Haïti


Constitution du 19 décembre 1957.

Préambule.
Titre premier. Du territoire de la République.
Titre ll. Des Droits.
Titre lll. Des Devoirs.
Titre lV. De la souveraineté nationale.
Titre V. Des assemblées primaires.
Titre Vl. Du régime administratif.
Titre Vll. Des finances publiques.
Titre Vlll. Du régime économique.
Titre lX. Du régime social.
Titre X. De la Culture.
Titre Xl. Santé et assistance sociale.
Titre Xll. Des Forces armées.
Titre Xlll. Dispositions générales.
Titre XlV. De la révision constitutionnelle.
Titre XV. Dispositions transitoires.

    Le colonel Magloire, élu président en 1950, est poussé à la démission le 6 décembre 1956 par des manifestations populaires. Cinq gouvernements provisoires se succèdent en quelques mois, puis le général Kébreau organise une élection présidentielle, le 22 septembre 1957, qui permet à François Duvalier de devenir président de la République. Une nouvelle Constitution est alors approuvée le 19 décembre 1957.
    Pour conserver le pouvoir, Duvalier devenu « Papa Doc », favorise le vaudou contre l'Église catholique, utilise un discours raciste à l'encontre des Mulâtres et s'appuie sur une milice privée, les
Tontons macoutes. Pour éviter l'aléa électoral, il organise des élections à candidat unique et fait prolonger, en 1961, son mandat de six ans ; puis il se fait proclamer en 1964 président à vie — Référendum du 14 juin 1964. A son décès, le 21 avril 1971, il laisse le pouvoir à son fils Jean-Claude, « Bébé Doc » âgé de 19 ans, en application d'une réforme constitutionnelle approuvée le 31 janvier précédent avec 100% de oui (2.391.916 voix contre 0 !).
    Une nouvelle Constitution est établie en 1983, mais en acceptant d'exterminer tous les porcs haïtiens pour importer des porcs des États-Unis, Jean-Claude Duvalier ruine l'économie paysanne et provoque un soulèvement populaire qui le chasse le 7 février 1986. Il se réfugie alors en France avec son trésor de guerre.
    Un Conseil de Gouvernement présidé par le général Henri Namphy prend le pouvoir. Le 29 mars 1987, une nouvelle Constitution est approuvée, mais l'élection présidentielle prévue le 29 novembre 1987 est annulée à la suite de tueries dans les bureaux de vote. Le scrutin du 17 janvier 1988 est remporté par Leslie Manigat, mais le 20 juin suivant le général Namphy reprend le pouvoir. Celui-ci est renversé à son tour par le général Prosper Avril, le 17 septembre 1988. Et ce dernier doit s'exiler le 10 mars 1990 à la suite de manifestations de rue et sous la pression des États-Unis et de la France. Le chef de l'armée, le major général Hérard Abraham, assure l'intérim et,
en accord avec les partis d'opposition, remet le pouvoir, le 13 mars, à Ertha Pascal-Trouillot, membre de la Cour de cassation, chargée d'organiser une transition démocratique. Un prêtre catholique, à la tête d'une coalition de gauche remporte l'élection du 16 décembre 1990, et avec l'accord de l'armée devient président le 7 février 1991. Mais il est bientôt chassé, le 30 septembre 1991, par le nouveau chef de l'armée, le général Raoul Cédras...

Voir la Constitution de 1950.
Voir la Constitution de 1964.

Source : Brochure : Constitution de la République d'Haïti, 1957, Imprimerie de l'État, Port-au-Prince, 39 p..


Préambule.

Le Peuple Haïtien proclame la présente Constitution,
Pour consacrer Ses Droits, Ses Libertés, Sa Souveraineté. Son Indépendance Nationale et les Principes Démocratiques qui doivent être le fondement de Sa Vie ;
Pour définir Ses Devoirs civiques et ses responsabilités ;
Pour établir l'équilibre des Pouvoirs de l'État ;
Pour instaurer une Organisation efficiente de l'Administration Publique ;
Pour assainir les Finances Publiques et développer l'Économie Nationale ;
Pour assurer la Justice Sociale et protéger le Travail ;
Pour procurer le bénéfice de la Culture à tous les haïtiens sans distinction ;
Pour préserver la Santé des Populations urbaines et rurales et garantir la Sécurité Sociale;
Pour consolider la Paix intérieure ;
Pour constituer ainsi une Nation Haïtienne socialement juste, économiquement libre et politiquement indépendante.

Titre premier.
Du territoire de la République.

Article premier.

La République d'Haïti est une, indivisible, libre, souveraine, indépendante, démocratique et sociale.

Port-au-Prince, sa capitale, est le siège de son Gouvernement, ce siège peut être transporté ailleurs en cas de force majeure.

Toutes les îles, qui se trouvent dans les limites consacrées par le Droit des Gens et dont les principales sont : La Tortue, la Gonave, l'île à Vache, Les Cayemittes, la Navase, La Grande Caye, font partie intégrante du Territoire de la République, lequel est inviolable et ne peut être aliéné par aucun Traité ni Convention.

Article 2.

Le Territoire de la République est divisé en neuf départements qui sont : Le département du Nord, le département du Nord-Est, le département du Nord-Ouest, le département de l'Artibonite, le département du Centre, le département de l'Ouest, le département du Sud-Est, le département du Sud et le département de la Grande Anse. La loi fixe les limites de ces départements.

Chaque département est subdivisé en arrondissements, chaque arrondissement en communes, chaque commune en quartiers et sections rurales.

La loi détermine le nombre et les limites de ces subdivisions dont elle règle également l'organisation et le fonctionnement.

Titre ll. Des Droits.

Chapitre I. Des Haïtiens et de leurs droits.

Article 3.

Les règles relatives à la Nationalité sont déterminées par la loi.

Article 4.

Est Haïtien d'origine tout individu né d'un père qui, lui-même, est né Haïtien. Est également Haïtien d'origine tout individu né en Haïti de père inconnu, mais d'une mère née elle-même Haïtienne.

Article 5.

La vie et la liberté des Haïtiens sont sacrées et doivent être respectées par les individus et par l'État.

L'État a l'obligation d'assurer en outre aux citoyens de la République la culture, le bien être économique et la justice sociale.

Chapitre ll. Des Droits civils et politiques

Article 6.

La réunion des droits civils et politiques constitue la qualité de Citoyen.

L'exercice des droits civils, indépendants des droits politiques, est réglé par la loi.

Article 7.

L'exercice, la jouissance, la suspension et la perte des droits politiques sont réglés par la loi.

Article 8.

Le suffrage constitue pour les citoyens un droit et un devoir, sauf les exceptions prévues par la présente Constitution.

Article 9.

Tous les Haïtiens âgés de vingt et un ans accomplis, de l'un et l'autre sexe, exercent leurs droits politiques et civils, s'ils réunissent les conditions déterminées par la Constitution et par la loi.

Chapitre lll. Des Étrangers.

Article 10.

Les étrangers après 10 ans de résidence continue sur le territoire de la République peuvent acquérir la nationalité haïtienne en se conformant aux règles établies par la loi.

Les étrangers naturalisés haïtiens ne sont admis à l'exercice des droits politiques qu'après cinq ans à partir de la date de leur naturalisation.

Article 11.

La qualité d'Haïtien naturalisé se perd dans tous les cas prévus par la loi notamment par la résidence continue pendant plus de trois ans hors du territoire haïtien, sans une autorisation régulièrement accordée.

Quiconque perd ainsi la nationalité ne peut la recouvrer.

Article 12.

Les personnes morales constituées conformément aux lois de la République et qui ont leur domicile légal hors du pays sont haïtiennes.

Les dispositions prévues par la loi au bénéfice des Haïtiens ne peuvent être frauduleusement détournées de leurs fins par le moyen de personnes morales haïtiennes.

Article 13.

Tout étranger qui se trouve sur le territoire d'Haïti doit obéissance aux lois et règlements de la République et jouit de la même protection accordée aux Haïtiens, sauf les mesures dont la nécessité se ferait sentir contre les ressortissants des pays où l'Haïtien ne jouit pas de cette même protection.

Article 14.

Le droit de propriété immobilière est accordé à l'étranger résidant en Haïti pour les besoins de sa demeure.

Cependant l'étranger résidant en Haïti ne peut être propriétaire de plus d'une maison d'habitation dans une même localité. ll ne peut, en aucun cas, se livrer au trafic de location d'immeubles.

Toutefois, les sociétés étrangères de constructions immobilières bénéficieront d'un statut spécial réglé par la loi.

Le droit de propriété immobilière est également accordé à l'étranger résidant en Haïti et aux sociétés étrangères pour les besoins de leurs entreprises agricoles, commerciales, industrielles ou d'enseignement, dans les limites et conditions déterminées par la loi.

Ce droit prendra fin dans une période de deux années après que l'étranger aura cessé de résider dans le pays ou qu'auront cessé les opérations de ces sociétés conformément à la loi qui détermine les règles à suivre pour la transmission et la liquidation des biens appartenant aux étrangers.

Tout citoyen est habile, sous le bénéfice de certains avantages déterminées par la loi, à dénoncer les violations de ces dispositions, violations qui entraînent la saisie pure et simple des biens par l'État.

Article 15.

La loi établit les cas et la forme dans lesquels l'entrée ou le séjour sur le Territoire national peut être refusé à tout Étranger.

L'autorité compétente peut lui refuser l'entrée du Pays ou l'en expulser lorsqu'il s'immisce, soit directement soit indirectement dans la vie politique interne de l'État ou propage des doctrines anarchistes ou contraires à la Démocratie.

Chapitre lV. Du Droit public.

Article 16.

Les Haïtiens sont égaux devant la loi sous réserve des avantages conférés aux Haïtiens d'origine.

Tout Haïtien a le droit de prendre une part effective au Gouvernement de son pays, d'occuper des fonctions publiques ou d'être nommé à des emplois de l'État, sans aucune distinction de couleur, de sexe ou de religion.

L'administration des services publics de l'État, en ce qui concerne les nominations, termes et conditions de service, doit être exempte de tout privilège, de toute faveur ou discrimination.

Article 17.

La liberté individuelle est garantie. Nul ne peut être poursuivi, arrêté ou détenu que dans les cas déterminés par la loi et selon les formes qu'elle prescrit.

