Charles XII, tué au siège de Frédérikshald, le 11 décembre 1718, n'ayant pas laissé de postérité, la couronne devait passer au fils de sa soeur ainée, Charles-Frédéric, duc de Holstein-Gottorp, mais sa soeur cadette, Ulrique-Eléonore, dont le mari, Frédéric de Hesse, a pris le commandement de l'armée suédoise à la mort du roi, et qui a mis la main sur le trésor royal, ce qui lui permet de faire taire bien des scrupules, réunit aussitôt le Conseil qui la proclame héritière du trône et reine de Suède.
Les États généraux, devant lesquels la princesse renonce au pouvoir absolu et déclare rétablir les anciennes formes de Gouvernement, la désignent comme Reine par le Recès du 21 février/4 mars 1719 puis adoptent une Forme de Gouvernement, en 40 articles. Celle-ci limite étroitement le pouvoir royal et établit une forme de gouvernement parlementaire, dominé par l'aristocratie du Royaume, qui contrôle le Sénat, c'est-à-dire le Conseil royal, au sein duquel sont prises les décisions que la Reine ou le Roi n'a plus qu'à signer. Un an plus tard, la Reine abdique en faveur de son époux, Frédéric de Hesse-Cassel et la Forme de Gouvernement est remaniée de manière à préciser les rouages de l'appareil gouvernemental. Le mécanisme de la prise de décision est décrit par ce texte avec une grande précision et souligne le rôle des Sénateurs qui imposent leur politique au Roi au nom des États, détenteurs du pouvoir législatif.
L'appareil gouvernemental est incontestablement modernisé, gagne en compétence et en efficacité. Il est dirigé par un ensemble de Collèges dont le fonctionnement est soigneusement décrit, tandis que la division en provinces établie en 1719, et confirmée par la suite, permet de liquider le système des fiefs ou des grands gouvernorats princiers. La Banque centrale de Suède (créée en 1668) appartient aux États qui en assurent la direction et le contrôle. De même le chancelier de justice rapporte devant les États.
Mais la Constitution suédoise ne repose pas sur la seule Forme de Gouvernement, elle est complétée par l'Ordonnance sur la Diète ou Riksdag, dont une nouvelle version est adoptée en 1723 (la première était du 24 janvier 1617), ainsi que par les Assurances du Roi (Konungaförsakran) formulées lors de son avènement. La Diète suédoise possède une base électorale (20 à 30 % des hommes adultes) beaucoup plus large que le Parlement britannique à la même époque. Il y avait alors en Suède 14 évêchés et 105 villes qui avaient le pouvoir d'envoyer des députés aux États, et surtout les paysans propriétaires, usufruitiers ou exploitant les terres de la couronne élisaient leurs propres représentants. Mais la Diète est divisée en quatre chambres, correspondant aux quatre ordres (ce sera le cas jusqu'en 1866, voir le règlement de 1866), ce qui interdit une évolution rapide en faveur de la bourgeoisie. L'ordonnance de 1723 décrit précisément le système de délibération imposé par l'existence de ces quatre chambres. Ce sont des commissions communes, dans lesquelles la représentation de la noblesse est doublée, qui préparent le travail législatif, afin de limiter les navettes entre les chambres. Le fonctionnement de la Diète assure ainsi la prépondérance de l'aristocratie, d'autant que les questions les plus importantes sont réglées par un Comité secret dirigé par le Maréchal de la Diète, dans lequel l'ordre des paysans n'est pas représenté et dont la noblesse occupe la moitié des sièges. Finalement les décisions sont prises à la majorité de trois ordres pour la plupart des questions.
Cette période, connue en Suède comme l'Ere de la liberté est marquée par l'affrontement entre le parti des Bonnets, dirigé de 1720 à 1738 par Arved Horn, partisan d'une paix qui doit permettre de réorganiser le Royaume, et le parti des Chapeaux, financé par la France, qui veut reprendre à la Russie les territoires perdus au traité de Nystad. Elle prend fin à l'avènement de Gustave III qui impose une nouvelle Forme de Gouvernement en 1772. Mais la politique belliqueuse de celui-ci et de son successeur Gustave IV Adolphe conduira aux désastres militaires de 1807 et 1808, à la perte de la Finlande et au renversement de la dynastie (avènement de Bernadotte), ainsi qu'à une nouvelle Forme de Gouvernement en 1809.Sources : Une traduction a été publiée en 1756 à Copenhague : Forme du Gouvernement de Suède, par Paul-Henri Mallet, un Suisse devenu précepteur du Prince royal de Danemark. Nous avons repris cette traduction en corrigeant quelques lacunes et erreurs d'impression. L'orthographe, la grammaire, la ponctuation et l'usage abondant des majuscules ont été généralement respectés. Nous nous sommes permis quelques très légères corrections et avons ajouté des notes en bas de page pour faciliter la lecture du texte.
Voir le texte suédois de la Regeringsform du 2 mai 1720 au recueil des lois : http://www.sns.se/zino.aspx?articleID=834.
Voir le Recès de 1719.
Voir la Forme de Gouvernement de 1772.
Voir la Forme de Gouvernement de 1809.
La Forme du Gouvernement de Suéde,
établie par S. M. & les États du Royaume le 2. May 1720. à Stockholm.
