Les accords de Potsdam
La conférence de Potsdam s'est tenue du 17 juillet au 2 août 1945. C'est la troisième rencontre entre les trois puissances alliées, après Téhéran et Yalta, mais Truman a succédé à Roosevelt et, au cours de la Conférence, Churchill, qui a perdu les élections, est remplacé par Attlee.
Alors que les Trois avaient décidé, à Yalta, de démembrer l'Allemagne, ici la décision est prise de préserver son unité, et le système des réparations est fixé de manière telle que seule l'URSS en bénéficiera. D'ailleurs, sur la plupart des questions la délégation soviétique obtient satisfaction. En fait la rupture entre les Alliés est proche, les ministres des affaires étrangères pourront encore, lors de la conférence de Moscou, en décembre 1945, préparer les traités de paix avec l'Italie, la Bulgarie, la Roumanie, la Hongrie et la Finlande, et régler plusieurs autres questions, mais sur l'Allemagne, chacun voudra consolider ses positions et les États-Unis seront les premiers à arrêter le paiement des réparations, puis à décider du réarmement de l'Allemagne, pour en faire leur principal point d'appui en Europe.Lien avec le dossier de la Faculté de droit de Yale.
Communiqué final
I. Rapport de la Conférence tripartite de Berlin
Le 17 juillet 1945, le président des États-Unis, Harry S. Truman, le président du Conseil des commissaires du peuple de l'Union des républiques socialistes soviétiques, Généralissime Staline, et le premier ministre de Grande-Bretagne, Winston Churchill, en même temps que M. Clément Attlee, se sont réunis en conférence à Berlin. Ils étaient accompagnés des ministres des affaires étrangères des trois gouvernements, MM. James Byrnes, Vatcheslav Molotov et Anthony Eden, des chefs d'état-majors et d'autres conseillers.Il y a eu neuf réunions entre les 17 et 25 juillet.
La Conférence a alors été interrompue pour deux jours pendant la déclaration des résultats des élections générales en Grande-Bretagne.
Le 28 juillet, M. Attlee est revenu comme premier ministre, accompagné du nouveau secrétaire d'État aux affaires étrangères, M. Ernest Bevin. Les discussions se sont poursuivies pendant quatre jours.
Pendant la durée de la Conférence ont eu lieu des réunions régulières des chefs des trois gouvernements, accompagnés des ministres des affaires étrangères, ainsi que des réunions des ministres des affaires étrangères seuls.
Des commissions instituées par les ministres des affaires étrangères en vue de l'étude préliminaire des questions soumises à la Conférence se sont réunies également chaque jour.
Les réunions de la Conférence se sont tenues au Cecilienhof, près de Potsdam. La Conférence s'est terminée le 2 août 1945.
D'importantes décisions ont été prises et des accords importants ont été conclus. Des échanges de vues ont eu lieu sur plusieurs autres questions et l'étude de ces questions sera poursuivie par le Conseil des ministres des affaires étrangères institué par la conférence.
Le président Truman, le généralissime Staline et le premier ministre Attlee quittent cette Conférence qui a renforcé les liens entre les trois gouvernements et augmenté l'étendue de leur collaboration et de leur entente, avec l'assurance renouvelée que leurs gouvernements et leurs peuples assureront, avec les autres Nations unies, l'établissement d'une paix juste et durable.
II. - Conseil des ministres des affaires étrangères
A. La conférence a abouti à un accord pour l'établissement d'un conseil des ministres des Affaires étrangères représentant les cinq principales puissances, afin de continuer le travail préparatoire nécessaire aux règlements de paix et traiter toutes autres questions qui pourraient, de temps à autre, être déférées au conseil par accord entre les gouvernements parties à ce conseil.Le texte de l'accord pour l'établissement du conseil des ministres des Affaires étrangères est le suivant :
1. Il sera établi un conseil composé des ministres des Affaires étrangères du Royaume-Uni, de l'U.R.S.S., de la Chine, de la France et des États-Unis.
2. a) Le conseil devra normalement se réunir à Londres, qui sera le siège permanent du secrétariat commun que le conseil instituera.
Chacun des ministres des Affaires étrangères sera accompagné d'un adjoint de rang élevé, dûment autorisé à continuer le travail au conseil en l'absence de son ministre des Affaires étrangères, et par un petit groupe de conseillers techniques.
b) La première réunion du conseil aura lieu à Londres pas plus tard que le 1er septembre 1945. Des réunions pourront avoir lieu par commun accord dans d'autres capitales, si l'on convient qu'il en soit ainsi, de temps à autre.
