien, le Frioul ci-devant Vénitien, le territoire de Montefalcone, le gouvernement et la ville de Trieste, la Carniole, la Haute-Carinthie, la Croatie à la droite de la Save, Fiume et le littoral hongrois, et le district de Castua.

Article 94.

S. M. 1. et R. A. réunira à sa monarchie, pour être possédés par elle et ses successeurs en toute propriété et souveraineté :

1° Outre la partie de la terre ferme des États Vénitiens dont il a été fait mention dans l'article précédent, les autres parties desdits États, ainsi que tout autre territoire qui se trouve situé entre le Tessin, le Pô, et la mer Adriatique ;
2° Les vallées de la Valteline, de Bormio et de Chiavenna ;
3° Les territoires ayant formé la ci-devant république de Raguse.

Article 95.

En conséquence des stipulations arrêtées dans les Articles précédents, les frontières des États de S. M. I. et R. A. en Italie seront :

1° Du côté des États de S. M. le Roi de Sardaigne, telles qu'elles étaient au 1er janvier 1792 ;
2° Du côté des États de Parme, Plaisance et Guastalla, le cours du Pô, la ligne de démarcation. suivant le thalweg de ce fleuve ;
3° Du côté des États de Modène, les mêmes qu'elles étaient au 1er janvier 1792 ;
4° Du côté des États du Pape, le cours du Pô jusqu'à l'embouchure du Goro ;
5° Du côté de la Suisse, l'ancienne frontière de la Lombardie, et celle qui sépare les vallées de la Valteline, de Bormio et Chiavenna, des cantons des Grisons et du Tessin. Là où le thalweg du Pô constituera la limite, il est statué que les changements que subira par la suite le cours de ce fleuve, n'auront à l'avenir aucun effet sur la propriété des îles qui s'y trouvent.

Article 96.

Les principes généraux adoptés par le Congrès de Vienne pour la navigation des fleuves, seront appliqués à celle du Pô. Des commissaires seront nommés par les États riverains, au plus tard dans le délai de trois mois après la fin du Congrès, pour régler tout ce qui a rapport à l'exécution du présent article.

Article 97.

Comme il est indispensable de conserver à l'établissement connu sous le nom de Mont-Napoléon à Milan, les moyens de remplir ses obligations envers ses créanciers, il est convenu que les biens-fonds et autres immeubles de cet établissement situés dans des pays qui, ayant fait partie du ci-devant Royaume d'Italie, ont passé depuis sous la domination de différents Princes d'Italie, de même que les capitaux appartenant audit établissement et placés dans ces différents pays, resteront affectés à la même destination.

Les redevances du Mont-Napoléon non fondées et non liquidées, telles que celles dérivant de l'arriéré de ses charges ou de tout autre accroissement du passif de cet établissement, seront réparties sur les territoires dont se composait le ci-devant Royaume d'Italie ; et cette répartition sera assise sur les bases réunies de la population et du revenu. Les Souverains desdits pays nommeront, dans le terme de trois mois à dater de la fin du Congrès, des commissaires pour s'entendre avec les commissaires autrichiens sur ce qui a rapport à cet objet. Cette Commission se réunira à Milan.

Article 98.

S. A. R. l'Archiduc François d'Este, ses héritiers et successeurs, posséderont en toute propriété et souveraineté les Duchés de Modène, de Reggio et de Mirandole, dans la même étendue qu'ils étaient à l'époque du Traité de Campo-Formio. S. A. R. l'Archiduchesse Marie-Béatrix d'Este, ses héritiers et successeurs, posséderont en toute souveraineté et propriété le Duché de Massa et la Principauté de Carrare, ainsi que les fiefs impériaux dans la Lunigiana. Ces derniers pourront servir à des échanges ou autres arrangements de gré à gré avec S. A. I, le Grand-Duc de Toscane, selon la convenance réciproque. Les droits de succession et réversion établis dans les branches des archiducs d'Autriche, relativement aux Duchés de Modène, de Reggio et Mirandole, ainsi que des Principautés de Massa et Carrera, sont conservés.

Article 99.

