Titre premier. Du Territoire de la République.
Titre II. Des Haïtiens et de leurs droits.
Titre III. De la souveraineté et des pouvoirs qui en dérivent.
Titre IV. Des Finances.
Titre V. De la force publique.
Titre VI. Dispositions générales.
Titre VII. De la Révision de la Constitution.
Titre VIII. Dispositions transitoires.
Après avoir gouverné Haïti pendant 25 ans, Boyer doit partir en exil, le 13 mars 1843, à la suite d'une révolte militaire, dirigée par Charles Hérard Rivière, qui devient chef du Gouvernement provisoire, puis président élu par l'Assemblée constituante le 30 décembre 1843.
Mais, la politique de son Gouvernement provoque immédiatement plusieurs tentatives de sécession : la partie orientale, la République dominicaine, devient indépendante le 27 février 1844 ; dans le Nord, le général Guerrier est proclamé président, et dès le 3 mai Hérard Rivière part en exil et Guerrier est reconnu président de toute la partie occidentale, jusqu'à son décès, le 15 avril 1845. Le général Jean-Louis Pierrot lui succède pendant quelques mois, mais il est destitué le 1er mars 1846 et remplacé par le général Jean-Baptiste Riché.
La Constitution de 1843, très démocratique et bien rédigée, ne fut ainsi jamais appliquée. Riché remet en vigueur la précédente Constitution de 1816, et charge le Sénat de la réviser. La présidence à vie est rétablie par le nouveau texte constitutionnel approuvé le 14 novembre 1946. Mais Riché doit faire face à un mouvement de révolte de la paysannerie et il meurt, le 28 février 1847, peut-être empoisonné. Le Sénat porte à la présidence le général Faustin Soulouque. Celui-ci jugeant la présidence à vie insuffisante à ses ambitions, se proclame bientôt empereur.
Sources : Louis-Joseph Janvier, Les Constitutions d'Haïti, Paris, Marpon et Flammarion, 1886.
Le peuple haïtien proclame, en présence de l'Être suprême, la présente Constitution, pour consacrer à jamais ses droits, ses garanties civiles et politiques, et son indépendance nationale.
Titre premier. Du Territoire de la République.
Article premier.
L'île d'Haïti et les îles adjacentes qui en dépendent forment le territoire de la République.
Article 2.
Le territoire de la République est divisé en six départements.
Ces départements sont : Le Sud, l'Ouest, l'Artibonite, le Nord, le Cibao, l'Ozama.
Leurs limites seront établies par la loi.
Article 3.
Chaque département est subdivisé en arrondissements, chaque arrondissement en communes.
Le nombre et les limites de ces subdivisions seront déterminés par la loi.
Article 4.
Les limites des départements, le nombre et les limites des arrondissements et des communes, ne pourront
être changés ou rectifiés qu'en vertu d'une loi.
Article 5.
La République Haïtienne est une et indivisible, essentiellement libre, souveraine et indépendante.
Son territoire est inviolable et ne peut être aliéné par aucun traité.
Titre II. Des Haïtiens et de leurs droits.
Section première. Des Haïtiens.
Article 6.
Sont Haïtiens tous individus nés en Haïti ou descendant d'Africain ou d'Indien, et tous ceux nés en pays étrangers d'un Haïtien ou d'une Haïtienne ; sont également Haïtiens tous ceux qui, jusqu'à ce jour, ont été reconnus en cette qualité.
Article 7.
Tout Africain ou Indien, et leurs descendants sont habiles à devenir Haïtiens.
La loi règle les formalités de la naturalisation.
Section II. Des droits civils et politiques.
Article 8.
Aucun blanc ne pourra acquérir la qualité d'Haïtien ni le droit de posséder aucun immeuble en Haïti.
Article 9.
La réunion des droits civils et politiques constitue la qualité de citoyen.
Article 10.
L'exercice des droits civils est réglé par la loi.
Article 11.
Tout citoyen âgé de 21 ans exerce les droits politiques. Néanmoins les Haïtiens naturalisés ne sont admis à
cet exercice qu'après une année de résidence dans la République.
Article 12.
L'exercice des droits politiques se perd :
1° Par la naturalisation acquise en pays étranger ;
2° Par l'abandon de la Patrie au moment d'un danger imminent ;
3° Par l'acceptation, non autorisée, de fonctions publiques ou de pensions conférées par un gouvernement étranger ;
4° Par tous services rendus aux ennemis de la République, ou par toutes transactions faites avec eux ;
5° Par la condamnation contradictoire et définitive à des peines perpétuelles, à la fois afflictives et infamantes.
Article 13.
L'exercice des droits politiques est suspendu :
1° Par l'état de domestique à gages ;
2° Par l'état de banqueroutier simple ou frauduleux ;
3° Par l'état d'interdiction judiciaire, d'accusation ou de contumace ;
4° Par suite de condamnations judiciaires emportant la suspension des droits civils ;
5* Par suite d'un jugement constatant le refus du service dans la garde nationale.
La suspension cesse avec les causes qui y ont donné lieu.
Article 14.
L'exercice des droits politiques ne peut se perdre ni être suspendu que dans les cas exprimés aux articles
précédents.
Article 15.
La loi règle le cas où l'on peut recouvrer les droits politiques, le mode et les conditions à remplir à cet
effet.
Section III. Du droit public.
Article 16.
Les Haïtiens sont égaux devant la loi. Ils sont tous également admissibles aux emplois civils et militaires.
Article 17.
Il n'y a dans l'état aucune distinction d'ordres.
Article 18.
La liberté individuelle est garantie. Chacun est libre d'aller, de rester, de partir, sans pouvoir être arrêté, détenu ou exilé, que dans les cas prévus par la loi, et selon les formes qu'elle prescrit.
Article 19.
Pour que l'acte qui ordonne l'arrestation d'une personne puisse être exécuté, il faut :
1° Qu'il exprime formellement le motif de l'arrestation et la loi en exécution de laquelle elle est ordonnée ;
2" Qu'il émane d'un fonctionnaire à qui la loi ait donné formellement ce pouvoir ;
3° Qu'il soit notifié à la personne arrêtée et qu'il lui en soit laissé copie.
Toute arrestation faite hors des cas prévus par la loi et dans les formes qu'elle prescrit, toutes violences ou rigueurs employées dans l'exécution d'un mandat, sont des actes arbitraires auxquels chacun a le droit de résister.
Article 20.
