République argentine


Constitution du 1er mai 1853, version de 1860.

Préambule.

Première partie.
Chapitre unique. Déclarations, droits et garanties.

Deuxième partie. Autorités nationales.
Titre premier. Gouvernement fédéral.
Section première. Du Pouvoir législatif.
Chapitre premier. De la Chambres des députés.
Chapitre II. Du Sénat.
Chapitre III. Dispositions communes aux deux chambres.
Chapitre IV. Attributions du Congrès.
Chapitre V. De l'élaboration et de l'adoption des lois.
Section II. Du pouvoir exécutif.
Chapitre premier. De sa nature et de sa durée.
Chapitre II. Du mode et du moment de l'élection du Président et du vice-président de la Confédération.
Chapitre III. Attributions du Pouvoir exécutif.
Chapitre IV. Des ministres du Pouvoir exécutif.
Section III. Du Pouvoir judiciaire.
Chapitre premier. De sa nature et de sa durée.
Chapitre II. Attributions du Pouvoir judiciaire.
Titre II. Gouvernements des provinces.

    Depuis la Révolution de mai 1810, les différentes provinces de la vice-royauté du Rio de la Plata, dans lesquelles des caudillos prennent le pouvoir et deviennent autonomes, s'opposent à la ville de Buenos Aires, seul port du pays en eaux profondes, enrichie par ses activités portuaires et les taxes prélevées sur les marchandises entrant ou sortant du pays. L'opposition entre les provinces souhaitant des institutions fédérales et Buenos Aires, qui veut imposer son autorité centrale, provoque des troubles incessants qui se poursuivront jusqu'à la prise de Buenos Aires par les troupes fédérales du général Roca (21 juin 1880).Ce qui permet de placer la ville sous la tutelle du gouvernement fédéral.
    Tandis que le Paraguay, suivi par le Haut-Pérou (l'actuelle Bolivie) et l'Uruguay obtiennent l'indépendance, les règlements provisoires se succèdent ; le Congrès de l'an XIII échoue avec et son projet de Statut de 1815 ; les constitutions de 1819 et de 1826 ne sont que partiellement appliquées et pendant quelques mois seulement ; le Pacte fédéral du 4 janvier 1831 est refusé par Buenos AIres où le dictateur Rosas impose son autorité jusqu'à sa défaite lors de la bataille de Caseros (3 février 1852), remportée par le général Urquiza, à la tête d'une armée de plusieurs provinces, et soutenu par des troupes uruguayennes et brésiliennes.
    Urquiza, le vainqueur, peut alors convoquer un Congrès constituant à Santa Fé, qui donnera naissance à la Constitution historique du 1er mai 1853, plusieurs fois modifiée, souvent violée, mais toujours en vigueur aujourd'hui (2021). Pendant ce temps, le général Mitre prend le pouvoir à Buenos Aires (11 septembre 1852) et une nouvelle guerre éclate entre les deux camps. La Constitution est approuvée par les délégués de 13 provinces, mais l'État de Buenos Aires refuse de la ratifier. Urquiza devient en 1854 le premier président constitutionnel de l'Argentine.

    Il convient de préciser ici que les «  pactes préexistants », visés au préambule de la Constitution, sont les pactes conclus pour mettre fin aux guerres civiles opposant les caudillos des différentes provinces et qui leur garantissent certaines prérogatives. Les plus importants étaient : le Traité de Pilar (1820), le Traité du Cuadrilátero (1822), le Pacte fédéral (1831), le Protocole de Palerme (1852) et le Traité de San Nicolás de los Arroyos (1852), les deux derniers étant consécutifs à la bataille de Caseros.
    A la suite de la bataille de Cepeda (23 octobre 1859), le Pacte de San José de Flores (11 novembre 1859), avec la médiation du Paraguay, ménage un compromis qui permet à Buenos Aires de rejoindre la confédération.
    Une Convention constituante ad hoc se réunit alors à Santa Fe pour examiner les propositions présentées par Buenos Aires. La révision approuvée  le 25 septembre 1860 porte sur 22 points avec des amendements de coordination et une nouvelle numérotation des articles. Cependant la guerre reprend et se termine à la bataille de Pavon (17 septembre 1861) par la victoire de Mitre, qui accepte alors la Constitution révisée et devient président en octobre 1862.

    La Constitution sera révisée sur des points limités en 1866 et en 1898.


Note : Dans le texte ci-dessous, outre les 22 modifications expressément signalées, le terme «  Confédération » a été remplacé, dans toutes ses occurrences, par le terme« Nation  ».

Voir la Constitution de 1853 dans sa version initiale.
Voir la Constitution de 1853 dans sa version modifiée en 1866 et en 1898.
Voir la Constitution de 1853 dans sa version de 1994.

Sources : Republica argentina, Convencion nacional de 1898, y antecedentes. Buenos Aires, 1898. Voir dans cet ouvrage (en espagnol) : le compte-rendu du Congrès général constituant, p. 157-594, et le texte de la Constitution de la Confédération, p. 354 ; Convention nationale ad hoc (1860), voir le texte des réformes, p. 626, et le texte consolidé, p. 629 ; Voir également le Pacte fédéral de 1831, p. 587.
Voir le texte de la révision de 1860 et les analyses dans : Constituciones argentinas. Compilación histórica y análisis doctrinario, Infojus, Sistema Argentino de Información Jurídica, 2015, p. 157 et s.



Préambule.

   Nous, les représentants du peuple de la Nation argentine, réunis en Congrès général constituant par la volonté et l'élection des provinces qui la composent, en exécution des pactes préexistants et dans le but de former l'union nationale, d'affermir la justice, de consolider la paix intérieure, de pourvoir à la défense commune, de promouvoir le bien-être général et d'assurer les bénéfices de la liberté‚ pour nous, pour notre postérité‚ et pour tous les hommes du monde qui voudront habiter le territoire argentin ; en invoquant la protection de Dieu, source de toute raison et justice, nous ordonnons, dictons et établissons la présente Constitution pour la Nation argentine.

Première partie.

Chapitre unique. Déclarations, droits et garanties.

Article premier.

La Nation argentine adopte pour son gouvernement la forme représentative, républicaine fédérale, conformément à la présente Constitution.

Article 2.

Le Gouvernement fédéral soutient la religion catholique, apostolique et romaine.

Article 3.

Les autorités qui exercent le gouvernement fédéral ont leur siège dans la ville de Buenos Aires qui est déclarée capitale de la Confédération par une loi spéciale.
Les autorités qui exercent le gouvernement fédéral ont leur siège dans la ville qui est déclarée capitale de la République par une loi spéciale du Congrès, après cession par une ou plusieurs législatures provinciales du territoire qui doit être fédéralisé.
[Article modifié par la révision de 1860.]

Article 4.

Le Gouvernement fédéral pourvoit aux dépenses de la Nation avec les fonds du Trésor national constitués par le produit des droits d'importation et d'exportation des Douanes, jusqu'en 1866, conformément à l'alinéa 1 de l'article 67, du produit de la vente ou de la location des terres qui appartiennent au domaine national, du produit des Postes et des autres contributions que le Congrès établit d'une façon équitable et proportionnelle à la population, et par les emprunts et les opérations de crédit prescrits par ledit Congrès pour les besoins de la Nation ou des entreprises d'utilité nationale.
[Article modifié par la révision de 1860.]