Nous, Frédéric, par la grace de Dieu, roi de Suède, des Goths et des Vandales, etc., etc. Faisons savoir qu'ayant été reconnu & déclaré Roi du Royaume de Suéde et des pays qui en dépendent par la Providence divine, par le Sénat et les États du Royaume, lesquels pouvoir et autorité Royales Nous ne voulons pas étendre plus qu'il n'est nécessaire pour assurer et augmenter la force & la prospérité du Royaume, le bien et la surêté des sujets ; en conséquence, Nous avons, après une mûre délibération & consentement unanime, non seulement reçu & confirmé la forme de Gouvernement établie, mais nous nous engageons à nous y conformer comme à une loi générale & fondamentale, de la façon & manière qu'elle se trouve ici écrite, & mot à mot comme il suit :
Nous soussignés le Sénat du Royaume, les États, Comtes, Barons, Évêques, Chevaliers et Nobles, Ecclesiastiques, Officiers des Armées, Bourgeois, & Communes qui sommes ici assemblés pour nous & nos fréres absens, Faisons savoir que S. M. nôtre gracieuse Reine considérant les grandes & fâcheuses guerres dont le Royaume est affligé a confié de nôtre consentement unanime le gouvernement de l'État à son Auguste Époux nôtre Roi à présent régnant, se réservant cependant de reprendre les rênes de l'État au cas que Sa Majesté le Roi vienne à mourir avant S. M. la Reine : Et comme nous les États ici assemblés avons consenti unanimement et solemnellement à la proposition qui nous a été faite par S. M. la Reine, le 24. du dernier mois de Mars, Nous avons reconnu & déclaré par un hommage volontaire, & une résolution unanime l'Auguste et très cher Époux de S. M. la Reine S. A. S. le Prince Frederich héréditaire de Hesse, Prince de Hirschfeldt, Comte de Catzen-Ellenbogen, de Dietz, de Ziegenheim, Nidda, & Schaumbourg &c pour être Roi de Suéde, des Goths et des Vandales &c. dont le Tout puissant veuille rendre le regne heureux, long & pacifique ; De plus Sa dite Majesté nôtre gracieux Roi ayant toujours témoigné une juste aversion pour l'autorité absoluë, ou ce qu'on appelle la Souveraineté, & ayant toujours pris un soin distingué de la surêté et de la prospérité de ses fidéles sujets, témoignant en même tems qu'il lui étoit agréable qu'on composat & couchât par écrit une solide instruction pour l'administration de l'État, conformément à laquelle il puisse être gouverné légitimement & avec ordre et prudence, en sorte que la pure Doctrine Évangélique fut maintenue, le Royaume relevé, la propre satisfaction de S. M. la prospérité & le bonheur de ses sujets procurés et affermis de plus en plus ; A ces causes Nous avons soumis à un nouvel examen la Forme de Gouvernement composée, & unanimement receue dans nôtre Diéte de l'année passée, & après une mûre délibération, consultation et unanime résolution nous l'avons perfectionnée à certains égards, & composé ici dans le Royaume le suivant Edit & réglement touchant la meilleure manière de gouverner l'État ; lequel Edit non seulement S. M. a promis de recevoir, confirmer et suivre, mais auquel Nous nous engageons aussi en nôtre nom, & en celui de nos fréres absens de nous conformer exactement et scrupuleusement, en sorte que s'il y avait quelqu'un parmi nous qui fit ou tramât quelque chose, soit ouvertement, soit clandestinement pour abolir ou changer cette Forme de Gouvernement, il doit être regardé comme l'ennemi de la sûreté publique, traité & puni comme un membre abandonné & rejetté de la Patrie, & comme un traitre envers le Royaume. Cependant nous nous réservons, en cas que cette loi eut besoin par la suite de quelque explication ou correction de le faire à la Diéte générale. Nôtre principal but a été de faire en sorte que par nos fidéles soins, nôtre zèle & nos résolutions la Majesté du Roi restât inviolable. Que le Sénat fût maintenu dans l'autorité qui lui appartient, & que les droits et libertés des États leur fussent conservées, afin que le commandement et l'obéissance se correspondent suivant un ordre certain & constant, & que le tête et les membres soient unis pour ne former qu'un corps inséparable, ce que nous espérons avec l'assistance de Dieu pouvoir arriver de la manière et façon qui suit :
Article 1.
L'unité dans la Religion & la pureté du Culte, sont le premier & le plus solide fondement d'un gouvernement légitime, paisible & durable. Or c'est ce qui, à notre grande satisfaction & utilité, se trouve établi dans notre chère patrie, au moyen de plusieurs édits, ordonnances & résolutions des États, comme aussi par la précieuse assurance que S. M. nous a donnée de conserver la Religion dans une pureté inaltérable contre toute hérésie, fanatisme & oppression : C'est pourquoi nous nous en tenons à cet égard à ce qui a été en différens tems publié, ordonné et résolu là dessus, ainsi qu'à ce qui en a été inséré en 1686. dans la Loi Ecclesiastique, en sorte que le droit des Églises doit être & demeurer confirmé sans préjudicie de droits du Roi, de la Couronne et des communes de Suéde.
Article 2.