Nul ne peut être distrait des juges que la Constitution ou la loi lui assigne.
Article 21.
La maison de toute personne habitant le territoire haïtien est un asile inviolable.
Aucune visite domiciliaire, aucune saisie de papiers, ne peut avoir lieu qu'en vertu de la loi et dans les formes qu'elle prescrit.
Article 22.
Aucune loi ne peut avoir d'effet rétroactif.
La loi rétroagit toutes les fois qu'elle ravit des droits acquis.
Article 23.
Nulle peine ne peut être établie ni appliquée qu'en vertu de la loi.
Article 24.
La propriété est inviolable et sacrée.
Les concessions et ventes faites par l'État demeurent irrévocables.
Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique, dans les cas et de la manière établie parla loi, et moyennant une juste et préalable indemnité.
Article 25.
La peine de la confiscation des biens ne peut être établie.
Article 26.
La peine de mort sera restreinte à certains cas déterminés par la loi.
Article 27.
Chacun a le droit d'exprimer ses opinions en toute matière, d'écrire, d'imprimer et de publier ses pensées.
Ce droit ne peut être restreint par aucune loi préventive ni fiscale.
Les abus de l'usage de ce droit sont définis et réprimés par la loi, sans qu'il puisse être porté atteinte à la liberté de la presse.
Article 28.
Tous les cultes sont également libres.
Chacun a le droit de professer sa religion et d'exercer librement son culte, pourvu qu'il ne trouble pas l'ordre public.
Article 29.
L'établissement d'une église ou d'un temple, et l'exercice d'un culte, peuvent être réglés par la loi.
Article 30.
Nul ne peut être contraint de concourir, d'une manière quelconque, aux actes et aux cérémonies d'un culte,
ni d'en observer les jours de repos.
Article 31.
L'enseignement est libre, et des écoles sont distribuées graduellement, à raison de la population.
Chaque commune a des écoles primaires de l'un et de l'autre sexe, gratuites et communes à tous les citoyens.
Les villes principales ont, en outre, des écoles supérieures où sont enseignés les éléments des sciences, des belles-lettres et des beaux-arts.
Les langues usitées dans le pays sont enseignées dans ces écoles.
Article 32.
Le jury est établi en toutes matières criminelles, et pour délits politiques et de la presse.
Sa décision n'est soumise à aucun recours.
Elle ne peut être formée contre l'accusé qu'au deux tiers des voix.
Article 33.
Les Haïtiens ont le droit de s'assembler paisiblement et sans armes, même pour s'occuper d'objets politiques, en se conformant aux lois qui peuvent régler l'exercice de ce droit, sans néanmoins le soumettre à une autorisation préalable.
Cette disposition ne s'applique point aux rassemblements dans les lieux publics, lesquels restent entièrement soumis aux lois de police.
Article 34.
Les Haïtiens ont le droit de s'associer ; ce droit ne peut être soumis à aucune mesure préventive.
Article 35.
Le droit de pétition est exercé personnellement par un ou plusieurs individus, jamais au nom d'un corps.
Les pétitions peuvent être adressées, soit au pouvoir exécutif, soit au pouvoir législatif.
Article 36.
Le secret des lettres est inviolable.
La loi détermine quels sont les agents responsables de la violation du secret des lettres confiées à la poste.
Article 37.
L'emploi des langues usitées en Haïti est facultatif, il ne peut être réglé que par la loi, et seulement pour les
actes de l'autorité publique et pour les affaires judiciaires.
Article 38.
Des établissements de secours publics et des maisons pénitentiaires seront créés et organisés dans les principales villes de la République.
Article 39.
Nulle autorisation préalable n'est nécessaire pour exercer des poursuites contre des fonctionnaires publics, pour fait de leur administration, sauf ce qui est statué à l'égard des secrétaires d'État.
Article 40.
La loi ne peut ni ajouter ni déroger à la Constitution.
La lettre de la Constitution doit toujours prévaloir.
Article 41.
Tout principe du droit public, quoique non consacré, est préexistant aux pouvoirs délégués par la présente Constitution.
Toute délégation de pouvoirs est restreinte dans ses termes.
Titre III. De la souveraineté et des pouvoirs qui en dérivent.
Article 42.
La souveraineté nationale réside dans l'universalité des citoyens.
Article 43.
L'exercice de cette souveraineté est délégué à trois pouvoirs électifs et temporaires.
Ces trois pouvoirs sont : le pouvoir législatif, le pouvoir exécutif et le pouvoir judiciaire.
Article 44.
Ces trois pouvoirs forment le gouvernement de la République, lequel est essentiellement civil et représentatif.
Article 45.
Chaque pouvoir s'exerce séparément ; chacun d'eux est indépendant des deux autres dans ses attributions.
Aucun d'eux ne peut les déléguer, ni sortir des limites qui lui sont fixées. La responsabilité est attachée à chacun des actes des trois pouvoirs.
Article 46.
Le pouvoir législatif est exercé par deux Chambres représentatives, une Chambre des communes et un Sénat.
Article 47.
Les deux Chambres se réunissent en Assemblée nationale dans les cas prévus par la Constitution.
Les pouvoirs de l'Assemblée nationale sont limités, et ne peuvent s'étendre à d'autres objets que ceux qui lui sont spécialement attribués par la Constitution.
Article 48.
Le pouvoir exécutif est délégué à un citoyen qui prend le titre de président de la République haïtienne et ne peut recevoir aucune autre qualification.
Article 49.
Les intérêts qui touchent exclusivement les communes et les arrondissements sont réglés par des comités municipaux et des conseils d'arrondissement.
Article 50.
Le pouvoir judiciaire est exercé par un tribunal de cassation, des tribunaux d'appel, des tribunaux de première instance et des tribunaux de paix.
Chapitre premier. Du Pouvoir législatif.
Section première. De la Chambre des Communes.
Article 51.
La Chambre des communes se compose de représentants du peuple, dont le nombre sera fixé par la loi, à raison de la population des communes.
Chaque commune aura au moins un représentant.
Article 52.
Jusqu'à ce que l'état de la population soit établi, et que la loi ait fixé le nombre des représentants du peuple, ce nombre est réglé ainsi qu'il suit :
Quatre pour le Port-Républicain; trois pour chacune des villes des Cayes, des Gonaïves, du Cap-Haïtien, de Saint-Yague et de Santo-Domingo ; deux pour chacune des communes de Jérémie et de Jacmel, et un pour chacune des autres communes.
