Grande Guerre.


Traité de paix entre la Lituanie et la Russie.

Signé à Moscou le 12 juillet 1920 ;
Ratifications échangées à Moscou le 14 octobre 1920.

    La Grande Guerre, ouverte par le bombardement de Belgrade le 28 juillet 1914, un mois après l'attentat de Sarajevo, s'achève en 1918 par les armistices de Salonique avec la Bulgarie (29 septembre), de Moudros avec la Turquie (30 octobre), de Villa Giusti avec l'Autriche-Hongrie (3 novembre), de Rethondes avec l'Allemagne (11 novembre) et avec la convention de Belgrade avec la Hongrie (13 novembre).
    Les principaux traités de paix, qui ont mis fin à la Grande Guerre sont :
- le traité de Versailles, signé le 28 juin 1919 entre  les Puissances alliées et associées et l'Allemagne ;
- le traité de Saint-Germain-en-Laye, signé le 10 septembre 1919 entre les Puissances alliées et associées et l'Autriche ;
- le traité de Neuilly-sur-Seine, signé le 27 novembre 1919 entre les Puissances alliées et associées et la Bulgarie ;
- le traité de Trianon, signé le 4 juin 1920 entre les Puissances alliées et associées et la Hongrie ;

- le traité de Sèvres, signé le 10 août 1920 entre les Puissances alliées et associées et la Turquie, non ratifié et remplacé par le traité de Lausanne, signé le 24 juillet 1923.
    Des traités complémentaires sont signés par les Principales Puissances alliées avec les autres Puissances alliées, bénéficiaires de territoires transférés : Pologne, Tchécoslovaquie, Roumanie, État serbe-croate-slovène, Grèce, afin de confirmer la reconnaissance de l'indépendance du pays, de garantir les droits des minorités et d'assurer l'ouverture du pays au commerce international.

    Sur le front de l'Est européen, la Révolution russe permet à la guerre de s'interrompre plus tôt qu'à l'Ouest. L'Allemagne et ses alliés signent les traités de Brest-Litovsk avec l'Ukraine le 9 février 1918, et avec la Russie soviétique le 3 mars 1918 ; avec la Finlande, qui vient de se séparer de la Russie, le 7 mars 1918 ; puis, le traité de Bucarest avec la Roumanie, isolée, le 7 mai 1918. Mais la guerre se poursuit en Russie même avec les forces qui contestent le pouvoir soviétique, tandis que différents groupes nationaux proclament leur indépendance.
    La nouvelle République fédérative des soviets de Russie reconnaît ainsi l'indépendance de plusieurs nouveaux États et signe avec eux des traités de paix  : avec l'éphémère République socialiste finlandaise des travailleurs dès le 10 mars 1918 ; avec l'Estonie, le 2 février 1920 ; la Lituanie, le 12 juillet ; la Lettonie, le 11 août ; la Finlande, le 14 octobre 1920 ; et enfin la Pologne, le 18 mars 1921. Mais, elle parvient à établir des gouvernements soviétiques en Ukraine, en Biélorussie, en Géorgie, en Azerbaïdjan et en Arménie, et elle refuse de reconnaître le rattachement de la Bessarabie à la Roumanie.

    En 1917, sous la protection des forces allemandes victorieuses, un Conseil national est formé qui proclame l'indépendance le 16 février 1918 et offre la couronne à un prince allemand. Le 2 novembre 1918, la défaite allemande entraîne la proclamation de la République, mais la Lituanie entre successivement en conflit avec la Russie soviétique, avec des forces russes Blanches, puis avec la Pologne. Une Assemblée constituante, élue en avril 1920, proclame le rétablissement de l'indépendance le 15 mai 1920 et fait la paix avec la Russie soviétique, pour pouvoir lutter contre la Pologne, à propos notamment de Vilnius.

Sources : Société des Nations, Recueil des traités, vol. 3, n° 94, 1921, p. 105 (textes russe, lituanien, anglais et français). On écrivait bien à l'époque « Lithuanie ».