Il appartient à la Majesté Royale d'affermir, d'aimer, de protéger des Loix, la Justice & la vérité ; d'empêcher, de détruire & d'anéantir la violence et l'injustice, afin que personne de soit exposé à perdre sa vie, ou ne soit lézé dans son corps, ou dans ses biens, son honneur, & (à moins qu'il n'ait été convaincu & jugé suivant la loi) de n'enlever, ou laisser enlever à personne quelque partie de ses biens, soit meubles soit immeubles, sans que la loi l'ordonne, & qu'un jugement légal ne précéde ; de défendre, de maintenir en paix, & de délivrer celui qui veut vivre d'une manière conforme à l'ordre & à la loi ; au contraire de châtier & punir ceux qui sont inquiets, turbulens, & violens. Il appartient aussi à S. M. de l'avis du Sénat de faire toutes sorte de perquisitions & de recherches pour découvrir la vérité, de réprimer les émeutes & les séditions, de donner des saufconduits, de répondre & satisfaire aux questions qui peuvent être faites sur le vrai sens de la Loi, de l'expliquer, & dans les cas particuliers, sur lesquels on ne trouve point de loix, de prescrire & d'ordonner de quelle façon on en usera à l'avenir, comme cela est énoncé à l'article 4. Si quelqu'un perd une cause qui intéresse l'honneur, le Roi peut les y rétablir, ainsi que ceux dont la naissance a quelque tache s'ils méritent cette grace, il peut soumettre à ce qu'on nomme la Révision Royale, & écouter les plaintes portées contre les sentences rendues par les Cours supérieures de Justice, conformément aux ordonnances publiées à ce sujet ; en sorte que la Loi & le droit soient impartialement suivis & maintenus ; que la justice, ce second fondement de la prospérité, de la force, & du bon état d'un Royaume soit appuiée & secondée, & qu'aucune manoeuvre illégitime ne prévaille sur la Loi.
Article 3.
Les héritiers mâles en ligne directe descendans de S. M. le Roi (au cas qu'il plaise à Dieu qu'il en ait de son Auguste Épouse S. M. la Reine Ulrique Eléonore) seront les héritiers du Royaume en vertu de l'Acte de réunion nouvellement passé, & cela de la même manière qu'il est réglé & expliqué dans la Résolution de la Diète de 1650. Cependant aucun d'eux ne montera sur le thrône qu'il n'ait auparavant 21. ans accomplis, qu'il n'ait donné son Assurance dans l'Assemblée des États, qu'il ne se soit fait couronner & n'ait prêté les serments que la Loi de Suéde prescrit. Jusques-à-ce que ce temps arrive, les États ont le pouvoir de nommer, avec le gracieux consentement de S. M. des personnes de mérite qui seront pourvues d'instructions nécessaires & établies pour élever convenablement les Enfans du Roi dans nôtre pure Doctrine Evangelique Luthérienne, dans toutes les vertus, les moeurs & les connaissances qui sont dignes des Rois, & propres à devenir le fondement d'un Gouvernement réglé, sage et prudent. Ainsi les personnes au soin fidéle et prudent desquelles on confiera cette haute et importante Commission en seront responsables envers les États du Royaume & devront être sévèrement punies, si par leur négligence, & leur inattention quelqu'un des devoirs attachés à leur emploi n'a point été rempli comme il doit l'être. Du reste c'est un droit des États du Royaume que de faire à l'égard de ces personnes les changemens qui seront trouvés nécessaires.Article 4.
Aucune loi nouvelle ne se fera ni n'obligera les États contre leur agréement, consentement & acceptation : Aucune ancienne loi qu'ils auront admise de leur bon gré ne sera changée, alterée, ou abrogée.
Mais si S. M. devoit dans l'intervalle des Diétes faire, de l'avis du Sénat, quelques Ordonnances, Edits, ou Réglemens, & cela pour quelque avantage indispensable de l'État, alors à la prochaine Diéte ces réglemens doivent être aussitôt examinés, & adoptés suivant l'ordre & les formes usitées, au cas qu'il y en ait à qui l'on doive donner force & effet de Loi générale & constante.
Article 5.
Il appartient à S. M. de maintenir son Royaume en paix, de le secourir, principalement contre toute force étrangère & toute violence & attaque ennemie ; mais il ne doit pas pour cela, contre la loi, contre son serment Royal & ses assurances exiger de ses sujets des impôts, subsides pour la guerre, taxes, péages, levées de soldats & autres charges, sans la participation & le libre consentement des États au delà de ce que l'article suivant lui accorde ; il ne doit pas non plus les étendre, ni les prolonger plus qu'il n'est permis de le faire conformément au contenu clair & positif de la concession qui lui en a été faite. Nous de nôtre côté, nous devons, comme il convient à des sujets fidéles & bien intentionnés, aider & soutenir le Roi de tout ce que nous avons de facultés & de forces, & ne pas épargner nos faibles moyens, mais les employer volontairement & de bon coeur pour la défense du Royaume, pour résister à l'ennemi, & pour obtenir une paix honorable.Article 6.
S. M. ne doit pas non plus ; sans une délibération & un consentement antécédent des États du Royaume commencer la guerre & attaquer à main armée ses voisins qui sont en paix. Mais si quelques séditieux dans le pays, ou quelque ennemi du dehors vient armé & de force ouverte troubler la tranquillité du Royaume & en attaquer les frontiéres ; un dessein si mauvais doit être sur le champ prévenu, avec l'avis du Sénat, & sans attendre l'assemblée & la délibération des États, le Royaume doit être défendu, pacifié & délivré ; & les impôts nécessaires et inévitables en pareil cas établis & continués jusqu'à ce que les États du Royaume puissent s'assembler.Article 7.
Comme les Négociations touchant la paix, les tréves, ou les alliances ne peuvent que rarement souffrir le moindre délai, & que les États ne se trouvent pas toujours assemblés lorsque de pareilles conjonctures l'exigent ni ne peuvent l'être assez promptement ; S. M. dans des cas de cette importance délibere avec le Sénat, prend avec lui les mesures les plus utiles, & les plus convenables pour le bien du Royaume & les fait exécuter sans retardement. Cependant il nous en sera donné connaissance dans la suite à la plus prochaine Diéte : Mais lorsque la Diéte se trouve actuellement assemblée on n'entreprend ni ne conclud rien en pareille matiére à l'insçu & sans le consentement des États.Article 8.