Au surplus, l'arrestation et la détention ne peuvent avoir lieu que sur le mandat d'un fonctionnaire légalement compétent.

Pour que ce mandat puisse être exécuté, il faut :
1° qu'il exprime formellement le motif de la détention et la disposition légale qui punit le fait imputé ;
2° qu'il soit notifié et qu'il en soit laissé copie au moment de l'exécution à la personne détenue, sauf le cas de flagrant délit.

Nul ne peut être maintenu en détention s'il n'a comparu dans les quarante huit heures devant un juge appelé à statuer sur la légalité de l'arrestation, et si ce juge n'a confirmé la détention par décision motivée.

S'il s'agit d'une contravention, le détenu sera déféré au Juge de Paix qui statuera alors définitivement.

S'il s'agit de crimes et délits, il pourra, sans permission préalable et sur simple mémoire, se pourvoir par devant le Doyen du Tribunal Civil du ressort qui, sur les conclusions verbales du Commissaire du Gouvernement, statuera à l'extraordinaire, audience tenante, sans remise ni tour de rôle, toutes affaires cessantes, sur la légalité de l'arrestation.

Dans l'un et l'autre cas, si l'arrestation est jugée illégale, le détenu sera libéré, nonobstant appel ou pourvoi en cassation.

Toute rigueur ou contrainte qui n'est pas nécessaire pour appréhender une personne ou la maintenir en détention, toute pression morale ou brutalité physique sont interdites.

Toutes violations de cette disposition sont des actes arbitraires contre lesquels les parties lésées peuvent, sans autorisation préalable, se pourvoir devant les tribunaux compétents en poursuivant soit les auteurs. soit les exécutants, quelles qu'en soient les qualités et à quelque corps qu'ils appartiennent.

Article 18.

Nul ne peut être distrait des juges que la Constitution ou la loi lui assigne. Un civil ne pourra jamais être justiciable d'une Cour militaire quelle qu'elle soit, ni un militaire, en matière de droit commun, distrait du tribunal de droit commun, exception faite pour le cas d'État de siège légalement déclaré.

Article 19.

Aucune visite domiciliaire, aucune saisie de papiers ne peuvent avoir lieu, qu'en vertu de la loi et dans les formes qu'elle prescrit.

Article 20.

La loi ne peut avoir d'effet rétroactif, sauf en matière pénale, quand elle est favorable au délinquant.

La loi rétroagit toutes les fois qu'elle ravit des droits acquis.

Article 21.

Nulle peine ne peut être établie que par la loi ni appliquée que dans les cas qu'elle détermine.

Article 22.

Le droit de propriété est garanti aux citoyens. L'expropriation pour cause d'utilité publique légalement constatée ne peut avoir lieu que moyennant le paiement ou la consignation aux ordres de qui de droit d'une juste et préalable indemnité.

La propriété entraîne également des obligations, l'usage doit en être dans l'intérêt général.

Le propriétaire foncier a vis-a-vis de la communauté le devoir de cultiver, d'exploiter et de protéger le sol, notamment contre l'érosion.

La sanction de cette obligation est prévue par la loi.

Le droit de propriété ne s'étend pas aux sources, rivières ou autres cours d'eau, mines et carrières du sous-sol, qui font partie du domaine public de l'État.

La loi fixe les règles qui conditionnent la liberté de prospection et le droit d'exploiter les mines, minières et carrières du sous-sol en assurant au propriétaire de la surface, au concessionnaire et à l'État haïtien une participation équitable aux profits qu'amènera la mise en valeur de ces ressources naturelles.

La loi limite la hauteur maxima du droit de propriété.

Article 23.

La liberté de travail s'exerce sous le contrôle et la surveillance de l'État et est conditionnée par la loi.

Néanmoins, il est interdit, sauf les exceptions et les distinctions établies par la loi, à tous les importateurs, commissionnaires, agents de manufacture de se livrer au commerce de détail, même par personne interposée.

La loi définira ce que l'on entend par personne interposée.

Article 24.

Tout travailleur a droit à un juste salaire, au perfectionnement de son apprentissage, à la protection de sa santé, à la sécurité sociale, au bien-être de sa famille dans la mesure correspondant au développement économique du pays.

C'est une obligation morale pour l'employeur de contribuer, suivant ses moyens, à l'éducation de ses travailleurs illettrés.

Tout travailleur a le droit de participer, par l'intermédiaire de ses délégués, à la détermination collective des conditions de travail.

Tout travailleur a droit au repos et aux loisirs.

Tout travailleur a le droit de défendre ses intérêts par l'action syndicale. Chacun adhère au syndicat de ses activités professionnelles.

Le congé annuel payé est obligatoire.

Article 25.

La peine de mort ne peut être établie en matière politique, excepté pour cause de trahison.

Le crime de trahison consiste à prendre les armes contre la République d'Haïti, à se joindre aux ennemis déclarés d'Haïti, à leur prêter appui et secours.

Article 26.

Chacun a le droit d'exprimer ses opinions en toute matière et par tous les moyens en son pouvoir. L'expression de la pensée, quelle que soit la forme qu'elle affecte, ne peut être soumise à aucune censure préalable exception faite du cas d'État de Guerre déclarée.

Les abus du droit d'expression sont définis et réprimés par la loi, sans qu'il puisse être porté atteinte à la liberté d'expression.

Article 27.

Tous les Cultes et toutes les Religions sont également libres, et reconnus. Chacun a le droit de professer sa religion et d'exercer son culte pourvu qu'il ne trouble pas l'ordre public.

Nul ne peut contraindre quelqu'un à faire partie d'une association religieuse, ou à suivre un enseignement religieux contraire à ses convictions.

Article 28.

Le mariage tendant à la pureté des moeurs en contribuant à une meilleure organisation de la famille, base fondamentale de la société, l'État doit, par tous les moyens, en faciliter la réalisation et encourager la propagation dans le peuple et tout particulièrement dans la classe paysanne.

La loi protégera spécialement la femme haïtienne.

Article 29.

La liberté de l'enseignement s'exerce conformément à la loi, sous le contrôle de l'État qui doit veiller à la formation morale et civique de la jeunesse.

L'instruction publique est une charge de l'État et des Communes.

L'instruction primaire est obligatoire.

L'instruction publique est gratuite à tous les degrés.

L'enseignement technique et professionnel doit être généralisé.

L'accès aux études supérieures doit être ouvert en pleine égalité à tous, uniquement en fonction du mérite.

Article 30.

Le Jury, dans les cas déterminés par la loi, est établi en matière criminelle et pour les délits politiques commis par la voie de la presse ou autrement.

Article 31.

Les Haïtiens ont le droit de s'assembler paisiblement et sans armes, même pour s'occuper d'objets politiques, en se conformant aux lois qui peuvent régler l'exercice de ce droit, sans néanmoins le soumettre à l'autorisation préalable.

Cette disposition ne s'applique point aux rassemblements publics qui restent entièrement soumis aux lois de police.

Article 32.

Les Haïtiens ont le droit de s'associer et de se grouper en partis politiques, en syndicats et en coopératives.

Ce droit ne peut être soumis à aucune mesure préventive. Et nul ne peut être contraint de s'affilier à une association ou à un parti politique.

La loi, en réglementant les conditions de fonctionnement de ces groupements favorisera la formation des partis politiques, des syndicats et des coopératives.

Article 33.

Le droit de pétition est exercé personnellement par un ou plusieurs individus, jamais au nom d'un corps.

Toute pétition adressée au Corps législatif doit donner lieu à la procédure réglementaire permettant de statuer sur son objet.

Article 34.

Le secret des lettres est inviolable.

La loi détermine les agents responsables de la violation des lettres confiées à la Poste.

Article 35.

Le français est la langue officielle. Son emploi est obligatoire dans les services publics. La loi viendra déterminer les cas et les conditions dans lesquels l'usage du créole sera permis et même recommandé pour sauvegarder les intérêts matériels et moraux des citoyens qui ne connaissent pas suffisamment la langue française.

Article 36.

Le droit d'asile est reconnu aux réfugiés politiques sous la condition de se conformer aux lois du pays.

Article 37.

L'extradition n'est ni admise ni sollicitée en matière politique.

Article 38.

La loi ne peut ajouter ni déroger à la Constitution.

La lettre de la Constitution doit toujours prévaloir.

Titre lll. Des Devoirs.

Chapitre unique.
Du Devoir civique et de la responsabilité des fonctionnaires et employés publics

Article 39.

A la qualité de citoyen, aux droits civils et politiques se rattache le devoir civique.

Le devoir civique est l'ensemble des obligations du citoyen dans l'ordre moral, politique, social et économique vis-a-vis de l'État et de la Patrie.

Article 40.

Le fonctionnaire tel qu'il est défini et indiqué par la loi, avant de prendre possession de sa charge, jurera sur son honneur de remplir consciencieusement les devoirs de ses fonctions, d'être fidèle à la République, d'exécuter et de faire exécuter la Constitution et les lois ainsi que les règlements pris en vertu de la Constitution.

ll sera dressé de ce serment un procès-verbal signé du fonctionnaire et expédition sera délivrée à l'intéressé pour lui servir et valoir ce que de droit.

Article 41.

Les fonctionnaires qui ont connaissance d'infraction contre le fisc commise par leurs subordonnés doivent en informer, dans le plus bref délai, les autorités compétentes et sont considérés, s'ils ne le font pas en temps opportun, comme receleurs et poursuivis comme tels.

Article 42.

Les fonctionnaires ou employés publics qui s'enrichissent au dépens des finances publiques sont obligés de restituer à l'État ce qu'ils auront illégalement acquis, sans préjudice de la responsabilité criminelle qui leur incombe en vertu des lois.

L'enrichissement illicite pourra être établi par des indices et se déduira notamment de tous faits et circonstances indiquant une disproportion marquée entre les moyens (capital mobilier et immobilier du fonctionnaire) et le montant accumulé du traitement ou des émoluments de la fonction qu'il a occupée. On envisage comme formant un bloc, pour la détermination de cette augmentation, le capital du fonctionnaire ou employé, celui de sa femme, et ceux de ses enfants mineurs.