3. a) A titre de tâche immédiate et importante, le conseil sera autorisé à élaborer, en vue d'être soumis aux Nations Unies, des traités de paix avec l'Italie, la Roumanie, la Bulgarie, la Hongrie et la Finlande et à proposer des règlements aux questions territoriales pendantes au moment où se terminera la guerre en Europe.
Le conseil sera employé à préparer un règlement de paix pour l'Allemagne en vue de son acceptation par le gouvernement de l'Allemagne lorsqu'un gouvernement approprié sera établi.
b) Pour chacune des ces tâches, le conseil sera composé de membres représentant les États qui furent signataires des conditions de reddition imposées à l'État ennemi en cause. Pour le règlement de paix avec l'Italie, la France sera considérée comme une signataire des conditions de reddition pour l'Italie. D'autres membres seront invités à participer lorsque des questions les concernant directement seront discutées.
c) D'autres questions pourront, de temps à autre, être déférées au conseil par accord entre les gouvernements qui en sont membres.
4. a) Chaque fois que le conseil étudiera une question intéressant directement un État non représenté dans son sein, cet État devra être invité à envoyer des représentants pour participer à la discussion et à l'étude de cette question.
b) Le conseil peut adapter sa procédure au problème particulier qui lui est soumis. Dans certains cas, il pourra avoir ses propres discussions préliminaires préalablement à la participation d'autres États intéressés. Dans d'autres cas, le conseil peut convoquer en conférence officielle l'État principalement intéressé à la recherche d'une solution à un problème particulier.
B. Conformément à la décision de la conférence, les trois gouvernements ont chacun adressé une communication identique aux gouvernements de Chine et de France les invitant à adopter ce texte et à se joindre à eux pour l'établissement du conseil.
Projet établi par le Conseil des Ministres des Affaires étrangères d'invitations à envoyer par chacun des trois gouvernements aux gouvernements de Chine et de France.
Les gouvernements du Royaume-Uni, des États-Unis et de l'U.R.S.S. considèrent nécessaire de commencer sans retard les travaux préparatoires aux règlements de paix en Europe. Dans ce but, ils sont d'accord pour que soit institué un Conseil des ministres des Affaires étrangères des cinq grandes puissances pour préparer les traités de paix avec les États européens ennemis, pour les soumettre ensuite aux Nations Unies. Le Conseil aura aussi autorité pour proposer le règlement des principales questions territoriales en Europe, et pour étudier toute autre question que les gouvernements membres estimeront devoir lui soumettre.
Le texte adopté par les trois gouvernements est le suivant:
« D'accord avec le gouvernement des États-Unis, le gouvernement de Sa Majesté du Royaume-Uni et le gouvernement de l'U.R.S.S., le gouvernement des États-Unis, le gouvernement du Royaume-Uni et le gouvernement soviétique envoient aux gouvernements de la Chine (de la France) une invitation cordiale à adopter le texte ci-dessus, et à se joindre à la création du Conseil. Le gouvernement de Sa Majesté, le gouvernement des États-Unis, et le gouvernement de l'Union Soviétique, attachent une grande importance à la participation du gouvernement chinois (du gouvernement français) à l'élaboration des accords proposés et ils espèrent recevoir une réponse rapide et favorable à cette invitation. »
C. Il fut décidé que la création du Conseil des ministres des Affaires étrangères pour les fins précises énumérées dans le présent texte, se ferait sans préjudice de l'accord conclu à la conférence de Crimée, d'après lequel il devrait y avoir consultation périodique entre les ministres des Affaires étrangères des États-Unis, de l'Union Soviétique et du Royaume-Uni.
D. La conférence a aussi examiné le statut de la commission consultative européenne à la suite de l'accord pour la création du Conseil des ministres des Affaires étrangères. On a remarqué avec satisfaction que la commission s'était acquittée avec compétence des principales tâches qui lui incombaient en émettant des recommandations sur les termes de la reddition inconditionnelle de l'Allemagne, sur les zones de l'occupation de l'Allemagne et de l'Autriche et sur l'organisme de contrôle interallié dans ces pays.
On a estimé que les questions plus détaillées concernant la coordination de la politique alliée en vue du contrôle de l'Allemagne et de l'Autriche relèveraient à l'avenir de la compétence du Conseil de contrôle allié à Berlin et de la Commission alliée à Vienne. Aussi s'est-on mis d'accord pour recommander la dissolution de la Commission consultative européenne.