Article 5.

Chaque province confédérée établit sa propre Constitution sur la base du système représentatif républicain suivant les principes, déclarations et garanties établis par la Constitution nationale. Chacune assure l'administration de la justice, le régime municipal et l'enseignement primaire gratuit. Les constitutions provinciales seront examinées par le Congrès avant leur promulgation. Sous ces conditions, le Gouvernement fédéral garantit à chaque province la jouissance et l'exercice de ses propres institutions.
[Dispositions supprimées par la révision de 1860.]

Article 6.

Le Gouvernement fédéral intervient avec ou sans réquisition des législatures ou gouverneurs provinciaux sur le territoire de l'une des provinces, dans le seul but de rétablir l'ordre public perturbé par la sédition, ou de répondre à la sécurité nationale menacée par une attaque ou un danger extérieur.
Le gouvernement fédéral intervient sur le territoire des provinces, pour garantir la forme républicaine du gouvernement ou repousser les invasions étrangères, et, sur la réquisition de leurs autorités constituées, pour soutenir ou rétablir lesdites autorités, si elles ont été renversées par une sédition ou l'invasion d'une autre province.
[Article modifié par la révision de 1860.]

Article 7.

Les actes publics et les procédures judiciaires d'une province font foi dans les autres provinces ; le Congrès peut, par des lois générales, déterminer la forme probante de ces actes et procédures, ainsi que leurs effets légaux.

Article 8.

Les citoyens de chaque province jouissent de tous les droits, privilèges et immunités attachés à la qualité de citoyen dans les autres provinces. L'extradition des criminels est une obligation réciproque entre toutes les provinces.

Article 9.

Sur tout le territoire de la Nation, il n'existe d'autres douanes que l'administration nationale des douanes qui applique les droits fixés par le Congrès.

Article 10.

La circulation des objets de production ou de fabrication nationale est libre de droits à l'intérieur de la République, ainsi que la circulation des marchandises et des objets de toute catégorie ayant franchi régulièrement les douanes extérieures.

Article 11.

Les produits nationaux ou étrangers, ainsi que les troupeaux de toute espèce circulant d'une province à une autre, sont exonérés des droits dits de transit, ainsi que les voitures, les bateaux ou les bêtes de somme transportant ces mêmes produits. Aucun autre droit ne peut, sous quelque dénomination que ce soit, leur être imposé à l'avenir pour cause de circulation sur le territoire.

Article 12.

Les bateaux se rendant d'une province à une autre ne sont obligés ni à entrer, ni à jeter l'ancre, ni à payer des droits pour cause de transit, et, en aucun cas, il ne pourra être concédé de privilège à un port au préjudice des autres ports au moyen de lois ou règlements de commerce.
[Article modifié par la révision de 1860.]

Article 13.

De nouvelles provinces peuvent être admises dans la Nation, mais la création d'une province sur le territoire d'une ou de plusieurs autres provinces et la réunion de plusieurs provinces en une seule ne peuvent avoir lieu qu'avec l'accord du Congrès et de la législature des provinces concernées.

Article 14.

Tous les habitants de la Nation jouissent, conformément aux lois qui en réglementent l'exercice, des droits suivants : le droit de travailler et d'exercer toute industrie licite ; de naviguer et de faire le commerce ; d'adresser des pétitions aux autorités ; d'entrer sur le territoire argentin, d'y résider, d'y circuler librement et d'en sortir ; de publier leurs idées par la presse sans censure préalable ; de jouir et de disposer de sa propriété ; de s'associer dans un but utile ; de professer librement leur culte ; d'enseigner et de s'instruire.

Article 15.

Il n'y a pas d'esclaves dans la Nation argentine ; le petit nombre d'esclaves qui existent encore sera libre du
jour où la présente Constitution aura été jurée et une loi spéciale règlera les indemnités résultant de cette déclaration. Tout contrat d'achat ou de vente de personnes est considéré comme un crime, dont la responsabilité incombe tant aux parties contractantes qu'aux officiers publics ou fonctionnaires qui l'autorisent. Tout esclave devient libre en mettant le pied sur le territoire de la République, quelle que soit la manière dont il s'y est introduit.
[Article modifié par la révision de 1860.]

Article 16.

La Nation argentine n'admet pas des prérogatives de sang ou de naissance ; il n'y a ni privilèges personnels ni titres de noblesse. Tous les habitants sont égaux devant la loi et admissibles aux emplois sans autre condition que celle de leurs aptitudes. L'égalité est la base de l'impôt et des charges publiques.

Article 17.

La propriété est inviolable et aucun habitant de la Nation ne peut en être privé qu'en vertu d'un jugement fondé sur la loi. L'expropriation pour cause d'utilité publique doit être autorisée par une loi spéciale et donner lieu à une indemnité préalable. Seul le Congrès fixe les taxes prévues à l'article 4. Aucun service personnel ne peut être exigé qu'en vertu d'une loi ou d'un jugement fondé sur la loi. Tout auteur ou inventeur est propriétaire exclusif de son oeuvre, de son invention ou de sa découverte pour la durée fixée par la loi. La confiscation des biens est à jamais supprimée du Code pénal argentin. Aucun corps armé ne peut procéder à aucune réquisition, ni exiger aucune sorte de corvée.

Article 18.

Aucun habitant de la Nation ne peut être puni sans jugement préalable fondé sur une loi établie antérieurement au fait incriminé ; il ne peut non plus être jugé par des commissions spéciales, ni être distrait des juges désignés par une loi antérieure au fait de la cause. Nul ne peut être contraint à déposer contre lui-même ni être arrêté qu'en vertu d'un mandat ordonné par l'autorité compétente. Le droit de défense est inviolable dans les procès intéressant la personne et ses droits. Le domicile est inviolable, ainsi que la correspondance épistolaire et les papiers personnels ; une loi déterminera dans quels cas et moyennant quels motifs il peut être procédé à une perquisition et à leur saisie. La peine de mort en matière politique, les tortures de toutes sortes et la peine du fouet et les exécutions à la lance ou au couteau sont abolies à jamais. Les prisons de la Nation sont propres et bien tenues ; elles sont destinées à la détention et non au châtiment des détenus ; toute mesure qui, à titre préventif, entraîne pour les condamnés des souffrances excessives, engage la responsabilité du juge qui aurait autorisé ladite mesure.
[Dispositions supprimées par la révision de 1860.]

Article 19.

Les actes privés des hommes, lorsqu'ils n'offensent pas l'ordre et la morale publique et ne portent pas préjudice aux tiers, ne relèvent que de Dieu et sont exemptés de l'autorité des tribunaux. Aucun habitant de la Nation ne peut être contraint à faire ce que la loi n'ordonne pas ni être empêché de faire ce qu'elle n'interdit pas.

Article 20.