Les fonctionnaires et employés qu'indique la loi sont tenus de déclarer l'état de leur patrimoine au greffe du Tribunal civil dans les soixante jours qui suivent leur entrée en fonction. Le Commissaire du Gouvernement compétent peut prendre toutes mesures qu'il juge nécessaires pour vérifier l'exactitude de la déclaration.

Article 43.

Le fonctionnaire coupable des délits sus désignés ne peut bénéficier que de la prescription décennale qui commence à courir à partir de la date de la cessation de ses fonctions.

Article 44.

La violation de ces dispositions constitutionnelles est particulièrement sanctionnée par la loi ; et les responsabilités encourues de ce chef ne sont pas susceptibles d'amnistie. Le fonctionnaire coupable ne peut non plus bénéficier de grâce ou de commutation de peine.

Titre lV.
De la souveraineté nationale.

Chapitre premier. Des pouvoirs auxquels l'exercice de la Souveraineté est délégué.

Article 45.

La souveraineté nationale réside dans l'universalité des citoyens.

Article 46.

L'exercice de cette souveraineté est délégué à trois Pouvoirs : le Pouvoir législatif, le Pouvoir exécutif et le Pouvoir judiciaire.

lis forment le Gouvernement de la République, lequel est essentiellement civil, démocratique et représentatif.

Article 47.

Chaque Pouvoir est indépendant des deux autres dans ses attributions, qu'il exerce séparément.

Aucun d'eux ne peut déléguer ses attributions, ni sortir des limites qui lui sont fixées.

La responsabilité est attachée aux actes de chacun des trois Pouvoirs.

Chapitre 2. Du Pouvoir législatif

Section 1. Du Corps législatif

Article 48.

Le Pouvoir législatif est exercé par une Assemblée unique dénommée : « CHAMBRE LEGlSLATlVE ».

Article 49.

Le nombre des membres de la Chambre législative est fixé à 67 députés jusqu'à ce que la loi ait établi le nombre de citoyens que doit représenter chaque député.

En attendant, le nombre et l'étendue des circonscriptions par arrondissement seront fixés, en tenant compte de leur importance économique et politique et de la densité de la population.

Le député est élu à la majorité relative des votes émis par les assemblées primaires d'après les conditions et le mode prescrits par la loi.

Article 50.

Pour être membre du Corps législatif, il faut :
1° Être Haïtien et n'avoir jamais renoncé à sa nationalité ;
2° Être âgé de 25 ans accomplis ;
3° Jouir de ses droits civils et politiques ;
4° Avoir résidé au moins cinq ans dans la circonscription à représenter.

Article 51.

Les membres du Corps législatif sont élus pour six ans et sont indéfiniment rééligibles.

Ils entrent en fonction le deuxième lundi d'avril de l'année ou ils sont élus, sauf s'ils le sont pour remplir une vacance. Dans ce dernier cas ils entrent en fonction dès leur élection et leur mandat ne dure que le temps qui reste à courir.

Article 52.

En cas de mort, démission, déchéance, interdiction judiciaire ou acceptation de nouvelle fonction incompatible avec celle de membre du Corps législatif, il est pourvu au remplacement de celui-ci dans sa circonscription électorale pour le temps seulement qui reste à courir, par une élection spéciale sur convocation de l'assemblée primaire électorale faite par le Président de la République dans le mois de la vacance.

Néanmoins avant d'agréer une démission la Chambre législative peut entreprendre toutes sortes d'enquêtes sur les circonstances qui entourent cette démission.

Cette élection a lieu dans une période de trente jours après la convocation de l'assemblée primaire.

ll en est de même à défaut d'élections ou en cas de nullité des élections dans une ou plusieurs circonscriptions. Cependant si la vacance se produit au cours de la dernière session ordinaire de la législature ou après cette session, il n'y aura pas lieu à élection partielle.

Article 53.

Ne peuvent être membres du Corps législatif : Ceux qui ont des contrats ou concessions avec l'État aux fins d'exploitation des richesses nationales ou de services publics, ainsi que leurs représentants ou mandataires ou ceux des compagnies étrangères qui se trouvent dans cette situation, à moins qu'ils ne liquident publiquement ou ne cèdent leurs contrats à des tiers qui ne sont ni parents, ni alliés.

Section 2. De l'Assemblée nationale

Article 54.

Les membres du Corps législatif se réunissent en Assemblée nationale pour l'ouverture et la clôture de chaque session, ainsi que dans les cas prévus à l'article 55 de la présente Constitution.

Les pouvoirs de l'Assemblée nationale sont limités et ne peuvent s'étendre à d'autres objets que ceux qui lui sont spécialement attribués par la Constitution.

Article 55.

Les attributions de l'Assemblée nationale sont :
1° De recevoir le serment constitutionnel du Président de la République ;
2° De déclarer la guerre sur le rapport du Pouvoir exécutif ;
3° D'approuver ou de rejeter les Traités de paix et autres traités et conventions internationales ;
4° De réviser la Constitution ;
5° De s'ériger en haute cour de justice.

Article 56.

Les séances de l'Assemblée nationale sont publiques.

Néanmoins, elles peuvent avoir lieu à huis clos sur la demande de cinq membres et il sera ensuite décidé, à la majorité absolue, si la séance doit être reprise en public.

Article 57.

En cas d'urgence, lorsque le Corps législatif n'est pas en session, le Pouvoir exécutif peut convoquer l'Assemblée nationale en session extraordinaire.

Article 58.

La présence dans l'Assemblée nationale d'une majorité des 2/3 des membres du Corps législatif est nécessaire pour prendre les décisions.

Section 3. De l'exercice du Pouvoir législatif

Article 59.

Le siège du Corps législatif est fixé dans la Capitale de la République. Néanmoins suivant les circonstances, ce siège peut être transféré ailleurs au même lieu et en même temps que celui du Pouvoir exécutif.

Article 60.

Le Corps législatif se réunit de plein droit chaque année, le deuxième lundi d'avril.

La session prend date dès la première réunion du Corps législatif en Assemblée nationale.

La session dure trois mois. En cas de nécessité, elle peut être prolongée de un à deux mois par le Pouvoir exécutif ou le Pouvoir législatif.

Le Président de la République peut ajourner le Corps législatif en cas de conflit entre les deux pouvoirs, mais l'ajournement ne peut être de plus d'un mois ni de moins de quinze jours ; et pas plus de deux ajournements ne peuvent avoir lieu dans le cours d'une même session. Le temps de l'ajournement ne sera pas imputé sur la durée constitutionnelle de la session.

A la suite de deux crises ministérielles provoquées par un vote de blâme du Parlement, si après l'épuisement des deux ajournements prévus, au cours de la même session, le conflit persiste entre les deux pouvoirs et paralyse toutes activités exécutives, le décret de dissolution sera pris par l'Exécutif après avis du Conseil des secrétaires d'État.

Le même décret ordonnera de nouvelles élections qui auront lieu dans un délai de trois mois. La publication de ce décret entraînera le renvoi immédiat de tous les membres du Cabinet ministériel qui ne pourront, en aucun cas, faire partie de la prochaine composition gouvernementale.

Tout décret de dissolution du Parlement pris en dehors de la forme prescrite dans le présent article demeure nul et inopérant.

Article 61.

Dans l'intervalle des sessions et en cas d'urgence, le Président de la République peut convoquer le Corps législatif à l'extraordinaire.

ll lui rend alors compte de cette mesure par un message.

Dans le cas de convocation à l'extraordinaire, le Corps législatif ne peut s'occuper d'aucun objet étranger aux motifs de cette convocation.

Cependant tout membre du Corps législatif peut entretenir l'Assemblée de questions d'intérêt général.

Article 62.

Le Corps législatif vérifie et valide les pouvoirs de ses membres et juge souverainement les contestations qui s'élèvent à ce sujet.

Article 63.

Les membres du Corps législatif prêtent le serment suivant : « JE JURE DE MAINTENIR LES DROITS DU PEUPLE ET D'ÊTRE FlDELE A LA CONSTITUTION ».

Article 64.

Les séances du Corps législatif sont publiques.

L'Assemblée peut passer à huis clos sur la demande de cinq membres et décider ensuite à la majorité si la séance doit être reprise en public.

Article 65.

Aucun monopole ne peut être établi, sauf en faveur de l'État ou des Communes et seulement dans les cas et sous les conditions déterminés par la loi.

Cependant l'État ou les Communes dans l'exercice de ce privilège peuvent se substituer des sociétés ou des compagnies.

Dans ce cas, le contrat de concession devra être soumis à la ratification du Corps législatif.

Article 66.

Le pouvoir législatif fait des lois sur tous les objets d'intérêt général.

L'initiative en appartient tant au Corps législatif qu'au pouvoir exécutif.

Néanmoins le pouvoir exécutif a seul le droit de prendre l'initiative des lois concernant les dépenses publiques ; et le Corps législatif ne peut augmenter tout ou partie des dépenses proposées par le pouvoir exécutif.

Article 67.

Le Corps législatif, par ses règlements, nomme son personnel, fixe sa discipline et détermine le mode suivant lequel il exerce ses attributions.

ll peut, à la majorité des deux tiers, appliquer des peines disciplinaires à ses membres pour conduite répréhensible.

Article 68.

Les membres du Corps législatif sont inviolables et inamovibles du jour de leur prestation de serment jusqu'à l'expiration de leur mandat.

lis ne peuvent être exclus de l'Assemblée, ni être en aucun temps poursuivis et attaqués pour les opinions et votes émis par eux, dans l'exercice de leur fonction ou à l'occasion de cet exercice.

Article 69.

Aucune contrainte par corps ne peut être exercée contre un membre du Corps législatif pendant la durée de son mandat.

Article 70.

Nul membre du Corps législatif ne peut, durant son mandat, être poursuivi ni arrêté en matière criminelle, correctionnelle ou de simple police, même pour délit politique, si ce n'est avec l'autorisation de l'Assemblée, sauf le cas de flagrant délit en matière d'infractions punies de peine afflictive et infamante. ll en est alors référé sans délai à l'Assemblée législative si celle-ci est en session, dans le cas contraire, le Président de la République convoquera le Corps législatif à l'extraordinaire dans les 48 heures qui suivront l'arrestation de ce membre afin qu'il soit statué sur son cas.

Article 71.

Aucun acte de l'Assemblée législative ne peut être pris qu'à la majorité absolue des membres présents, excepté lorsqu'il est autrement prévu par la Constitution.