III. - Allemagne
Le texte de l'accord est le suivant :Principes politiques et économiques du traitement
dont l'Allemagne sera l'objet dans la période initiale de contrôle« A. - Principes politiques.
« 1. Conformément à l'accord sur le système de contrôle en Allemagne, l'autorité suprême en Allemagne est exercée, d'après les instructions de leurs gouvernements respectifs, par les Commandants en chef des forces armées des États-Unis, du Royaume-Uni, de l'Union des républiques socialistes soviétiques et de la République française, agissant chacun dans sa propre zone d'occupation ou conjointement, en toute matière affectant l'Allemagne dans son ensemble, en leur qualité de membres du Conseil de contrôle.« 2. Dans la mesure du possible, le traitement de la population allemande sera uniforme dans toute l'Allemagne.
« 3. Les buts de l'occupation de l'Allemagne, que le Conseil de contrôle ne devra pas perdre du vue, sont :
« I. Le complet désarmement et la complète démilitarisation de l'Allemagne, et l'élimination ou le contrôle de toutes les industries allemandes qui pourraient servir à la production de guerre.
« À ces fins :
« a) Toutes les forces terrestres, navales et aériennes allemandes, les SS, SA, SD, ainsi que la Gestapo, avec toutes leurs organisations, leurs états-majors et leurs institutions, y compris l'état-major général, le corps des officiers, le corps de réserve, les écoles militaires, les associations d'anciens combattants, et toutes les autres organisations militaires ou para-militaires, de même que tous les clubs ou associations qui contribuent à maintenir vivante la tradition militaire en Allemagne, seront complètement et définitivement supprimés, de manière à empêcher pour toujours la résurrection ou la réorganisation du militarisme allemand et du nazisme ;
« b) Toutes les armes, munitions et tout le matériel de guerre, ainsi que tous les moyens spécialement affectés à leur production, seront mis à la disposition des Alliés ou détruits. La conservation ou la production des appareils aéronautiques, des munitions et du matériel de guerre de toutes sortes sera interdite.
« II. La conviction à inculquer au peuple allemand qu'il a subi une défaite militaire totale et qu'il ne peut échapper à la responsabilité des malheurs qu'il s'est attirés, étant donné que ses méthodes de guerre implacables et que la résistance fanatique des nazis ont détruit léconomie allemande et rendu inévitables le chaos et la souffrance ;
« III. La suppression du parti national-socialiste et des organisations qui lui sont affiliées ou qui sont sous son contrôle, la dissolution de toutes les institutions nazies, l'assurance qu'elles ne revivent sous aucune forme et l'opposition à toute activité ou propagande nazie ou militariste ;
« IV. La préparation de la reconstruction éventuelle de la vie politique allemande sur une base démocratique et de la coopération éventuelle de l'Allemagne à la vie internationale.
« 4. Toutes les lois nazies qui constituent la base du régime hitlérien ou qui établissent des discriminations en se fondant sur des motifs de race, de croyance ou d'opinion politique seront abrogées. Aucune discrimination de cet ordre, légale, administrative ou autre, ne sera tolérée.
« 5. Les criminels de guerre et les individus qui ont participé aux plans ou à l'exécution des entreprises nazies, tendant ou aboutissant à des atrocités ou à des crimes de guerre, seront arrêtés et traduits en jugement. Les chefs nazis, les adhérents influents du parti et les hauts dignitaires des organisations et des institutions nazies, de même que toutes les autres personnes dangereuses pour l'occupation alliée ou les buts qu'elle se propose, seront arrêtés ou internés.
« 6. Tous les membres du parti nazi qui ont participé à son activité autrement que par leur adhésion nominale et toutes les autres personnes hostiles aux desseins alliés seront exclus des fonctions publiques ou semi-publiques et de toutes les situations qui impliquent des responsabilités dans les entreprises privées importantes. Ces individus seront remplacés par des personnes qui, en raison de leurs qualités politiques et morales, sont jugées capables d'aider au développement de véritables institutions démocratiques en Allemagne.
« 7. L'éducation allemande sera contrôlée de manière à éliminer complètement les doctrines nazies et militaristes et à permettre l'heureux développement des idées démocratiques.
« 8. Le système judiciaire sera réorganisé conformément aux principes de la démocratie, de la légalité des droits pour tout les citoyens, sans distinction de race, de nationalité ou de religion.
« 9. L'administration des affaires intérieures allemandes devra être orientée vers la décentralisation de la structure politique et le développement de la responsabilité locale.