Les étrangers jouissent sur le territoire de la Nation de tous les droits civils du citoyen ; ils peuvent exercer toute industrie, commerce et profession ; posséder tous biens immeubles, les acquérir et les aliéner ; naviguer sur les cours d'eau et le long des côtes ; pratiquer librement leur culte, tester et se marier conformément aux lois en vigueur. Ils ne sont pas tenus à acquérir la citoyenneté ou à payer des taxes obligatoires extraordinaires. Ils acquièrent la naturalisation par une résidence de deux ans ininterrompus sur le territoire de la Nation, mais l'autorité peut abréger ce délai en faveur de ceux qui le demandent s'ils allèguent et justifient des services rendus à la République.

Article 21.

Tout citoyen argentin est obligé de prendre les armes pour la défense de la patrie et de la présente Constitution, conformément aux lois votées à cet effet par le Congrès et aux décrets pris par le Pouvoir exécutif national. Les citoyens naturalisés sont libres d'accepter ou de refuser le service militaire pendant le délai de dix ans à compter du jour où ils ont acquis la naturalisation.

Article 22.

Le peuple ne délibère et ne gouverne que par ses représentants et par les autorités établies par la présente Constitution. Toute force armée ou toute réunion de personnes s'attribuant les droits du peuple et réclamant en son nom commet le crime de sédition.

Article 23.

En cas de troubles intérieurs ou d'attaque extérieure mettant en péril l'exercice de la présente Constitution et les autorités établies par elle, l'état de siège est décrété dans la province ou sur le territoire où l'ordre public est troublé, et les garanties constitutionnelles y sont suspendues. Pendant cette suspension, le Président de la République ne peut, de sa propre autorité, prononcer aucune condamnation ni aucune peine. En ce qui concerne les personnes, son pouvoir est donc limité au droit d'ordonner leur arrestation ou leur transfert d'un point du territoire à un autre, si elles ne désirent pas quitter le territoire argentin.

Article 24.

Le Congrès vise à la réforme de la législation actuelle dans toutes ses branches et à l'institution du jury.

Article 25.

Le Gouvernement fédéral favorise l'immigration européenne, il ne peut restreindre, limiter ou grever d'aucun impôt l'entrée sur le territoire argentin des étrangers qui veulent travailler la terre, développer les industries, introduire et enseigner les sciences et les arts.

Article 26.

La navigation sur les cours d'eau intérieurs de la Nation est libre pour tous les pavillons, sous la seule condition de se conformer aux règlements établis par l'autorité nationale.

Article 27.

Le Gouvernement fédéral est tenu de consolider ses relations de paix et de commerce avec les puissances étrangères par tous traités conformes aux principes de droit public établis par la présente Constitution.

Article 28.

Les principes, garanties et droits reconnus dans les articles précédents ne peuvent être modifiés par les lois qui en règlent l'exercice.

Article 29.

Le Congrès ne peut accorder au Pouvoir exécutif national, ni les législatures provinciales aux gouverneurs des provinces, des pouvoirs extraordinaires ni la totalité du pouvoir public ; il ne peut non plus leur octroyer des pouvoirs ni des suprématies en vertu desquels la vie, l'honneur et la fortune des citoyens argentins seraient à la merci d'un gouvernement ou d'une personne quelconque. Les actes de cette nature sont frappés de nullité absolue et exposent ceux qui les réalisent, les approuvent ou y souscrivent à la responsabilité et aux peines appliquées aux traîtres à la patrie.

Article 30.

La Constitution peut être révisée dans son ensemble et dans chacune de ses parties dix ans après le jour où les peuples l'auront jurée. La nécessité d'une révision doit être prononcée par le Congrès à la majorité des deux tiers au moins de ses membres ; mais la révision ne peut être effectuée que par une Convention convoquée à cet effet.
[Dispositions supprimées par la révision de 1860.]

Article 31.

La présente Constitution, les lois de la Nation que le Congrès adopte pour son exécution et les traités conclus avec les Nations étrangères sont considérés comme la loi suprême de la Nation ; les autorités des provinces sont tenues de s'y conformer, nonobstant toute disposition contraire incluse dans les lois ou les constitutions provinciales, sous réserve pour la province de Buenos-Aires, des traités ratifiés après le pacte du 11 novembre 1859.
[Article modifié par la révision de 1860, et tenant compte du pacte de San José de Flores.]

Article 32.

Le Congrès fédéral n'adopte aucune loi limitant la liberté de presse ou rendant celle-ci justiciable des tribunaux
fédéraux.
[Article ajouté par la révision de 1860.]

Article 33.

Les déclarations, garanties et droits énumérés dans la Constitution ne doivent pas être considérés comme la négation d'autres garanties et droits non énumérés mais découlant du principe de la souveraineté du peuple et de la forme républicaine de gouvernement.
[Article ajouté par la révision de 1860.]

Article 34.

Les magistrats du siège des tribunaux fédéraux ne peuvent être en même temps juges des tribunaux provinciaux ; le service fédéral, civil ou militaire, ne donne pas le droit de résidence dans la province où il est exercé, lorsqu'elle n'est pas celle du domicile habituel du fonctionnaire, cette disposition ayant pour effet d'accorder au fonctionnaire la possibilité de choisir parmi les différents emplois dans la province où il se trouve accidentellement.
[Article ajouté par la révision de 1860.]

Article 35.

Les dénominations successivement adoptées depuis 1810 jusqu'à ce jour, à savoir « Provinces Unies du Río de la Plata », « République argentine », « Confédération argentine », sont désormais indistinctement et officiellement utilisées pour désigner le gouvernement et le territoire des provinces ; l'expression « Nation argentine » est employée pour l'élaboration et la sanction des lois.
[Article ajouté par la révision de 1860.]

Deuxième partie. Autorités nationales.

Titre premier. Gouvernement fédéral.

Section première. Du Pouvoir législatif

Article 36.

Un Congrès composé de deux chambres, celle des députés de la Nation et celle des sénateurs des provinces et de la capitale, est investi du pouvoir législatif de la Nation.

Chapitre premier. De la Chambre des députés

Article 37.

La Chambres des députés est composée de représentants directement élus à la majorité par le peuple des provinces et de la capitale, qui sont considérées à cet effet comme des circonscriptions électorales d'un seul État, à raison d'un pour vingt mille habitants ou d'une fraction qui ne peut être inférieure à dix mille.

Article 38.

Les députés pour la première législature sont nommés dans la proportion suivante : pour la capitale, six, pour la province de Buenos Aires, six douze députés ; pour celle de Córdoba, six ; pour celle de Catamarca, trois ; pour celle de Corrientes, quatre ; pour celle de Entre Ríos, deux ; pour celle de Jujuy, deux ; pour celle de Mendoza, trois ; pour celle de La Rioja, deux ; pour celle de Salta, trois ; pour celle de Santiago, quatre ; pour celle de San Juan, deux ; pour celle de Santa Fe, deux ; pour celle de San Luis, deux ; pour celle de Tucumán, trois.
[Article modifié par la révision de 1860.]

Article 39.