La Russie, d'une part, et La Lithuanie, de l'autre, animées de la ferme volonté de poser les fondements de relations futures, qui assureront aux deux États et à leurs Peuples tous les avantages de la paix et d'un bon voisinage; ont résolu d'entamer des pourparlers pour arriver à ce but ; et ont nommé à cet effet les Plénipotentiaires suivants :

Le Gouvernement de la République Socialiste Fédérative des Soviets de Russie :
M. Adolphe Abramovitch Joffe,
M. Julien Josephovitch Marchlevski,
M. Léonide Léonidovitch Obolenski ;
et
Le Gouvernement de la République Démocratique de Lithuanie :
M. Thomas Narusevicius,
M. Pierre Klimas,
M. Simon Rozenbaum,
M. Joseph Vailokaitis,
M. Vitautas Rackauskas.
Les Plénipotentiaires désignés, après avoir échangé leurs pleins pouvoirs, qui ont été reconnus en bonne et due forme, ont arrêté ce qui suit :

Article premier.

Se fondant sur la déclaration faite par la République Socialiste Fédérative des Soviets de Russie, que tous les peuples ont le droit de libre détermination, droit qui va jusqu'à leur séparation complète de l'État, dont ils faisaient partie, la Russie reconnaît sans arrière pensée l'indépendance et la souveraineté de l'État lithuanien, avec toutes les conséquences juridiques découlant de cette reconnaissance, et elle renonce volontairement, et à tout jamais, à tous ses droits souverains sur la nation lithuanienne et sur son territoire.

Le fait que la Lithuanie dépendait anciennement de la Russie n'entraîne pour la nation lithuanienne et son territoire aucune obligation envers ce pays.

Article 2.