« À cette fin :
« I. L'autonomie locale sera rétablie sur tout le territoire allemand selon les principes démocratiques, et, en particulier, au moyen de conseils élus, aussi rapidement que le permettront la sécurité militaire et les buts de l'occupation militaire ;
« II. Tous les partis politiques démocratiques seront autorisés et encouragés dans toute l'Allemagne et auront le droit de réunion et de discussion publique ;
« III. Les principes représentatifs et électifs seront introduits dans l'administration régionale, provinciale et nationale (« land »), aussi rapidement que le justifiera l'heureuse application de ces principes dans l'administration locale ;
« IV. Quant à présent, aucun gouvernement central allemand ne sera établi. Cependant, certains départements essentiels ayant à leur tête des secrétaires d'État seront institués, en particulier en ce qui concerne les finances, les transports, les communications, le commerce extérieur et l'industrie. Ces départements fonctionneront sous la direction du Conseil de contrôle.
« 10. Sous réserve de la nécessité de maintenir la sécurité militaire, la liberté de parole, de presse et de religion sera autorisée, les institutions religieuses seront respectées. Sous la même réserve, la formation de syndicats sera autorisée.
« B. - Principes économiques.
« 11. Afin d'anéantir le potentiel de guerre de l'Allemagne, la production d'armes, de munitions, de matériel de guerre, de tous types d'appareils aéronautiques et de bâtiments affectés à la navigation maritime sera interdite et empêchée. La production des métaux, des produits chimiques, des machines et autres articles directement nécessaires à l'économie de guerre sera strictement contrôlée et réduite aux besoins de l'Allemagne d'après guerre quant aux objectifs indiqués au paragraphe 15.« Tout le matériel qui ne sera pas nécessaire à la fabrication de la production autorisée sera prélevé conformément au plan de réparations recommandé par la Commission alliée des réparations et approuvé par les gouvernements intéressés, ou, s'il n'est pas prélevé, sera détruit.
« 12. Aussitôt que possible, l'économie allemande sera décentralisée en vue de mettre fin à la concentration excessive actuelle de la puissance économique dont les cartels, les syndicats, les trusts et autres arrangements à caractère de monopole constituent, en particulier, des exemples.
« 13. Dans l'organisation de l'économie allemande, il faudra attacher une importance principale au développement de l'agriculture et des industries intérieures de caractère pacifique.
« 14. Pendant la période d'occupation, l'Allemagne sera traitée comme une entité économique. À cette fin, une politique commune sera établie en ce qui concerne :
« a) la production minière et industrielle et sa répartition ;
« b) L'agriculture, l'industrie forestière et la pêche ;
« c) Les salaires, les prix et le rationnement ;
« d) Le programme d'importations et d'exportations pour l'ensemble de l'Allemagne ;
« e) La circulation fiduciaire et les banques, les impôts nationaux et les droits de douane ;
« f) La réparation et le prélèvement du potentiel de l'industrie de guerre ;
« g) Les transport et les communications.« En appliquant cette politique, on tiendra compte, sil y a lieu, des diverses conditions locales.
« 15. L'économie allemande sera soumise au contrôle allié, mais seulement dans la mesure nécessaire :
« a) Pour appliquer les programmes de désarmement industriel, de démilitarisation, de réparations et d'exportations et importations autorisées ;
« b) Pour assurer la production et le maintien des fournitures et des services nécessaires aux besoins des forces d'occupation et des déportés en Allemagne et essentiels pour maintenir en Allemagne un standard de vie moyen ne dépassant pas celui des pays européens. Le terme « pays européens » comprend tous les pays d'Europe à l'exclusion du Royaume-Uni et de l'Union des républiques socialistes soviétiques ;
« c) Pour assurer, dans les conditions fixées par le Conseil de contrôle, la répartition équitable des produits essentiels entre les différentes zones afin de réaliser une économie bien équilibrée dans toute l'Allemagne et de réduire les besoins en importations ;
« d) Pour contrôler l'industrie allemande et toutes les transactions internationales économiques et financières, y compris les exportations et les importations, afin d'empêcher l'Allemagne d'acquérir un nouveau potentiel de guerre et afin d'atteindre les autres objectifs ici spécifiés ;
« e) Pour contrôler tous les organismes scientifiques allemands, publics ou privés, les instituts de recherches et d'expériences, les laboratoires, etc., en rapport avec l'activité économique ;« 16. Pour l'organisation et l'application des contrôles économiques établis par le Conseil de contrôle il sera créé un organisme administratif allemand et il sera fait appel le plus possible aux autorités allemandes pour assurer l'administration des contrôles dont il s'agit. De cette façon, le peuple allemand se rendra compte qu'il est responsable du fonctionnement de ces contrôles et de leur échec éventuel. Tous les contrôles allemands qui pourraient aller à l'encontre des objectifs de l'occupation seront interdits.