Pour la seconde législature, il doit être procédé à un recensement général qui établira le nouveau nombre de députés ; mais ce recensement ne peut être renouvelé que tous les dix ans.
[Article modifié par la révision de 1860.]

Article 40.

Pour être élu député, il faut avoir vingt-cinq ans révolus, et avoir exercé les droits de citoyen depuis quatre ans, être originaire de la province où on est élu, ou y avoir résidé pendant les deux années précédentes.
[Article modifié par la révision de 1860.]

Article 41.

Les législatures des provinces déterminent dans ce cas la façon dont il doit être procédé à l'élection directe des députés de la Nation ; par la suite, le Congrès adoptera une loi générale.

Article 42.

Les députés sont élus pour quatre ans et ils sont rééligibles ; mais la Chambre sera renouvelable par moitié tous les deux ans ; à cet effet, les députés élus pour la première législature désignent par tirage au sort ceux qui sortiront au premier renouvellement.

Article 43.

En cas de vacance, le gouvernement de la province ou de la capitale fait procéder à l'élection légale d'un nouveau membre.

Article 44.

La Chambre des Députés possède seule l'initiative des lois sur les contributions et sur le recrutement des troupes.

Article 45.

Elle a seule le droit d'accuser devant le Sénat le Président et le Vice-président de la Confédération et les ministres, ainsi que les membres des deux chambres, ceux de la Cour suprême de justice et et des autres tribunaux inférieurs de la Nation, les gouverneurs des provinces, pour trahison, concussion, détournement de deniers publics, violation de la Constitution, ou autres délits punis de peines infamantes ou de mort, après en avoir eu connaissance, à la demande d'une partie ou de l'un de ses membres, et décidé à la majorité des deux tiers de ses membres présents qu'il y a lieu d'engager une action.  dans les actions en responsabilité poursuivies à leur encontre en cas de délit ou de mauvais exercice de leurs fonctions, ou en cas de crime de droit commun, après enquête et déclaration à la majorité des deux tiers de ses membres présents qu'il y a lieu d'engager une action.
[Article modifié par la révision de 1860.]

Chapitre II. Du Sénat

Article 46.

Le Sénat est composé de deux sénateurs pour chaque province, élus par leurs législatures à la pluralité des voix, et de deux sénateurs de la capitale élus de la manière prévue pour l'élection du Président de la Nation. Chaque sénateur a une voix.

Article 47.

Pour être élu sénateur, il faut être âgé de trente ans, avoir exercé pendant six ans les droits de citoyen de la Nation, jouir d'une rente annuelle de deux mille pesos forts ou d'un revenu équivalent, être originaire de la province où on est élu, ou y avoir résidé pendant les deux années précédentes.
[Article modifié par la révision de 1860.].

Article 48.

Les sénateurs sont élus pour une période de neuf ans et sont indéfiniment renouvelables. Le Sénat est renouvelé par tiers tous les trois ans, en décidant par tirage au sort, après que tous se soient réunis, de ceux qui doivent sortir dans le premier et le second triennat.

Article 49.

Le Vice-président de la Nation est le président du Sénat, mais il n'a droit de vote qu'en cas de partage des voix.

Article 50.

Le Sénat désigne un président pro tempore qui exerce sa présidence en cas d'absence du Vice-président ou lorsque celui-ci exerce les fonctions de Président de la Nation.

Article 51.

Il incombe au Sénat de juger en audience publique les personnes mises en accusation par la Chambre des députés ; à cet effet, ses membres doivent prêter serment. Si l'accusé est le Président de la Nation, le Sénat est présidé par le président de la Cour suprême de justice. Nul ne peut être déclaré coupable qu'à la majorité des deux tiers des membres présents.

Article 52.

Sa décision n'aura d'autre effet que celui de destituer l'accusé et de le déclarer incapable d'occuper tout poste honorifique ou de confiance, ou tout autre emploi rétribué par la Nation. Toutefois, la partie condamnée pourra être accusée, jugée et punie par-devant les tribunaux ordinaires, conformément aux lois en vigueur.

Article 53.

Il incombe également au Sénat d'autoriser le Président de la Nation à décréter l'état de siège sur tout ou partie de la République en cas d'attaque extérieure.

Article 54.

En cas de vacance d'un siège de sénateur par décès, démission ou toute autre cause, le gouvernement provincial auquel correspond ce siège fait procéder sans délai à l'élection d'un nouveau membre.

Article 51.

Seul le Sénat a l'initiative de la réforme de la Constitution.
[Article abrogé par la révision de 1860.]

Chapitre III. Dispositions communes aux deux chambres.

Article 55.

Les deux chambres se réunissent tous les ans en sessions ordinaires du 1er mai au 30 septembre. Elles peuvent aussi être convoquées en sessions extraordinaires par le Président de la Nation et leurs sessions peuvent être prorogées.

Article 56.

Chaque chambre a le droit de juger la validité des élections, des droits et des qualités de ses membres. Aucune d'elles ne tient séance qu'à la majorité absolue de ses membres, mais, si cette majorité n'est pas obtenue, les membres absents sont contraints à assister aux séances dans les délais et sous les peines établies par chaque chambre.

Article 57.

Les deux chambres ouvrent et clôturent leurs sessions simultanément. Aucune chambre ne peut interrompre ses séances pendant plus de trois jours sans le consentement de l'autre.

Article 58.

Chaque chambre détermine son règlement et peut à la majorité des deux tiers des suffrages exprimés soit réprimer les écarts de conduite de tous les membres dans l'exercice de leurs fonctions, soit les révoquer pour une incapacité physique ou morale survenue depuis leur entrée en fonctions et elle peut même les exclure de son sein ; mais la majorité absolue des membres présents est suffisante pour décider sur les cas de démission.

Article 59.

Au moment de leur entrée en fonctions, les sénateurs et les députés prêtent serment de remplir avec loyauté leurs fonctions et d'agir en toutes circonstances conformément aux dispositions de la présente Constitution.

Article 60.

Aucun membre du Congrès ne peut être accusé, poursuivi ou inquiété en raison des opinions ou des discours prononcés par lui dans l'exercice de ses fonctions.

Article 61.

Aucun sénateur ou député depuis le jour de son élection jusqu'à celui de la cessation de ses fonctions, ne peut être arrêté‚ sauf le cas de flagrant délit dans la commission d'un crime comportant la peine de mort ou une peine afflictive ou infamante ; dans ce cas, la chambre intéressée en est saisie par une information sommaire.

Article 62.

Au cas où une plainte serait interposée devant les juridictions ordinaires à l'encontre d'un sénateur ou d'un député, chaque chambre peut, après examen de l'affaire en audience publique et à la majorité des deux tiers des suffrages exprimés, suspendre l'accusé dans ses fonctions et le déférer au juge compétent.

Article 63.

Les deux chambres peuvent interpeller les ministres du Pouvoir exécutif afin de leur demander toutes les explications et tous les renseignements qu'elles jugent nécessaires.

Article 64.

Aucun membre du Congrès ne peut accepter un emploi ou une commission du Pouvoir exécutif sans le consentement préalable de la chambre dont il fait partie, à moins qu'il ne s'agisse d'un simple avancement.

