Titre premier. Du territoire de la République.
Titre II. Des droits civils et politiques.
Titre III. De l'exercice de la souveraineté et des organes de l'État.
Titre IV. Du gouvernement.
Titre V. Du corps législatif.
Titre VI. Du pouvoir exécutif.
Titre VII. Du corps judiciaire.
Titre VIII. De l'organisation communale.
Titre IX. De la force publique.
Titre X. Des assemblées primaires.
Titre XI. Des finances.
Titre XII. De la révision de la Constitution.
Titre XIII. Dispositions générales.
Titre XIV. Disposition spéciale.
Titre XV. Dispositions transitoires.
Le président Sténio Vincent fut élu le 18 novembre 1930 par l'Assemblée nationale. Il est à l'origine de la Constitution du 15 juillet 1932. Il obtint de Roosevelt la fin de l'occupation (depuis le 28 juillet 1915 jusqu'au 21 août 1934) du pays par les États-Unis. Il fait alors approuver une nouvelle Constitution, ratifiée par le référendum du 2 juin 1935, qui lui accorde un second mandat de cinq ans (titre XIV) et accroît ses pouvoirs.
Cette Constitution fut révisée par le référendum du 23 juillet 1939, puis par l'Assemblée nationale le 19 avril 1944.
Source : Texte de la Constitution de 1935 et texte de la Constitution révisée en 1939 et en 1944, publiés en brochures par l'Imprimerie de l'État à Port-au-Prince.
Voir le texte révisé en 1939.
Voir le texte révisé en 1944.
Le peuple haïtien,
Proclame la présente Constitution en vue d'affermir la puissance publique, d'assurer la prédominance de l'intérêt général sur l'intérêt particulier, de garantir la paix publique pour le développement du progrès social et du bien-être des générations présentes et futures.Titre premier.
Du territoire de la République.Article premier.
Haïti est un État indépendant où le pouvoir souverain réside dans le peuple.Son territoire et les îles qui en dépendent sont inviolables et ne peuvent être aliénés par aucun traité ou par aucune convention.
Ces îles sont : La Gonâve, la Tortue, l'île-à-Vaches, les Cayemittes, la Navase, la Grande Caye.
Article 2.
Le territoire d'Haïti est divisé en départements, arrondissements et communes. Le nombre et les limites de ces divisions sont fixés par la loi qui en règle également l'organisation et le fonctionnement.Néanmoins, aucune érection de poste militaire, de quartier ou de commune ne pourra avoir lieu qu'après une enquête du pouvoir exécutif établissant que le développement général de la localité justifie cette mesure.
Titre II.
Des droits civils et politiques.Article 3.
La réunion des droits civils et politiques constitue la qualité de citoyen.L'exercice des droits civils indépendants des droits politiques est réglé par la loi.
Article 4.
Tout Haïtien âgé de 21 ans accomplis exerce les droits politiques, s'il n'est dans aucun des cas d'incapacité prévus par la loi.Article 5.
Les étrangers naturalisés haïtiens ne sont admis à l'exercice des droits politiques que dix ans à partir de la date de leur naturalisation.Article 6.
Les Haïtiens sont égaux devant la loi. Ils sont également admissibles aux emplois civils et militaires sous les conditions établies par la loi.Néanmoins, en ce qui concerne l'exercice des droits civils, certaines différences peuvent être établies par la loi entre les Haïtiens d'origine et les Haïtiens par naturalisation.
Article 7.
Le droit de propriété est garanti aux citoyens. L'expropriation d'immeubles pour cause de nécessité et d'utilité publique ne peut avoir lieu que moyennant le paiement ou la consignation aux ordres de qui-de-droit d'une juste et préalable indemnité. Mais la propriété entraîne également des obligations. L'usage doit en être dans l'intérêt général. Le propriétaire foncier a, vis-à-vis de la communauté, le devoir de cultiver et d'exploiter le sol. La sanction de cette obligation est prévue par la loi.Article 8.