« 17. Des mesures seront rapidement prises :
« a) Pour effectuer les réparations essentielles dans les transports ;
« b) Pour augmenter la production de charbon ;
« c) Pour porter au maximum le rendement de l'agriculture ;
« d) Pour effectuer les réparations urgentes des maisons d'habitation et des entreprises essentielles.« 18. Le Conseil de contrôle prendra des mesures appropriées pour exercer le contrôle et le droit de disposition des avoirs allemands à l'étranger qui ne sont pas encore en possession des Nations unies ayant pris part à la guerre contre l'Allemagne.
« 19. Le payement des réparations devra laisser au peuple allemand suffisamment de ressources pour lui permettre de subsister sans aide extérieure. En dressant le bilan économique de l'Allemagne, il faudra prévoir les moyens nécessaires au payement des importations autorisées par le Conseil de contrôle en Allemagne. Le produit des exportations de production courante et de stocks devra être consacré avant tout au payement de ces importations.
« La clause ci-dessus ne s'appliquera pas au matériel ni aux produits visés au paragraphe 4, a) et b), de l'accord sur les réparations. »
IV. - Réparations dues par l'Allemagne
Conformément à la décision prise par la Conférence de Crimée suivant laquelle l'Allemagne sera contrainte de compenser, dans la plus grande mesure possible, les pertes et les souffrances qu'elle a causées aux Nations unies et à la responsabilité desquelles le peuple allemand ne peut échapper, l'accord suivant sur les réparations a été conclu :« 1. Les demandes de l'Union des républiques socialistes soviétiques, au titre des réparations, seront satisfaites au moyen de prélèvements effectués dans la zone allemande occupée par l'Union des républiques socialistes soviétiques et sur les avoirs allemands à l'étranger qui peuvent faire l'objet de ces prélèvements.
« 2. L'Union des républiques socialistes soviétiques s'engage à régler sur sa propre part de réparations les demandes de la Pologne au titre des réparations.
« 3. Les demandes au titre des réparations des États-Unis, du Royaume-Uni et des autres pays ayant droit aux réparations seront satisfaites au moyen de prélèvements effectués dans les zones occidentales et sur les avoirs allemands à l'étranger qui peuvent faire l'objet de ces prélèvements.
« 4. En plus des réparations que l'Union des républiques socialistes soviétiques prélèvera sur sa propre zone d'occupation, l'Union des républiques socialistes soviétiques recevra des zones occidentales :
« a) 15 p. cent de l'outillage industriel de base utilisable et complet provenant en premier lieu des industries métallurgique, chimique et de constructions mécaniques, qui n'est pas nécessaire à l'économie de paix de l'Allemagne ; cet outillage devra être prélevé sur les zones occidentales de l'Allemagne, en échange d'une valeur égale de denrées alimentaires, de charbon, de potasse, de zinc, de bois, de produits à base d'argile, de produits pétroliers et de tels autres produits dont il sera convenu ;
b) 10 p. cent de l'outillage industriel qui n'est pas indispensable à l'économie de paix de l'Allemagne ; cet outillage devra être prélevé sur les zones occidentales pour être remis au gouvernement soviétique au titre des réparations, sans payement ou échange d'aucune sorte en contrepartie.
Les prélèvements d'outillage prévus aux alinéas a et b s'effectueront simultanément.« 5. La quantité d'outillage à prélever sur les zones occidentales au titre des réparations devra être fixée dans les six mois au plus tard.
« 6. Les prélèvements d'outillage industriel de base commenceront dès que possible et devront être achevés dans les deux ans qui suivront le délai spécifié au paragraphe 5. La livraison des produits visés au paragraphe 4 a) ci-dessus commencera dès que possible et sera effectuée par l'Union des républiques socialistes soviétiques par tranches convenues dans un délai de cinq ans à dater du présent accord. La quantité et la nature de l'outillage industriel de base, non indispensable à l'économie allemande du temps de paix, et par suite disponible au titre des réparations, seront fixées par le Conseil de contrôle selon les règles établies par la Commission des réparations, avec la participation de la France, sous réserve de l'approbation définitive du commandant de la zone dans laquelle l'outillage devra être prélevé.