Les États du Royaume doivent avec une fidéle attention maintenir dans toute leur étendue tous les droits & toute l'autorité que la loi de Suéde & cette Forme de Gouvernement assignent au Roi, sans les restreindre aucunement, mais au contraire garantir, défendre, & assurer avec le plus grand zèle tout ce qui appartient de la manière qu'on vient de dire à la Majesté, & à l'autorité Royale.Article 9.
Quoique ce soit un droit propre & une prérogative légitime de la Couronne que de faire battre monnoye, cependant lorsqu'il sera question de faire quelque augmentation ou diminution dans la valeur intrinsèque des monnoyes, les États se réservent qu'un tel changement ne puise se faire sans leur participation, & consentement.Article 10.
Les Rois ne doivent pas sortir de leur Royaume, ni en passer les frontiéres sans le consentement & l'agrément des États.Article 11.
Le Royaume étant vaste, & les affaires nombreuses & trop importantes, pour que les Rois puissent seuls les administrer, il leur faut un conseil ou Sénat, des Officiers, & des Gouverneurs pour les assister.Article 12.
Après la Majesté Royale la plus grande dignité a été de tout tems, & doit continuer à être à l'avenir (sans qu'aucun emploi plus élevé intervienne) celle de Sénateur du Royaume ; les États nommeront pour la remplir des sujets Suédois de naissance, dévoués tout entier au Royaume, & ils les présenteront très humblement au Roi afin qu'il les choisissent, les retienne, & les revête de leur charge, ce qui doit se faire de la manière suivante : Les Chevaliers & Nobles sont une députation de vingt-quatre personnes, le Clergé de douze, & l'ordre des Bourgeois pareillement de douze chacun de son ordre, lesquels se réunissent, & après avoir prêté serment de garder le secret, délibérent, consultent, & se réunissent pour choisir un nombre de personnes capables & qui ayent bien mérité de la patrie ; lequel nombre sera tel qu'on puisse nommer & présenter pour chaque place vacante trois personnes qu'on aura reconnu dignes & capables de remplir un si haut emploi. Les membres de cette députation, dans laquelle on n'admettra point ceux qui peuvent eux-mêmes être élus, proposeront ensuite chacun à l'ordre qui le commet les personnes qu'ils auront nommées pour recevoir leur approbation & confirmation, & être après un consentement unanime, très humblement présentées à S. M. qui par son gracieux agrément les choisit & leur donne place dans le Sénat ; S. M. y siegeant elle même, mais sans y demander pour cela les suffrages des sénateurs. Si dans l'intervalle des Diétes quelque place de Sénateur vient à vaquer, elle ne doit être remplie qu'à la Diéte suivante. Toutes les affaires qui dépendent de cette place vacante, pourront en attendant être expédiées comme cela se trouve plus bas expliqué dans l'article 37. Le Sénat du Royaume, outre les Gouverneurs Généraux des provinces extérieures qui doivent en être aussi membres, sera composé à l'avenir de seize personnes seulement, parmi lesquelles on comprend le Président de la Chancellerie, & le Grand Maréchal. Ainsi on laissera diminuer le nombre des Sénateurs (par leur décès) jusqu'au nombre susdit. Cependant les charges de Cours de Justice & des Collèges, ainsi que celle de grand Gouverneur, seront remplies par des personnes capables & expérimentées, choisies hors du Sénat. Il ne doit pas y avoir non plus dans le Sénat plus de deux personnes d'une même famille, soit qu'elles soient parentes par le sang, ou seulement par alliance, quand même chacune aurait une place séparée dans la Maison des Nobles. Il ne peut pas non plus y avoir plus de deux fréres dans le Sénat.Article 13.
Le Roi gouvernera son Royaume avec, & non sans, bien moins encore contre l'avis du Sénat. Et comme la Loi fondamentale de Suéde ne peut, ni ne doit être entendue autrement dans ce point, tout ce qui peut avoir été déclaré, ordonné, & approuvé de contraire, où que ce soit, est entiérement abrogé, changé, & rectifié par la présente déclaration.Article 14.
La charge de Sénateur consiste principalement, après la fidélité à laquelle ils sont obligés envers le Roi & le Royaume, en ce qu'eux & le Roi soient attentifs (& cela sans en être requis) aux droits du Royaume, suivant leurs lumières & leur conscience : Elle consiste encore à conseiller ce qui est le plus avantageux aux Magistrats & à l'État, à pourvoir à ce que la Loi fondamentale de Suéde, la Forme du Gouvernement, les Constitutions, Réglemens, les Privilèges & droits légitimes de tous & un chacun soient maintenus & observés comme il faut, à affermir les sujets dans la fidélité & dans l'obéissance, à prendre soin de l'autorité & de la dignité du Roi & du Royaume, du droit & de la prospérité de l'État, à ne point laisser l'intérêt public de côté par égard pour des amis, des parens, par haine, par envie, ou par intérêt ; à tenir caché tout ce qui ne doit point être découvert, & (comme s'exprime la résolution de la Diéte de 1602.) à faire ce qu'exige leur emploi, mais non à regner. Les Sénateurs doivent aussi prévoir, empêcher, & détourner toute entreprise, par laquelle les États pourroient être assujettis, leurs libertés restreintes, & la Monarchie absolue de nouveau introduite. Ainsi celui, quel qu'il puisse être, grand ou petit, Ecclesiastique ou Laïque, qui perdant de vûe les engagements de son serment, & le bonheur de sa patrie, intriguera, & machinera pour nous soumettre de nouveau à ce gouvernement absolu, sera condamné à la perte de ses biens, de son honneur, & de sa vie. Du reste les Sénateurs sont responsables aux États, & leur doivent rendre compte, chacun pour soi de sa conduite, & dans toutes les affaires où ils auraient donné leur avis, & leurs voix, quand les États l'exigent d'eux. Cependant on ne doit pas leur imputer des mauvais succès qui peuvent arriver ensuite de leur suffrage, quand leur opinion, leur pensée, & leur jugement auront été fondés sur des raisons valables ; sur tout si l'exécution des bonnes entreprises n'a point été amenée à la fin qu'on avait en vûe, par la faute de ceux à qui on aura remis & ordonné l'exécution de l'affaire.Article 15.