Article 72.

Le Corps législatif a le droit d'enquête sur les questions dont il est saisi.

Ce droit est limité par le principe de la séparation des pouvoirs conformément à l'article 47 de la présente Constitution.

Article 73.

Aucun projet ne peut être adopté par l'Assemblée qu'après avoir été voté article par article.

Article 74.

L'Assemblée législative a le droit d'amender et de diviser les articles proposés. Tout projet de loi ne deviendra loi qu'après avoir été voté dans son ensemble.

Tout projet de loi ne peut être retiré de la discussion tant qu'il n'a pas été définitivement voté.

Article 75.

Toute loi votée par le Corps législatif est immédiatement adressée au Président de la République qui, avant de la promulguer a le droit d'y faire objection en tout ou en partie.

Dans ce cas, il renvoie la loi avec les objections au Corps législatif.

Si la loi est amendée et votée par le Corps législatif, elle sera adressée de nouveau au Président de la République pour être promulguée.

Si les objections sont rejetées, la loi est renvoyée dans sa teneur primitive au Président de la République qui est dans l'obligation de la promulguer.

Le rejet des objections est voté à la majorité des deux tiers et les votes sont donnés par « OUl » et par « NON » et consignés en marge du procès-verbal à coté du nom de chaque membre de l'Assemblée.

Si les deux tiers ne s'abstiennent pas pour amener ce rejet, les objections sont acceptées.

Article 76.

Le droit d'objection doit être exercé dans un délai de huit jours à partir de la date de la réception de la loi par le Président de la République, à l'exclusion des dimanches, des jours de fêtes légales et nationales, de chômage ainsi que ceux d'ajournement du Corps législatif, conformément à l'article 60 de la présente Constitution.

Article 77.

Si dans les délais prescrits, le Président de la République ne fait aucune objection, la loi doit être promulguée, à moins que la session du Corps législatif n'ait pris fin avant l'expiration des délais ; dans ce cas, la loi demeure ajournée. La loi ainsi ajournée est, à l'ouverture de la session, adressée au Président de la République pour l'exercice de son droit d'objection.

Article 78.

Un projet rejeté par le Corps législatif ne peut être reproduit dans la même session.

Article 79.

Les lois et autres actes du Corps législatif sont rendus officiels par la voie du Moniteur et insérés dans le Bulletin imprimé et numéroté ayant pour titre « Bulletin des Lois et Actes ».

Article 80.

La loi prend date du jour de son adoption définitive par le Corps législatif mais elle ne devient obligatoire qu'après sa promulgation par le Président de la République et sa publication suivant les modes établis par la loi.

Article 81.

Nul ne peut en personne présenter des pétitions au Corps législatif.

Article 82.

L'interprétation des lois par voie d'autorité n'appartient qu'au pouvoir législatif ; elle est donnée dans la forme d'une loi.

Article 83.

Chaque membre du Corps législatif reçoit une indemnité mensuelle de DEUX MILLE GOURDES à partir de sa prestation de serment.

Article 84.

La fonction de membre du Corps législatif est incompatible avec toute autre fonction rétribuée par l'État, sauf celle de secrétaire d'État, sous-secrétaire d'État ou agent diplomatique.

Tout membre du Corps législatif devenu secrétaire d'État, sous- secrétaire d'État ou agent diplomatique cesse d'avoir droit à l'indemnité qui lui est allouée à l'article précédent, sauf s'il s'agit de mission temporaire.

Le parlementaire devenu secrétaire d'État, sous-secrétaire d'État ou agent diplomatique, ne pourra prendre part aux travaux de délibération du Corps législatif.

Article 85.

Le droit de questionner et d'interpeller un membre du Cabinet ou le Cabinet entier est reconnu à tout membre de l'Assemblée législative sur les faits et actes de l'administration de l'Exécutif.

La demande d'interpellation doit être appuyée du tiers des membres de l'Assemblée.

Chapitre 3. Du Pouvoir exécutif.

Section 1. Du Président de la République

Article 86.

Le Pouvoir exécutif est exercé par un citoyen qui reçoit le titre de Président de la République, assisté de secrétaires d'État, et de sous-secrétaires d'État.

Article 87.

La durée du mandat présidentiel est de six ans, et cette période commencera et se terminera le 15 mai sans qu'il soit possible au Chef du Pouvoir exécutif de continuer à exercer ses fonctions un jour de plus. S'il est élu pour remplir une vacance, il entre en fonction dès son élection et son mandat est censé commencer depuis le 15 mai précédant la date de son élection, et le terme constitutionnel prend fin même si la sixième année de son mandat n'est pas entièrement révolue.

Article 88.

Pour être élu Président de la République, il faut :
1° Être Haïtien d'origine et n'avoir jamais renoncé à sa nationalité ;
2° Être âgé de 40 ans accomplis ;
3° Jouir de ses droits civils et politiques ;
4° Avoir son domicile dans le pays ;
5° Avoir déjà reçu décharge de sa gestion, quand on a été comptable de deniers publics.

Article 89.

Avant d'entrer en fonction le Président de la République, prête devant l'Assemblée Nationale, le serment suivant :
« Je jure devant Dieu et devant la Nation de gérer honnêtement le patrimoine national, de travailler à la grandeur et à la prospérité du Peuple Haïtien, de respecter ses droits et ses libertés, d'observer et de faire observer fidèlement la Constitution et les lois de la République, de maintenir l'lndépendance nationale et l'intégrité du territoire ».

Article 90.

Le Président de la République nomme et révoque les secrétaires d'État ainsi que les fonctionnaires et employés publics.

ll est chargé de veiller à l'exécution des traités de la République.

ll prend toutes mesures à l'effet d'assurer le fonctionnement satisfaisant de tous organismes administratifs et financiers d'État.

ll fait sceller les lois du Sceau de la République et les promulgue dans le délai prescrit par les articles 75, 76, 77 de la présente Constitution.

ll est chargé de faire exécuter la Constitution et les lois, actes et décrets du Corps législatif et de l'Assemblée nationale.

ll fait tous règlements et arrêtés nécessaires à cet effet, sans pouvoir jamais suspendre et interpréter les lois, actes et décrets eux-mêmes, ni se dispenser de les exécuter.

ll ne nomme aux emplois et fonctions publics qu'en vertu de la Constitution ou de la disposition expresse d'une loi et aux conditions qu'elle prescrit.

ll pourvoit d'après les lois, à la sûreté intérieure et extérieure de l'État.

ll fait tous traités ou toutes conventions internationales, sauf la sanction de l'Assemblée nationale à la ratification de laquelle il soumet également tous accords exécutifs.

ll a la faculté de dissoudre le Corps législatif, conformément à l'article 60 de la présente Constitution.

ll a le droit de grâce et de commutation de peine, relativement à toutes condamnations passées en force de chose jugée, excepté le cas de mise en accusation par les Tribunaux ou par le Corps législatif ainsi qu'il est prévu aux articles 123, 124 et 125 de la présente Constitution.

ll ne peut accorder amnistie qu'en matière politique et selon les prévisions de la loi.

Article 91.

Si le Président de la République se trouve dans l'impossibilité temporaire d'exercer ses fonctions, le Conseil des secrétaires d'État est chargé de l'autorité exécutive tant que dure l'empêchement.

Article 92.

Toutes les mesures que prend le Président de la République sont préalablement délibérées en Conseil des secrétaires d'État.

Article 93.

Tous les actes du Président de la République, excepté les arrêtés portant nomination ou révocation des secrétaires d'État, sont contresignés par le secrétaire d'État intéressé.

Article 94.

Le Président de la République n'a d'autres pouvoirs que ceux que lui attribuent la Constitution et les lois particulières votées en vertu de la Constitution.

Article 95.

A l'ouverture de chaque session, le Président de la République, par un message, fait au Corps législatif, l'exposé général de la situation et lui transmet les rapports que lui adressent les différents secrétaires d'État.

Article 96.

Le Président de la République reçoit du Trésor public une indemnité mensuelle de DlX MlLLE GOURDES (G. 10.000,00).

Article 97.

Le Président de la République a sa résidence officielle au Palais national de la Capitale, sauf le cas de déplacement du siège du Gouvernement.

Section 2. De l'élection du Président de la République

Article 98.

Le Président de la République est élu par suffrages directs et à la majorité relative des voix exprimées par les électeurs.

La loi réglementera les cas de carence ou d'annulation d'élection dans une ou plusieurs localités.

Article 99.

Six mois avant le terme du mandat du Président en fonction, celui-ci convoque les assemblées primaires qui se réunissent sur cette convocation ou de plein droit, le deuxième dimanche de février aux fins d'élire le Président de la République.

L'organisation, le fonctionnement des bureaux de vote, le recensement des suffrages se feront dans les formes et délais déterminés par la loi.

Article 100.

En cas de vacance par décès, démission ou toute autre cause de la fonction de Président de la République, le président de la Cour de Cassation ou a son défaut, le président de l'Assemblée nationale, ou à défaut de celui-ci, le vice-président du Tribunal de Cassation et à défaut de ce dernier le vice-président de l'Assemblée nationale, est automatiquement investi du Pouvoir exécutif à titre provisoire.

Le Président bénéficiant de cette saisine provisoire ne pourra en aucun cas, être candidat à la Présidence et devra organiser les élections par suffrage direct dans un délai de trois mois (3 mois).

Le nouveau Chef d'État ainsi élu exercera ses pouvoirs pour un mandat régulier de six ans (6 ans).

La démission du Président de la République, pour être valable, doit être adressée directement à l'Assemblée Nationale et en cas de dissolution du Corps législatif, à la Cour de Cassation.

Section 3. Des secrétaires d'État

Article 101.

La loi fixe le nombre des départements ministériels.

Le nombre des secrétaires d'État ne peut être inférieur à cinq (5).

Le Président de la République peut, quand il le juge nécessaire, leur adjoindre des sous-secrétaires d'État dont les attributions sont déterminées par la loi.

Pour être nommé secrétaire et sous-secrétaire d'État, il faut :
1° Être Haïtien et n'avoir jamais renoncé à sa nationalité ;
2° Être âgé de 30 ans accomplis ;
3° Jouir de ses droits civils et politiques.

Article 102.