Article 53.
Les représentants du peuple sont élus directement par les assemblées primaires de chaque commune, suivant le mode établi par la loi.
Article 54.
Pour être élu représentant du peuple, il faut :
1° Être âgé de 25 ans accomplis ;
2° Jouir des droits civils et politiques ;
3° Être propriétaire d'immeubles en Haïti ;
4° Être domicilié dans la commune.
Article 55.
L'Haïtien naturalisé devra, en outre des conditions prescrites par l'article précédent, justifier d'une résidence de deux années dans la République, pour être élu représentant du peuple.
Article 56.
Les représentants du peuple sont élus pour trois ans.
Leur renouvellement se fait intégralement.
Ils sont indéfiniment rééligibles.
Article 57.
En cas de mort, démission ou déchéance d'un représentant du peuple, l'assemblée primaire pourvoit à son remplacement pour le temps seulement qui reste à courir.
Article 58.
Pendant la durée de la session législative, chaque représentant du peuple reçoit, du trésor public, une indemnité de 200 gourdes par mois.
Il lui est, en outre, alloué une gourde par lieue pour frais de route.
Section II. Du Sénat.
Article 59.
Le Sénat se compose de trente-six représentants du peuple, à raison de six par chaque département.
Article 60.
Les sénateurs sont élus, savoir :
1° Pour le département du Sud, quatre par l'assemblée électorale des Cayes, et deux par celle de Jérémie ;
2° Pour le département de l'Ouest, quatre par l'assemblée électorale du Port-Républicain et deux par celle de Jacmel ;
3° Pour le département de l'Artibonite, six par l'assemblée électorale des Gonaïves ;
4° Pour le département du Nord, six par l'assemblée électorale du Cap-Haïtien ;
5° Pour le département de Cibao, six par l'assemblée électorale de Saint-Yague ;
6° Pour le département de l'Ozama, six par l'assemblée électorale de Santo-Domingo.
Article 61 .
Pour être élu sénateur, il faut :
1° Être âgé de 30 ans accomplis ;
2° Jouir des droits civils et politiques ;
3° Être propriétaire d'immeubles en Haïti ;
4° Être domicilié dans l'arrondissement électoral.
Article 62.
L'Haïtien naturalisé devra, en outre des conditions prescrites par l'article précédent, justifier d'une résidence de quatre années dans la République, pour être élu sénateur.
Article 03.
Les sénateurs sont élus pour six ans.
Leur renouvellement se fait par tiers tous les deux ans. En conséquence, ils se divisent, par la voie du sort, en trois séries ; chaque série se compose de douze sénateurs, à raison de deux par département.
Article 64.
Les sénateurs sont indéfiniment rééligibles.
Article 65.
En cas de mort, démission ou déchéance d'un sénateur, il est pourvu à son remplacement pour le temps seulement qui reste à courir.
Article 66.
Le Sénat ne peut s'assembler hors du temps de la session du Corps législatif, sauf les cas prévus par les articles 123 et 163.
Article 67.
Chaque sénateur reçoit du Trésor public une indemnité de 300 gourdes par mois durant la session seulement.
Il lui est, en outre, alloué une gourde par lieue, pour frais de route.
Section III. De l'Assemblée nationale.
Article 68.
A l'ouverture de chaque session annuelle, la Chambre des communes et le Sénat se réunissent en Assemblée nationale.
Article 69.
Le président du Sénat préside l'Assemblée nationale ; le président de la Chambre des communes est le vice-président ; les secrétaires du Sénat et de la Chambre des communes, sont les secrétaires de l'Assemblée nationale.
Article 70.
Les attributions de l'Assemblée nationale sont :
1° De proclamer le Président de la République, soit par suite du scrutin électoral, soit après le ballottage en cas de majorité non-absolue des votes ;
2° De déclarer la guerre sur le rapport du Pouvoir exécutif, de régler les représailles et de statuer sur tous les cas relatifs à la guerre ;
3° D'approuver ou de rejeter les traités de paix, d'alliance, de neutralité, de commerce et autres conventions internationales consenties par le Pouvoir exécutif.
Aucun traité n'aura d'effet que par la sanction de l'Assemblée nationale ;
4° D'autoriser le Pouvoir exécutif à contracter tous emprunts sur le crédit de la République ;
5" De permettre ou de défendre l'entrée des forces navales étrangères dans les ports de la République ;
6° D'accorder toute amnistie ; de statuer sur les recours en grâce ou en commutation de peines, sur la recommandation des juges ou du Pouvoir exécutif.
Dans ce cas, l'exécution du jugement de condamnation demeure suspendue.
7° D'autoriser l'établissement d'une banque nationale ;
8° De changer le lieu fixé pour la capitale de la République ;
9° De réviser la Constitution, lorsque le Pouvoir législatif a déclaré qu'il y avait lieu de le faire.
Section IV. De l'exercice du Pouvoir législatif.
Article 71.
Le siège du Corps législatif est fixé dans la capitale de la République.
Chaque Chambre a son local particulier, sauf les cas de la réunion des deux Chambres en Assemblée nationale.
Article 72.
Le Corps législatif s'assemble de plein droit chaque année, le premier lundi d'avril.
Sa session est de trois mois. En cas de nécessité, elle peut être prolongée jusqu'à quatre, soit par le Corps législatif, soit par le Pouvoir exécutif.
Le Corps législatif ne peut jamais être dissous, ni prorogé.
Article 73.
Dans l'intervalle des sessions, et en cas d'urgence, le Pouvoir exécutif peut convoquer les Chambres ou l'Assemblée nationale à l'extraordinaire.
Il leur rend compte alors de cette mesure par un message.
Article 74.
En cas de vacance de l'office de Président de la République, l'Assemblée nationale est tenue de se réunir dans les vingt jours au plus tard.
Article 75.
Les membres du Corps législatif représentent la nation entière.
Article 76.
Chaque Chambre vérifie les pouvoirs de ses membres, et juge les contestations qui s'élèvent à ce sujet.
Article 77.
Les membres de chaque Chambre prêtent individuellement le serment de maintenir les droits du peuple et d'être fidèles à la Constitution.
Article 78.
Les séances des Chambres et de l'Assemblée nationale sont publiques. Néanmoins, chaque Assemblée se forme en comité secret sur la demande de cinq membres.
L'Assemblée décide ensuite, à la majorité absolue, si la séance doit être reprise en public sur le même sujet.
