Traité d'alliance signé à Vienne, le 7 octobre 1879, entre l'Allemagne et l'Autriche-Hongrie.
Renouvelé le 22 mars 1883 et le 1er juin 1902, puis le 5 décembre 1912.
À la fin du XIXe siècle, à la suite de la crise amorcée par les troubles en Herzégovine en 1875, continuée par le traité de San Stefano, mais circonscrite et achevée par le Congrès de Berlin, en 1878, les Puissances centrales forment un réseau d'alliances pour « assurer le maintien de l'ordre social et politique dans leurs États respectifs ».
L'Allemagne et l'Autriche-Hongrie concluent d'abord, le 7 octobre 1879, une solide alliance, la Duplice, dirigée contre la Russie et la France, qui les lie jusqu'en 1914. Les deux pays forment ensuite la Triple Alliance ou Triplice avec l'Italie, le 20 mai 1882, alors que l'Italie craint un conflit avec la France en Afrique du Nord. Cet accord conclu initialement pour cinq ans est confirmé en 1887, avec un traité italo-autrichien relatif à une action concertée dans les Balkans et la mer Égée, et un traité italo-allemand dirigé contre la France. Il est renouvelé et précisé le 6 mai 1891, puis, dans les mêmes termes, le 28 juin 1902 et enfin le 5 décembre 1912. Enfin, une convention maritime (23 juin et 2 août 1913) prévoit les moyens nécessaires pour des opérations communes des trois Puissances en Méditerranée en 1914.
Des accords avec la Roumanie, le 30 octobre 1883, renouvelés le 13/25 juillet 1892, le 30 septembre 1896, le 17 avril 1902 et le 5 février 1913, permettent de former une Quadruplice. L'Alliance est aussi étendue à la Serbie le 16/28 juin 1881, confirmée le 7/19 mars 1889, prévoyant l'extension du territoire serbe en Macédoine ; et à l'Espagne, en ce qui concerne les questions nord-africaines, le 4 mai 1887.
Cependant, par le Traité des 3-Empereurs, le 18 juin 1881, elles tentent de concilier les ambitions russes et autrichiennes dans les Balkans. Mais en 1887, tandis que l'Autriche s'entend avec l'Italie et la Grande-Bretagne (mars et décembre 1887) pour l'indépendance et l'intégrité de l'Empire ottoman et le statu quo en Méditerranée, le traité de réassurance ne lie que l'Allemagne et la Russie. Les ambitions opposées de l'Autriche, de la Russie et bientôt de l'Italie dans les Balkans ruinent ainsi l'édifice de la diplomatie allemande : Après la démission de Bismarck en 1890, le nouvel empereur, Guillaume II, choisit définitivement l'Autriche et tente de se rapprocher de la Grande-Bretagne. La Russie, isolée, se tourne alors vers la France ; en Serbie, à la suite de la révolution de 1903, le nouveau gouvernement recherche la protection de la Russie et de la France ; et l'Italie comme la Roumanie refusent d'entrer en guerre en 1914, puis s'engagent du côté de l'Entente, l'Italie, le 24 mai 1915, et la Roumanie le 27 août 1916.
Sources : Nouveau recueil général de traités, continuation du Grand Recueil de Martens, tome X, Leipzig, 1920, p. 3.
Traité d'alliance entre l'Allemagne et l'Autriche-Hongrie.
(Vienne, 7 octobre 1879)
Considérant que LL. MM. l'empereur d'Autriche et roi de Hongrie et l'empereur allemand et roi de Prusse doivent estimer comme leur devoir inéluctable de souverains de veiller en toutes circonstances à la sécurité de leurs empires et à la tranquillité de leurs peuples ;
Considérant que les deux monarques seront à même, par une alliance solide des deux empires, dans le genre de celle qui existait précédemment, d'accomplir plus facilement et plus efficacement ce devoir ;
Considérant enfin qu'un accord intime entre l'Autriche- Hongrie et l'Allemagne ne peut menacer personne, mais est plutôt de nature à consolider la paix européenne créée par les stipulations du Traité de Berlin ;
LL. MM. l'empereur d'Autriche et roi de Hongrie et l'empereur allemand, se promettant solennellement de ne jamais donner une tendance agressive quelconque à leur accord purement défensif, ont résolu de conclure une alliance de paix et de protection réciproque.
Article premier.
Si, contrairement à ce qu'il y a lieu d'espérer et contrairement au sincère désir des deux hautes parties contractantes, l'un des deux empires venait à être attaqué par la Russie, les deux hautes parties contractantes sont tenues de se prêter réciproquement secours avec la totalité de la puissance militaire de leurs empires et, par suite, de ne conclure la paix que conjointement et d'accord.
Article 2.
Si l'une des deux hautes parties contractantes venait à être attaquée par une autre puissance, l'autre haute partie contractante s'engage par le présent acte, non seulement à ne pas soutenir l'agresseur contre son haut allié, mais, tout au moins, à observer une neutralité bienveillante à l'égard de la partie contractante. Si, toutefois, dans le cas précité, la puissance attaquante était soutenue par la Russie, soit sous forme de coopération active, soit par des mesures militaires qui menaceraient la puissance attaquée, alors l'obligation d'assistance réciproque, avec toutes les forces militaires, obligation stipulée dans l'article premier de ce traité, entrerait immédiatement en vigueur, et les opérations de guerre des deux hautes parties contractantes seraient aussi dans cette circonstance conduites conjointement jusqu'à la conclusion de la paix.
Article 3.
La durée de ce traité est provisoirement fixée à cinq ans à partir de la date de l'échange des ratifications. Un an avant son expiration, les deux Hautes Parties contractantes se concerteront sur la question de savoir si les conditions servant de base au traité continuent de prévaloir, et s'il y a lieu pour les pays signataires d'ouvrir des négociations pour le prolonger ou en modifier certaines modalités. Si l'invitation à l'ouverture de ces négociations est effectuée par les deux parties au cours du premier mois de la dernière année du traité, celui-ci est renouvelé pour une nouvelle période de trois ans.Article 4.
Ce traité, conformément son caractère pacifique et pour éviter toute fausse interprétation, sera tenu secret par les deux Hautes Parties contractantes. Il ne pourrait être communiqué à une troisième puissance qu'à la connaissance des deux parties et après entente spéciale entre elles.
Les deux Hautes Parties contractantes ont l'espoir, conformément aux sentiments exprimés par l'empereur Alexandre à la réunion d'Alexandrowo, que l'armement de la Russie ne sera en réalité aucunement menaçant pour elles, c'est pourquoi il n'y a aucune raison de le communiquer maintenant ; mais si, contre toute attente cet espoir s'avérait vain, les deux Hautes Parties contractantes pourraient considérer comme un devoir de loyauté envers l'empereur Alexandre de lui indiquer confidentiellement qu'ils envisageraient une attaque contre l'une d'elles comme étant dirigé contre les deux.
Article 5.
Le présent traité entrera en vigueur après approbation par les deux souverains et il devra être ratifié dans un délai de quatorze jours.
En foi de quoi les plénipotentiaires ont signés de leur main ce traité et y ont apposé leurs sceaux.
Fait à Vienne, 7 octobre 1879.
Andrassy
Prince Henri VII de Reuss.
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