Le droit de propriété immobilière est accordé à l'étranger résidant en Haïti et aux Sociétés formées par des étrangers seulement pour les besoins de leurs demeures, et de leurs entreprises agricoles, commerciales, industrielles ou pour leurs établissements d'enseignement légalement autorisés. Ce droit prendra fin dans une période d'une année après que l'étranger aura cessé de résider dans le pays ou qu'auront cessé les opérations de ces compagnies conformément à la loi qui détermine également les règles à suivre pour la transmission et la liquidation des biens.Article 9.
Tous les cultes sont libres. Chacun a le droit de professer sa religion et d'exercer son culte pourvu qu'il ne trouble pas l'ordre public.La religion catholique, professée par la majorité des Haïtiens, jouit d'une situation spéciale découlant du Concordat existant entre le gouvernement haïtien et le Saint-Siège apostolique.
Article 10.
Chacun a le droit d'exprimer ses opinions en toutes matières.Les abus de ce droit sont définis et réprimés par la loi.
Article 11.
L'enseignement est libre. La liberté de l'enseignement s'exerce sous le contrôle et la surveillance de l'État conformément à la loi.L'enseignement primaire est obligatoire.
L'instruction publique, jusqu'à l'enseignement secondaire inclusivement, est gratuite, sans préjudice des conditions d'admission établies par la loi.
Les établissements d'enseignement supérieur de l'État sont ouverts aux jeunes gens qui remplissent les conditions prescrites par la loi et les règlements.
Article 12.
Le Français est la langue officielle. Son emploi est obligatoire dans les services publics.
Titre III.
De l'exercice de la souveraineté et des organes de l'État.Article 13.
La souveraineté réside dans le peuple qui l'exerce :
1° par le libre choix qu'il fait du chef du pouvoir exécutif ;
2° par l'élection des membres de la Chambre des députés et des électeurs sénatoriaux ;
3° par l'opinion qu'il peut, par voie de référendum, émettre sur toutes les questions l'intéressant et au sujet desquelles il est consulté par le chef du pouvoir exécutif.La procédure et les garanties du référendum sont réglementées par arrêté du chef du pouvoir exécutif.
Titre IV.
Du gouvernement.Article 14.
Le gouvernement d'Haïti est républicain et démocratique. Il fonctionne par le pouvoir exécutif, dirigé par un président, détenteur de la puissance publique, sous l'autorité de qui fonctionnent les divers organes de l'État et qui est assisté du corps législatif et du corps judiciaire.La responsabilité est individuelle et attachée à toutes les fonctions publiques.
Une cour spéciale dénommée Haute Cour de Justice, composée du président du Tribunal de cassation, du président du Sénat et du président de la Chambre des députés, connaîtra du crime de trahison et des autres crimes et délits commis par le Président de la République, les secrétaires d'État et les membres du Tribunal de cassation dans l'exercice de leurs fonctions.
Cette Cour ne pourra juger que sur la mise en accusation prononcée par les deux tiers du Sénat de la République et n'appliquera d'autre peine que la déchéance, la destitution et la privation d'exercer toute fonction publique pendant un an au moins et cinq ans au plus.
Titre V.
Du corps législatif.Article 15.
Le Corps législatif comprend une Chambre des députés de 37 membres et un Sénat de 21 membres.Il siège à Port-au-Prince.
Néanmoins, il peut être appelé, suivant les circonstances, à siéger ailleurs.
Article 16.
Pour être membre de la Chambre des députés, il faut :
1° Être âgé de 25 ans accomplis ;
2° Avoir la jouissance de l'exercice des droits civils et politiques ;
3° Avoir résidé au moins une année dans l'une des communes de l'arrondissement que l'on veut représenter, ou bien y avoir conservé et entretenu un établissement important depuis l'époque où l'on a cessé d'y résider ;
4° Être propriétaire de biens fonciers.Article 17.