Article 79.
On ne peut être à la fois membre des deux Chambres.
Article 80.
Les fonctions de représentant et celles de sénateur sont incompatibles avec les fonctions salariées par l'État ou à la nomination du Pouvoir exécutif.
Les membres du Corps législatif ne peuvent, durant la législature, accepter aucune fonction salariée à la nomination du Pouvoir exécutif, même en renonçant à leur mandat.
Article 81.
Le Pouvoir législatif fait des lois sur tous les objets d'intérêt public.
L'initiative appartient à chacune des deux Chambres et au Pouvoir exécutif.
Néanmoins, le Pouvoir exécutif ne peut proposer aucune loi relative aux recettes et aux dépenses de l'État, au contingent et à l'organisation de l'armée de terre et de mer, à la garde nationale, aux élections et à la responsabilité des secrétaires d'État et autres agents du Pouvoir exécutif.
Toute loi sur ces objets doit d'abord être votée par la Chambre des communes.
Article 82.
L'interprétation des lois par voie d'autorité n'appartient qu'au Pouvoir législatif.
Elle est donnée dans la forme d'une loi.
Article 83.
Aucune des deux Chambres ne peut prendre de résolution qu'autant que les deux tiers de ses membres se trouvent réunis.
Article 84.
Toute résolution est prise à la majorité absolue des suffrages, sauf les cas prévus par la Constitution.
Article 85.
Les votes sont émis par assis et levé, et par la voie du scrutin secret, si trois membres de l'Assemblée le réclament.
L'ensemble des lois est toujours voté au scrutin secret.
Article 86.
Chaque Chambre a le droit d'enquête sur tous les objets à elle attribués.
Article 87.
Tout projet de loi est soumis à trois lectures, à moins que la Chambre ne déclare qu'il y a urgence.
Il y aura, entre chaque lecture, un intervalle d'un jour au moins.
Article 88.
Un projet de loi ne peut être adopté par l'une des Chambres qu'après avoir été voté article par article.
Article 89.
Chaque Chambre a le droit d'amender et de diviser les articles et amendements proposés. Tout amendement fait par une Chambre doit être adopté par l'autre.
Article 90.
Toute loi admise par les deux Chambres est immédiatement adressée au Pouvoir exécutif, qui, avant de la promulguer, a le droit d'y faire des objections.
Dans ce cas, il renvoie la loi à la Chambre où elle a été primitivement votée, avec ses objections ; si elles sont admises, la loi est amendée par les deux Chambres.
Si elles sont rejetées, la loi est de nouveau adressée au Pouvoir exécutif pour être promulguée.
L'admission des objections, et les amendements auxquels elles peuvent donner lieu, sont votés aux deux tiers des voix et au scrutin secret.
Article 91.
Néanmoins, le Pouvoir exécutif ne peut faire aucune objection sur les lois dont l'initiative appartient exclusivement aux deux Chambres.
Ces lois sont promulguées immédiatement.
Article 92.
Le droit d'objection doit être exercé dans les délais suivants :
1° Dans les deux jours, pour les lois d'urgence, sans qu'en aucun cas l'objection puisse porter sur l'urgence ;
2° Dans les huit jours, pour les autres lois, le dimanche excepté.
Toutefois, si la session est close avant l'expiration de ce dernier délai, la loi demeure ajournée.
Article 93.
Si, dans les délais prescrits par l'article précédent, le Pouvoir exécutif ne fait aucune objection, la loi est
immédiatement promulguée.
Article 94.
Un projet de loi rejeté par l'une des Chambres ne peut être reproduit dans la même session.
Article 95.
Les lois sont rendues officielles par la voie d'un bulletin imprimé et numéroté, ayant pour titre : Bulletin des lois.
Article 96.
La loi prend date du jour où elle a été définitivement adoptée par les deux Chambres.
Nul n'a le droit de présenter, en personne, des pétitions aux Chambres.
Chaque Chambre a le droit de renvoyer aux secrétaires d'État les pétitions qui lui sont adressées.
Les secrétaires d'État sont tenus de donner des explications sur leur contenu, chaque fois que la Chambre l'exige.
Article 98.
Les membres du Corps législatif sont inviolables du jour de leur élection jusqu'à l'expiration de leur
mandat.
Ils ne peuvent être exclus de la Chambre dont ils font partie, ni être en aucun temps poursuivis et attaqués pour les opinions et votes émis par eux, soit dans l'exercice de leurs fonctions, soit à l'occasion de cet exercice.
Article 99.
Aucune contrainte par corps ne peut être exercée contre un membre du Corps législatif pendant la durée de son mandat.
Article 100.
Nul membre du Corps législatif ne peut être poursuivi ni arrêté en matière criminelle, correctionnelle ou
de police, durant son mandat, qu'après l'autorisation de la Chambre à laquelle il appartient ; sauf le cas de flagrant délit. Il en est référé à la Chambre sans délai.
Article 101.
En matière criminelle, tout membre du Corps législatif est mis en état d'accusation par la Chambre dont il fait partie, et jugé par le tribunal criminel de son domicile, avec l'assistance du jury.
Article 102.
Chaque Chambre, par son règlement, fixe sa discipline, et détermine le mode suivant lequel elle exerce ses attributions.
Article 103.
Aucun corps de troupe ne peut, pendant la session législative, séjourner dans un rayon de plus de quinze lieues du siège du Corps législatif, si ce n'est sur sa réquisition ou avec son consentement.
Chapitre II. Du Pouvoir exécutif.
Section première. Le Président de la République.
Article 104.
Le Président de la République est élu pour quatre ans.
Il entre en fonctions le 15 mai.
Article 105.
L'élection du Président est faite d'après le mode suivant :
Chaque assemblée électorale, désignée en l'article 60, élit deux candidats, dont l'un est pris dans l'arrondissement électoral et l'autre dans toute l'étendue de la République.
Les procès-verbaux d'élection sont adressés clos et cachetés au président de l'Assemblée nationale.
L'Assemblée nationale en fait l'ouverture sans délai, et constate, en séance publique, le nombre des votes émis par chaque candidat.
Si l'un des candidats réunit la majorité absolue des votes, il est proclamé Président de la République haïtienne.
Si aucun d'eux n'obtient cette majorité, les trois candidats qui ont le plus de suffrages sont ballottés au scrutin secret.
S'il y a égalité de suffrages, le ballottage a lieu entre les candidats qui ont obtenu le même nombre de votes.
