La Grande Guerre, ouverte par le bombardement de Belgrade le 28 juillet 1914, un mois après l'attentat de Sarajevo, s'achève en 1918 par les armistices de Salonique avec la Bulgarie (29 septembre), de Moudros avec la Turquie (30 octobre), de Villa Giusti avec l'Autriche-Hongrie (3 novembre), de Rethondes avec l'Allemagne (11 novembre) et avec la convention de Belgrade avec la Hongrie (13 novembre).
Les principaux traités de paix, qui ont mis fin à la Grande Guerre sont :
- le traité de Versailles, signé le 28 juin 1919 entre les Puissances alliées et associées et l'Allemagne ;
- le traité de Saint-Germain-en-Laye, signé le 10 septembre 1919 entre les Puissances alliées et associées et l'Autriche ;
- le traité de Neuilly-sur-Seine, signé le 27 novembre 1919 entre les Puissances alliées et associées et la Bulgarie ;
- le traité de Trianon, signé le 4 juin 1920 entre les Puissances alliées et associées et la Hongrie ;
- le traité de Sèvres, signé le 10 août 1920 entre les Puissances alliées et associées et la Turquie, non ratifié et remplacé par le traité de Lausanne, signé le 24 juillet 1923.
Des traités complémentaires sont signés par les Principales Puissances alliées avec les autres Puissances alliées, bénéficiaires de territoires transférés : Pologne, Tchécoslovaquie, Roumanie, État serbe-croate-slovène, Grèce, afin de confirmer la reconnaissance de l'indépendance du pays, de garantir les droits des minorités et d'assurer l'ouverture du pays au commerce international.
Renonçant au traité de Sèvres, moins de six mois après sa signature, dans l'espoir de préserver ses intérêts financiers en Turquie, le gouvernement français (Briand), à la suite d'une campagne de presse anti-britannique, se tourne en faveur du mouvement nationaliste turc. Briand conclut un premier accord le 9 mars 1921 avec le Gouvernement de Mustafa Kémal. Il accepte la rectification de la frontière fixée à Sèvres entre la Syrie et la Turquie. Dans le même esprit, l'Italie conclut un accord avec la Turquie le 12 mars pour obtenir des concessions minières et commerciales. Ces accords ne sont cependant pas ratifiés par les Turcs, qui obtiennent de nouveaux avantages par l'accord d'Angora du 20 octobre 1921. L'évacuation des forces françaises provoque un nouvel exode des Arméniens de la région.
Sources : Documents politiques, Paris, décembre 1922. RGDIP, 1924, n° 6. Voir l'analyse au Bulletin de l'Institut Pierre Renouvin n° 27, La France, les Français face à la Turquie. Autour de l'accord d’Angora du 20 octobre 1921, Université Paris 1, Panthéon-Sorbonne.
L'abandon du traité de Sèvres permet à la Turquie de récupérer les territoires promis à l'Arménie (Traité de Kars du 13 octobre 1921). La France et l'Italie favorisent l'offensive turque contre les Grecs établis dans la région de Smyrne (articles 65 à 83 du traité de Sèvres). Les Turcs reprennent Smyrne en septembre 1922. La France et l'Italie évacuant leurs positions, les Britanniques, isolés, laissent les Turcs reprendre les Détroits et la Thrace orientale. Le 11 octobre 1922, un nouvel armistice est conclu. Les Alliés renoncent à la plupart de leurs exigences, notamment au régime international des Détroits et les Arméniens sont abandonnés à leur sort.
Un nouveau traité de paix avec la Turquie est conclu à Lausanne, en juillet 1923. Et après les massacres commis pendant les deux guerres, l'épuration ethnique se poursuit avec une convention qui organise l'échange des populations entre la Grèce et la Turquie.
Entre les Hautes Parties Contractantes soussignées :
Son Excellence M. Briand, Président du Conseil, Ministre des Affaires étrangères, agissant au nom du Gouvernement français d'une part,
et Son Excellence Bekir Samy Bey, Délégué de la Grande Assemblée Nationale d'Angora, agissant au nom du Gouvernement national turc, et muni à cet effet de pleins pouvoirs, qui ont été trouvés en règle.
Il a été convenu ce qui suit :
A. Cessation des hostilités et échange des prisonniers, dans les termes de l'annexe ci-joint.
B. Désarmement des populations et des bandes armées, d'accord entre les commandements français et turc.
C. Constitution de forces de police (en utilisant la gendarmerie déjà formée) sous le commandement turc, assisté d'officiers français mis à la disposition du Gouvernement turc.
D. D'accord entre les commandements français et turc : Evacuation dans un délai d'un mois (après la cessation des hostilités) des territoires occupés par les troupes combattantes, au nord des frontières du Traité de Sèvres. Les troupes turques se retireront les premières et occuperont, huit jours après l'évacuation, les localités évacuées par les troupes françaises.
Des dispositions transitoires seront prises en ce qui concerne l'évacuation des territoires attribués à la Syrie par le Traité de Sèvres et réincorporés à l'État turc par le présent accord, en raison de leur caractère ethnique.