atteint l'ouest du village de Pchegroda ; de là elle atteint la source de la d'environ une verste dudit village ; à ce point la frontière tourne vers le nord, passe à l'ouest du village de Koulefchtchisna et entre les villages de Dreni et de Jerlaki, de là elle se dirige vers le nord-ouest, passe à l'est du village de Garavina et à l'ouest du village d'Adamovitchi ; puis à l'est du village de Myslevitchi et du village de Boukhofchtchina, dans la direction de la station de Molodetchno ; elle coupe la voie ferrée de manière que la ligne Vilna-Molodetchno-Lida reste en territoire lithuanien et la ligne Vilieika-Molodetchno- Minsk en territoire russe. De là elle suit le cours de la rivière Boukhofka jusqu'à son confluent avec la rivière Oucha qu'elle suit jusqu'au village d'Oucha. La frontière tourne alors (Menjikofchtchisna) ; ensuite elle oblique vers le nord-est, passe l'ouest du bourg de Kholkhlo et à une verste à l'ouest du bourg de Soukhonarofchisna. Là la frontière tourne vers le nord-est, passe environ à une verste à l'ouest du village de Berezoftsy ; ensuite elle passe à l'ouest du village de Vaskoftsy, à l'ouest du village de Lalkovchtchysna à la distance parallèlement au lac Oziraitsy, passe à l'ouest de Répichtché, à l'ouest de la frontière entre la Russie et la Lithuanie part du confluent de la rivière Gorodnianka avec la rivière Bobr à deux verstes à l'est du village de Tcharnylas ; elle suit la rivière Gorodnianka entre les villages de Khmelnik et de Khmelofka, et les villages de Lefka et de Olcha ; de là, par terre ferme, la frontière se dirige vers le sud du village de Vecelovo ; elle suit un affluent de la rivière Kamienna, jusqu'au confluent de ce cours d'eau avec la Kamienna à la distance d'une verste environ du village de Vecelovo. Elle remonte alors le cours de la petite rivière Kamienna sur un parcours d'une verste environ ; de là, par terre ferme, elle atteint la mairie du village de Nerasnaia, puis la source d'un affluent de la petite rivière Siderka ; elle suit cet affluent jusqu'à sa jonction avec la Siderka à une verste environ du village de Siderka, puis le cours de la rivière Siderka (Siderianka) entre les villages de Chestaki et de Siderka ; elle passe près du bourg de Sidra entre les villages de Yourachi et de Ogorodniki, près du village de Beniachi, près du village de Litvinka, entre les villages de Sverisny et de Timany et atteint le village Lovtchiki ; de là par terre ferme, elle atteint la limite sud du village de Volkoucha, puis la limite nord du village de Tchouprinovo ; ensuite elle toucha le point trigonométrique N° 108,0 qui est à une verste environ du village de Novodeli ; elle se dirige alors vers le hameau de Toltchy et passe à une verste environ au nord de cette localité ; de là, elle se dirige vers le sud du village de Doubovaia ; elle suit la rivière Indourka en passant par les villages de Loujki, Indoura, Prokopovitchi, Belevo, puis la rivière Lachanka, en passant par le village de Bobrovniki et suit cette rivière jusqu'à son confluent avec la rivière Svisiotch. Elle suit alors le cours de la Svislotch, jusqu'à son confluent avec le Niémen, qu'elle suit jusqu'à sa jonction avec la rivière Bérézyna ; elle suit les rivières Bérézyna, Islotch et Vologinka, passe à l'ouest du bourg de Vologine et au nord des villages de Brilki, Bourlaki et Polikchtchofehtchisna, oblique vers le nord-ouest, passe à une verste environ à l'ouest des villages de Melachy et de Gintovchtchisna vers le nord-est et passe à l'ouest des villages de Slobodka, Dolgaïa et Prenta ; puis elle suit la rivière Narotch et passe non loin du village de Tcheremchtchitsa ; à une verste environ de ce village elle quitte le cours de la rivière, tourne vers le nord et court le long de la rive orientale du lac Bliada ; à la distance d'une verste de ce lac elle continue vers le nord, traverse de lac Miastra, puis, à la sortie de ce lac, elle passe entre le village de Pikoltsy à l'ouest et le village de Mintchoky ; la frontière se dirige alors vers le nord, passe à environ une verste à l'ouest du village de Volotchek ; elle continue vers le nord, traverse le lac Madziol, passe à environ une verste à l'ouest du village de Pchegroda ; de là elle rivière Miadzelka dont elle suit le cours jusqu'à sa jonction avec la rivière Disna ; puis elle oblique vers le nord-est, passe à environ une verste à l'ouest du village de Borovya ; continuant vers le nord-est, elle traverse le lac Mikhalichki ; elle suit alors le cours de la rivière Nichtchenka Zamochié sur le lac de Zolva jusqu'à la rivière Zolvitsa, traverse le lac Dryviaty, le lac Tsno, le lac Neslyja, tourne vers le nord et traverse le lac Nedrovo ; quittant ce lac elle suit la rivière Drouika jusqu'à son intersection c la frontière du Gouvernement de Kovno, ensuite elle suit la frontière du Gouvernement de Kovno, puis par la Dvina occidentale atteint la ferme de Chafranavo.

1re Remarque. La frontière entre la Lithuanie et la Pologne et celle entre la Lithuanie et la Latvie seront établies après une entente entre ces États.

2e Remarque. Le tracé de la frontière entre les deux parties contractantes sera effectué sur place et la pose des poteaux frontières sera effectuée par une commission mixte composée en nombre égal de délégués des deux parties.

Pour le tracé sur place de la frontière, les décisions de la dite commission s'inspireront des considérations économiques et ethnographiques en prenant autant que possible en considération les limites naturelles. Les territoires habités devront, si possible, être attribués intégralement à une des Parties.

Dans les cas où la frontière passe à travers des lacs, des rivières ou des canaux, la ligne frontière suivra le milieu de ces lacs, rivières et canaux, sauf disposition contraire de ce traité.

3e Remarque. La frontière indiquée par le présent traité est tracée en rouge sur la carte ci-jointe.
En cas de divergence entre la carte et le texte du traité le texte fera foi.

4e Remarque. Le détournement artificiel des eaux des rivières et des lacs, formant frontière, susceptible d'amener un abaissement du niveau des dites eaux est interdit.

La réglementation de la navigation et la pêche sur ces rivières et ces lacs fera l'objet d'accords spéciaux; toutefois on ne pourra utiliser pour la pêche que des engins ne nuisant pas à la richesse en poissons de ces eaux.