Pour être membre du Sénat, il faut :
1° Être âgé de 30 ans accomplis ;
2° Avoir la jouissance et l'exercice des droits civils et politiques ;
3° Avoir résidé au moins deux ans dans l'une des communes du département à représenter, ou bien y avoir conservé et entretenu un établissement important depuis l'époque où l'on a cessé d'y résider ;
4° Être propriétaire de biens fonciers.Article 18.
La répartition des sièges des députés et des sénateurs est fixée par la loi.Article 19.
Les députés sont élus au suffrage universel pour une période de quatre ans.Les sénateurs, au nombre de onze, sont élus pour six ans par la Chambre des députés, sur deux listes de trois candidats pour chaque siège, fournies l'une par les collèges électoraux suivant le mode prescrit par la loi, et l'autre par le pouvoir exécutif.
Les dix autres sont nommés pour la même durée par le Président de la République.
Les membres de chaque Chambre prêtent individuellement le serment de maintenir les droits du peuple et d'être fidèles à la Constitution.
Des attributions du corps législatif.
Article 20.
Le Corps législatif se réunit de plein droit le 15 janvier de chaque année.La session dure trois mois.
Les sessions prennent date à l'ouverture des deux Chambres en Assemblée nationale.
Le Président de la République peut ajourner les Chambres, mais l'ajournement ne sera jamais de plus de deux mois et ne devra point se répéter au cours de la session.
En cas de conflit grave soit entre les deux Chambres, soit entre elles ou l'une d'entre elles et le pouvoir exécutif, le Président de la République a la faculté de dissoudre le Corps législatif. Le décret de dissolution ordonnera en même temps de nouvelles élections. Ces élections auront lieu dans un délai de trois mois à partir de la date du décret.
Pendant ces trois mois, le Président de la République est autorisé à prendre, en conseil des secrétaires d'État, des décrets qui auront force de lois et qui, soumis à la ratification des Chambres à leur prochaine réunion, ne pourront être rejetés qu'à la majorité des deux tiers de chaque Chambre.
Article 21.
Le Corps législatif fait des lois sur tous les objets d'intérêt public et en partage l'initiative avec le pouvoir exécutif. Il vote le budget de l'État. Mais le pouvoir exécutif a seul le droit de prendre l'initiative des lois concernant les dépenses publiques et celles-ci ne peuvent jamais être augmentées par le Corps législatif.Article 22.
Les séances du Corps législatif sont publiques. Néanmoins, chacune des deux Chambres peut se former en comités secrets sur la demande d'un membre et après délibération de la majorité.Article 23.
Le Corps législatif fixe, par ses règlements intérieurs, sa discipline, l'ordre suivant lequel il accomplit ses travaux et détermine la sanction à appliquer à tout membre qui ne s'y conforme pas.Les députés et les sénateurs reçoivent du Trésor public une indemnité mensuelle de deux cent cinquante dollars.
Tout membre du Corps législatif devenu secrétaire d'État ou chargé de mission temporaire à l'étranger cesse, pendant ce temps, d'avoir droit à l'indemnité qui lui est allouée à l'alinéa précèdent.
Article 24.
Toute loi votée par le Corps législatif est immédiatement adressée, à fin de promulgation, au Président de la République. Si le Président de la République estime qu'il y a lieu de ne pas la promulguer, il la renverra au Corps législatif avec ses observations.Dans les huit jours du renvoi de la loi à la Chambre qui l'avait primitivement votée, celle-ci demandera à l'autre Chambre de se joindre à elle en Assemblée nationale pour statuer sur les objections. Si les objections sont rejetées par l'Assemblée nationale et que le Président de la République y persiste, la loi sera soumise à un nouvel et dernier examen de l'Assemblée nationale qui ne pourra avoir lieu qu'au début de la prochaine session ordinaire.
Article 25.