Si le ballottage ne donne pas la majorité absolue, il est procédé à un nouveau ballottage entre les deux candidats qui ont le plus de voix.
En cas d'égalité de suffrages entre les deux candidats, le sort décide de l'élection.
Article 106.
Pour être élu Président il faut avoir atteint l'âge de trente-cinq ans.
L'Haïtien né en pays étranger, ou naturalisé, doit en outre justifier d'une résidence de dix années dans la République.
Article 107.
Nul ne peut être réélu Président qu'après un intervalle de quatre ans.
Article 108.
En cas de mort, démission ou déchéance du Président, celui qui le remplace est nommé pour quatre ans, et ses fonctions cessent toujours le 15 de mai, alors même que la quatrième année de son exercice ne serait point révolue.
Pendant la vacance, le Pouvoir exécutif est exercé par les secrétaires d'État réunis en conseil, et sous leur responsabilité.
Article 109.
Si le Président se trouve dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions, le conseil des secrétaires d'État est chargé de l'autorité exécutive tant que dure l'empêchement.
Article 110.
Avant d'entrer en fonctions, le Président prête devant l'Assemblée nationale le serment suivant :
« Je jure d'observer la Constitution et les lois du peuple haïtien, de maintenir l'indépendance nationale et l'intégrité du territoire. »
Article 111.
Le Président fait sceller les lois du sceau de la République, et les fait promulguer immédiatement après leur réception, aux termes des articles 90, 91, 92 et 93.
Il fait également sceller et promulguer les actes et décrets du Corps législatif et de l'Assemblée nationale.
Article 112.
Il est chargé de faire exécuter les lois, actes et décrets du Corps législatif et de l'Assemblée nationale.
Il fait tous règlements et arrêtés nécessaires à cet effet, sans pouvoir jamais suspendre ni arrêter les lois, actes et décrets eux-mêmes, ni se dispenser de leur exécution.
Article 113.
Le Président nomme et révoque les secrétaires d'État.
Article 114.
Il confère les grades dans l'armée conformément à la loi.
Article 115.
Il commande les forces de terre et de mer ; mais il ne peut les commander en personne qu'avec l'autorisation de l'Assemblée nationale.
Article 116.
Il nomme aux emplois d'administration générale et de relations extérieures, aux conditions établies par la loi.
Il ne nomme à d'autres emplois ou fonctions publiques, qu'en vertu de la Constitution ou de la disposition expresse d'une loi et aux conditions qu'elle prescrit.
Article 117.
Il fait les traités de paix, d'alliance, de neutralité, de commerce et autres conventions internationales, sauf la sanction de l'Assemblée nationale.
Article 118.
Toutes les mesures que prend le Président sont préalablement délibérées en conseil des secrétaires d'État.
Article 119.
Aucun acte du Président ne peut avoir d'effet, s'il n'est contresigné par un secrétaire d'État qui, par cela seul, s'en rend responsable avec lui.
Article 120.
Le Président est responsable de tous les abus d'autorité et excès de pouvoir qui se commettent dans son administration.
Article 121.
Il n'a d'autres pouvoirs que ceux que lui attribuent formellement la Constitution et les lois particulières portées en vertu de la Constitution.
Article 122.
A l'ouverture de chaque session, le Président, par un message, rend compte à l'Assemblée nationale de son administration pendant l'année expirée, et présente la situation générale de la République tant à l'intérieur qu'à l'extérieur.
Article 123.
La Chambre des communes a le droit d'accuser le Président et de le traduire devant le Sénat, en cas de malversation, de trahison ou de tout autre crime commis dans l'exercice de ses fonctions.
Le Sénat ne peut prononcer d'autres peines que celles de la déchéance et de la privation du droit d'exercer toute autre fonction publique, pendant un an au moins, ou cinq ans au plus.
S'il y a lieu à appliquer d'autres peines et à statuer sur l'exercice de l'action civile, il sera procédé devant les tribunaux ordinaires, soit sur l'accusation admise par la Chambre des communes, soit sur la poursuite des parties lésées.
La mise en accusation et la déclaration de culpabilité ne pourront être prononcées, respectivement, dans chaque Chambre, qu'à la majorité des deux tiers des suffrages.
Article 124.
La loi règle le mode de procéder contre le Président, dans les cas de crimes ou délits par lui commis, soit dans l'exercice de ses fonctions, soit hors de cet exercice.
Article 125.
Le Président ne peut avoir de garde particulière.
Article 126.
Il reçoit du Trésor public un traitement de 24.000 gourdes par an.
Les frais de tournée sont réglés par la loi.
Article 127.
Il réside au palais national de la capitale.
Section II. Des Secrétaires d'État.
Article 128.
Il y a quatre secrétaires d'État dont les départements sont :
1° L'intérieur et l'agriculture ;
2° La justice, l'instruction publique et les cultes ;
3" Les finances et le commerce ;
4° Les relations extérieures, la guerre et la marine.
Néanmoins, la loi peut répartir autrement les attributions de ces départements.
Article 129.
Nul ne peut être secrétaire d'État s'il n'est âgé de trente ans accomplis.
Article 130.
Les secrétaires d'État se forment en conseil, sous la présidence du Président de la République, ou de l'un d'eux désigné par le Président.
Toutes les délibérations sont consignées sur un registre et signées par les membres du Conseil.
Article 131.
Les secrétaires d'État correspondent immédiatement avec les autorités qui leur sont subordonnées.
Article 132.
Ils ont leur entrée dans chacune des Chambres, pour soutenir les projets de loi et les objections du pouvoir exécutif.
Les Chambres peuvent requérir la présence des secrétaires d'État, et les interpeller sur tous les faits de leur administration.
Article 133.
Les secrétaires d'État sont respectivement responsables, tant des actes du Président, qu'ils contresignent, que de ceux de leur département, ainsi que de l'inexécution des lois.
En aucun cas, l'ordre verbal ou écrit du Président ne peut soustraire un secrétaire d'État à la responsabilité.
Article 134.
La Chambre des communes a le droit d'accuser les secrétaires d'État, et de les traduire devant le tribunal de Cassation, qui seul a le droit de les juger, sections réunies ; sauf ce qui sera statué par la loi, quant à l'exercice de l'action civile par la partie lésée, et aux crimes et délits que les secrétaires d'État auraient commis hors de l'exercice de leurs fonctions.