Tous les Sénateurs du Royaume qui se trouvent présens, & qui peuvent & doivent s'assembler, ne se dispenseront pas lorsqu'on traite des affaires de l'État d'assister aux délibérations. Ils doivent au moins être alors au nombre de 7, s'il ne peut y en avoir d'avantage, & ne point laisser trainer les affaires importantes en longueur, sous peine de répondre de leur absence illégitime ; en sorte que sans aucun délai, omission & négligence, tout ce qui peut être avantageux au service du Roi & de l'État (deux choses qu'on ne doit jamais séparer) soit examiné & résolu dans son tems, d'une maniére sage & réguliére, ce qu'on nomme Revision de Justice. Lorsque dans le Sénat ou dans ce qu'on nomme Revision de Justice, les affaires s'expédient avec l'avis du Sénat, (ce qui est toujours entendu se faire en recueillant les voix) & que les voix se trouvent en égalité des deux côtés, celui-là l'emporte à qui S. M. donne son gracieux suffrage. L'accession de S. M. produit le même effet dans les affaires de ce genre, lorsque les voix sont si partagées qu'il y a deux Sénateurs de plus d'un côté que de l'autre : Mais s'il y a une plus grande inégalité des les suffrages, alors S. M. embrasse toujours le parti que le plus grand nombre des Sénateurs a déclaré le plus avantageux, comme étant selon toute apparence le plus sûr & le meilleur ; & cela avec d'autant plus de raison, que lorsqu'il résulte quelque pernicieux effet d'une telle résolution, ceux des Sénateurs qui en auraient été cause par leurs mauvais conseils en seront responsables devant les États.
Article 16.
Si le Roi est en voyage ou s'il est malade, en sorte qu'il ne puisse être chargé du poids des affaires de l'État ; alors, non seulement le Sénat prend le gouvernement en main, mais il doit encore signer les expéditions qui ne souffrent aucun délai, lesquelles auront la même valeur que si elles avaient été signées par le Roi lui même. Ils doivent aussi observer la pluralité des voix dans toutes les affaires qui surviendront, mais dans les cas où les voix se trouvent en nombre égal des deux côtés, l'opinion de celui qui est le plus ancien du Sénat prévaut. Et si le Trône venait par raison de decès à vaquer, sans qu'il se trouvât de Prince héréditaire, (ce que Dieu veuille détourner de ce Royaume) alors le Gouvernement est confié aux fidéles soins du Sénat, jusqu'à ce que les États puissent s'assembler, & délibérer sur l'Election d'un Roi, & sur ce qui intéresse le bien & la surêté du Royaume, de la maniére que cela est déduit & ordonné plus au long, avec divers autres points, dans notre acte de Réunion.Article 17.
Et pour que le plus grand nombre des importantes affaires d'État qui surviennent au Roi, puissent être dirigées & expédiées avec d'autant plus d'activité & d'ordre, elles doivent être tellement partagées entre les Sénateurs, qu'une moitié soit toujours occupée de ce qui concerne la Justice et les affaires étrangéres, sans se charger d'un plus grand nombre d'objets que cela n'est porté dans l'article 19. Mais si par la maladie de quelques membres, le nombre de l'une ou de l'autre division du Sénat, n'étoit pas assez fort pour que 7. Sénateurs pussent être assemblés & réunis pour l'expédition des affaires ; alors il doit être fortifié au moyen de l'autre division, & le travail doit cesser dans celle où le Roi lui même n'est pas présent, & dans laquelle les choses les moins importantes se traitent. Dans la Révision de Justice on ne doit admettre ni expédier les affaires qui n'en dépendent pas proprement, suivant la teneur de l'ordonnance sur la Révision de Justice qui a déja été faite : On n'y traitera non plus que celles qu'on ne peut expédier dans aucun autre lieu, jusqu'à ce que l'ordonnance de révision soit de nouveau examinée & améliorée en certains points.Article 18.
Les Sénateurs qui sont actuellement Présidens à vie des Colléges, (à leur décès l'emploi de Président sera donné de la façon qu'exprime l'article 12.) doivent journellement se trouver chacun dans son Collége, pour y expédier avec soin les affaires qui exigent de la promptitude. Le Grand Gouverneur continuera aussi d'être chargé de l'exécution des ordres, & expédier les affaires, principalement ce qui regarde le gouvernement & la police de la ville de Stockholm : Mais on ne doit pas comprendre dans ceci le Président du Collège de la Chancellerie, qui doit au contraire être journellement présent au Sénat, où l'on traite les affaires soit étrangéres, soit autres également importantes.Article 19.
Les autres Sénateurs qui n'ont pas séance dans la Révision de Justice, ou dans les Colléges, doivent assister tous les jours au Sénat, travailler aux affaires proposées par les Secrétaires d'État, de Guerre, ou des affaires étrangéres, & cela du gracieux agrément de S. M. conformément à l'article 15. & ne s'en absenter que pour quelque empêchement légitime ; mais quand il se présentera quelque cas digne de l'examen de chacun, & qui regardera le bien du Royaume, comme par exemple, le maintien des places fortes, la conclusion de la paix, d'une tréve, ou d'une alliance, les préparatifs pour une armée, des regimens, une flotte, une Escadre, la nomination aux principaux Emplois, le choix des Députés et Ministres, le soin d'ordonner des dépenses grandes & considérables, & qui ne sont pas comprises dans la note de dépense des États, & autres choses de cette nature ; alors S. M. convoquera tous les Sénateurs qui sont présens, pour déliberer & résoudre ces affaires importantes.Article 20.