Les secrétaires d'État se réunissent en Conseil sous la présidence du Président de la République ou de l'un d'eux délégué par lui. Toutes les délibérations du Conseil sont consignées sur un registre et les procès-verbaux de chaque séance sont signés par les membres présents du Conseil.

Article 103.

Les secrétaires d'État ont leur entrée à l'Assemblée législative ainsi qu'à l'Assemblée nationale pour soutenir les projets de loi et les objections du Pouvoir exécutif.

Article 104.

Les secrétaires d'État sont respectivement responsables tant des actes du Président de la République qu'ils contresignent que de ceux de leurs départements ainsi que de l'inexécution des lois.

En aucun cas l'ordre écrit ou verbal du Président de la République ne peut soustraire un secrétaire d'État à la responsabilité.

Article 105.

Chaque secrétaire d'État reçoit du Trésor public une indemnité mensuelle de TROIS MlLLE GOURDES (G. 3.000) et chaque sous-secrétaire d'État une indemnité mensuelle de DEUX MILLE GOURDES (G. 2.000,00).

Article 106.

Ne peuvent être secrétaires d'État ni sous-secrétaires d'État les personnes visées à l'article 53 de cette Constitution.

Section 4. Du Grand Conseil Technique et de l'Office du Budget.

Article 107.

ll est institué un Grand Conseil Technique des Ressources Nationales et du Développement Économique. C'est un organisme indépendant dont les membres seront nommés par arrêté du Président de la République.

Son fonctionnement sera déterminé par la loi.

Article 108.

L'Office du Budget, relevant directement du Chef du Pouvoir Exécutif, est chargé d'élaborer, en contact étroit avec le secrétaire permanent du Conseil Technique des Ressources Nationales et du Développement Économique, le Budget de dépenses et recettes de l'État, et d'en suivre l'exécution. ll doit en outre s'appliquer à promouvoir l'économie nationale en intégrant les dépenses et recettes publiques dans les plans généraux de développement économique du pays.

Chapitre 4. Du Pouvoir judiciaire.

Article 109.

Le Pouvoir judiciaire est exercé par une Cour de Cassation, des Cours d'appel et des Tribunaux inférieurs, dont le nombre, l'organisation et la juridiction sont réglés par la loi.

Le Président de la République nomme les juges des Cours et Tribunaux.

ll nomme et révoque les officiers du Ministère public près la Cour de Cassation, les Cours d'appel et les autres Tribunaux ainsi que les Juges de Paix et leurs suppléants.

Les juges de la Cour de Cassation, des Cours d'appel sont nommés pour dix ans et ceux des Tribunaux Civils pour sept ans.

Les périodes commencent à courir à partir de leur prestation de serment.

Les juges, une fois nommés, ne peuvent être sujets à révocation par le Pouvoir Exécutif pour quelque cause que ce soit. Cependant, ils restent soumis aux dispositions des articles 124, 125 et 126 de la présente Constitution et aux dispositions des lois spéciales déterminant les causes susceptibles de mettre fin à leurs fonctions.

Article 110.

Les contestations qui ont pour objet des droits civils sont exclusivement du ressort des Tribunaux de droit commun.

Article 111.

Les contestations qui ont pour objet des droits politiques sont du ressort des Tribunaux, sauf les exceptions établies par la loi.

Article 112.

Les contestations commerciales sont déférées aux Tribunaux civils et de paix conformément au Code de Commerce.

Article 113.

Nulle juridiction contentieuse ne peut être établie que par la loi.

Article 114.

ll est institué des Tribunaux terriens, des Tribunaux de travail et des Tribunaux pour enfants dont l'organisation, le nombre, le siège et le fonctionnement sont fixés par la loi.

Article 115.

Les Tribunaux terriens ont une mission temporaire.

Leurs fonctions cessent dès la réalisation des fins pour lesquelles ils ont été organisés.

Article 116.

Chaque Tribunal terrien connaît exceptionnellement des difficultés relatives aux opérations cadastrales, de l'immatriculation des biens fonds, de droits immobiliers et des actions possessoires uniquement de la région pour laquelle il est établi.

Les Tribunaux de droit commun et les Tribunaux de paix conservent la connaissance des litiges qui leur est dévolue par la loi.

Article 117.

La Cour de Cassation ne connaît pas du fond des affaires.

Néanmoins, en toutes matières, autres que celles soumises au Jury, lorsque sur un second recours, même sur une exception, une affaire se présentera entre les mêmes parties, la Cour de Cassation, admettant le pourvoi, ne prononcera point de renvoi, et statuera sur le fond, sections réunies. Dans ce cas, la Cour devra siéger avec une majorité de juges n'ayant pas connu de l'affaire lors du premier recours.

Lorsqu'il s'agira de pourvoi contre les ordonnances de référé, les ordonnances du Juge d'instruction, les arrêts d'appel rendus à l'occasion de ces ordonnances, ou contre les sentences en dernier ressort des Tribunaux de paix et des décisions des Tribunaux terriens, la Cour de Cassation, admettant le recours statuera sans renvoi.

Article 118.

Les fonctions de Juge sont incompatibles avec toutes autres fonctions salariées.

L'incompatibilité en raison de la parenté ou de l'alliance est réglée par la loi.

La loi règle également les conditions exigibles pour être Juge à tous les degrés.

Article 119.

Les audiences des Tribunaux sont publiques à moins que cette publicité ne soit dangereuse pour l'ordre public et les bonnes moeurs. Dans ce cas, le Tribunal le déclare par jugement.

En matière de délit politique et de presse, le huis clos ne peut être prononcé.

Article 120.

Tout arrêt ou jugement est motivé et prononcé en audience publique.

Article 121.

Les arrêts ou jugements sont rendus et exécutés au nom de la République.

lis portent un mandement exécutoire. Les actes des notaires sont mis dans la même forme lorsqu'il s'agit de leur exécution forcée.

Article 122.

La Cour de Cassation prononce sur les conflits d'attributions d'après le mode réglé par la loi.

Elle connaît des faits et du droit dans tous les cas de décisions rendues par le Tribunal militaire.

Article 123.

La Cour de Cassation, à l'occasion d'un litige et sur le renvoi qui lui en est fait, prononce en sections réunies sur l'inconstitutionnalité des lois.

Le recours en inconstitutionnalité n'est soumis à aucune condition de cautionnement, d'amende et de taxes.

L'interprétation donnée par les Chambres législatives s'imposera pour la chose sans qu'elle puisse rétroagir en ravissant des droits acquis par la chose déjà jugée.

Les Tribunaux n'appliqueront les arrêtés et règlements d'administration publique qu'autant qu'ils seront conformes aux lois.

Chapitre 5.
Des poursuites centre les membres des Pouvoirs de l'État.

Article 124.

L'Assemblée législative accuse le Président de la République et le traduit devant l'Assemblée nationale érigée en Haute Cour de Justice pour cause de trahison ou tout autre crime ou délit commis dans l'exercice de ses fonctions.

Elle accuse également :
1. Les secrétaires d'État et sous-secrétaires d'État en cas de malversations, de trahison, d'abus ou d'excès de pouvoir ou de tout autre crime ou délit commis dans l'exercice de leurs fonctions ;
2. En cas de forfaiture, les membres de la Cour de Cassation, de l'une de ses sections ou tout officier du Ministère public près la dite Cour.

La mise en accusation ne peut être prononcée qu'à la majorité des deux tiers des membres de l'Assemblée. Elle traduit en conséquence ceux qu'elle accuse devant l'Assemblée nationale érigée en Haute Cour de Justice.

L'Assemblée nationale, au scrutin secret, et à la majorité absolue, désigne le tiers de ses membres pour se charger de l'instruction et du jugement de la poursuite. La condamnation prononcée doit être ratifiée par les deux tiers des membres de cette Assemblée.

A l'ouverture de l'audience, chaque membre de la Haute Cour de Justice prête le serment de juger avec l'impartialité et la fermeté qui conviennent à un homme probe et libre, suivant sa conscience et son intime conviction. La Haute Cour de Justice ne peut prononcer d'autre peine que la déchéance, la destitution et la privation du droit d'exercer toute fonction publique durant un an au moins et cinq ans au plus, mais le condamné peut être traduit devant les tribunaux ordinaires conformément à la loi s'il y a lieu d'appliquer d'autres peines ou de statuer sur l'exercice de l'action civile.

Nul ne peut être jugé ni condamné qu'à la majorité des deux tiers des membres de l'Assemblée nationale érigée en Haute Cour de Justice.

Article 125.

En cas de forfaiture, tout juge ou officier du Ministère public est mis en état d'accusation par l'une des sections de la Cour de Cassation.

S'il s'agit du Tribunal entier, la mise en accusation est prononcée par la Cour de Cassation, sections réunies.

Article 126.

La loi règle le mode de procéder contre le Président de la République, les secrétaires et sous-secrétaires d'État et les juges dans les cas de crime ou délits par eux commis, soit dans l'exercice de leurs fonctions, soit en dehors de cet exercice.

Le bénéfice de la prescription ne peut être invoqué par des fonctionnaires militaires ou civils qui se sont rendus coupables d'actes arbitraires et illégaux au préjudice des particuliers, que dix ans après la cessation de leurs fonctions.

Titre V.
Des assemblées primaires.

Article 127.

Les assemblées primaires se réunissent tous les six ans sur convocation de l'Exécutif, ou, à défaut de convocation, de plein droit dans chaque Commune, au deuxième dimanche de février, suivant le mode prévu par la loi pour l'élection des conseillers communaux, des membres du Corps législatif et du Président de la République.

Elles se réuniront sur convocation spéciale pour les élections partielles prévues par les articles 52 et 100, de la présente Constitution.

Elles ne peuvent s'occuper d'aucun autre objet que celui qui leur est attribué par la présente Constitution.

Elles sont tenues de se dissoudre dès l'accomplissement des fins sus désignées.

Article 128.

La loi prescrit les conditions requises pour exercer, dans les assemblées primaires, le droit de vote.

Titre Vl.
Du régime administratif.

Chapitre 1. 
Des institutions communales et préfectorales. 
Des Conseils Techniques et Administratifs d'Arrondissements et des Conseils d'Administration de la Section Rurale

Article 129.

La Commune est autonome. Cette autonomie est réglée par la loi.

Article 130.