Une loi déterminera les cas de responsabilité, les peines à infliger aux secrétaires d'État, et le mode de procéder contre eux, soit sur l'accusation admise par la Chambre des communes, soit sur la poursuite des parties lésées.
Article 135.
Chaque secrétaire d'État jouit d'un traitement annuel de 5,000 gourdes.
Section III. Des institutions communales et d'arrondissement.
Article 136.
Chaque arrondissement a pour chef d'administration un préfet, chaque commune, un maire.
Les attributions de ces fonctionnaires sont à la fois civiles et financières.
Article 137.
Le Président de la République nomme et révoque les préfets.
Les maires sont élus par les assemblées primaires.
Article 138.
Il est établi, savoir :
Un conseil par chaque arrondissement; un comité municipal par chaque commune.
Chaque conseil ou comité est présidé par le chef d'administration avec voix délibérative.
Article 139.
Ces institutions sont réglées par la loi.
La loi consacre l'application des principes suivants :
1° L'élection directe, tous les deux ans, pour les comités municipaux ;
2° La délégation des membres des comités municipaux, pour former les conseils d'arrondissement ;
3° L'attribution aux comités et conseils de tout ce qui est d'intérêt communal et d'arrondissement, sans préjudice de l'approbation de leurs actes, dans les cas et suivant le mode que la loi détermine ;
4° La publicité des séances des comités et des conseils dans les limites établies par la loi ;
5° La publicité des budgets et des comptes ;
6° L'intervention du Président de la République ou du Pouvoir législatif, pour empêcher que les comités et les conseils ne sortent de leurs attributions et ne blessent l'intérêt général.
Article 140.
La rédaction des actes de l'état civil et la tenue des registres sont exclusivement dans les attributions des autorités communales.
Article 141.
Les préfets sont salariés par l'État.
Les maires sont rétribués par leurs communes.
Chapitre III. Du Pouvoir judiciaire.
Article 142.
Les contestations qui ont pour objet des droits civils sont exclusivement du ressort des tribunaux.
Article 143.
Les contestations qui ont pour objet des droits politiques sont du ressort des tribunaux, sauf les exceptions établies par la loi.
Article 144.
Nul tribunal, nulle juridiction contentieuse ne peut être établie qu'en vertu d'une loi.
Il ne peut être créé de commissions ni de tribunaux extraordinaires, sous quelque dénomination que ce soit.
Article 145.
Il y a pour toute la République un tribunal de Cassation, composé de deux sections au moins. Son siège est dans la capitale.
Article 146.
Ce tribunal ne connaît pas du fond des affaires.
Article 147.
Néanmoins, en toute matière autre que celles soumises au jury, lorsque, sur un second recours, une même affaire se présentera entre les mêmes parties, le tribunal de cassation, en admettant le pourvoi, ne prononcera point de renvoi, et statuera sur le fond, sections réunies.
Article 148.
Chaque commune a un tribunal de paix.
Un tribunal de première instance est institué pour un ou plusieurs arrondissements. La loi détermine son ressort et le lieu où il est établi.
Il y a un tribunal d'appel pour chaque département ; son siège est au chef-lieu.
Article 149.
Les juges sont élus, savoir :
Pour les tribunaux de paix, par les assemblées primaires ;
Pour les tribunaux de première instance et d'appel, par les assemblées électorales de leur ressort respectif ;
Pour le tribunal de Cassation, par le Sénat, sur la présentation d'une liste simple de candidats par chacune des assemblées électorales du ressort des tribunaux d'appel.
Article 150.
Les juges de paix sont élus pour trois ans, ceux des autres tribunaux pour neuf ans.
Ils sont indéfiniment rééligibles.
Aucun juge pendant la durée de ses fonctions ne peut être destitué ni suspendu que par un jugement.
Article 151,
En cas de mort, de démission ou de destitution d'un juge, l'assemblée électorale pourvoit à son remplacement pour le temps seulement qui reste à courir.
Article 152.
Nul ne peut être élu juge, s'il n'a trente ans accomplis, pour le tribunal de Cassation, et vingt-cinq ans accomplis pour les autres tribunaux.
Article 153.
Le Président de la République nomme et révoque les officiers du ministère public près les tribunaux de première instance, d'appel et de Cassation.
Article 154.
Les fonctions de juge sont incompatibles avec les fonctions salariées par l'État et à la nomination du Pouvoir exécutif.
L'incompatibilité à raison de la parenté est réglée par la loi.
Article 155.
Le traitement des membres du corps judiciaire est fixé par la loi.
Article 156.
Il y a des tribunaux de commerce dans les lieux déterminés par la loi. Elle règle leur organisation, les attributions, le mode d'élection de leurs membres et la durée des fonctions de ces derniers.
Article 157.
Des lois particulières règlent l'organisation des tribunaux militaires, leurs attributions, les droits et obligations des membres de ces tribunaux et la durée de leurs fonctions.
Tout délit civil commis par un militaire, à moins qu'il ne soit dans un camp ou en campagne, est jugé par les tribunaux criminels ordinaires.
Il en est de même de toute accusation contre un militaire, dans laquelle un individu non militaire est compris.
Article 158.
Les audiences des tribunaux sont publiques, à moins que cette publicité ne soit dangereuse pour l'ordre public et les bonnes moeurs. Dans ce cas, le tribunal le déclare par un jugement.
En matière de délits politiques et de presse, le huis-clos ne peut être prononcé.
Article 159.
Tout arrêt ou jugement est motivé. Il est prononcé en audience publique.
Article 160.
Les arrêts et jugements sont exécutés au nom de la République. Ils portent un mandement aux officiers du ministère public et aux agents de la force publique.
Les actes des notaires sont mis dans la même forme, lorsqu'il s'agit de leur exécution forcée.
Article 161.
Le tribunal de Cassation prononce sur les conflits d'attributions, d'après le mode réglé par la loi. Il connaît aussi des jugements des conseils militaires pour cause d'incompétence.
Article 162.
Les tribunaux doivent refuser d'appliquer une loi inconstitutionnelle.
Ils n'appliqueront les arrêts et règlements généraux d'administration publique qu'autant qu'ils seront conformes aux lois.
Article 163.
En cas de forfaiture, tout juge ou officier du ministère public est mis en état d'accusation par l'une des sections du tribunal de Cassation.
S'il s'agit d'un tribunal entier, la mise en accusation est prononcée par le tribunal de Cassation, sections réunies.