Et comme les affaires sont si nombreuses, qu'elles peuvent difficilement être expédiées dans le Sénat avec la diligence nécessaire, celles qu'on va spécifier seront très humblement proposées et remises à S.M. en particulier, pour qu'elle les expédie dans des heures convenables, & au temps qu'elle marquera pour cela. Telles sont :
1. Les cas particuliers qui concernent des personnes privées, & ne sont pas compris dans les affaires qui exigent un soin public, ni dans le département de la Justice.
2. Les affaires particulières et de conséquence, sur lesquelles les Collèges ou autres à qui il appartient, envoyent leurs respectueuses observations. Mais s'il arriva que S. M. soit dans l'intention de s'écarter du sentiment des Collèges, alors l'affaire doit être traitée et expédiée de l'avis du Sénat.
3. Toutes les commissions & charges qu'il est question de donner, pour lesquelles les Collèges, & autres à qui il appartient présentent des sujets, auquel cas ils deviennent responsables s'ils n'observent pas dans cette présentation ce qui est prescrit et contenu dans l'article 40.
4. Les emplois dans le service militaire qui sont à remplir en conséquence de la présentation des Colonels à qui ce droit appartient, dont il est aussi fait mention dans l'article 40.
5. Les Pasteurs à ordonner conformément à l'article susdit.
6. Pareillement les [charges des] Magistrats & les charges des Officiers civils des Provinces que S. M. revêt de ses pleins pouvoirs, après que la présentation en a été faite au préalable par ceux à qui il appartient. Et soit pour apporter en ce point quelque adoucissement aux peines & embarras de S. M. soit pour qu'elle puisse avoir de plus sûres instructions, il doit y avoir deux Sénateurs (le Président de la Chancellerie excepté) pour être auprès de S. M. dans le temps où elle aura souhaité qu'on lui propose les cas ci-dessus spécifiés, de quoi il sera toujours tenu exactement registre ; mais toutes les autres charges de quelque nature qu'elles puissent être (celles qui regardent la maison & les offices de la Cour de S. M. exceptés) sont conférées par S. M. de l'avis du Sénat.
Article 21.
Lorsque le Roi se trouve en voyage, ou absent à la guerre, deux Sénateurs suivent pareillement S. M. tour à tour, pour être à sa disposition dans le cas où il lui plairoit traiter des affaires spécifiées dans l'article précédent, comme aussi dans tous ceux où leur avis est nécessaire. Mais le Président de la Chancellerie & ceux qui sont présentement Présidens dans les Cours de Justice & dans les Collèges, aussi bien que le grand Gouverneur, ne suivent pas S. M. en voyage, pour les raisons qui ont déja été alléguées.Article 22.
Afin que les affaires soient traitées & poussées avec un soin & une activité continuelles, il y a certains collèges établis, qui comme les bras du corps humain s'étendent & embrassent tout ce qui se doit faire & ordonner dans le Royaume. Ils ont droit & pouvoir chacun dans son département, au nom du Roi & en vertu de la commission qui leur est confiée, de commander à ceux qui relévent d'eux, de sommer ceux qui sont sous leurs soins & obéissance, de remplir leur devoir, de leur demander compte de leur administration, & de donner eux-mêmes au Roi toutes les instructions nécessaires, & que S. M. peut souhaiter touchant les affaires de leur département.Article 23.
Dans chaque Cour de Justice (ou Parlement) au dessus de laquelle le Roi n'a point de Tribunal supérieur, il y a un Président qui par son savoir & son expérience dans les loix s'est rendu capable des fonctions de Juge. Il a pour assesseurs un Vice-Président, & les assesseurs ordinaires, parmi lesquels dans la Cour de Justice de Suéde les quatre plus anciens, sans aucune augmentation d'appointement, & sans exemption des fonctions ordinaires, jouissent du titre & des honneurs de Conseillers de la Cour de Justice, mais dans les autres Cours de Justice, il y a seulement deux Conseillers dans chaque Cour. Ces Tribunaux suprêmes doivent chacun dans son ressort, apporter une soigneuse attention à ce que la Justice soit rendue, comme devant en répondre, suivant les loix de Suéde écrites, les Edits & ordonnances, lesquelles sans violation & suivant le sens des mots, doivent être observées & suivies dans les jugemens, en sorte que les dites cours de Justice, sans acception de personnes, sans intérêt, & autres mauvaises vûes fassent droit à chacun, & puissent rendre compte de leur gestion devant Dieu, dont ils remplissent les fonctions, devant le Roi, le Sénat & les États, afin que l'injustice n'afflige pas ce Royaume & cet État. Aucun Chevalier & Gentilhomme ne doit pas non plus être juge, pour des choses qui touchent à la vie ou à l'honneur par un autre Tribunal que par les dittes Cours de Justice ou Parlemens, comme les priviléges, & la loi touchant la procédure de 1615. le réglent & l'ordonnent positivement. Cependant les informations nécessaires se prendront in loco, & l'on ne portera devant les parlemens aucune autre affaire criminelle que celles qui regardent la vie & l'honneur. Les Cours ou Parlemens doivent aussi avoir une soigneuse inspection sur les juges inférieurs des villes & de la campagne, aussi bien que sur les personnes chargées des exécutions, & quand par imprudence, par négligence, malice, ou avidité ils tombent dans quelque faute, il faut suivant la nature de chaque cas leur adresser des réprimandes, les juger ou les