Toute Commune dont les revenus ne permettent pas une administration autonome pourra être rattachée à la Commune la plus proche et deviendra Quartier.

Article 131.

Le CONSElL COMMUNAL est élu pour six ans, et ses membres sont indéfiniment rééligibles.

Le nombre des membres des Conseils communaux est fixé par la loi.

Pour être élu membre d'un Conseil communal, il faut :
1. Être Haïtien ;
2. Être âgé de 25 ans accomplis ;
3. Jouir de ses droits civils et politiques ;
4. Être propriétaire d'immeubles dans la Commune ou y exercer une industrie ou une profession ;
5. Avoir résidé au moins cinq années dans la Commune.

Un « SOUS-CONSElL TECHNlQUE » de trois membres, nommés par le Président de la République, assistera chaque Conseil communal.

La Section Rurale sera régie par un CONSElL D'ADMlNlSTRATlON présidé par un Leader de la Commune et organisé pour relever les conditions de vie dans les campagnes ainsi que le niveau social, moral et intellectuel du paysan. Les systèmes coopératifs communautaires et d'éducation de base, de même que l'organisation du petit crédit agricole et artisanal aideront à atteindre ces objectifs.

Le Conseil communal ne peut être dissous qu'en cas d'incurie, de malversation ou d'administration frauduleuse dûment constatée.

Dans ce cas, le Président de la République formera une « COMMlSSlON COMMUNALE » de trois membres, appelée à gérer les intérêts de la Commune jusqu'aux prochaines élections.

Article 132.

Le Conseil communal administre ses ressources au profit exclusif de la Communauté et rend un compte détaillé et documenté de sa gestion au pouvoir central.

ll nomme ses fonctionnaires et employés sans intervention d'aucune autre autorité.

ll établit ses tarifs d'impôt et ses taxes pour en faire proposition de loi au pouvoir central qui peut y apporter les modifications jugées nécessaires.

Article 133.

ll est créé dans les départements, au besoin dans les arrondissements, la fonction de Préfet.

Les Préfets sont des fonctionnaires civils qui représentent directement le Pouvoir exécutif.

La loi détermine leurs attributions et le lieu de leur résidence.

Dans chaque circonscription préfectorale, des « CONSElLS TECHNlQUES ET ADMlNlSTRATlFS D'ARRONDlSSEMENTS » présidés par le Préfet et composés de techniciens tirés des cadres des services publics, sont institués pour contrôler les Conseils communaux de la circonscription.

Ces Conseils techniques et administratifs prennent soin des intérêts politiques, administratifs, économiques, sociaux et culturels des communes dont ils ont le contrôle, en préparent ou coordonnent les plans et programmes de développement et s'assurent de la parfaite réalisation de ces derniers par les « SOUS-CONSElLS TECHNlQUES ».

Article 134.

La loi détermine le fonctionnement et les attributions de ces divers conseils.

Chapitre 2. Du Service Civil

Article 135.

Les fonctionnaires et employés publics sont au service de l'État et non d'une faction politique déterminée. lis ne peuvent se prévaloir de leurs charges pour faire de la politique électorale.

Article 136.

La loi réglemente le Service Civil et particulièrement les conditions d'accès à l'administration, les promotions et nominations sur la base du mérite et de l'aptitude, la garantie du maintien au service, les mutations, les suspensions et cessations de fonctions, les devoirs des services publics et les recours contre les mesures qui les affectent.

Ne sont pas compris dans la carrière administrative les fonctionnaires qui exercent des emplois politiques, et en particulier, les secrétaires d'État ou sous-secrétaires d'État, les Préfets, le Ministère public, les ambassadeurs, le secrétaire privé du Président de la République, les secrétaires ou directeurs généraux des services publics.

Article 137.

La grève des fonctionnaires et employés publics est interdite, ainsi que l'abandon collectif de leurs fonctions.

La militarisation des services publics ou la mobilisation générale peut être décrétée dans le cas de péril national ou de troubles civils graves, telles que les grèves générales illégales ou à caractère politique.

L'ordre de mobilisation générale, en vertu de la loi sur le service militaire, peut être décrété en cas de troubles civils graves par le Pouvoir exécutif.

Titre Vll.
Des finances publiques.

Chapitre 1. Des recettes de l'État et du Budget.

Article 138.

Les revenus publics ou les finances de l'État sont constitués par l'impôt, la taxe et les ressources agricoles, industrielles et commerciales, provenant des entreprises de l'État et de ses institutions de Crédit.

Article 139.

Les impôts au profit de l'État et des Communes ne peuvent être établis que par une loi.

Les lois qui établissent les impôts n'ont de force que pour un an.

Article 140..

L'imposition directe repose sur le principe de la progressivité et est calculée en fonction de l'importance de la fortune, des salaires et des revenus.

L'impôt est un prélèvement de l'État proportionné à la fortune du contribuable tandis que la taxe représente le prix direct d'un service rendu.

Article 141.

L'unité monétaire d'Haïti est la Gourde.

La loi en fixe le titre et le poids ainsi que ceux de toute monnaie d'appoint que l'État a la faculté d'émettre avec force libératoire sur tout le territoire de la République.

La Banque nationale de la République d'Haïti, dont la loi fixe le statut, est investie du privilège exclusif d'émettre des billets représentatifs de la Gourde.

Aucune émission de monnaie ne peut avoir lieu qu'en vertu d'une loi qui en détermine l'emploi et en fixe le chiffre.

En aucun cas, ce chiffre ne peut être dépassé.

L'État doit orienter la politique monétaire afin de créer et de maintenir les conditions les plus favorables au développement ordonné de l'économie nationale.

Article 142.

ll ne peut être établi de privilège en matière d'impôt.

Aucune exception, aucune augmentation ou diminution d'impôts ne peut être établie qu'en vertu de la loi.

Article 143.

Aucune pension, aucune gratification, aucune subvention, aucune allocation quelconque à la charge du Trésor Public ne peut être accordée qu'en vertu d'une loi proposée par le Pouvoir exécutif.

Article 144.

Le cumul des fonctions salariées de l'État est formellement interdit excepté dans l'enseignement secondaire, supérieur et professionnel ou lorsqu'il s'agit d'une fonction de professeur d'enseignement supérieur et d'une fonction à caractère technique relevant de la même spécialité.

Article 145.

Le Budget de chaque département ministériel est divisé en chapitres et en sections et doit être voté article par article.

Le virement est formellement interdit.

Aucune somme allouée pour un chapitre ne peut être reportée au crédit d'un autre chapitre et employée à d'autres dépenses sans une loi.

Le secrétaire d'État des Finances est tenu, sous sa responsabilité personnelle, de ne servir, chaque mois, à chaque département ministériel que le douzième des valeurs prévues dans son Budget, à moins d'une décision du Conseil des secrétaires d'État, pour cas extraordinaire.

Les Comptes généraux des recettes et des dépenses de la République sont tenus par le secrétaire d'État des Finances selon un mode de comptabilité établi par la loi.

L'exercice administratif commence le premier octobre et finit le trente septembre de l'année suivante.

Chapitre 2.
Des Organismes de Gestion des Recettes de l'État et de Contrôle des dépenses publiques

Article 146.

ll est institué un organisme autonome dénommé « COUR SUPERlEURE DES COMPTES », chargé du contrôle administratif et juridictionnel de toutes les dépenses et recettes de l'État.

Cet organisme est consulté sur toutes les questions relatives à la législation sur les Finances publiques ainsi que sur tous les projets de contrats, accords et conventions à caractère commercial ou financier auxquels l'État est partie.

Son organisation et son fonctionnement sont déterminés par la loi.

Article 147.

En vue d'exercer un contrôle sérieux et permanent des dépenses publiques, il sera élu au scrutin secret, au début de chaque législature, une « COMMlSSlON PARLEMENTAlRE DES COMPTES GENERAUX » de quinze membres chargée de rapporter sur la gestion des secrétaires d'État pour permettre au Corps législatif de leur accorder ou de leur refuser décharge.

Cette Commission pourra s'adjoindre trois spécialistes comptables au plus, ainsi que des employés pour l'aider dans son contrôle.

Article 148.

Chaque année le Corps législatif arrête :
1. Le Compte des recettes et dépenses de l'année écoulée ou des années précédentes ;
2. Le Budget général de l'État contenant l'aperçu et la portion des fonds alloués pour l'année à chaque département ministériel.

Toutefois, aucune proposition, aucun amendement ne peut être introduit à l'occasion du Budget sans la provision correspondante des voies et moyens.

Aucun changement ne peut être fait soit pour augmenter, soit pour réduire les appointements des fonctionnaires publics que par une modification des lois y relatives.

Article 149.

Les Comptes généraux et les budgets prescrits par l'article précédent, accompagnés du rapport de la Cour supérieure des comptes doivent être soumis au Corps législatif pair le secrétaire d'État des Finances au plus tard dans les quinze jours de l'ouverture de la session législative.

ll en est de même du bilan annuel et des opérations de la Banque nationale de la République d'Haïti ainsi que de tous autres comptes de l'État haïtien.

Article 150.

Le Corps législatif peut s'abstenir de tous travaux législatifs tant que ces documents ne lui sont pas présentés. ll refuse la décharge des secrétaires d'État et même le vote du Budget lorsque les comptes présentés ne fournissent pas par eux-mêmes ou par les pièces à l'appui, tous les éléments de vérification et d'appréciation nécessaires.

Article 151.

Au cas ou le Corps législatif, pour quelque raison que ce soit, sauf celle de la non présentation des documents à l'article 149 de la Constitution ou de l'insuffisance des pièces à l'appui, n'arrête pas le Budget pour un ou plusieurs départements ministériels avant son ajournement, le ou les Budgets des départements intéressés en vigueur pendant l'année budgétaire en cours sont maintenus pour l'année budgétaire suivante.

Dans le cas ou, par la faute de l'Exécutif, les Budgets de la République n'auront pas été votés, le Président de la République convoquera immédiatement le Corps législatif en session extraordinaire à seule fin de voter les Budgets de l'État sauf les sanctions constitutionnelles à prendre contre les secrétaires d'État responsables.

Article 152.

Les institutions et entreprises de l'État de caractère autonome et les entités auxquelles subviennent les fonds du fisc, en totalité ou en partie, à l'exception des institutions de crédit, sont réglés par des Budgets spéciaux et des systèmes de salaire approuvés par le Pouvoir exécutif.