Article 65.

Les membres du clergé régulier ne peuvent être membres du Congrès, ainsi que les gouverneurs provinciaux pendant la durée de leur mandat.

Article 66.

Les sénateurs et les députés reçoivent du Trésor de la Nation une indemnité fixée par la loi.

Chapitre IV. Des attributions du Congrès

Article 67.

Les attributions du Congrès sont les suivantes :
1. Légiférer sur les douanes extérieures et établir les droits à l'importation et à l'exportation qui doivent y être acquittés.
Légiférer sur les douanes extérieures et établir les droits d'importation, lesquels seront, ainsi que les évaluations qui leur servent de base, uniformes pour toute la nation; il demeure entendu que ces droits, ainsi que les autres contributions nationales, pourront être payés en monnaies ayant cours dans les provinces respectives, à leur juste équivalent. Établir également les droits d'exportation jusqu'en 1866, date à laquelle ils cesseront en tant qu'impôt national, et ne pourront être impôt provincial.
[Modifié par la révision de 1860.]
2. Imposer des contributions directes pour une durée déterminée et proportionnellement égales sur tout le territoire de la Nation, en tant que l'exigent la défense, la sécurité commune et le bien général de l'État.
3. Contracter des emprunts sur le crédit de la Nation.
4. Décider de l'usage et de l'aliénation des terres appartenant au domaine national.
5. Constituer et réglementer une banque nationale dans la capitale et ses succursales en province, ayant la  faculté d'émettre des billets.
6. Régler le paiement de la dette intérieure et extérieure de la Nation.
7. Fixer annuellement le budget des dépenses de l'administration de la Nation, et approuver ou rejeter le compte d'emploi de ces fonds
8. Accorder des subventions du Trésor national aux provinces dont les revenus ne sont pas suffisants pour couvrir leurs dépenses ordinaires d'après leur propre loi de finances.
9. Réglementer la libre navigation des cours d'eau intérieurs, autoriser les ports qu'il juge convenable, créer et supprimer des douanes, sans pouvoir supprimer les douanes extérieures qui existaient dans chaque province à l'époque de son incorporation.
[Modifié par la révision de 1860.]
10. Battre monnaie, en fixer la valeur, ainsi que celle des monnaies étrangères et adopter un système uniforme de poids et mesures pour toute la Nation.
11. Adopter les codes civil, commercial, pénal et des mines ; adopter spécialement les lois générales pour toute la Nation sur la nationalité et la naturalisation, sur la banqueroute, sur la contrefaçon des pièces de monnaie ayant cours légal et des documents publics de l'État, et les lois nécessaires à l'institution du jury.
Adopter les codes civil, commercial, pénal et des mines sans que ces codes puissent altérer les juridictions locales, leur application appartenant aux tribunaux fédéraux ou provinciaux, suivant que les personnes ou les choses tombent sous l'une ou l'autre juridiction ; et spécialement les lois générales pour toute la nation sur la nationalité et la naturalisation, sous réserve du principe de la nationalité naturelle ; ainsi que sur la banqueroute, sur la contrefaçon des monnaies ayant cours légal et des documents publics de l'État, et les lois nécessaires à l'institution du jury.
[Modifié par la révision de 1860.]
12. Régler le commerce maritime et terrestre avec les nations étrangères et entre les provinces.
13. Régler et organiser les courriers et postes générales de la nation.
14. Établir définitivement les limites du territoire de la Nation, fixer celles des provinces, créer de nouvelles provinces et établir par une législation spéciale l'organisation, l'administration et le gouvernement des territoires nationaux qui resteraient en dehors des limites assignées aux provinces.
15. Pourvoir à la sécurité des frontières, conserver l'état de paix avec les Indiens, et promouvoir leur conversion au catholicisme.
16. Pourvoir à la prospérité du pays, à l'épanouissement et au bien-être de toutes les provinces et au développement de la culture en élaborant des plans d'enseignement général et universitaire et en promouvant l'industrie, l'immigration, la construction de chemins de fer et de canaux navigables, la colonisation des terres qui appartiennent au domaine national, l'introduction et l'établissement de nouvelles industries, l'importation de capitaux étrangers et l'exploration des cours d'eaux intérieurs, le tout par des lois de protection de ces intérêts et par des concessions temporaires de privilèges et des récompenses.
17. Établir des tribunaux inférieurs à la Cour suprême de justice ; y créer et supprimer des emplois, en fixer les attributions, attribuer des pensions, accorder des honneurs et des amnisties générales.
18. Accepter ou rejeter les motifs de démission du Président ou du Vice-président de la République ; déclarer s'il y a lieu de procéder à une nouvelle élection ; procéder au scrutin et à sa rectification
19. Approuver ou rejeter les traités conclus avec les autres nations et les concordats signés avec le Siège apostolique ; régler l'exercice du droit de patronat sur tout le territoire.
20. Admettre sur le territoire de la Nation des ordres religieux, en plus de ceux qui existent.
21. Autoriser le Pouvoir exécutif à déclarer la guerre ou à faire la paix.
22. Accorder des patentes de course et de représailles, et établir des règlements pour les prises.
23. Fixer la force des troupes de ligne de terre et de mer en temps de paix et de guerre ; faire les règlements et
ordonnances pour l'administration de ces troupes.
24. Autoriser la convocation des milices de toutes les provinces ou de certaines d'entre elles, lorsque l'exécution des lois de la Nation l'exige et qu'il est nécessaire de réprimer une insurrection ou de repousser une invasion. Régler l'organisation, l'armement et la discipline de ces milices, et l'administration et la direction de la partie de ces milices employée au service de la Nation, en laissant à chaque province le droit de nommer ses chefs et officiers respectifs, et le soin d'organiser dans sa propre milice la discipline prescrite par le Congrès.
25. Permettre l'introduction de troupes étrangères sur le territoire de la Nation, et la sortie des forces nationales hors du territoire.
26. Décréter l'état de siège sur un ou plusieurs points de la Nation en cas de troubles intérieurs et approuver ou mettre fin à l'état de siège décrété par le Pouvoir exécutif, hors session.
27. Établir une législation exclusive sur le territoire de la capitale de la Nation et sur les autres lieux acquis par achat ou cession dans une province quelconque pour la création de forteresses, d'arsenaux, de magasins et autres établissements d'utilité nationale.
28. Examiner les constitutions provinciales et les désapprouver si elles ne sont pas conformes aux principes et aux dispositions de la présente Constitution ; faire toutes les lois et règlements appropriées pour exercer les pouvoirs ci-dessus définis et  tous les autres pouvoirs conférés par la présente Constitution au Gouvernement de la Nation argentine.
[Modifié par la révision de 1860.]

Chapitre V. De l'élaboration et de l'adoption des lois.

Article 68.

L'initiative des lois peut émaner de l'une ou de l'autre Chambre du Congrès, sous forme de projets présentés par leurs membres ou par le pouvoir exécutif, à l'exception des lois relatives aux objets dont traite les articles 40 et 51 l'article 44.
[Modifié par la révision de 1860.]