Article 3.

La surveillance des frontières ainsi que les questions de douane et autres questions connexes, seront réglées par un accord spécial par les Parties Contractantes, après que les localités qui séparent la Lithuanie de la Russie auront été libérées de l'occupation étrangère.

Article 4.

Les deux Parties Contractantes s'engagent :
1° A ne pas permettre sur leur territoire la formation et le séjour de Gouvernements, organisations ou groupes se proposant d'entreprendre une lutte armée contre l'autre Partie Contractante ; à ne pas permettre également dans les limites de leur territoire la conscription et la mobilisation d'un personnel  attaché à l'armée des ces Gouvernements,
organisations ou groupes, ou le séjour de leurs représentants ou fonctionnaires ;
2° à interdire aux Gouvernements, se trouvant de fait en état de guerre avec l'autre partie ainsi qu'aux organisations ou groupes, se proposant d'entreprendre une lutte armée contre elle, l'importation et le transport sur leur territoire de tout ce qui pourrait servir à attaquer l'autre Partie Contractante, notamment, des forces militaires, le matériel de guerre terrestre, naval ou aéronautique, le matériel militaire technique d'intendance et d'artillerie.

Article 5.

Au cas où la neutralité de la Lithuanie serait reconnue internationalement, la Russie s'engagera de son côté à respecter cette neutralité et à participer aux mesures destinées à la garantir.

Article 6.

Les personnes résidant le jour de la ratification du présent Traité dans les limites du territoire lithuanien, et qui ont résidé, ou dont les parents ont résidé constamment en Lithuanie, de même celles qui ont été inscrites dans les sociétés urbaines ou rurales, soit parmi d'autres classes de la société sur le territoire de cet État ; de même les personnes qui y résidaient jusqu'à l'année 1914 depuis au moins 10 ans, et y avaient une y occupation régulière — exception faite toutefois des fonctionnaires civils et militaires d'origine non lithuanienne, ainsi que de leurs familles — sont de ce fait même reconnues comme citoyens lithuaniens.

Les personnes appartenant à ces catégories et résidant au moment de la ratification du présent Traité sur le territoire d'un troisième État, mais qui n'y sont pas naturalisées, sont également reconnues comme citoyens lithuaniens.

Néanmoins, toute personne ayant atteint l'âge de 18 ans et résidant, en territoire lithuanien a le droit, durant une année à dater du jour qui suit la ratification du présent Traité, de déclarer qu'elle désire garder la nationalité russe, et, dans ce cas, les enfants âgés de moins de 18 ans, et l'épouse, suivent cette dernière nationalité à moins qu'un arrangement contraire n'ait été conclu entre les époux.

De même les personnes résidant sur territoire russe et se trouvant dans les conditions mentionnées au premier paragraphe de cet article peuvent dans le même laps de temps, et aux mêmes conditions, opter pour la nationalité lithuanienne.

Ceux qui ont fait une déclaration d'option, ainsi que ceux des leurs auxquels la nationalité est transmise, conservent leurs droits sur leurs biens, meubles et immeubles, dans les limites des lois en vigueur dans l'État ou ils habitent, et en cas de départ, ils ont le droit de liquider et emporter ce qui leur appartient.

1re Remarque. Pour les personnes résidant au Caucase ou en Russie d'Asie, le dernier délai de déclaration et de départ sera prolongé d'un an.

2me Remarque. Les citoyens qui, avant ou pendant la guerre mondiale de 1914-1917, résidaient sur les territoires de l'une des Parties, et qui, au moment de la ratification du présent Traité, résident sur le territoire de l'autre Partie, bénéficient aussi des droits réservés aux optants par le présent Traité. Les réfugiés qui n'auraient pas pu emporter leurs biens en raison de l'accord sur le rapatriement des réfugiés du 12 juin 1920, bénéficient des droits envisagés par l'article relatif aux optants, mais à la condition de prouver que ces biens leur appartiennent et, au moment de leur rapatriement, se trouvaient de fait en leur possession.

Article 7.

Les réfugiés des deux Parties Contractantes, qui désirent retourner dans leur pays doivent effectuer leur retour dans le plus bref délai possible.