Les lois et autres actes du Corps législatif sont publiés dans le Moniteur et insérés dans le Bulletin des Lois.Article 26.
Pendant la durée de son mandat et sauf le cas de flagrant délit, nul membre du Corps législatif ne peut être arrêté ni poursuivi en matière criminelle, correctionnelle et de police, sans l'autorisation de la Chambre à laquelle il appartient.De l'Assemblée nationale.
Article 27.
La réunion des deux Chambres constitue l'Assemblée nationale.Les présidents du Sénat et de la Chambre des députés sont, de droit, président et vice-président de l'Assemblée nationale qui a pour secrétaires les secrétaires mêmes des bureaux des deux Chambres.
Article 28.
Les attributions de l'Assemblée nationale sont :
1° De recevoir le serment du Président de la République ;
2° D'ouvrir et de clôturer les sessions législatives ;
3° De statuer sur les propositions de révision constitutionnelle, de proclamer la Constitution nouvelle lorsqu'il s'agit de révision totale ; d'introduire dans la Constitution les amendements qui y sont apportés par voie de référendum populaire, lorsqu'il ne s'agit que de révision partielle ;
4° De statuer sur les objections du Président de la République comme il est dit dans l'article 24 de la Constitution ;
5° D'approuver ou de rejeter les traités de paix et autres traités ou conventions internationales ;
6° De former le Comité permanent prévu à l'article 30 ci-dessous ;
7° De désigner les trois candidats à la présidence de la République, comme il est prévu à l'article 38 ci-après.Article 29.
En cas de mort, démission, déchéance, interdiction judiciaire d'un député ou d'un sénateur, il est pourvu à son remplacement pour le temps seulement qui reste à courir. Il en est de même à défaut d'élections ou en cas de nullité des élections dans une ou plusieurs circonscriptions. Il n'y aura pas lieu à l'élection partielle, si la vacance se produit au cours de la dernière session ordinaire de la législature, sauf le cas où il y aurait plusieurs députés ou sénateurs à remplacer.Du Comité permanent de l'Assemblée nationale.
Article 30.
À la clôture de chaque session ordinaire, l'Assemblée nationale forme un Comité permanent composé de onze membres dont six députés et cinq sénateurs agréés par le Président de la République.Le Comité permanent désigne son président et fonctionne pendant l'intersession.
Il collaborera à la confection des décrets pris par le Président de la République dans l'intervalle des sessions ; autorisera son président à contresigner les dits décrets lorsqu'il les aura approuvés, fera, à l'ouverture de chaque session ordinaire, rapport à l'Assemblée nationale sur les mesures d'urgence auxquelles il aura participé.
Titre VI.
Du pouvoir exécutif.Article 31.
Le pouvoir exécutif est exercé par un citoyen qui a le titre de Président de la République et qui personnifie la nation.Article 32.
Pour être Président de la République, il faut :
1° Être né d'un père qui lui-même est né Haïtien et n'avoir jamais renoncé à sa nationalité ;
2° Être propriétaire de biens fonciers en Haïti ;
3° Être âgé de 40 ans accomplis ;
4° Jouir des droits civils et politiques.Article 33.
Avant d'entrer en fonction, le Président de la République prête devant l'Assemblée nationale, le serment suivant :
« Je jure devant Dieu et sur mon honneur, de travailler au bonheur du peuple haïtien qui m'a confié ses destinées, d'administrer fidèlement ses intérêts et d'y apporter la fermeté et la volonté du chef responsable. »Article 34.
Le Président de la République est élu pour une durée de cinq ans et son mandat n'est renouvelable que pour une nouvelle durée de cinq ans.Aucun citoyen ne peut être élu Président de la République s'il a exercé deux fois le mandat présidentiel.
Le Président de la République réside au Palais national à Port-au-Prince et reçoit du Trésor public une indemnité mensuelle de 2.000 dollars.
Des attributions et prérogatives du président de la République.
Article 35.