Article 69.

Tout projet de loi adopté par la chambre qui en a eu l'initiative est soumis à l'examen de l'autre chambre. Une fois le projet adopté par les deux chambres, il est transmis au Pouvoir exécutif de la Nation en vue de son examen et, s'il l'approuve, de sa promulgation.

Article 70.

Tout projet de loi est considéré comme adopté par le Pouvoir exécutif s'il n'est pas renvoyé au Congrès dans un délai de dix jours ouvrables.

Article 71.

Aucun projet de loi rejeté en totalité par l'une des chambres ne peut être soumis à une nouvelle délibération au cours des sessions de la même année. Mais, si le projet a été l'objet d'amendements par l'autre chambre, il revient à celle qui en a eu l'initiative, et si dans celle-ci les additions ou modifications ont été approuvées à la majorité absolue, le projet est transmis au Pouvoir exécutif. Si ces additions ou modifications ont été rejetées, le projet de loi revient encore une fois à la Chambre saisie en second lieu, et si cette Chambre persiste à les adopter à la majorité des deux tiers de ses membres, le projet revient à l'autre Chambre, et lesdites additions ou corrections ne sont censées rejetées que si ce rejet réunit les deux tiers des voix des membres présents.

Article 72.

Lorsqu'un projet de loi est rejeté en tout ou en partie par le Pouvoir exécutif, il revient à la chambre qui en a eu l'initiative avec les objections formulées. Cette chambre procède à une nouvelle délibération et, si elle ratifie le projet à la majorité des deux tiers des suffrages exprimés, celui-ci est soumis à un nouvel examen de l'autre chambre. Si ledit projet est adopté définitivement par les deux chambres à la même majorité, le projet devient loi et est transmis au Pouvoir exécutif en vue de sa promulgation. Dans ce cas, les votes des deux chambres sont par appel nominal en se prononçant pour ou contre ; les noms et les motifs des votants, ainsi que les objections du Pouvoir exécutif, sont immédiatement publiés par la presse. Si les chambres ne sont pas d'accord entre elles sur les objections formulées, le projet ne peut être à nouveau discuté au cours des sessions de l'année.

Article 73.

La formule suivante est employée pour l'adoption des lois : « Le Sénat et la Chambre des Députés de la Nation argentine, réunis en Congrès, ... ordonnent ou adoptent avec force de loi. »

Section II. Du pouvoir exécutif.

Chapitre premier. De sa nature et de sa durée

Article 74.

Le Pouvoir exécutif de la Nation est exercé par un citoyen en qualité de « Président de la Nation argentine ».

Article 75.

En cas de maladie, absence de la capitale, décès, démission ou révocation du Président, le Pouvoir exécutif est exercé par le vice-président de la Nation. En cas de révocation, décès, démission ou incapacité du Président et du Vice-président de la Nation, le Congrès désigne le fonctionnaire public qui devra exercer la présidence jusqu'à la cessation de l'incapacité ou jusqu'à l'élection du nouveau président.

Article 76.

Pour être élu Président ou Vice-président de la Nation, il faut être né sur le territoire argentin ou être fils d'un citoyen de naissance, en cas de naissance dans un pays étranger, appartenir à la communion catholique, apostolique romaine, et remplir toute autre condition exigée pour être élu sénateur.

Article 77.

Le Président et le Vice-président sont élus pour six ans et ne sont renouvelables qu'après l'intervalle d'une période.

Article 78.

Les fonctions du Président de la Nation prennent fin le jour même où sa période de six ans arrive à échéance, sans qu'aucun évènement qui en aurait entraîné l'interruption ne puisse servir de prétexte à une prorogation du mandat.

Article 79.

Le Président et le Vice-président sont rémunérés par le Trésor de la Nation ; leur traitement ne peut être modifié pendant l'exercice de leurs fonctions. Ils ne peuvent, dans la même période, occuper aucun autre emploi ni recevoir d'autres émoluments de la Nation ou d'une province.

Article 80.

Dès leur entrée en fonctions, entre les mains du président du Sénat (la première fois, entre les mains du président du Congrès constituant) et devant le Congrès réuni en assemblée plénière, le Président et le Vice-président prêtent serment, dans les termes suivants : « Moi N. N. jure devant Dieu Notre Seigneur et ses Saints-Évangiles, d'exercer avec loyauté et patriotisme les fonctions de Président (ou de Vice-président) de la Nation et d'observer et de faire observer fidèlement la Constitution de la Nation argentine. Si je ne le fais ainsi, que Dieu et la nation m'en demandent
compte. ».

Chapitre II. Du mode et du moment de l'élection du Président et du vice-président.

Article 81.

L'élection du Président et du Vice-président de la Nation aura lieu de la manière suivante : la capitale et chacune des provinces nommeront à l'élection directe une junte d'électeurs, égale au double du total des députés et des sénateurs qu'elles envoient chacune au Congrès, sous les mêmes conditions d'éligibilité et avec les mêmes formes que celles qui sont prescrites pour l'élection des députés.
Les députés, les sénateurs ni les employés rémunérés par le gouvernement fédéral ne peuvent être électeurs. Les électeurs réunis dans la capitale de la Nation, et dans celles de leurs provinces respectives, quatre mois avant l'expiration du mandat du Président en fonctions, procéderont à l'élection du Président et du Vice-président de la Nation par bulletins signés, en indiquant sur l'un d'eux la personne pour laquelle ils votent comme Président, et sur l'autre la personne pour laquelle ils votent comme Vice-président.
Il sera dressé une double liste de toutes les personnes ayant eu des voix pour la présidence, et une double liste également des personnes ayant eu des voix pour la vice-présidence, avec l'indication du nombre de voix obtenues par chacune d'elles. Ces listes seront signées par les électeurs, et seront remises closes et scellées, deux d'entre
elles (une de chaque espèce) au président de la législature provinciale, et dans la capitale au président de la municipalité, dans les archives desquels elles demeureront déposées et renfermées, les deux autres entre les mains du président du Sénat (la première fois entre les mains du président du Congrès constituant).

Article 82.

Le président du Sénat (pour la première fois, celui du Congrès constituant), après avoir réuni toutes les listes,
procédera à leur ouverture en présence des deux Chambres. Quatre membres du Congrès, désignés par le sort, seront adjoints aux secrétaires et procéderont immédiatement au dépouillement ; ils annonceront le chiffre des suffrages obtenus par chaque candidat pour la présidence et la vice-présidence de la Nation. Ceux qui réunissent dans les deux cas la majorité absolue de tous les votants seront proclamés immédiatement Président et Vice-président.

Article 83.

Dans le cas où il n'y a point de majorité absolue à cause de la division des voix, le Congrès se prononcera entre
les deux personnes qui auront obtenu le plus grand nombre de suffrages. Si le chiffre de voix le plus élevé a été obtenu par plus de deux personnes, le Congrès fera son choix entre toutes ces personnes. Lorsque le chiffre de voix le plus élevé aura été obtenu par une seule personne, mais que le chiffre immédiatement inférieur aura été obtenu par deux ou plusieurs personnes, le Congrès fera son choix entre toutes les personnes ayant obtenu l'un et l'autre chiffres.