La modalité et les conditions de ce rapatriement seront réglées par un accord entre les deux Gouvernements.

Article 8.

Les deux Parties Contractantes renoncent mutuellement à toute réclamation provenant du fait que la Lithuanie faisait partie de la Russie, et reconnaissent que les biens nationaux de toutes sortes, se trouvant sur le territoire de chacune d'elles, sont la propriété indiscutable de l'État correspondant. Le droit de revendiquer les biens de l'État russe transportés après le 1 er août 1914 hors du territoire lithuanien sur le territoire d'un tiers État, passe au Gouvernement Lithuanien.

L'Etat lithuanien hérite ensuite de toutes les créances du Trésor russe sur les biens situés dans les limites du territoire lithuanien, de même que toutes sortes de créances sur des citoyens lithuaniens, mais seulement dans la mesure où elles n'auraient pas été compensées par des paiements faits en acomptes.

Remarque. Le droit de réclamer aux petites propriétaires paysans leurs dettes envers l'ancienne banque foncière paysanne russe ou envers d'autres banques foncières russes, aujourd'hui nationalisées, ainsi que le droit de réclamer les dettes envers l'ancienne banque foncière russe de la noblesse ou envers d'autres banques foncières russes aujourd'hui nationalisées, dettes pesant sur les terres des propriétaires, vu que ces terres passent à des paysans ayant peu ou pas du tout des terres, ne passent pas au Gouvernement Lithuanien, mais ces dettes sont purement et simplement annulées.

Tous actes et documents constituant la preuve des droits ci-dessus envisagés seront transmis au Gouvernement Lithuanien par le Gouvernement Russe autant que celui-ci les possède. Au cas où la transmission en aurait été impossible dans le délai d'un an après la ratification du présent Traité, les documents et actes non transmis seront considérés comme perdus.

Article 9.

1° Le Gouvernement Russe restitue à ses frais à la Lithuanie et remet au Gouvernement lithuanien les bibliothèques, les archives, les musées, les oeuvres d'art, le matériel scolaire, les documents et autres biens des établissements scolaires et scientifiques, les biens gouvernementaux, religieux, communaux et ceux des institutions corporatives, autant que ces objets ont été transportés en dehors des limites de la Lithuanie pendant la guerre mondiale de 1914-1917 et se trouvent ou se trouveront de fait en la possession des administrations gouvernementales ou publiques de Russie.

En ce qui concerne les archives, les bibliothèques, les musées, les oeuvres d'art et les documents ayant pour la Lithuanie une importance essentielle au point de vue scientifique, artistique ou historique et transportés en dehors des limites de la Lithuanie en Russie, avant la guerre mondiale 1914-1917, le Gouvernement Russe consent à les restituer à la Lithuanie dans la mesure où cette restitution ne causerait pas une perte essentielle aux archives, bibliothèques, musées, galeries de tableaux russes dans lesquels ils sont conservés.

Les questions se rapportant à cette restitution seront soumises à la décision d'une Commission mixte composée d'un nombre égal de Membres pour chacune des Parties Contractantes.

2° Le Gouvernement Russe restitue à ses frais et remet au Gouvernement Lithuanien tous les dossiers concernant les affaires de justice et d'État, toutes les archives juridiques et gouvernementales, et dans ce nombre, les archives des notaires de première et deuxième classe, les archives des sections hypothécaires, celles des départements religieux de tous les cultes, archives et plans d'arpentage, d'aménagement des terres, des voies ferrées, des forêts, des chaussées, des postes et télégraphes et autres administrations, les plans, les devis, les cartes et en général tout le matériel topographique de l'arrondissement militaire de Vilna ; les archives des succursales locales des banques de la noblesse et des paysans, les succursales de la Banque de l'État et de tous les autres établissements de crédits, d'assurances mutuelles et de coopératives, ainsi que les archives et dossiers des administrations privées de la Lithuanie pour autant que les objets désignés se trouvent de fait ou se trouveront en la possession des institutions gouvernementales ou politiques de Russie.