S'il s'agit du tribunal de Cassation, d'une de ses sections ou de l'un de ses membres, la mise en accusation est prononcée par la Chambre des communes et le jugement par le Sénat.
La décision de chacune des Chambres est prise à la majorité des deux tiers des membres présents, et la peine à prononcer par le Sénat ne peut être que la révocation des fonctions et l'inadmissibilité, pendant un certain temps, à toutes les charges publiques, mais le condamné est renvoyé, s'il y a lieu, devant les tribunaux ordinaires et puni conformément aux lois.
La loi règle le mode de procéder contre les juges, dans les cas de crimes ou délits par eux commis, soit dans l'exercice de leurs fonctions, soit hors de cet exercice.
Chapitre IV. Des Assemblées primaires et électorales.
Article 164.
Tout citoyen, âgé de vingt-et-un ans, a le droit de voter aux assemblées primaires et électorales, s'il est propriétaire foncier, s'il a l'exploitation d'une ferme dont la durée du bail n'est pas moindre de neuf ans, ou s'il exerce une profession, un emploi ou une industrie quelconque.
Article 165.
Les assemblées primaires s'assemblent de plein droit, dans chaque commune, le 10 janvier de chaque année, selon qu'il y a lieu et suivant le mode établi par la loi.
Article 166.
Elles ont pour objet :
1° D'élire les représentants du peuple, les juges de paix, les maires et les conseillers municipaux aux époques fixées par la Constitution ;
2° De nommer les électeurs.
Article 167.
Le nombre des électeurs de chaque commune est triple de celui des représentants du peuple.
Article 168.
Les assemblées électorales se réunissent de plein droit le 15 février de chaque année, selon qu'il y a lieu et suivant le mode établi par la loi.
Article 169.
Elles ont pour objet :
1° D'élire les sénateurs et les candidats à la Présidence dans les villes désignées en l'article 60 ;
2° D'élire les candidats au tribunal de Cassation et les juges aux tribunaux d'appel, au chef-lieu de chaque département ;
3° D'élire les juges aux tribunaux de première instance, au siège de chaque ressort ;
4° De pourvoir au remplacement de ces fonctionnaires, dans les cas prévus par la Constitution.
Article 170.
Toutes les élections se font à la majorité absolue des suffrages et au scrutin secret.
Article 471.
Aucune élection ne peut avoir lieu dans une assemblée électorale qu'autant que les deux tiers au moins des électeurs sont présents.
Article 172.
Hors le cas de remplacement par mort, démission, déchéance ou destitution, les élections ne peuvent être faites qu'à l'expiration de l'année qui termine la période du renouvellement des fonctionnaires.
Article 173.
Les assemblées primaires et électorales ne peuvent s'occuper d'aucun autre objet que de celui des élections qui leur sont respectivement attribuées par la Constitution.
Elles sont tenues de se dissoudre dès que cet objet est rempli.
Titre IV. Des Finances.
Article 174.
Aucun impôt au profit de l'État ne peut être établi que par une loi.
Aucune charge, aucune imposition, soit d'arrondissement, soit communale, ne peut être établie que du consentement respectif du conseil d'arrondissement ou du comité municipal de la commune.
La loi détermine les exceptions dont l'expérience démontrera la nécessité, relativement aux impositions d'arrondissement et communales.
Article 175.
Les impôts au profit de l'État sont votés annuellement.
Les lois qui les établissent n'ont de force que pour un an, si elles ne sont pas renouvelées.
Article 176.
Il ne peut être établi de privilèges en matière d'impôts.
Nulle exception ou modération d'impôt ne peut être établie que par une loi.
Article 177.
Hors les cas formellement exceptés par la loi, aucune rétribution ne peut être exigée des citoyens qu'à titre d'impôt au profit de l'État, de l'arrondissement ou de la commune.
Article 178.
Aucune pension, aucune gratification à la charge du trésor public ne peut être accordée qu'en vertu d'une loi.
Article 179.
Le budget de chaque secrétairerie d'État est divisé en chapitres : aucune somme allouée pour un chapitre ne peut être reportée au crédit d'un autre chapitre et employée à d'autres dépenses sans une loi.
Article 180.
Chaque année, les Chambres arrêtent :
1° Le compte des recettes et dépenses de l'année ou des années précédentes, avec distinction de chaque département ;
2° Le budget général de l'État, contenant l'aperçu des recettes, et la proposition des fonds assignés pour l'année à chaque secrétairerie d'État.
Article 181.
La Chambre des comptes est composée de cinq membres. Ils sont nommés par le Président de la République et révocables à sa volonté.
Article 182.
La Chambre des comptes est chargée de l'examen et de la liquidation des comptes de l'administration générale et de tous comptables envers le trésor public.
Elle veille à ce qu'aucun article des dépenses du budget ne soit dépassé et qu'aucun transfert n'ait lieu. Elle arrête les comptes des différentes administrations de l'État, et est chargée de recueillir, à cet effet, tout renseignement et toute pièce comptable nécessaire.
Le compte général de l'État est soumis aux Chambres avec les observations de la Chambre des comptes.
Cette Chambre est organisée par une loi.
Article 183.
La loi règle le titre, le poids, la valeur, l'empreinte et la dénomination des monnaies.
L'effigie ne peut être que celle de la République.
Titre V. De la force publique.
Article 184.
La force publique est instituée pour défendre l'État contre les ennemis du dehors, et pour assurer au dedans le maintien de l'exécution des lois.
Article 185.
L'armée est essentiellement obéissante ; nul corps armé ne peut délibérer.
Article 186.
L'armée sera réduite au pied de paix, et son contingent est voté annuellement.
La loi qui le fixe n'a de force que pour un an, si elle n'est pas renouvelée.
Nul ne peut recevoir de solde s'il ne fait partie de ce contingent.
Article 187.
Le mode de recrutement de l'armée est déterminé par la loi.
Elle règle également l'avancement, les droits et les obligations des militaires.
Il ne pourra jamais être créé de corps privilégié.
Article 188.
L'organisation et les attributions de la gendarmerie font l'objet d'une loi.
Article 189.
La garde nationale est placée sous l'autorité immédiate des comités municipaux. Elle est organisée par une loi.
Tous les grades sont électifs et temporaires.
Article 190.
La garde nationale ne peut être mobilisée en tout ou en partie que dans les cas prévus par la loi.
Article 191.
Les militaires ne peuvent être privés de leurs grades, honneurs et pensions que de la manière déterminée par la loi.