Article 84.

L'élection se fera à la majorité absolue des suffrages et au vote nominal. Si le premier scrutin vérifié ne donne pas de majorité absolue, il y aura lieu à un second tour de scrutin, le vote se restreignant aux deux personnes qui ont obtenu le plus de suffrages au premier tour. En cas d'égalité, la décision appartient au président du Sénat (pour la
première fois, au président du Congrès constituant). Aucun scrutin ni aucune rectification d'élection ne pourront avoir lieu sans la présence des trois quarts du nombre total des membres du Congrès.

Article 85.

L'élection du Président et du Vice-président de la Nation doit être achevée dans une seule séance du Congrès ; le résultat en est publié ensuite avec les procès-verbaux par la voie de l'impression.

Chapitre III. Attributions du Pouvoir exécutif.

Article 86.

Les attributions du Président de la Nation sont les suivantes :
1. Il est le chef suprême de la Nation et le responsable politique de l'administration générale du pays.
2. Il dicte les instructions et établit les règlements nécessaires à l'exécution des lois de la Nation, tout en veillant à ne pas altérer leur esprit par des exceptions réglementaires.
3. Il est le chef immédiat et local de la capitale de la Nation.
4. Il intervient dans l'élaboration des lois conformément à la Constitution, les promulgue et ordonne leur publication.
5. Il nomme les magistrats du siège de la Cour suprême de justice et ceux des tribunaux fédéraux inférieurs, avec l'accord du Sénat.
6. Il a le droit de faire grâce ou de commuer les peines applicables pour les délits relevant de la juridiction fédérale, après avis du tribunal compétent, sauf en cas d'accusation de la Chambre des Députés.
7. II accorde les pensions, retraites, congés et la jouissance de secours, conformément aux lois de la Nation.
8. Il exerce les droits du patronal national en ce qui touche la présentation des évêques pour les églises cathédrales, sur une liste de trois noms proposés par le Sénat.
9. Il donne ou refuse son accord aux décrets des conciles, aux bulles, brefs et rescrits du Souverain Pontife de Rome, avec l'assentiment de la Cour suprême ; une loi est requise, lorsque ces actes contiennent des dispositions générales et permanentes.
10. Il nomme et révoque avec l'accord du Sénat les ambassadeurs, les ministres plénipotentiaires et les chargés d'affaire ; il nomme et révoque de sa propre autorité les ministres d'État, les fonctionnaires des ministères, les agents consulaires et les employés dont la nomination n'est pas autrement prévue par la présente Constitution.
11. Il procède chaque année à l'ouverture des sessions du Congrès, les deux chambres étant réunies à cet effet ; il rend compte à cette occasion de la situation de la Nation, des réformes promises par la Constitution et recommande à son attention les mesures qu'il juge nécessaires et convenables.
12. Il proroge les sessions ordinaires du Congrès ou procède à la convocation des sessions extraordinaires lorsqu'un grave intérêt d'ordre public ou de progrès l'exige.
13. Il fait procéder au recouvrement des impôts de la Nation et à l'investissement de leur produit conformément aux lois en vigueur ou à la loi de finances sur les dépenses nationales.
14. Il conclut et signe les traités de paix, de commerce, de navigation, d'alliance, de limites et de neutralité, les concordats et les autres conventions nécessaires pour le maintien des bonnes relations avec les puissances étrangères ; il reçoit leurs ministres et leurs consuls sont accrédités auprès de lui.
15. Il est le commandant en chef de toutes les forces de terre et de mer de la Nation.
16. Il nomme aux emplois militaires de la Nation : il nomme avec l'accord du Sénat aux emplois ou grades d'officiers supérieurs de l'armée de terre et de la marine, et de sa propre autorité sur le champ de bataille.
17. Il dispose des forces militaires maritimes et terrestres, et il pourvoit à leur organisation et à leur distribution suivant les besoins de la Nation.
18. Il déclare la guerre, délivre les patentes de course et les lettres de représailles, avec l'autorisation et l'approbation du Congrès.
19. En cas d'attaque extérieure, il peut avec l'accord du Sénat décréter l'état de siège sur tout ou partie de la Nation pour une durée déterminée. En cas de troubles intérieurs, il ne peut prendre ces mesures que hors session du Congrès car il s'agit d'une attribution qui appartient à celui-ci. Le Président exerce ladite attribution conformément aux dispositions prévues à l'article 23.
20. Bien que le Congrès soit en session, dans les cas urgents où la tranquillité publique est en danger, le Président peut, seul, user sur les personnes de la faculté accordée à l'article 23 ; il en rend compte au Congrès dans un délai de dix jours depuis qu'il a commencé à l'exercer. Mais si le Congrès ne déclare pas l'état de siège, les personnes arrêtées ou transférées d'un point à un autre jouiront à nouveau de leur liberté, à moins que jugées, elles doivent être maintenues en détention par le juge ou le tribunal saisi de l'affaire;
[Abrogé par la révision de 1860.]
20. Il peut demander aux chefs de tous les secteurs de l'administration publique, et par leur intermédiaire à tous employés, les informations qu'il juge utile et que ces fonctionnaires sont tenus de lui fournir.
21. Il ne peut s'absenter du territoire de la capitale qu'avec l'autorisation du Congrès. Hors session, le Président ne peut s'absenter sans autorisation que pour de graves raisons de service public.
22. Il a la faculté de pourvoir aux vacances des emplois exigeant l'accord du Sénat et qui se produisent en dehors de ses sessions par des nominations dont il rend compte à ladite chambre lors de sa session suivante pour obtenir son approbation.
Il a la faculté de pourvoir aux vacances des emplois exigeant l'accord du Sénat et qui se produisent en dehors de ses sessions par des nominations en commission venant à expiration à la fin de la législature suivante.
[Modifié par la révision de 1860.]

Chapitre IV. Des ministres du Pouvoir exécutif.

Article 87.

Cinq ministres secrétaires, à savoir : de l'intérieur, des relations extérieures, des finances, de la justice, du culte et de l'instruction publique, et de la guerre et de la marine, sont chargés de l'expédition des affaires de la Nation, et ils entérinent et légalisent par le biais de leurs signature les actes du Président, qui à défaut sont sans effet. Une loi délimitera les branches des ministères respectifs.

Article 88.

Chaque ministre est responsable des actes qu'il contresigne et il est solidairement responsable avec les autres ministres des actes conjointement convenus.

Article 89.

En aucun cas, les ministres ne peuvent de leur propre chef prendre des décisions, sans mandat ou accord préalable du Président de la Confédération, à l'exception de ceux concernant le régime économique et administratif de leurs départements respectifs.
[Modifié par la révision de 1860.]

Article 90.

Dès l'ouverture des sessions du Congrès, les ministres doivent présenter un mémoire détaillé de la situation de la Nation en ce qui concerne les affaires de leurs départements respectifs.

Article 91.

Ils ne peuvent être sénateurs ou députés sans se démettre de leur fonction de ministre.