3° Le Gouvernement Russe rend à ses frais et remet au Gouvernement Lithuanien pour l'attribution à qui de droit toute espèce de titre de propriétés, comme : contrats d'acquisition, hypothèques, contrats de fermage et toutes sortes de traités, etc., et dans ce nombre les livres, les papiers, et documents nécessaires pour l'établissement des comptes, et en général tous les documents ayant une importance pour déterminer les droits de propriété des citoyens lithuaniens, transportés en dehors de la Lithuanie en Russie pendant la guerre mondiale de 1914-1917, pour autant que ces documents se trouvent ou se trouveront de fait en la possession d'institutions russes, gouvernementales ou publiques.

Au cas où ces documents ne seraient pas restitués dans le délai de deux ans à compter du jour de la ratification du présent Traite, ils seraient considérés comme perdus.

4° La Russie s'engage à extraire des archives de ses administrations centrales et locales, ceux des documents qui ont un rapport direct avec les provinces faisant partie de la Lithuanie. Les questions se rapportant à cette restitution seront soumises à la décision d'une Commission mixte composée d'un nombre égal de Membres pour chacune des Parties Contractantes

Article 10.

1" Le Gouvernement Russe restitue à la Lithuanie tous les biens transportés en Russie pendant la guerre mondiale de 1914-1917 et appartenant à des administrations religieuses, civiles, de bienfaisance, d'instruction, ainsi que les cloches et les objets de culte des églises et des couvents de tous les cultes, dans la mesure où les objets désignés se trouvent ou se trouveraient de fait en la possession des administrations gouvernementales et publiques de Russie.

2° a) Le Gouvernement Russe restitue à la Lithuanie les valeurs placées en dépôt dans les Caisses d'épargne, les sommes, gages et autres dépôts placés dans les anciennes institutions publiques pour autant que ces sommes et dépôts de valeurs appartiennent à des citoyens lithuaniens ;

b) en ce qui concerne les valeurs diverses appartenant à des citoyens lithuaniens et déposées précédemment dans les succursales de la Banque d'État russe, ainsi que dans les maisons de crédit et leurs annexes, qui ont été liquidées et nationalisées, le Gouvernement Russe s'engage à reconnaître aux dits citoyens les droits autrefois reconnus à tous les citoyens russes. Il concède également aux citoyens lithuaniens qui n'avaient pas, du temps de l'occupation militaire étrangère, la possibilité d'user de leurs droits, la faculté de le faire à présent ; ils seront indemnisés de leur perte par des versements de papiers-monnaie ayant cours dans la République de Russie au moment où leurs revendications seront satisfaites, et selon le cours du rouble-papier à la bourse, au moment de la dernière occupation de la Lithuanie, le 1er septembre 1915.

En ce qui concerne les objets de valeur et les sommes appartenant à des citoyens lithuaniens et déposés précédemment dans les banques où les coffre-forts, les conditions stipulées au premier paragraphe de cet article, seront observées.

Les sommes et objets de valeur mentionnés dans cet article, seront remis à l'État Lithuanien pour être rendus à qui de droit.

3° Le Gouvernement Russe renvoie à ses frais au Gouvernement Lithuanien les capitaux destinés à la fondation de bourses dans les établissements scolaires de Lithuanie, ainsi que ceux des établissements scolaires de Russie, destinés aux étudiants lithuaniens.

4° En ce qui concerne le remboursement du papier-monnaie russe en circulation clans les limites du territoire lithuanien, des valeurs de l'État, ou garanties par l'État, ainsi que des valeurs émises par des institutions et compagnies privées, et à présent nationalisées par le Gouvernement Russe, la Russie désirant apporter satisfaction aux revendications des

citoyens lithuaniens sur les trésors de l'État russe, et sur les institutions nationalisées — s'engage à reconnaître à la Lithuanie et à ses citoyens les privilèges et droits qui sont ou seront reconnus par la Lithuanie à tout autre État tiers ou à ses citoyens, institutions ou associations.

Si les valeurs et titres ne sont pas au porteur, le Gouvernement Russe consent à les considérer comme appartenant à ceux qui pourront prouver que leurs valeurs et titres ont été évacués pendant la guerre.