Le Président de la République a l'administration suprême du pays.
a) Il exerce le commandement en chef des forces de terre, de mer, de l'air, exécute et fait observer les lois et la Constitution en émettant les décrets, arrêtés, règlements et ordres à cet effet ;
b) Nomme et révoque les employés et fonctionnaires qui concourent à l'Administration générale ;
c) Convoque le Corps législatif en session extraordinaire ;
d) Peut, si des circonstances politiques ou autres l'exigent, reculer de trois mois au plus l'époque normale des élections législatives, auquel cas les sénateurs et les députés restent en fonction jusqu'à la réunion des Chambres ;
e) Déclare la guerre et fait la paix avec l'autorisation de l'Assemblée nationale ;
f) Négocie les conventions et traités internationaux ;
g) Décide, en cas d'insuffisance évidente des ressources de l'État ou lorsqu'il estime que certaines circonstances politiques ou économiques de la vie nationale seraient de nature à troubler la paix publique, tout emprunt intérieur de l'emploi duquel il rend compte au Corps législatif à sa plus prochaine session ;
h) Déclare l'état de siège en cas de nécessité ;
i) Exerce la direction suprême de la police de sécurité, le droit de grâce et de commutation de peine ;
j) Accorde toute amnistie.Article 36.
Les secrétaires d'État contresignent tous les actes du Président de la République, sauf les arrêtés qui les nomment.Article 37.
A l'ouverture de chaque session ordinaire, le Président de la République, soit en personne, soit par un message, met le Corps législatif au courant des mesures prises pour assurer l'économie nationale, améliorer le service routier, l'hygiène publique, l'assistance sociale et pour combattre l'analphabétisme de la masse rurale, expose enfin tous les résultats obtenus au cours de l'année et les mesures qu'il convient de prendre pour le bien-être général.De l'élection du Président de la République.
Article 38.
Trois mois avant le terme du mandat du Président en fonction, l'Assemblée nationale, si le Corps législatif est en session, se réunit d'elle-même à huis clos et désigne trois candidats parmi les citoyens qui aspirent à la présidence de la République et qui doivent se faire connaître à l'Assemblée par lettre recommandée. Si le Corps législatif n'est pas en session, le Président de la République est tenu de convoquer l'Assemblée nationale à cette fin. Dans l'un ou l'autre cas, procès-verbal de la désignation est dressé en triple original et signé de tous les membres présents de la dite Assemblée. L'un des originaux auquel sont annexées les lettres des candidats désignés est adressé immédiatement au président du Tribunal de cassation ; le second est transmis au secrétaire d'État de l'intérieur qui est tenu de le faire insérer sans retard au Moniteur et publier dans toutes les communes de la République ; le dernier est gardé dans les archives de l'Assemblée nationale. Dans les huit jours qui suivront la publication dans le Moniteur du procès-verbal de l'Assemblée nationale désignant les trois candidats à la présidence, les assemblées primaires électorales de chaque commune sont convoquées par le Président de la République. Elles se réunissent à la date fixée dans le décret de convocation et votent au scrutin secret pour l'un quelconque des trois candidats.Il est dressé, dans les conditions déterminées par la loi électorale, un procès-verbal en double original comportant le nombre des suffrages obtenus par chacun des trois candidats. Ce procès-verbal est signé et certifié sincère, par le bureau qui a recueilli les votes ; en outre, transmis, sous pli scellé et cacheté, l'un à l'adresse du président du Tribunal de cassation, l'autre au doyen du Tribunal civil de la circonscription électorale où ce procès-verbal a été dressé. L'original adressé au doyen sera déposé, sous sa responsabilité personnelle, au greffe de son Tribunal.