Article 92.

Les ministres peuvent assister aux séances du Congrès et prendre part aux débats, sans participer aux votes.

Article 93.

Ils perçoivent un traitement établi par la loi qui ne peut être augmenté ni réduit en faveur ou au préjudice des ministres en fonctions.

Section III. Du pouvoir judiciaire.

Chapitre premier. De sa nature et de sa durée.

Article 94.

Le Pouvoir judiciaire de la Nation est exercé par une Cour suprême de justice composée de neuf juges et deux procureurs, et par les autres tribunaux inférieurs établis par le Congrès sur le territoire de la Nation.
[Modifié par la révision de 1860.]

Article 95.

En aucun cas, le Président de la Nation ne peut exercer des fonctions judiciaires, ni être saisi d'une affaire en cours, ni revenir sur les affaires jugées.

Article 96.

Les magistrats du siège de la Cour suprême de justice et des tribunaux inférieurs de la Nation demeurent en fonctions tant que durera leur bonne conduite et ils reçoivent, pour leur service, une rémunération fixée par la loi qui ne pourra subir aucune réduction pendant l'exercice de leurs fonctions.

Article 95.

Nul ne peut être membre de la Cour suprême de justice sans être avocat de la Nation, ayant exercé la profession pendant huit ans, et remplir les conditions requises pour être élu sénateur.

Article 98.

A la formation initiale de la Cour suprême de justice, les personnes nommées prêtent serment, devant le Président de la Nation, de remplir leurs obligations en rendant la justice avec soin et loyauté conformément à la Constitution. Par la suite, ce serment sera prêté devant le président de la Cour.

Article 99.

La Cour suprême de justice établit son règlement intérieur et économique, et elle nomme tous ses employés subalternes.

Chapitre II. Attributions du Pouvoir judiciaire.

Article 100.

La Cour suprême de justice et les tribunaux inférieurs de la Nation sont compétents pour connaître et juger toutes les affaires relatives à des points visés par la Constitution et par les lois de la Nation (sous réserve des dispositions de l'alinéa 11 de l'article 67), ainsi que par les traités conclus avec les nations étrangères ; ils connaissent des conflits entre les pouvoirs publics d'une province, des affaires en relation avec les ambassadeurs, les ministres publics et les consuls étrangers ; des causes d'amirauté et de juridiction maritime, des recours contre les décisions des tribunaux ecclésiastiques [recursos de fuerza], des affaires où la Nation est l'une des parties concernées ; ainsi que des litiges survenus entre deux ou plusieurs provinces, entre une province et les habitants d'une autre, entre les habitants de provinces différentes, entre une province et ses propres habitants et entre une province et un État ou un citoyen étranger et entre une province ou ses habitants et un État ou un citoyen étranger.
[Modifié par la révision de 1860.]

Article 101.

Dans ces cas, la Cour suprême de justice exerce sa juridiction d'appel selon les règles et les exceptions établies par le Congrès ; mais dans toutes les affaires concernant les ambassadeurs, les ministres et les consuls étrangers, ainsi que celles où une province est l'une des parties concernées, et pour la résolution des conflits entre les pouvoirs publics d'une même province, la Cour suprême de justice exerce la juridiction de première et de dernière instance.

Article 102.

Une fois l'institution du jury établie dans la Confédération, tous les procès criminels ordinaires, sauf ceux qui seront fondés sur le droit d'accusation accordé à la Chambre des députés, seront jugés par un jury. L'instruction des procès aura lieu dans la province où le délit a été commis. Mais lorsque celui-ci est commis contre le droit des gens en dehors des frontières de la Nation, le Congrès déterminera par une loi spéciale le lieu de l'engagement des poursuites.

Article 103.

La trahison contre la Nation porte exclusivement sur le fait de prendre les armes contre elle ou de s'allier à ses ennemis en leur prêtant aide et secours. Le Congrès détermine par une loi spéciale la peine applicable à ce crime ; cette peine ne concerne que la personne du criminel et l'infamie du condamné ne se transmet jamais à ses parents à quelque degré que ce soit.

Titre II. Gouvernements de province.

Article 104.

Les provinces conservent tout le pouvoir non délégué par la présente Constitution au Gouvernement fédéral et celui qu'au moment de leur incorporation elles se sont expressément réservé par des pactes spéciaux.
[Modifié par la révision de 1860.]

Article 105.

Elles établissent leurs propres institutions locales et sont régies par celles-ci. Elles élisent leurs gouverneurs, leurs législateurs et les autres fonctionnaires provinciaux sans intervention du Gouvernement fédéral.

Article 106.

Chaque province adopte sa propre constitution, et avant de la mettre en vigueur la soumet à l'examen du Congrès, conformément aux dispositions de l'article 5.
[Modifié par la révision de 1860.]

Article 107.

Avec le consentement du Congrès fédéral, les provinces peuvent conclure des traités particuliers ayant pour objet l'administration de la justice, des intérêts économiques et des travaux d'utilité commune. Elles peuvent, avec leurs propres ressources, encourager l'industrie, l'immigration, la construction de chemins de fer et de canaux navigables, la colonisation des terres appartenant aux provinces, la création et l'installation de nouvelles industries, l'importation de capitaux étrangers et l'exploration de leurs cours d'eau par des lois protégeant ces intérêts.

Article 108.

Les provinces n'exercent pas le pouvoir délégué à la Nation. Elles ne peuvent pas conclure des traités particuliers ayant un caractère politique ; ni promulguer des lois sur le commerce ni sur la navigation intérieure ou extérieure ; ni établir des douanes provinciales ; ni frapper monnaie ; ni établir des banques ayant la faculté d'émettre des billets, sans l'autorisation du Congrès fédéral ; ni établir les codes civil, pénal, du commerce et des mines après la sanction de semblables codes par le Congrès ; ni promulguer des lois spéciales sur la citoyenneté et la naturalisation, sur le redressement et la liquidation judiciaire, sur la contrefaçon des pièces de monnaie ou des documents de État ; ni établir des droits de tonnage ; ni armer des navires de guerre ni lever des armées, sauf en cas d'invasion extérieure ou de péril imminent qui exige une réponse immédiate et en rendant compte par la suite au Gouvernement fédéral ; ni nommer ou recevoir des agents étrangers, ni admettre de nouveaux ordres religieux..

Article 109.

Aucune province ne peut déclarer ni faire la guerre à une autre province. Les différends sont soumis à la Cour suprême de justice et tranchés par celle-ci. Les hostilités de fait constituent des actes de guerre civile, qualifiés de sédition ou d'émeute, que le Gouvernement fédéral doit étouffer et réprimer conformément à la loi.

Article 107.

Les gouverneurs des provinces sont les représentants naturels du Gouvernement fédéral en vue du respect de la Constitution et des lois de la Nation.

Adopté à la salle des séances du Congrès national, à la ville de Santa Fe, le 25 septembre mil huit cent soixante.

Mariano Fragueiro,
Presidente.
Lucio V. Mansilla,
Secretario.
Carlos M. Saravia,
Secretario.