S. M. l'Impératrice Marie-Louise possédera en toute propriété et souveraineté les Duchés de Parme, de Plaisance et de Guastalla, à l'exception des districts enclavés dans les États de S. M. I. et R. A. sur la rive gauche du Pô. La réversibilité de ces pays sera déterminée de commun accord entre les Cours d'Autriche, de Russie, de France, d'Espagne, d'Angleterre et de Prusse, toutefois ayant égard aux droits de réversion de la Maison d'Autriche et de S. M. le Roi de Sardaigne sur lesdits pays.

Article 100.

S. A. I. et R. l'archiduc Ferdinand d'Autriche est rétabli, tant pour lui que pour ses héritiers et successeurs, dans tous les droits de souveraineté et propriété sur le Grand-Duché de Toscane et ses dépendances, ainsi que S. A. I. les a possédés antérieurement au Traité de Lunéville.

Les stipulations de l'article 2, du Traité de Vienne du 3 octobre 1735, entre l'Empereur Charles VI et le Roi de France, auxquelles accèdent les autres Puissances, sont pleinement rétablies en faveur de S. A. I. et ses descendants, ainsi que les garanties résultant de ces stipulations.

Il sera en outre réuni audit Grand-Duché, pour être possédés en toute propriété et souveraineté par S. A. I. et R. le Grand-Duc Ferdinand et ses héritiers et descendants :

1° L'État des Présides ;
2° La partie de l'île d'Elbe et de ses appartenances qui était sous la suzeraineté de S. M. le Roi des Deux Siciles avant l'année 1801 ;
3° La suzeraineté et souveraineté de la Principauté de Piombino et ses dépendances. Le Prince Ludovisi Buoncompagni conservera, pour lui et ses successeurs légitimes, toutes les propriétés; que sa famille possédait dans la Principauté de Piombino, dans l'île d'Elbe et ses dépendances, avant l'occupation de ces pays par les troupes françaises en 1799, y compris les mines, usines et salines. Le prince Ludovisi conservera également le droit de pêche, et jouira d'une exemption de droits parfaite, tant pour l'exportation des produits de ses mines, usines, salines et domaines que pour l'importation des bois et autres objets nécessaires pour l'exploitation on des mines. Il sera de plus indemnisé par S. A. I. le Grand-Duc de Toscane, de tous les revenus que sa famille tirait des droits régaliens avant l'année 1801. En cas qu'il survint des difficultés dans l'évaluation de cette indemnité, les parties intéressées s'en rapporteront à la décision des Cours de Vienne et de Sardaigne.
4° Les ci-devant fiefs impériaux de Vernio, Montauto et Monte Santa-Maria, enclavés dans les États Toscans.

Article 101.

La Principauté de Lucques sera possédée en toute souveraineté par S M. l'Infante Marie-Louise et ses descendants en ligne directe et masculine. Cette Principauté est érigée en Duché, et conservera une forme de gouvernement basée sur les principes de celle qu'elle avait reçue en 1805. Il sera ajouté aux revenus de la Principauté de Lucques, une rente de cinq cent mille francs, que S. M. l'Empereur d'Autriche, et S. A. I. le Grand-Duc de Toscane s'engagent à payer régulièrement, aussi longtemps que les circonstances ne permettront pas de procurer à S. M. l'Infante Marie Louise et à son fils et ses descendants, un autre établissement. Cette rente sera spécialement hypothéquée sur les seigneuries, en Bohème, connues sous le nom de Bavaro-.Palatines qui, dans le cas de réversion du Duché de Lucques au Grand-Duché de Toscane, seront affranchies de cette charge, et rentreront dans le domaine particulier de S. M. Impériale et Royale Apostolique.

Article 102.

Le Duché de Lucques sera réversible au Grand-Duc de Toscane, soit dans le cas qu'il devînt vacant par la mort de S. M. l'Infante Marie-Louise, ou de son fils don Carlos et de leurs descendants mâles et directs, soit dans celui que l'Infante Marie-Louise ou ses héritiers directs obtinssent un autre établissement ou succédassent à une autre branche de leur dynastie.