Aussitôt les plis reçus de toutes les communes, le président du Tribunal de cassation en fait part au président du Sénat et au président de la Chambre des députés, et les invite à se trouver, le dixième jour qui précédera la date de la cessation du mandat du président en fonction, au Tribunal de cassation, pour assister à l'ouverture des plis et au recensement des votes. Le public sera admis à y assister. A haute et intelligible voix, le président du Tribunal de cassation dira le contenu de chaque pli dont il sera tenu note. Le candidat qui, d'après le recensement, aura eu le plus grand nombre de votes, sera, par le président du Tribunal de cassation, déclaré Président de la République. Il en recevra notification dans le jour même. Les Chambres se réuniront en Assemblée nationale, dans les vingt-quatre heures qui précéderont la cessation du mandat du Président en fonction, pour recevoir son serment constitutionnel.
Dans le cas où soit le président du Tribunal de cassation, soit le président du Sénat de la République, soit le président de la Chambre des députés, serait parmi l'un des trois candidats désignés par l'Assemblée nationale, les fonctions ci-dessus prévues seront remplies dans le premier cas par le vice-président du Tribunal de cassation, dans les deux autres par les premiers secrétaires des bureaux du Sénat et de la Chambre.
Article 39.
En cas de vacance de la fonction de Président de la République, le conseil des secrétaires d'État est investi temporairement du pouvoir exécutif.Si le Corps législatif est en session, il lui adresse immédiatement un message pour lui demander de se réunir en Assemblée nationale aux fins de procéder à la désignation des candidats à la présidence de la République, comme cela est prévu à l'article 38 ci-dessus.
Dans le délai prescrit par le dit article 38, le conseil des secrétaires d'État convoque les Assemblées primaires. Dans ce cas spécial, le président du Tribunal de cassation invite le président du Sénat et le président de la Chambre des députés à se trouver au Tribunal de cassation à la date qu'il indiquera pour assister à l'ouverture des plis et au recensement des votes. Si le Corps législatif n'est pas en session, le conseil des secrétaires d'État convoque immédiatement les Chambres à l'extraordinaire.
Des secrétaires d'État.
Article 40.
Le chef du pouvoir exécutif a pour collaborateurs immédiats des secrétaires d'État et des sous-secrétaires d'État de son choix dont le nombre et les attributions sont déterminées par la loi.Pour être secrétaire d'État, il faut :
1° Être âgé de trente ans accomplis ;
2° Jouir des droits civils et politiques ;
3° Être propriétaire de biens fonciers.Les secrétaires d'État se forment en Conseil sous la présidence du Président de la République ou de l'un d'eux délégué par lui.
Les délibérations du Conseil sont consignées sur un registre et les minutes de chaque séance sont signées par les membres présents du Conseil.
Article 41.
Les secrétaires d'État sont respectivement responsables des actes de leurs départements ainsi que de l'inexécution des lois.Les secrétaires d'État ont leur entrée dans chacune des deux Chambres ainsi qu'à l'Assemblée nationale, mais seulement pour soutenir les projets de lois et les objections de l'exécutif, et faire toutes autres communications officielles.
Chaque secrétaire d'État reçoit du Trésor public une indemnité mensuelle de 500 dollars.
Les sous-secrétaires d'État reçoivent du Trésor public une indemnité mensuelle de 300 dollars.
Titre VII.
Du corps judiciaire.Article 42.
La justice est rendue au nom de la République par un Tribunal de cassation, des Tribunaux civils et des Tribunaux de paix.Le nombre et les attributions de ces divers ordres de tribunaux sont fixés par la loi.
Article 43.
Les juges de tous les tribunaux ainsi que les officiers du ministère public sont nommés par le Président de la République. La loi détermine les conditions exigibles pour être juge ou officier du ministère public.Seuls les juges de paix et les officiers du ministère public sont révocables. Les juges du Tribunal de cassation et ceux des Tribunaux civils ne peuvent être remplacés avant le terme de leur mandat fixé à dix ans pour les premiers et à sept pour les autres, sans préjudice toutefois de ce qui peut être prescrit par la loi ordinaire, contre les juges qui se laissent condamner définitivement par corps ou qui encourent une condamnation à une peine afflictive ou infamante.