« 7. Avant que soit fixée la quantité totale d'outillage à prélever, des livraisons de cet outillage seront faites, à valoir selon la procédure indiquée dans la dernière phrase du paragraphe 6.
« 8. Le gouvernement soviétique renonce à revendiquer, au titre des réparations, toute participation dans les entreprises allemandes situées dans les zones occidentales d'occupation de l'Allemagne ; il renonce de même aux avoirs allemands à l'étranger dans tous les pays autres que ceux qui sont mentionnés au paragraphe 9 ci-dessous.
« 9. Les gouvernements du Royaume-Uni et des États-Unis d'Amérique renoncent à revendiquer, au titre des réparations, des participations dans les entreprises allemandes situées dans la zone orientale d'occupation en Allemagne et sur les avoirs allemands à l'étranger se trouvant en Bulgarie, en Finlande, en Hongrie, en Roumanie et en Autriche orientale.
« 10. Le gouvernement soviétique n'élève aucune revendication sur l'or saisi par les troupes alliées en Allemagne. »
V. - Sort de la marine de guerre et de la marine marchande allemandes
La Conférence a adopté un accord de principe concernant la disposition et l'utilisation de la flotte allemande et des navires de commerce allemands. Il a été décidé que les trois gouvernements chargeraient des experts d'élaborer en commun des plans détaillés pour l'application des principes adoptés.Une déclaration commune ultérieure sera publiée simultanément, en temps utile, par les trois gouvernements.
VI. - Ville de Koenigsberg et région limitrophe
La Conférence a examiné une proposition du gouvernement soviétique suivant laquelle, en attendant le règlement définitif des questions territoriales par les traités de paix, la partie de la frontière occidentale de l'Union des républiques socialistes soviétiques contiguë à la mer Baltique, partirait d'un point situé sur la côte orientale de la baie de Dantzig pour se diriger vers l'est au point de jonction des frontières de la Lituanie, de la République polonaise et de la Prusse orientale, au nord de Braunsberg-Goldap.La Conférence a accepté le principe de la proposition soviétique concernant le transfert définitif à l'Union des républiques socialistes soviétiques de la ville de Koenigsberg et de la région limitrophe, telle qu'elle est décrite plus haut, sous réserve de l'examen de la frontière actuelle par des experts.
Le président des États-Unis et le premier ministre britannique ont déclaré qu'ils appuieraient la proposition de la Conférence au moment du prochain règlement de la paix.
VII. - Criminels de guerre
Les trois gouvernements ont pris note des échanges de vues qui ont eu lieu au cours des dernières semaines à Londres, entre les représentants britannique, américain et français, en vue d'aboutir à un accord sur les méthodes de jugement des principaux criminels de guerre, coupables, aux termes de la déclaration de Moscou d'octobre 1943, de crimes qui n'ont pas de localisation géographique particulière. Les trois gouvernements réaffirment leur intention d'appliquer à ces criminels une justice rapide et sûre. Ils espèrent que les négociations de Londres aboutiront à un prompt accord à cet égard et ils attachent une importance particulière à ce que le procès de ces grands criminels de guerre commence à une date aussi prochaine que possible. La première liste d'accusés sera publiée avant le 1er septembre.VIII. - Autriche
La Conférence a examiné une proposition du gouvernement soviétique concernant l'extension à la totalité de l'Autriche, de l'autorité du gouvernement provisoire autrichien. Les trois gouvernements ont été d'accord pour se déclarer prêts à examiner cette question après l'entrée des forces britanniques et américaines dans la ville de Vienne.IX. - Pologne
La Conférence a examiné les questions relatives au gouvernement provisoire polonais et à la frontière occidentale de la Pologne.a) En ce qui concerne le gouvernement polonais d'unité nationale, les membres de la Conférence ont précisé leur attitude dans la déclaration suivante :
« Nous avons pris note avec plaisir de l'accord réalisé entre des personnalités polonaises de Pologne et de l'étranger, accord qui a permis la formation, conformément aux décisions de la Conférence de Crimée, d'un gouvernement provisoire polonais d'unité nationale reconnu par les trois Puissances. L'établissement, par les gouvernements britannique et américain, de relations diplomatiques avec le gouvernement provisoire polonais, a eu pour conséquence l'annulation de leur reconnaissance de l'ancien gouvernement polonais de Londres qui a cessé d'exister.