Toutefois, le cas de réversion échéant, le Grand-Duc de Toscane s'engage à céder, dès qu'il entrera en possession de la Principauté de Lucques, au Duc de Modène, les territoires suivants : 1° les districts toscans de Fivizano, Pletra-Santa et Barga ; et
2° les districts Lucquois de Castiglione et Gallicano, enclavés dans les États de Modéne, ainsi que ceux de Minucciano et Monte-Ignose, contigus au pays de Massa.

Article 103.

Les Marelles, avec Camerino et leurs dépendances, ainsi que le Duché de Bénévent et la Principauté de Ponte-Corvo, sont rendus au Saint-Siége. Le Saint-Siége rentrera en possession des légations de Ravenne, de Bologne et de Ferrare, à l'exception de la partie du Ferrarois, située sur la rive gauche du Pô. S. M.I. et R.A. et ses successeurs auront droit de garnison dans les places de Ferrare et Commacho. Les habitants des pays qui rentrent sous la domination du Saint-Siége par suite des stipulations du Congrès, jouiront des effets de l'article 16 du Traité de Paris du 30 mai 1814.

Toutes les acquisitions faites par les particuliers en vertu d'un titre reconnu légal par les lois actuellement existantes, sont maintenues, et les dispositions propres à garantir la dette publique et le payement des pensions seront fixées par une convention particulière entre la Cour de Rome et celle de Vienne.

Article 104.

S. M. le Roi Ferdinand IV est rétabli, tant pour lui que pour ses héritiers et successeurs, sur le trône de Naples, et reconnu par les Puissances comme Roi du Royaume des Deux-Siciles.
 

[Portugal]

Article 105.

Les Puissances, reconnaissant la justice des réclamations formées par S. A. R. le Prince-Régent de Portugal et du Brésil, sur la ville d'Olivenza et les autres territoires cédés à l'Espagne par le Traité de Badajoz de 1801, et envisageant la restitution de ces objets comme une des mesures propres à assurer entre les deux Royaumes de la péninsule cette bonne harmonie complète et stable dont la conservation dans toutes les parties de l'Europe a été le but constant de leurs arrangements, s'engagent formellement à employer dans les voles de conciliation, tous leurs efforts les plus efficaces, afin que la rétrocession desdits territoires en faveur du Portugal, soit effectuée ; et les Puissances reconnaissent, autant qu'il dépend de chacune d'elles, que cet arrangement doit avoir lieu au plus tôt.

Article 106.

Afin de lever les difficultés qui se sont opposées, de la part de S. A. R. le Prince-Régent du Royaume de Portugal et celui du Brésil, à la ratification du Traité signé, le 30 mai 1814, entre le Portugal et la France, il est arrêté que la stipulation contenue dans l'article 10 dudit traité, et toutes celles qui pourraient y avoir rapport, resteront sans effet, et qu'il y sera substitué, d'accord avec toutes les Puissances, les dispositions énoncées dans l'article nouveau, lesquelles seront seules considérées comme valables. Au moyen de cette substitution, toutes les autres clauses du susdit Traité de Paris seront maintenues et regardées comme mutuellement obligatoires pour les deux Cours.

Article 107.

S. A. R. le Prince-Régent du Royaume de Portugal et de celui du Brésil, pour manifester d'une manière incontestable sa considération particulière pour S. M. Très-Chrétienne s'engage à restituer à Sadite Majesté la Guyane française jusqu'à la rivière d'Oyapock, dont l'embouchure est située entre le quatrième et le cinquième degré de latitude septentrionale, limite que le Portugal a toujours considérée comme celle qui avait été fixée par le Traité d'Utrecht. L'époque de la remise de cette colonie à S. M. Très-Chrétienne sera déterminée, dès que les circonstances le permettront, par une convention particulière entre les deux Cours ; et l'on procédera à l'amiable, aussitôt que faire se pourra, à la fixation définitive des limites des Guyanes portugaise et française, conformément au sens précis de l'article 7 du Traité d'Utrecht.

[Liberté de navigation fluviale]

Article 108.