Article 44.
Le Tribunal de cassation ne connaît pas du fond des affaires. Néanmoins, en toutes matières autres que celles soumises au jury, lorsque, sur un second recours, même sur une exception, une même affaire se présentera entre les mêmes parties, le Tribunal de cassation, admettant le pourvoi, ne prononcera point de renvoi et statuera sur le fond, sections réunies. Le Tribunal de cassation prononce sur les conflits d'attributions et connaît de l'inconstitutionnalité des lois d'après le mode réglé par la loi. Il est également compétent dans tous les cas de décisions rendues par les Tribunaux militaires pour cause d'incompétence ou d'excès de pouvoir.Le Tribunal de cassation statue également sans renvoi en matière de référé et dans les cas d'annulation des ordonnances des juges d'instruction.
Titre VIII.
De l'organisation communale.Article 45.
L'administration locale de chaque commune est exercée par trois citoyens élus par une Assemblée spéciale formée exclusivement de contribuables dont les catégories sont fixées par la loi.Le fonctionnement de cette Assemblée spéciale est également fixé par la loi.
L'un des trois citoyens ainsi élus est, par arrêté du Président de la République, nommé magistrat communal pour une durée de quatre ans.
Article 46.
L'administration communale est placée sous le contrôle immédiat du pouvoir exécutif et ses attributions sont déterminées par la loi.
Titre IX.
De la force publique.Article 47.
La force publique de la République d'Haïti est désignée sous le nom de « Garde d'Haïti ». Elle est établie pour la sécurité intérieure et extérieure de la République. Son organisation et sa discipline sont déterminées par les règlements et les manuels de justice militaire en vigueur dans toutes leurs dispositions généralement quelconques, ou par les lois qui peuvent les remplacer.Article 48.
Les militaires en activité de service ne sont pas éligibles aux fonctions représentatives ou exécutives. Tout candidat à l'une ou l'autre fonction doit démissionner un an au moins avant l'époque fixée pour les élections.
Titre X.
Des assemblées primaires.Article 49.
Les Assemblées primaires comprennent des Assemblées primaires générales et des Assemblées primaires spéciales. Les premières se réunissent de plein droit tous les quatre ans pour élire les députés, les secondes, également tous les quatre ans, mais sur convocation du Président de la République, pour élire les membres des administrations communales.Article 50.
La loi détermine les conditions exigibles pour exercer le droit de vote aux Assemblées primaires, générales et spéciales.
Titre XI.
Des finances.Article 51.
Les impôts au profit de l'État et des communes, leur augmentation ou leur diminution, ne peuvent être établis que par une loi. Cette loi n'a de force que pour un an.Article 52.
Aucune sortie de fonds à la charge du Trésor public, si le Corps législatif est en session ordinaire, ne peut avoir lieu qu'en vertu d'une loi proposée par le pouvoir exécutif.Article 53.
Le cumul des fonctions salariées par l'État est interdit, excepté dans l'enseignement, et sans préjudice de ce qui est prévu, au 3e alinéa de l'article 23 de la présente Constitution.Article 54.
Le budget de l'État est voté chaque année par le Corps législatif.Le secrétaire d'État des Finances est tenu, sous sa responsabilité personnelle, de ne servir chaque mois à chaque département ministériel que le douzième des valeurs votées dans son budget, à moins d'une décision du conseil des secrétaires d'État pour cas extraordinaire.
Les comptes généraux des recettes et des dépenses de la République sont tenus par le secrétaire d'État des Finances selon un mode de comptabilité établi par la loi.
L'exercice administratif commence le premier octobre et finit le trente septembre de l'année suivante. Le budget et les comptes généraux sont soumis au Corps législatif par le secrétaire d'État des finances au plus tard quinze jours après l'ouverture de la session législative.