Titre VI. Dispositions générales.
Article 192.
Les couleurs nationales sont le bleu et le rouge placés horizontalement.
Les armes de la République sont le palmiste surmonté du bonnet de la liberté et orné d'un trophée d'armes avec la légende : L'union fait la force.
Article 193.
La ville du Port-Républicain (ci-devant Port-au-Prince) est la capitale de la République haïtienne et le siège du gouvernement.
Article 194,
Aucun serment ne peut être imposé qu'en vertu de la loi. Elle en détermine la formule.
Article 195.
Tout étranger qui se trouve sur le territoire de la République jouit de la protection accordée aux personnes et aux biens, sauf les exceptions établies par la loi.
Article 196.
La loi établit un système uniforme de poids et mesures.
Article 197.
Les fêtes nationales sont : celle de l'Indépendance d'Haïti, le 1er janvier ; celle de l'Agriculture, le 1" mai ; celle d'Alexandre Pétion, le 2 avril ; celle de la Régénération, le 27 janvier de chaque année.
Article 198,
Aucune loi, aucun arrêté ou règlement d'administration publique n'est obligatoire qu'après avoir été publié dans la forme déterminée par la loi.
Article 199,
Aucune place, aucune partie du territoire ne peut être déclarée en état de siège que dans les cas d'invasion imminente ou effectuée de la part d'une force étrangère, ou de troubles civils. Dans le premier cas, la déclaration est faite par le Président de la République. Dans le second cas, elle ne peut l'être que par une loi, à moins que les Chambres ne soient pas assemblées.
Le cas arrivant, le Président les convoque à l'extraordinaire, et leur soumet, par un message, l'acte déclaratif de l'état de siège.
La capitale ne peut en aucun cas être mise en état de siège qu'en vertu d'une loi.
Article 200.
La Constitution ne peut être suspendue en tout ou en partie.
Elle est confiée au patriotisme et au courage de tous les citoyens.
Titre VII. De la Révision de la Constitution.
Article 201.
Le pouvoir législatif, sur la proposition de l'une des Chambres, a le droit de déclarer qu'il y a lieu à réviser telles dispositions constitutionnelles qu'il désigne.
Cette déclaration, qui ne peut être faite que dans la dernière session d'une période de la Chambre des communes, est publiée immédiatement dans toute l'étendue de la République.
Article 202.
Si, à la session suivante, les deux Chambres admettent la révision proposée, elles se réunissent en Assemblée nationale, et statuent sur les points soumis à la révision.
Article 203.
L'Assemblée nationale ne peut délibérer si les deux tiers, au moins, des membres qui la composent ne sont présents.
Aucune déclaration ne peut être faite, aucun changement ne peut être adopté qu'à la majorité des deux tiers des suffrages.
Titre VIII. Dispositions transitoires.
Article 204.
Le Président de la République sera élu pour la première fois par l'Assemblée constituante.
Cette Assemblée recevra son serment et l'installera dans ses fonctions.
Article 205.
L'Assemblée constituante restera en permanence et fera les actes législatifs jusqu'à la réunion des deux Chambres.
Article 206.
Les assemblées primaires et électorales seront convoquées dans les plus brefs délais pour la formation des deux Chambres.
Ces délais seront fixés par un décret de l'Assemblée constituante.
Article 207.
Aussitôt que le Pouvoir législatif sera constitué, l'Assemblée constituante se déclarera dissoute.
Article 208.
La première session législative ne sera que de deux mois.
En cas de nécessité, elle pourra néanmoins être prolongée d'un mois.
Article 209.
Les tribunaux actuels et leur personnel sont maintenus jusqu'à ce qu'il y ait été pourvu par une loi.
Article 210.
La présente Constitution sera publiée et exécutée dans toute l'étendue de la République ; toutes lois, décrets, arrêtés, règlements et autres actes qui y sont contraires seront annulés.
Article unique.
En conformité de l'article 204, le citoyen Charles Hérard aîné (Rivière), ayant réuni la majorité des suffrages, est proclamé Président de la République haïtienne.
Il entrera en charge immédiatement, pour en sortir le 15 de mai 1848.
Fait au Port-Républicain, le 30 décembre 1843, an XL de l'Indépendance d'Haïti et le 1er de la Régénération.
Signé : Adelson Douyon, Alcius Ponthieux, Francklin, Bazin, A. Larochel, A. Martin, Davezac, A. Clément, Bédainque , R. J. Simon, Valdès, R. Alexandre, Louis-Joseph Baille, Charles Picart, C. M. Westen, Corvoisier, Barjon fils, David Saint-Preux, A J Chanlatte, Mouras fils, David Troy, D. Benoit, P. Panayoti, D. Lespinasse, Dorsaintville Dautant, P. André, P. Beaufossé, D. Thézard, Ch. Devimeux , F Dorville, F Poisson, F. Donat, Nelcourt, F. Peralta, Prophète, G. Hipolite, Fabre Geffrard, Salès, J. S. Hippolyte, Baugé, Aug. Elie, J Latortue, J Courtois, Mullery, R. A. Laborde, J. Paul, J Magny, F Acloque, J François, J Ch. Junca, J. L. Santel, J. Saint-Amand, Dupérier, J Oscar Laporte, Fontil Tesson, Mode fils, Pilorge, Dr J. H. Fresnel, Lubérisse Barthelemy, Laudun, Lapice, L. Normil Dubois, Joseph-Alexandre Dupuy, Joseph Borelly, Montmorency Benjamin, Muzaine, M. Ambroise, M. Volel, M. B. Castellano, Miguel Antonio, Rojas, François Romain, Lherisson, Maximilien Zamor, P. Bergès, J. Népomucène Tejera, P L Osias, Tabuteau, B. A. Dupuy, P. Michel, P' A Sthélé, Remigio del Castillo, T. A. Blanchet, V. Plésance, S. Simonisse, S. Paret, Saint-Aude fils, Torribio Lopez, Villanueva, Thomas Presse, E. Heurtelou, Villefranche, E. Manigat, M. Marsse , M. J. Charlot, F. Roche, Charles Alerte, Covin aîné, N. Félix, E. Nau, S. Hérard Dumesle, président ; Louis B. Eusèbe, vice-président ; Damier, Grandchamp fils, Vrigneaux, J. A. Gardère, secrétaires.
Pour obtenir davantage d'informations sur le pays et sur le texte ci-dessus,
voir la fiche Haïti.
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