Article 153.

ll est établi un système de comptabilité unique pour tous les services publics.

Ce service relève de l'Office du Budget de la République.

Si la loi le permet, on peut séparer des biens de la masse des finances publiques ou assigner des ressources du Fonds général à la constitution ou a l'accroissement de patrimoines spéciaux de l'État, destinés à des institutions publiques qui ont des buts culturels, d'assistance ou de sécurité sociale, ou de développement économique, ou tendent à développer la petite propriété urbaine et rurale.

Titre Vlll.
Du régime économique.

Article 154.

Le régime économique doit répondre essentiellement à des principes de justice sociale qui tendent à assurer à tous les membres de la Communauté une existence digne de l'être humain.

Article 155.

La liberté économique est garantie en tant qu'elle ne s'oppose pas à l'intérêt social.

L'État développe et protège l'entreprise privée dans les conditions nécessaires à l'accroissement de la richesse nationale de manière à assurer la participation du plus grand nombre aux bénéfices de cette
richesse.

Article 156.

Aucune corporation ou fondation, quelle que soit sa dénomination ou son objet, ne peut conserver en propriété ou administrer d'autres biens immeubles que ceux destinés immédiatement et directement à son usage ou à son objet.

Article 157.

La loi peut accorder des privilèges portant sur une période limitée aux inventeurs ou perfectionneurs.

Des règles peuvent être établies en faveur de l'État ou des Communes, si l'intérêt général l'exige.

Article 158.

L'État peut avoir l'administration des entreprises qui prêtent des services essentiels à la Communauté afin d'en assurer la continuité si leurs propriétaires ou entrepreneurs se refusent à respecter les dispositions légales relatives à l'organisation économique et sociale du pays.

ll peut également prendre sous son contrôle et nationaliser les biens appartenant aux ressortissants des pays avec lesquels Haïti est en guerre.

Article 159.

La construction de logis d'habitation est déclarée d'intérêt social.

L'État s'efforce d'obtenir que le plus grand nombre possible de familles haïtiennes soit propriétaire de leur habitation. ll fait en sorte que toute entreprise industrielle ou agricole assure à ses ouvriers et travailleurs une demeure hygiénique et commode.

Article 160.

On doit faire figurer dans toute concession accordée par l'État pour l'installation de quais, chemins de fer, canaux et d'autres ouvrages relatifs à des services publics, la condition essentielle que, après un délai qui ne doit pas excéder cinquante ans, ces ouvrages retournent de plein droit à l'État et en parfaite condition d'usage, sans aucune indemnisation.

Titre lX.
Du régime social.

Chapitre 1. De la Famille

Article 161.

La famille, base fondamentale de la société, doit être protégée par l'État qui établit les lois et dispositions nécessaires à ce qu'elle ait une situation meilleure aux fins de favoriser le mariage, de protéger, d'aider la maternité et l'enfance. Le mariage est le fondement légal de la famille et repose sur l'égalité politique et économique des conjoints.

L'État protège la santé physique, mentale et morale des mineurs et garantit leur droit à l'éducation et à l'assistance.

La criminalité juvénile est soumise à un régime juridique particulier.

Article 162.

Les enfants légitimes et les enfants naturels légalement reconnus ont des droits égaux à l'éducation, à l'assistance et à la protection de leurs parents.

La loi règle le cas des enfants adultérins et incestueux.

La loi détermine les conditions dans lesquelles la paternité peut être recherchée.

Chapitre 2. Du Travail.

Article 163.

Le travail, fonction sociale, jouit de la protection de l'État et n'est pas un article d'exploitation.

L'État doit employer toutes ses ressources pour donner une occupation au travailleur manuel ou intellectuel et lui assurer ainsi qu'à sa famille les conditions économiques d'une existence digne.

Article 164.

Le travail est réglementé par un Code du Travail dont l'objet principal est d'harmoniser les rapports du Capital et du Travail et qui est fondé sur les principes généraux tendant à l'amélioration des conditions de vie des travailleurs.

Article 165.

Les droits consacrés en faveur des travailleurs ne sont pas susceptibles de renonciation et les lois qui les reconnaissent, obligent tous les habitants du territoire.

L'État prend en charge les indigents qui, du fait de leur âge ou de leur incapacité physique ou mentale, sont inaptes au travail.

Titre X.
De la Culture.

Article 166.

Le développement et la diffusion de la culture constituent pour l'État une obligation et une fin primordiale.

L'éducation est une attribution essentielle de l'État qui organise le système éducatif et crée les organismes et services nécessaires à cette fin.

Article 167.

L'éducation doit tendre au plein épanouissement de la personnalité des intéressés de façon qu'ils apportent une coopération constructive à la société et contribuent à inculquer le respect des droits de l'homme, à combattre tout esprit d'intolérance et de haine et à développer l'idéal d'unité morale, nationale et panaméricaine.

L'éducation de base est obligatoire et doit être fournie gratuitement par l'État en vue de réduire le nombre des illettrés absolus et permettre à tous de remplir consciemment leur rôle de travailleurs, de pères de famille et de citoyens.

Article 168.

Aucun établissement d'éducation officiel ou privé ne peut refuser des élèves en se fondant sur la nature de l'union de leurs parents ou tuteurs, ni sur des différences sociales, raciales, politiques ou religieuses.

Article 169.

ll est nécessaire pour enseigner, de justifier de ses capacités de la façon que précise la loi.

L'enseignement de l'histoire et de la Géographie nationale, de la Morale Civique et de la Constitution qui régit le Peuple devra être donné, dans tous les établissements d'éducation, qu'ils soient publics ou privés, par des professeurs haïtiens.

Article 170.

La richesse artistique, historique, folklorique et archéologique du pays fait partie du Trésor culturel haïtien, placé sous la sauvegarde de l'État et soumis, quant à la conservation, à des lois spéciales.

Titre Xl.
Santé et assistance sociale.

Article 171.

La santé des habitants du territoire constitue un bien public.

L'État assure une assistance médicale gratuite aux malades et a surtout l'impérieux devoir de prévenir et de limiter la propagation d'une maladie contagieuse ou endémique.

Article 172.

Un « CONSElL SUPERlEUR DE LA SANTE PUBLlQUE » veille à la santé de la population.

La loi précisera son organisation et son fonctionnement.

L'exercice des professions qui sont en rapport direct avec la santé de la population est strictement réglé par la loi.

Titre Xll.
Des Forces armées.

Article 173.

Les Forces armées sont instituées pour défendre l'intégrité du Territoire et la souveraineté de la République, maintenir l'ordre public en tant qu'auxiliaire de l'autorité civile de qui elles relèvent.

Le Président de la République est le Chef suprême des Forces armées et des Forces de police ; tous ceux qui commandent les dites Forces sont censés recevoir délégation de lui ; il prend toutes décisions dans le cadre de la Constitution, de la loi et des règlements en vigueur.

Article 174.

Le service militaire est obligatoire pour tous les Haïtiens.

La loi fixe le mode de recrutement du soldat et la durée du service.

Les militaires en activité de service ne sont pas éligibles aux fonctions représentatives ou exécutives. Tout militaire candidat à l'une ou l'autre de ces fonctions doit démissionner un an au moins avant l'époque fixée pour les élections.

Article 175.

Les Forces armées sont apolitiques et essentiellement obéissantes. Leur organisation et l'exercice de leurs activités sont soumis à des lois, dispositions et règlements spéciaux.

Article 176.

La carrière militaire est professionnelle et on n'y reconnaît que les grades obtenus suivant l'échelle rigoureuse et conforme à la loi.

Celui qui aura légalement un grade militaire le conservera sa vie durant, et n'en pourra être privé que par décision exécutoire.

Article 177.

L'importation et la fabrication d'armes et de matériel de guerre ne peuvent se faire qu'avec l'autorisation et sous le contrôle du Pouvoir exécutif.

Article 178.

Les fonctions de police sont séparées de celles de l'Armée et confiées à des agents spéciaux soumis à la responsabilité civile et pénale dans les formes et conditions légales.

Article 179.

L'organisation de l'Armée d'Haïti et des Tribunaux dont elle relève est fixée par la loi.

La Cour militaire doit prononcer sa sentence en présence de l'accusé et de son conseil et mention de cette formalité sera constatée dans la dite sentence, le tout à peine de nullité.

L'accuse ou son conseil pourra faire sa déclaration de pourvoi en cassation soit à l'officier remplissant la fonction de greffier, qui doit le recevoir à l'audience même, soit au Greffe du Tribunal civil de la juridiction de jugement, dans le délai de trois jours francs à partir du prononcé. Le délai et le pourvoi sont suspensifs.

L'officier ou le greffier qui aura reçu la déclaration sera tenu de l'acheminer, avec toutes les pièces du procès, au Parquet de la Cour de Cassation appelé à mettre l'affaire en état dans le délai de quinze jours au plus.

Article 180.

Les militaires en activités de service ne peuvent être appelés à aucune fonction publique.

Titre Xlll.
Dispositions générales.

Article 181.

Les couleurs nationales sont le bleu et le rouge placés horizontalement en bandes d'égales dimensions.

Les Armes de la République sont : le PALMlSTE surmonté du BONNET DE LA LlBERTE orné d'un trophée avec la légende : « L'UNlON FAlT LA FORCE ».

La devise est : « LlBERTE, EGALlTE, FRATERNlTE ».
L'Hymne national est la « DESSALlNlENNE ».

Article 182.

Aucun serment ne peut être imposé qu'en vertu de la Constitution ou d'une loi.

Article 183.

Les Fêtes Nationales sont: celle de l'lndépendance nationale, le premier janvier ; celle des Héros, le 2 janvier ; celle de l'Agriculture et du Travail, le premier mai ; celle du Drapeau, le 18 mai ; celle commémorative de l'anniversaire de la Bataille de Vertières, le 18 novembre, qui est également le jour de l'Armée ; celle du 5 décembre, jour de la Découverte d'Haïti par Christophe Colomb.

Les fêtes légales sont déterminées par la loi.

Article 184.

Aucune loi, aucun arrêté ou règlement d'administration publique n'est obligatoire qu'après avoir été publié dans la forme déterminée par la loi.

Article 185.