Les comptes généraux seront vérifiés au cours de la session ordinaire et décharge sera donnée aux secrétaires d'État à la fin de chaque session.
Titre XII.
De la révision de la Constitution.Article 55.
Le Corps législatif, sur la proposition de l'une de ses deux branches ou du pouvoir exécutif, a le droit de déclarer, au cours d'une session ordinaire, qu'il y a lieu de réviser partiellement ou totalement les dispositions de la Constitution en vigueur.Cette déclaration est notifiée immédiatement au Président de la République et publiée dans le Journal officiel.
A la fin de la session ordinaire, le Corps législatif est convoqué en session extraordinaire, pour statuer en Assemblée nationale uniquement sur la révision proposée.
La révision achevée, le pouvoir exécutif en est avisé aux fins de la soumettre, dans les trois mois qui suivront, à la ratification populaire.
Si le peuple a ratifié la révision proposée par l'Assemblée nationale, celle-ci proclamera, dans une séance spéciale, la Constitution nouvelle, s'il s'agit d'une révision totale ; ou les dispositions amendées, s'il ne s'agit que d'une révision partielle, et, dans ce dernier cas, les incorporera dans la Constitution.
Titre XIII.
Dispositions générales.Article 56.
Les couleurs nationales sont le bleu et le rouge placés horizontalement. Les armes de la République sont : le Palmiste surmonté du bonnet de la liberté, orné d'un trophée avec la légende : « L'union fait la force ».Article 57.
Aucun serment ne peut être imposé qu'en vertu de la Constitution ou d'une loi.La loi ne peut ajouter ni déroger à la Constitution. La lettre de la Constitution doit toujours prévaloir.
Article 58.
Les fêtes nationales sont : celle de l'Indépendance, le 1er janvier ; celle de l'Agriculture, le 1er mai ; celle du Drapeau, le 18 mai et celle de la Restauration des Droits du peuple haïtien, le 21 août.Les fêtes légales sont déterminées par la loi.
Article 59.
Toutes les élections se feront au scrutin secret.Article 60.
L'état de siège peut être déclaré par le Président de la République toutes les fois que la sécurité intérieure ou extérieure de la République rend obligatoire cette mesure exceptionnelle.Les effets de l'état de siège sont réglés par la loi.
Article 61.
La peine de mort ne peut être appliquée en matière politique que pour crime de trahison.
Titre XIV.
Disposition spéciale.Article unique.
Le citoyen Sténio Vincent, actuellement Président de la République, ayant bien mérité de la Patrie pour avoir : 1° libéré le pays de la tutelle étrangère ; 2° entrepris sérieusement son organisation économique, et la majorité du pays ayant publiquement manifesté le désir qu'il n'y ait pas de solution de continuité dans l'oeuvre entreprise par l'actuel président, le citoyen Sténio Vincent est investi d'un nouveau mandat de cinq ans à compter du 15 mai 1936.
A. Les premières élections législatives et la nomination des dix sénateurs au choix du Président de la République qui suivront l'adoption de la présente Constitution, auront lieu dans un délai de six mois à compter du 1er avril 1936, soit, au plus tard, le 1er octobre 1936. Le Corps législatif ainsi formé se réunira le 15 janvier suivant, date constitutionnelle de la réunion des Chambres, et à laquelle prendra fin le mandat des membres du Corps législatif actuel. Titre XV.
Dispositions transitoires.B. Le Président de la République pourra, si l'intérêt de la justice le commande, suspendre pour une période de six mois à partir du 15 mai 1936, l'inamovibilité des juges des Tribunaux.
C. La présente Constitution entrera en vigueur aussitôt qu'elle sera ratifiée par le peuple et publiée dans le Journal officiel.
Fait au Palais législatif, le 16 mai 1935, an 132e de l'Indépendance.
Pour obtenir davantage d'informations sur le pays et sur le texte ci-dessus,
voir la fiche Haïti.
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