Article 11.

1° Le Gouvernement Russe restitue au Gouvernement Lithuanien pour être remis aux ayant droit, les biens évacués au cours de la guerre mondiale 1914-1917, appartenant aux citoyens lithuaniens ou à des associations, compagnies et sociétés par actions, dont la majorité des actions étaient entre des mains lithuaniennes au moment où le Gouvernement
Russe publia le décret de nationalisation des propriétés, en tant que ces biens se trouvent être en possession du Gouvernement Russe.

Remarque. Cet article ne porte pas sur les capitaux, dépôts et objets de valeur qui se trouvent dans les succursales de la Banque d'État, ou dans les Banques privées, institutions de crédit et caisses d'épargne situées en territoire lithuanien.

2° En ce qui concerne le matériel des chemins de fer, des postes, télégraphes et téléphones, et le matériel des ateliers de chemin de fer, évacués pendant la guerre mondiale de 1914-1917, la Russie s'engage à en restituer une partie à la Lithuanie, mais seulement dans les limites nécessaires à son existence, et en prenant en considération l'abaissement
général du niveau de la vie économique.

Afin de préciser les limites de cette restitution, une Commission mixte, composée d'un nombre égal de représentants des deux Parties Contractantes, sera constituée aussitôt après la mise en vigueur du présent traité.

Remarque. La restitution du matériel de chemin de fer, du matériel des postes, télégraphes et téléphones, et du matériel des ateliers de chemins de fer, se trouvant sur le territoire occupé de la Lithuanie, ne pourra s'effectuer que lorsque ce territoire sera libéré.

3° En vue de faciliter l'exécution des articles 8, 9, 10 et 11, de la présente Convention, le Gouvernement russe s'engage à fournir au Gouvernement lithuanien, tous les renseignements et toutes informations concernant lesdits articles, et à prendre toutes les dispositions nécessaires pour faciliter la recherche des biens, archives et documents, à restituer. La
solution des différentes questions qui pourront surgir à ce sujet, sera confiée à une Commission mixte composée d'un nombre égal de représentants des deux Parties Contractantes.

Article 12.

Prenant en considération le fait que la Lithuanie a été presque entièrement dévastée au cours de la guerre mondiale et qu'il est impossible aux citoyens lithuaniens de remettre leurs fermes en état ; reconnaissant en particulier la difficulté de reconstruire les édifices détruits ou incendiés, étant donné l'anéantissement complet des forêts lithuaniennes, le Gouvernement russe se déclare prêt :
1° A libérer la Lithuanie de ses dettes et autres obligations envers la Russie, entraînées par l'émission des billets de banque, de timbres de l'État, d'obligations et bons du Trésor russe pour les emprunts extérieurs et intérieurs de l'État russe, de cautionnements des diverses institutions de crédit et des emprunts de ces institutions garantis par l'État, etc.
Toutes les réclamations des créanciers de la Russie concernant la Lithuanie doivent être adressées exclusivement à la Russie.
2° A concéder au Gouvernement lithuanien, pendant une période de 20 ans, le droit de procéder à la coupe des bois sur un espace de cent mille déciatines, dans les localités les plus rapprochées de la frontière lithuanienne, et autant que possible près des rivières navigables et des voies ferrées. Cette coupe devra se faire par séries progressives avec la
remise des friches selon les plans de l'administration des forêts de Russie. Le soin d' établir les modalités de cette concession est confié à une Commission mixte composée d'un nombre égal des représentants des deux Parties Contractantes.
3° A remettre au Gouvernement lithuanien la somme de trois millions de roubles or, dans le délai d'un mois et demi à partir de la ratification du présent Traité.

Article 13.

1° Les Parties Contractantes ont décidé de commencer aussitôt après la ratification du présent Traité, des pourparlers en vue de conclure une Convention de commerce et de transit.

2° Le principe de la protection la plus large doit être admis comme base du traité de commerce.