punir. Mais si quelqu'un est convaincu d'avoir fait une injustice de dessein prémédité, par haine, par faveur, ou pour s'attirer des présens contre les sentimens de sa conscience, & d'avoir nui à son prochain dans son corps, son honneur, & ses biens, un tel homme ne doit pas racheter sa méchanceté par de simples amendes ou par la perte de son emploi, mais par celle de sa vie & de son honneur suivant l'exigence du cas. On ne doit pas non plus taire & dissimuler de pareilles violations, ni les laisser impunies par indulgence, par complaisance, & par une pitié hors de saison, de peur que par-là d'autres ne soient engagés à abuser à leur gré de leur droit de juger, voyant qu'un juste châtiment, & que la peine méritée ne marchent pas toujours à la suite des fautes, des crimes, & de la méchanceté. D'un autre côté ceux qui par mauvaise volonté, par imprudence & par haine attaquent soit de paroles, soit par des écrits injurieux, deshonorans, ou offensans les juges & ceux qui sont chargés de l'exécution des sentences dans l'exercice de leur emploi, sans pouvoir prouver ce qu'ils ont accusé & avancé, doivent être sur le champ sévèrement punis, suivant la nature de chaque cas, afin que les hommes turbulens, méchans, & pervers, prennent de là un avertissement, & une frayeur salutaire. Personne, qui qu'il puisse être, ne doit rester long-tems aux arrêts, mais être aussi-tôt entendu & jugé. Et afin que la nécessité & la pauvreté ne donnent point lieu à de pernicieux effets, & ne deviennent pas un prétexte & une excuse pour abuser de son emploi, on conservera dans leur entier & sans y toucher en aucune façon, les appointemens et pensions que les communes accordent à leurs juges Provinciaux & territoriaux, aussi bien que l'argent des amendes & celui qui leur est payé pour les défrayer, lorsqu'ils se rendent aux Sessions, afin de l'employer à leur vraie destination, & au payement des juges suivant leur état, conformément à l'assurance donnée par le Roi Gustave Adolphe de glorieuse mémoire, l'an 1611. Les Officiers & Fiscaux du Roi ne doivent pas non plus offenser personne en exerçant leur emploi, ni chercher leur propre intérêt d'une manière mal séante : Et lorsqu'ils auront ainsi abusé de leur autorité dans des vûes particulières, en opprimant les innocens, ou en cherchant leur propre intérêt, ils seront cités en justice pour en répondre suivant la Loi, sur quoi le Chancelier de Justice doit veiller soigneusement. Le même magistrat doit aussi avoir inspection sur l'observation des loix & des ordonnances, & à l'assemblée de la Diéte il doit donner là dessus aux États d'amples instructions : De plus s'il s'est passé quelque chose qui soit contraire à la Forme du Gouvernement, & qui n'ait pas été redressé convenablement, il doit en parler publiquement.
Article 24.
Après les Cours de Justice ou Parlemens, suit le Collège de Guerre, dans lequel il y a un Président & un Grand Maître de l'artillerie, un Général Quartier-Maître, qui est obligé, sans que pour cela on charge davantage l'État des dépenses, d'assister à ce Collège : De plus quatre Conseillers de Guerre en tems de guerre, & seulement deux en tems de paix qui doivent être exercés dans l'art du calcul. Ce Collège a l'oeil & prend soin de l'armée de Terre, de l'artillerie qu'on emploie soit en campagne, & dans les places fortes de l'État, des fortifications, des Canons, des fabriques de canons, des Armes & Epées, des munitions de guerre, & de tout ce qui est compris sous ce nom ; de l'état des forteresses, surtout de celles qui sont près des frontiéres, des Forts & autres lieux de défense, des enrollemens, recrues, & revues, de l'habillement des régimens &c. conformément à l'instruction & réglement qui seront dressés là-dessus dans la présente Diéte. Quoique les livres de la milice soient tenus dans le Collége de Guerre, cependant ils appartiendront à l'avenir comme ci devant au Comptoir général des comptes de la milice, sous l'obéissance & l'inspection de la chambre des finances.
Article 25.
Toute l'armée soit de terre, soit de mer, avec ses Officiers majors, & subalternes, doit prêter hommage et serment de fidélité au Roi, au Royaume, & aux États suivant le formulaire dressé. L'armée soit Cavalerie, soit Infanterie, ainsi que les matelots enclassés, sont toujours maintenus dans les mêmes distributions, & dans les contrats passés avec les communes, & avec les villes, lesquels doivent être exactement suivis et observés, jusqu'à ce que le Roi & les États trouvent nécessaire d'y faire quelque changement : Alors on aura soin de rectifier toutes les inégalités & la confusion qui pourront s'y trouver.
Article 26.
Nul Colonel ou autre Officier major de l'armée, ne doit, sans un ordre du Roi à lui donné de l'avis du Sénat, faire marcher & entrer en campagne, des Soldats à qui il a été permis de rester dans leurs quartiers, à moins que ce ne soit pour des revues des régimens, & autres convocations de ce genre, ou à cause de quelque irruption imprévûe des ennemis du Royaume, ce qui doit être alors aussi-tôt annoncé au Roi. Et si quelqu'un fait une pareille chose de sa propre autorité & sans ordre, il mérite de perdre son emploi, & de plus la vie, l'honneur & les biens, s'il l'a fait pour troubler le Royaume, & favoriser des trames pernicieuses, auquel cas nul Officier, ou Soldat n'est tenu à l'obéissance envers son supérieur, ni lorsqu'il lui donne un ordre si insensé.
Article 27.