« Les gouvernements britannique et américain ont pris des mesures pour protéger les intérêts du gouvernement provisoire polonais en tant que gouvernement reconnu de l'État polonais, en ce qui concerne les biens appartenant à l'État polonais qui se trouvent sur leurs propres territoires et sous leur contrôle, quelle que soit la forme de ces biens. Ils ont en outre pris des mesures en vue d'empêcher l'aliénation de ces biens à des tiers. Toutes facilités seront données au gouvernement provisoire polonais pour l'exercice des moyens légaux permettant à l'État polonais de récupérer tout bien lui appartenant qui aurait pu être indûment aliéné.
« Les trois puissances notent que le gouvernement provisoire polonais a accepté, conformément aux décisions de la Conférence de Crimée, d'organiser aussitôt que possible, sur la base du suffrage universel et du scrutin secret, des élections auxquelles tous les partis démocratiques et antinazis auront le droit de prendre part et de présenter des candidats, et qu'il a accepté aussi que les représentants de la presse alliée aient toute liberté de faire connaître au monde ce qui se passera en Pologne avant et pendant les élections. »
b) La question de la frontière occidentale de la Pologne a fait l'objet de l'accord suivant :
« Conformément à l'accord de la Conférence de Crimée, concernant la Pologne, les chefs des trois gouvernements ont demandé au gouvernement polonais d'unité nationale son avis sur l'accroissement de territoire dont la Pologne doit bénéficier au nord et à l'ouest.
« Le président du Conseil national de Pologne et les membres du gouvernement provisoire polonais d'unité nationale ont été reçus à la Conférence et ont pleinement exposé leurs point de vue.
« Les chefs des trois gouvernements réaffirment qu'à leur avis, la délimitation définitive de la frontière polonaise occidentale doit être ajournée jusqu'au moment du règlement de la paix.
« Les chefs des trois gouvernements sont d'accord pour que l'État polonais administre, en attendant le tracé définitif de cette frontière, les anciens territoires allemands qui sont situés à l'est d'une ligne partant de la mer Baltique, immédiatement à l'ouest de Swinemünde, pour descendre le long de l'Oder jusqu'au confluent de la Neisse occidentale, puis longer celle-ci jusqu'à la frontière tchécoslovaque, y compris la partie de la Prusse orientale qui n'est pas placée sous l'administration soviétique en vertu de l'accord intervenu à la présente conférence de la région de l'ex-ville libre de Dantzig, lesdits territoires ne devant pas être, à cette fin, considérés comme faisant partie de la zone soviétique d'occupation de l'Allemagne. »
X. - Conclusion des traités de paix et admission dans l'Organisation des Nations unies
La Conférence a adopté la déclaration suivante sur la politique commune à suivre pour établir dès que possible les conditions d'une paix durable après la victoire en Europe :« Les trois gouvernements estiment qu'il est désirable que la situation anormale actuelle de l'Italie, de la Bulgarie, de la Finlande, de la Hongrie et de la Roumanie prenne fin par la conclusion de traités de paix et ils comptent que les autres gouvernements alliés seront également de cet avis. Pour leur part, les trois gouvernements ont placé la préparation d'un traité de paix avec l'Italie en tête des tâches d'importance immédiate que devra aborder le nouveau Conseil des ministres des affaires étrangères.
« L'Italie a été la première, parmi les puissances de l'Axe, à rompre avec l'Allemagne, à la défaite de laquelle elle a contribué d'une façon substantielle, et elle s'est maintenant jointe aux alliés dans la lutte contre le Japon. L'Italie s'est libérée du régime fasciste et marque des progrès importants vers le rétablissement d'un gouvernement et d'institutions démocratiques. La conclusion d'un traité de paix avec un gouvernement démocratique italien permettra aux trois gouvernements d'appuyer, comme ils en ont le désir, la demande d'admission de l'Italie à l'Organisation des Nations unies.
« Les trois gouvernements ont également chargé le Conseil des ministres des affaires étrangères de la préparation des traités de paix avec la Bulgarie, la Finlande, la Hongrie et la Roumanie. La conclusion de traités de paix avec des gouvernements démocratiques reconnus de ces États permettra aux trois gouvernements d'appuyer leur demande d'admission à l'Organisation des Nations unies. Les trois gouvernements sont d'accord pour examiner chacun séparément dans un proche avenir, et en tenant compte de l'état de choses qui existera alors, la question du rétablissement des relations diplomatiques avec la Finlande, la Roumanie, la Bulgarie et la Hongrie, dans la mesure où ce rétablissement sera possible avant la conclusion des traités de paix avec ces pays.