En raison de l'état de guerre prolongé et des troubles profonds qui en sont résultés, les troupes françaises se retireront progressivement dans des conditions déterminées par les autorités françaises et turques réunies en Commission, sur les bases générales suivantes : pacification effective, garantie de la sécurité des communications par voie ferrée entre l'Euphrate et le golfe d'Alexandrette, y compris le rétablissement des ouvrages d'art de l'Amanus et du pont de Djerablous, droit de suite militaire éventuel en cas d'attentats par des bandes, punition des coupables du guet-apens d'Ourfa.
E. Amnistie politique entière et maintien en fonctions du personnel administratif cilicien.
F. Engagement de protéger les minorités ethniques, de leur garantir l'égalité absolue des droits à tous égards et de tenir compte, dans une mesure équitable, de la quotité des populations pour l'établissement dans les régions à population mixte d'un équilibre pour la constitution de la gendarmerie et de l'administration municipale.
G. Collaboration économique franco- turque, avec droit de priorité pour les concessions à accorder en vue de la mise en valeur et du développement économique de la Cilicie, des régions évacuées par les troupes françaises, ainsi que des vilayets de Mamurt-el-Aziz, Diarbékir et Sivas, dans la mesure où cela ne serait pas effectué directement par le Gouvernement ottoman ou les ressortissants ottomans à l'aide des capitaux nationaux.
Concession à un groupe français des mines d'Argana-Maden.
Les concessions comportant monopole ou privilège seront exploitées par des Sociétés constituées selon la loi ottomane.
Association la plus large possible des capitaux ottomans et français (pouvant aller à 50 % du capital ottoman).
H. Institution d'un régime douanier approprié entre les régions turque et syrienne.
Maintien des oeuvres scolaires et hospitalières françaises, et des institutions d'assistance.
I. Le Gouvernement français instituera un régime administratif spécial pour la région d'Alexandrette, où les populations ont un caractère mixte, et s'engage à donner aux habitants de race turque toutes facilités pour le développement de leur culture et l'emploi de la langue turque qui y aura le caractère officiel, au même titre que les langues arabe et française.
K. Transfert à un groupe français de la section du chemin de fer de Bagdad entre les portes de Cilicie et la frontière de Syrie.
Toutes les dispositions seront prises pour faciliter à tous égards l'utilisation du chemin de fer respectivement par les Turcs et les Français, au point de vue économique et militaire.
L. La frontière entre la Turquie et la Syrie, partira d'un point à choisir sur le Golfe d'Alexandrette immédiatement au sud de la localité de Payas et se dirigeant sensiblement en ligne droite vers Meidan Ekbés (la station du chemin de fer et la localité restant à la Syrie).
De là, la frontière s'infléchira vers le sud-est, de manière à laisser à la Syrie la localité de Marsova et à la Turquie celle de Earnaba ainsi que la ville de Killis.
De là, la frontière rejoindra la voie ferrée à la station de Chobanbeg.
Ensuite, la frontière suivra la voie ferrée de Bagdad dont la plateforme restera en territoire ottoman jusqu'à Nisibin.
Puis la frontière rejoindra le coude de l'Euphrate au nord d'Azekh et suivra l'Euphrate jusqu'à Djeziret-ibn-Omar.
La ligne des douanes turques sera installée au nord de la voie et la ligne des douanes françaises au sud.
Annexes.
Article 1.
En attendant la conclusion imminente entre les Hautes Parties Contractantes d'un accord plus général, toutes opérations militaires actives seront entièrement arrêtées sur le front de Cilicie, et sur les confins de la Turquie et de la Syrie dès la réception des ordres donnés à cet effet à leur troupes respectives, tant par les autorités françaises que par les autorités d'Angora et au plus tard dans un délai d'une semaine.
Pour hâter cette suspension d'hostilités, les chefs d'unités françaises ou turques feront connaître, dès qu'elles en seront avisées, aux forces adverses qui leur sont opposées, la signature des présentes et l'arrêt des opérations.
Article 2.
Dès réception des ordres urgents qui seront donnés par les deux Hautes Parties Contractantes, les prisonniers respectifs, ainsi que toutes personnes françaises ou turques, détenues à la suite des hostilités, seront remises en liberté et reconduites aux frais de la partie qui les détient aux avant-postes ou dans telle ville la plus proche qui sera désignée à cet effet. Il ne sera fait exception que pour les criminels de droit commun, dont le cas sera réservé pour un examen en commun.
Article 3.
La présente convention est conclue sans limitation de durée, la reprise d'hostilités ne pouvant avoir lieu de part et d'autre qu'après dénonciation en règle un mois à l'avance. Pendant la suspension des hostilités, les Parties s'engagent à s'abstenir de tout renforcement d'effectifs et de toutes mesures tendant à améliorer leur position respective : les seuls transports militaires autorisés seront ceux de relèves normales ainsi que ce qui concerne le ravitaillement et l'entretien des troupes.
Fait à Londres, en double original, le 9 mars 1921.
(s) Briand.
(s) S. Bekir.
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