Aucune place, aucune partie du Territoire ne peut être déclarée en état de siège que dans les cas de troubles civils, d'invasion imminente de la part d'une Force Étrangère.

L'acte du Président de la République d'Haïti déclaratif de l'état de siège doit être signé du Conseil des secrétaires d'État et porter convocation immédiate du Corps législatif appelé à se prononcer sur l'opportunité de la mesure.

Le Corps législatif arrêtera avec le Pouvoir exécutif les garanties constitutionnelles qui peuvent être suspendues dans les parties du Territoire mises en état de siège.

Article 186.

Les effets de l'état de siège sont réglés par une loi spéciale.

Article 187.

Tous les Codes de lois et toutes les lois actuellement en vigueur sont maintenus en tout ce qui n'est pas contraire à la présente Constitution.

Titre XlV.
De la révision constitutionnelle.

Article 188.

Le Pouvoir législatif, sur la proposition de l'un de ses membres ou du Pouvoir exécutif a le droit de déclarer qu'il y a lieu de réviser telles dispositions constitutionnelles qu'il désigne.

Cette déclaration qui ne peut être faite qu'au cours de la dernière session ordinaire d'une législature est publiée immédiatement dans toute l'étendue du Territoire. Cette déclaration doit réunir l'adhésion des deux tiers de l'Assemblée législative. La législature s'entend de la durée du mandat des députés.

Article 189.

A la première session de la législature en cours, le Corps législatif se réunira en Assemblée nationale et statuera sur la révision proposée.

Article 190.

L'Assemblée nationale ne peut délibérer sur cette révision, si les deux tiers au moins de ses membres ne sont présents.

Aucune décision ne peut être prise, aucun changement ne peut être adopté qu'a la majorité des deux tiers des suffrages.

Article 191.

Toute consultation populaire tendant à modifier la Constitution par voie de référendum est formellement interdite.

Article spécial.

Tous les actes accomplis par le Conseil Militaire de Gouvernement durant la vacance présidentielle ouverte le 14 Juin 1957 sont ratifiés et valables, sous la réserve du Droit du Pouvoir compétent d'apporter législativement aux décrets et arrêtés pris par ledit Conseil, toutes modifications que pourra réclamer l'intérêt public.

Titre XV.
Dispositions transitoires.

Article A.

Le mandat de l'actuel Président de la République élu le 22 septembre 1957 prendra fin le 15 mai 1963.

Article B.

La Chambre des députés et le Sénat reconstitués aux élections du 22 septembre 1957 exerceront la puissance législative jusqu'au deuxième lundi d'avril 1963 date de la fin du mandat des 21 Sénateurs élus sous l'empire du décret électoral du Conseil Militaire de Gouvernement en date du 28 août 1957.

Article C.

Les 37 députés actuels exerceront leur mandat jusqu'au deuxième lundi d'avril 1963.

Durant la période ou le Pouvoir législatif, tel qu'il a été défini aux articles 50, 51, 52, 53, 59, 60, 61, 62, 63, 64, 65, 66, 67, 68, 69, 70, 71, 72, 73, 74, 75, 83, 84, 85, 149, 190, 191, 192, sera exercé par les deux Chambres, les dispositions suivantes seront en vigueur, en sus de celles prescrites par les articles susmentionnés ;

1° Les deux Chambres se réuniront en Assemblée nationale dans les cas prévus par la Constitution. Le Président titulaire du Sénat présidera l'Assemblée, le Président titulaire de la Chambre des députés en sera le vice-président et les secrétaires des deux Chambres en seront les secrétaires. La présence dans l'Assemblée nationale de la majorité de chacune des deux Chambres est nécessaire pour prendre les résolutions.

2° En cas d'objection de l'Exécutif à une loi votée par le Corps législatif, le Président de la République renvoie la loi à la Chambre où elle a été primitivement votée avec ses objections. Si la loi ainsi amendée est votée par la seconde Chambre, elle sera adressée de nouveau au Président pour être promulguée.

Si les objections sont rejetées par la Chambre qui a primitivement voté la loi, elle est renvoyée à l'autre Chambre avec les objections.

Si la seconde Chambre vote également le rejet, la loi est renvoyée au Président de la République qui est dans l'obligation de la promulguer.

3° L'initiative des lois appartient à chacune des deux Chambres ainsi qu'au Pouvoir exécutif.

Néanmoins, la loi budgétaire, celle comprenant l'assiette, la quotité et le mode de perception des impôts et contributions, celle ayant pour objet de créer des recettes ou d'augmenter les dépenses de l'État doivent d'abord être votées par la Chambre des députés.

En cas de désaccord entre les deux Chambres relativement aux lois mentionnées dans le précédent paragraphe, chaque Chambre nomme, par tirage au sort, en nombre égal une Commission interparlementaire qui résoudra en dernier ressort le désaccord.

Si le désaccord se produit à l'occasion de toute autre loi, celle-ci sera ajournée jusqu'à la session suivante. Si, à cette session, et même en cas de renouvellement des Chambres, la loi étant présentée à nouveau, une entente ne se réalise pas, chaque Chambre nommera au scrutin de liste et en nombre égal une Commission chargée d'arrêter le texte définitif qui sera soumis aux deux assemblées, à commencer par celle qui avait primitivement voté la loi. Et si ces nouvelles délibérations ne donnent aucun résultat, le projet ou la proposition de loi sera retiré.

4° Chaque Chambre a le droit d'amender et de diviser les articles et amendements proposés. Les amendements votés par une Chambre ne peuvent faire partie d'un projet de loi qu'après avoir été votés par l'autre Chambre ; et aucun projet ne deviendra loi qu'après avoir été voté dans la même forme par les deux Chambres.

Tout projet peut être retiré de la discussion tant qu'il n'a pas été définitivement voté.

5° Un projet de loi rejeté par l'une des deux Chambres ne peut être reproduit dans la même session.

6° La Chambre des députés accuse le Président de la République et le traduit devant le Sénat érigé en Haute Cour de Justice, pour crime de trahison ou tout autre crime ou délit commis dans l'exercice de ses fonctions.

Elle accuse également et traduit devant la Haute Cour :
1°) Les secrétaires d'État en cas de malversation, de trahison, d'abus ou d'excès de pouvoir ou de tout autre crime ou délit commis dans l'exercice de leurs fonctions ;
2°) En cas de forfaiture, tout membre de la Cour de Cassation et tout officier du Ministère public près la dite Cour.

La mise en accusation ne pourra être prononcée qu'à la majorité des deux tiers des membres de la Chambre.

A l'ouverture de l'audience, chaque membre de la Haute Cour de Justice prête le serment de juger avec l'impartialité et la fermeté qui conviennent à un homme probe et libre, suivant sa conscience et son intime conviction.

La Haute Cour de Justice ne pourra prononcer d'autre peine que la déchéance, la destitution et la privation du droit d'exercer toute fonction publique durant un an au moins et cinq ans au plus, mais le condamné peut être traduit devant les tribunaux ordinaires conformément à la loi, s'il y a lieu d'appliquer d'autres peines ou de statuer sur l'exercice de l'action civile.

Nul ne peut être jugé, ni condamné, qu'a la majorité des deux tiers des membres du Sénat.

Les limites prescrites par l'article 60 de la Constitution à la durée des sessions du Corps législatif, ne peuvent servir à mettre fin aux poursuites lorsque le Sénat siège en Haute Cour de Justice.

7° L'examen et la liquidation des comptes de l'administration générale et de tout comptable envers le Trésor se feront, suivant le mode établi par la loi, par la Cour supérieure des Comptes.

8° En vue d'exercer un contrôle sérieux et permanent des dépenses publiques, a été élue au scrutin secret, au début de l'actuelle législature, une Commission interparlementaire de quinze membres dont neuf députés et six sénateurs, chargée de rapporter sur la gestion des secrétaires d'État pour permettre aux deux Assemblées de leur accorder ou de leur refuser décharge

Cette Commission pourra s'adjoindre trois spécialistes comptables au plus, ainsi que des employés pour l'aider dans son contrôle.

Article D.

Les prochaines élections des conseils communaux auront lieu en même temps que celles des députés.

Article E.

Dans les deux mois à partir de la publication de la présente Constitution, le Pouvoir exécutif est autorisé à procéder, dans les Cours et Tribunaux ainsi que dans les organismes administratifs et financiers d'État, à tous changements ou réformes qui seront jugés nécessaires.

Article F.

La présente Constitution entrera en vigueur dès la publication qui en sera faite au « Moniteur », Journal Officiel de la République.

Donné au Palais législatif, à Port-au-Prince, siège de l'Assemblée nationale constituante, le 19 décembre 1957, An 154e de l'lndependance.

Le Président : Hugues F. BOURJOLLY
Le vice-président : Rameau ESTlME
Les secrétaires : Victor Nevers CONSTANT, Ulrich ST LOUlS, Jean JULME, André GARNlER.
Les membres : Paul PERElRA, Dieudonné LEGROS, Arthur BONHOMME, Jean DAVlD, Jean BELlZAlRE, Charité LOUlS, Candelon LUCAS, Jehu GARNlER, lvan Emmanuel MOREAU, Thomas DESULME, Louis RAYMOND, Luc STEPHEN, Pressoir BAYARD, Antoine H. MARTHOL, Jules LARRlEUX, Gasner KERSAlNT, Calisthènes JOSEPH, Alphonse LAHENS, Pierre ARMAND, Laurent ST-LOUlS, Amerlin CONDE, Thermosirus ST-FLEUR, Bélotte BLEMUR, Pauléus DUVERSEAU, Marius LAFOND, Clément ST-CLOUD, Jean Baptiste PlERRE-LOUlS, Saintange BONTEMPS, Josué JN-BAPTlSTE, Dalvanor ETlENNE, Décius JEAN, Hébert FRANClLLON, Max MENARD, Hugo H. PAUL, Dijon JEAN GlLLES, Lavoisier LAMOTHE, Franklin ELlE, Enaillo NONEZ, Raynold METELLUS, Andre MOlSE. Gabriel AUGUSTlN, Webert KERSAlNT, Luc FRANCOlS, Lucien BELlZAlRE, Henry GATTEREAU, Franck SERAPHlN, Albert GARCON, Joseph AMARY, Dupéra PERALTE, Gerson ZAMOR, Marmontel GUlLLAUME.