« Les trois gouvernements ne doutent pas, qu'en raison du changement de conditions résultant de la cessation des hostilités en Europe, les représentants de la presse alliée auront toute liberté de rendre compte à l'opinion mondiale, des événements de Roumanie, de Bulgarie, de Hongrie et de Finlande.
« Pour ce qui est de l'admission des autres États dans l'Organisation des Nations unies, les trois gouvernements déclarent :
« 1° Que l'Organisation des Nations unies est ouverte à tous les autres États pacifiques qui acceptent les obligations stipulées dans la Charte actuelle et qui, de l'avis de l'Organisation, ont la possibilité et la volonté de remplir ces obligations ;
« 2° Que l'admission de ces États comme membres des Nations unies aura lieu en vertu d'une décision de l'Assemblée générale, sur la proposition du Conseil de sécurité.
« Les trois gouvernements soutiendront, en ce qui les concerne, les candidatures de tous les pays restés neutres pendant la guerre et remplissant les conditions mentionnées ci-dessus.
« Toutefois, ils se croient tenus de déclarer que, pour leur part, ils n'appuieront pas la candidature du gouvernement espagnol actuel, qui, établi avec l'aide des puissances de l'Axe, ne possède pas, en raison de ses origines, de son caractère et de son association étroite avec les pays agresseurs, les qualifications nécessaires pour justifier son admission parmi les Nations unies. »
XI. - Territoires sous tutelle
La Conférence a examiné une proposition du gouvernement soviétique concernant les territoires sous tutelle tels qu'ils ont été définis par la décision de la Conférence de Crimée et par la charte de l'Organisation des Nations unies.Après un échange de vues sur cette question, il a été décidé que le sort de tout territoire ayant antérieurement appartenu à l'Italie serait réglé à l'occasion de la préparation du traité de paix avec ce pays et que la question du territoire italien serait examinée en septembre par le Conseil des ministres des affaires étrangères.
XII. - Révision de la procédure adoptée par la commission de contrôle alliée en Roumanie, en Bulgarie et en Hongrie
Les trois gouvernements ont pris note des propositions que les représentants soviétiques aux commissions alliées en Roumanie, en Bulgarie et en Hongrie ont communiquées à leurs collègues britanniques et américains en vue d'améliorer le travail des commissions de contrôle maintenant que les hostilités en Europe ont pris fin.Les trois gouvernements ont été d'accord pour entreprendre maintenant la révision des procédures des commissions de contrôle alliées dans ces pays, en tenant compte des intérêts et des responsabilités des trois gouvernements qui ont présenté conjointement les conditions d'armistice à chacun de ces pays et en prenant comme base les propositions sur lesquelles ils se sont mis d'accord.
XIII. - Transfert méthodique de populations allemandes
La Conférence a adopté l'accord suivant au sujet du transfert des Allemands de Pologne, de Tchécoslovaquie et de Hongrie :« Les trois gouvernements, après avoir examiné la question sous tous ses aspects, reconnaissent qu'il y aura lieu de procéder au transfert en Allemagne des populations allemandes restant en Pologne, en Tchécoslovaquie et en Hongrie. Ils sont d'accord pour estimer que ces transferts devront être effectués de façon ordonnée et humaine. Étant donné que l'arrivée d'un grand nombre d'Allemands en Allemagne accroîtrait la charge qui pèse déjà sur les autorités d'occupation, ils estiment que le conseil de contrôle doit d'abord étudier le problème en tenant compte particulièrement de la répartition équitable de ces Allemands entre les différentes zones d'occupation. En conséquence, ils donnent des instructions à leurs représentants respectifs au conseil de contrôle afin que ceux-ci leur fassent connaître le plus tôt possible dans quelle mesure les Allemands dont il s'agit ont déjà pénétré en Allemagne en provenance de Pologne, de Tchécoslovaquie et de Hongrie et pour qu'ils évaluent la durée et la cadence que pourront comporter les transferts ultérieurs, compte tenu de la situation actuelle en Allemagne. Le gouvernement tchécoslovaque, le gouvernement provisoire polonais et le conseil de contrôle en Hongrie sont en même temps informés de ce qui précède et sont incités à surseoir à toute expulsion, pendant que les gouvernements intéressés examineront les rapports de leurs représentants en comité de contrôle. »
XIV. - Entretiens militaires
Pendant la durée de la Conférence, il y a eu des réunions entre les chefs d'état-major des trois gouvernements, au cours desquelles les questions militaires d'un intérêt commun ont été examinées.Berlin, le 2 août 1945.
J. V. Staline.
H. S. Truman.
C. R. Attlee.
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