3° Les principes suivants doivent être admis comme base du Traité concernant le transit :
a) Les marchandises passant en transit sur le territoire des Parties Contractantes, ne seront soumises à aucun impôt ni droit de douane.
b) Les tarifs de fret, appliqués aux marchandises en transit, ne peuvent être supérieurs à ceux auxquels sont soumis les marchandises nationales de même nature.

Remarque. Jusqu'au rétablissement des relations normales, les conditions réciproques du transit entre la Russie et la Lithuanie seront réglées d'après les principes établis ci-dessus. Les autres conditions du transit seront réglées par des Conventions temporaires spéciales.

4° Les flottes commerciales de la Russie et de la Lithuanie pourront profiter de leurs ports respectifs sur la base des droits égaux.

5° Les biens provenant de la succession d'un citoyen de l'une des Parties Contractantes et se trouvant sur le territoire de l'autre partie, seront remis en entier au Consul ou au représentant du Gouvernement dont dépendait le défunt pour en être disposé selon les lois du pays d'origine du défunt.

Article 14.

Les relations diplomatiques et consulaires entre les Parties Contractantes, seront rétablies aussitôt après la ratification du présent Traité et celles-ci procéderont à la conclusion d'une Convention consulaire.

Article 15.

Après la ratification du présent Traité, le Gouvernement russe libérera les citoyens lithuaniens, ainsi que les personnes ayant opté pour la nationalité lithuanienne, qu'elles soient civiles ou militaires, de toute punition pour délit politique ou disciplinaire. Le Gouvernement lithuanien s'engage à agir de même. Si les jugements n'ont pas encore été rendus,

l'instruction cessera.

Ne bénéficieront pas de l'amnistie les individus qui commettraient les délits ci-dessus désignés après la ratification du présent Traité.

Les personnes condamnées par un tribunal criminel pour délits non susceptibles d'amnistie, retourneront dans leur pays après avoir subi leur peine. Si le jugement n'a pas été rendu un an après que le coupable a été mis en accusation, il sera remis avec le dossier de sa cause, aux autorités de son pays.

Les deux Parties Contractantes libéreront simultanément leurs propres citoyens des peines encourues pour infractions commises avant la ratification du présent Traité au profit de l'autre partie.

Article 16.

En élaborait le présent Traité les deux Parties Contractantes ont tenu compte du fait qu'elles n'ont jamais été en guerre, et que la Lithuanie, théâtre des opérations militaires pendant la guerre mondiale 1914-1017 en a tout particulièrement souffert. En conséquence, les conditions du présent Traité ne pourront jamais et dans aucune circonstance servir de précédent à aucun autre État.

D'autre part, si un État tiers concède à une des Parties Contractantes ou à ses citoyens des concessions spéciales, droits ou privilèges, ceux-ci s'étendront, sans qu'il soit besoin de conclure une convention séparée, à l'autre Partie Contractante ainsi qu'à ses citoyens.

Remarque.
Néanmoins les Parties Contractantes ne prétendront pas aux privilèges que l'une d'elles pourrait concéder à un État tiers avec lequel elle serait liée par des conventions de douanes ou autres.

Article 17.

La solution des questions de droit public et privé, surgissant entre les citoyens des Parties Contractantes, de même que le règlement de certaines questions spéciales entre les deux États, ou entre un des Gouvernements et les citoyens de l'autre, sera confiée à une Commission particulière mixte, composée d'un nombre égal de membres des Parties Contractantes, qui sera établie dès la mise en vigueur du présent Traité.

La composition de cette Commission, ses droits et devoirs, seront déterminés par un règlement après entente entre les deux parties.

Article 18.

Le présent Traité est rédigé en langue russe et en langue lithuanienne. Pour son interprétation, les deux textes feront foi.

Article 19.

Le présent Traité sera ratifié.

L'échange des instruments de ratification aura lieu à Moscou.

Partout où dans le présent Traité on donne pour date le moment de la ratification, il faut entendre le moment de l'échange des instruments de ratification.

En foi de quoi les plénipotentiaires des deux parties ont signé de leur propre main le présent Traité et y ont apposé leur sceau.

L'original est rédigé en deux exemplaires.

Fait et signé à Moscou le douze juillet de l'an mil neuf cent vingt.



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Jean-Pierre Maury