Les Puissances dont les États sont séparés ou traversés par une même rivière navigable, s'engagent à régler d'un commun accord tout ce qui a rapport à la navigation de cette rivière. Elles nommeront, à cet effet, des commissaires qui se réuniront au plus tard six mois après la fin du Congrès, et qui prendront pour bases de leurs travaux les principes établis dans les articles suivants.

Article 109.

La navigation dans tout le cours des rivières Indiquées dans l'article précédent, du point où chacune d'elles devient navigable jusqu'à son embouchure, sera entièrement libre, et ne pourra, sous le rapport du commerce, être interdite à personne ; bien entendu que l'on se conformera aux règlements relatifs à la police de cette navigation, lesquels seront conçus d'une manière uniforme pour tous, et aussi favorables que possible au commerce de toutes les nations.

Article 110.

Le système qui sera établi, tant pour la perception des droits que pour le maintien de la police, sera, autant que faire se pourra, le même pour tout le cours de la rivière, et s'étendra aussi, à moins que des circonstances particulières ne s'y opposent, sur ceux de ses embranchements et confluents qui, dans leur cours navigable, séparent ou traversent différents États.

Article 111.

Les droits sur la navigation seront fixés d'une manière uniforme, invariable, et assez indépendante de la qualité différente des marchandises pour ne pas rendre nécessaire un examen détaillé de la cargaison, autrement que pour cause de fraude et de contravention. La quotité de ces droits qui, en aucun cas, ne pourront excéder ceux existant actuellement, sera déterminée d'après les circonstances locales, qui ne permettent guère d'établir une règle générale à cet égard. On partira, néanmoins, en dressant le tarif, du point de vue d'encourager le commerce en facilitant la navigation, et l'octroi établi sur le Rhin pourra servir d'une norme approximative. Le tarif, une fois réglé, il ne pourra plus être augmenté que par un arrangement commun des États riverains, ni la navigation grevée d'autres droits quelconques outre ceux fixés dans le règlement.

Article 112.

Les bureaux de perception, dont on réduira, autant que possible, le nombre, seront fixés par le règlement, et il ne pourra s'y faire ensuite aucun changement que d'un commun accord, à moins qu'un des États riverains ne voulût diminuer le nombre de ceux qui lui appartiennent exclusivement.

Article 113.

Chaque État riverain se chargera de l'entretien dès chemins de halage qui passent par son territoire, et des travaux nécessaires pour la même étendue dans le lit de la rivière, pour ne faire éprouver aucun obstacle à la navigation. Le règlement futur fixera la manière dont les États riverains devront concourir à ces derniers travaux, dans le cas où les deux rives appartiennent à différents gouvernements.

Article 114.

On n'établira nulle part des droits d'étape, d'échelle ou de relâche forcée. Quant à ceux qui existent déjà, ils ne seront conservés qu'entant que les États riverains, sans avoir égard à l'intérêt local de l'endroit ou du pays où ils sont établis, les trouveraient nécessaires ou utiles à la navigation et au commerce en général.

Article 115.

Les douanes des États riverains n'auront rien de commun avec les droits de navigation. On empêchera, par des dispositions réglementaires, que l'exercice des fonctions des douaniers ne mette pas d'entraves à la navigation ; mais on surveillera par une police exacte sur la rive toute tentative des habitants de faire la contrebande à l'aide des bateliers.

Article 116.

Tout ce qui est indiqué dans les articles précédents sera déterminé par un règlement commun qui renfermera également tout ce qui aurait besoin d'être fixé ultérieurement. Le règlement une fois arrêté ne pourra être changé que du consentement de tous les États riverains, et ils auront soin de pourvoir à son exécution d'une manière convenable et adaptée aux circonstances et aux localités.

Article 117.

Les règlements particuliers relatifs à la navigation du Rhin, du Necker, du Mein, de la Moselle, de la Meuse et de l'Escaut, tels qu'ils se trouvent joints au présent acte, auront la même force et valeur que s'ils avaient été textuellement insérés.

[Dispositions finales]

Article 118.

Les Traités, Conventions, Déclarations, Règlements et autres actes particuliers qui se trouvent annexés au présent acte, et nommément:

1° Le Traité entre la Russie et l'Autriche, du 21 avril /3 mai 1815.
2° Le Traité entre la Russie et la Prusse, du 21 avril /3 mai 1815.
3° Le Traité additionnel relatif à Cracovie, entre l'Autriche, la Prusse et la Russie, du 3 mai /21 avril 1815.
4° Le Traité entre la Prusse et la Saxe, du 18 mai 1815.
5° La Déclaration du Roi de Saxe sur les droits de la Maison de Schoenbourg, du 18 mai 1815.
6° Le Traité entre la Prusse et le Hanovre, du 29 mai 1815.
7° La Convention entre la Prusse et le Grand-Duc de Saxe-Weimar, du 1er juin 1815.
8° La Convention entre la Prusse et les Duc et Prince de Nassau, du 31 mai 1815.
9° L'Acte sur la Constitution Fédérative de l'Allemagne, du 8 juin 1815.
10° Le Traité entre le Roi des Pays-Bas et la Prusse, l'Angleterre, l'Autriche et la Russie, du 31 mai 1815.
11° La Déclaration des Puissances sur les affaires de la Confédération helvétique, du 20 mars, et l'acte d'accession de la Diète, du 27 mai 1815.
12° Le Protocole du 29 mars 1815 sur les cessions faites par le Roi de Sardaigne au canton de Genève.
13° Le Traité entre le Roi de Sardaigne, l'Autriche, l'Angleterre, la Russie, la Prusse et la France, du 20 mai 1815.
14° L'Acte intitulé : Conditions qui doivent servir de bases à la réunion des États de Gênes et à ceux de S. M. Sarde.
15° La Déclaration des Puissances sur l'abolition de la traite des nègres, du 8 février 1815.
16° Les Règlements pour la libre navigation des rivières.
17° Les Règlements sur le rang entre les agents diplomatiques,

sont considérés comme parties intégrantes des arrangements du Congrès, et auront partout la même force et valeur que s'ils étaient insérés mot à mot dans le Traité général.

Article 119.

Toutes les Puissances qui ont été réunies au Congrès, ainsi que les princes et les villes libres qui ont concouru aux arrangements consignés ou aux actes confirmés dans ce Traité général, sont invités à y accéder.

Article 120

La langue française ayant été exclusivement employée dans toutes les copies du présent Traité, il est reconnu par les Puissances qui ont concouru à cet acte, que l'emploi de cette langue ne tirera point à conséquence pour l'avenir ; de sorte que chaque Puissance se réserve d'adopter, dans les négociations et conventions futures, la langue dont elle s'est servie jusqu'ici dans ses relations diplomatiques, sans que le Traité actuel puisse être cité comme exemple contraire aux usages établis.

Article 121.

Le présent Traité sera ratifié et les ratifications seront échangées dans l'espace de six mois, par la Cour de Portugal dans un an ou plus tôt si faire se peut. Il sera déposé à Vienne, aux archives de Cour et d'État de S. M. Impériale et Royale Apostolique, un exemplaire de ce Traité général, pour servir dans le cas où l'une ou l'autre des Cours de l'Europe pourrait juger convenable de consulter le texte original de cette pièce.
En foi de quoi, les Plénipotentiaires respectifs ont signé ce Traité et y ont apposé le cachet de leurs armes.

Fait à Vienne le 9 Juin de l'an de grâce 1815.

(Autriche : Prince DE METTERNICH. Baron DE WESSENDERG.
(Espagne)
(France) : Prince DE TALLEYRAND. DUC DE DALBERG. Comte ALEXIS DE NOAILLES.
(Grande-Bretagne) : CLANCARTY. CATHCART. STEWART, lieutenant-général. (Portugal) : Comte DE PALMELLA. ANTONIO DA SALDANHA DA GAMA. D. JOAQUIN LORO DA SILVEIRA.
(Prusse) : Prince DE HARDENBEG. Baron DE HUMBOLDT.
(Russie) Prince DE RASOUMOFFSKY. Comte DE STACKELBERG. Comte DE NESSELRODE.
(Suède) . Comte CHARLES-AXEL DE LOEWENHIELM, sauf la réservation faite aux articles 101, 109, et 104 du traité.


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Jean-Pierre Maury