Le troisième Collége du Royaume est celui de l'Amirauté, où il y a un Président ayant pour Assesseurs, tous les Amiraux & Commandeurs qui se trouvent présens. Mais comme ce Collége tient ses séances à Carlscrone il doit se trouver au moins un membre du Sénat, pour délibérer auprès de S. M. lequel ait servi sur mer, & soit expérimenté dans la marine, afin de donner des instructions nécessaires et sûres. Ce Collége prend un soin attentif des forces maritimes du Royaume, des vaisseaux de guerre & des flottes, des Galéres, Frégates, bâtimens de transport, galiotes, prêmes, chantiers, pilotage, & de tout emploi & fonction y comprises. Pareillement il aura inspection sur tous les mariniers & leur entretien, il aura soin que les vaisseaux soient pourvûs de leurs agrès, de canons d'amunitions, & de ce qui est de plus requis, & appartient au soin particulier de ce Collège, mais qui ne saurait être spécifié assez exactement. Le Comptoir des Finances de l'Amirauté, continue sur le même pied qu'il a été établi en 1692. & il a sous son soin & garde les deniers de l'Amirauté, soit ceux à percevoir, soit ceux à distribuer, à changer, & à compter, & tout ce qui regarde particuliérement & proprement l'oeconomie & les finances de la Marine, & il rend compte & raison des dits deniers, par devant la chambre des Finances.
Article 28.
Le Collége qui suit l'Amirauté est la Chancellerie du Royaume, à laquelle préside toujours un des Sénateurs, qui a pour Assesseurs un Sénateur, un Chancelier de la Cour, trois Secrétaires d'État & quatre Conseillers de Chancellerie. C'est dans ce Collége qu'on dresse & expédie tous les Edits, ordonnances & recès qui concernent le Royaume en général, & les priviléges particuliers de certaines villes & personnes, leurs patentes, lettres, mandemens, & ordres. A ce Collége appartiennent encore les Mémoires, & documents des Diétes & assemblées, les alliances avec les puissances étrangéres, les Traités de paix avec les ennemis, le soin de faire la présentation des Envoyés, & de donner audience aux Ministres Etrangers : De lui dépendent aussi les Résolutions prises par le Roi de l'avis du Sénat, les régistres qui doivent en être tenus, & tout ce qui est expédié au nom & avec la signature de S. M. Ce Collége doit avoir de plus tout le soin nécessaire des Postes, dans toute l'étendue du Royaume & des Provinces qui en dépendent, en sorte qu'elles soient maintenues en bon ordre, sous l'inspection du Grand Maître constitué dans cette vûe. Les affaires doivent être partagées entre les Secrétaires d'État, de façon que l'un ait toutes les affaires étrangéres, l'autre celles de la guerre, & le troisiéme le reste des affaires de l'intérieur du Royaume. Les Secrétaires d'État doivent en conséquence observer soigneusement, que les expéditions se fassent conformément aux résolutions & suivant la teneur des registres, avec promptitude, sans erreur, ni confusion, & sans négliger quoique ce soit, & dans quelque vûe que ce puisse être. Et si quelqu'un d'entr'eux traitoit & expédioit seul avec le Roi, ce qui doit être fait de l'avis du Sénat, il sera démis de son emploi, & suivant la nature du délit, puni comme il convient, après les enquêtes, & la sentence nécessaire. Et il ne pourra point alléguer comme une excuse légitime que la chose lui a été ordonnée, puisque la volonté du Roi n'est jamais qu'il se fasse quelque chose contre la teneur des présentes assurances qu'il a données, & contre la Forme du Gouvernement.
Article 29.
Comme les avantages & le bonheur des États, sont en grande partie fondés sur le soin que l'on prend d'y cultiver les études & les sciences, & qu'au contraire ils tombent dans le désordre & l'obscurité quand on les méprise, les détruit, & les néglige. Tous ceux qui sont dans l'intention de destiner leurs enfans aux études, (ce qu'on leur rendra le plus aisé qu'il sera possible en perfectionnant les ordonnances concernant les écoles, & par d'autres moyens nécessaires) y seront d'autant plus encouragés qu'ils pourront s'en promettre pour l'avenir de l'avancement, de l'avantage, & de la récompense. C'est pourquoi l'on ne doit donner aucun accès ou emploi dans la Chancellerie Royale qu'à ceux qui ont montré par de sûres preuves, leur savoir, leur intelligence, & leur capacité, de quoi l'ordonnance de la Chancellerie traite plus au long.
Article 30.
Il y aura dans la Chambre des Finances un Président, dont les Assesseurs seront les quatre Conseillers ordinaires de la chambre. C'est-là que tous ceux qui ont quelque emploi ou affaire concernant les revenus & les dépenses de la Couronne doivent recevoir leurs ordres, ou rendre raison de leur gestion. Le soin & le devoir de ce collége consiste à faire en sorte que les revenus entrent exactement, soient augmentés, le païs bien cultivé & amélioré par une bonne oeconomie, en sorte que les bien nommés regalia fisci ne soient point pillés, négligés, & perdus, mais que les deniers du Royaume soient en toute façon augmentés, proportionnés aux dépenses, menagés prudemment, recueillis à tems, que le crédit soit maintenu, en sorte que le Roi en cas de besoin, puisse au dehors & au dedans du Royaume, trouver des ressources, du secours & de l'appui. Les grandes Douanes de mer, avec leurs recettes & leurs comptes, pareillement les petites Douanes & l'accise, sont aussi sous le soin & la garde des grands Directeurs nommés pour cela à l'inspection de la Chambre des Finances. C'est-là que s'expédient aussi les patentes pour les Douaniers & receveurs nécessaires, & où l'on doit s'occuper à avancer les intérêts du Roi.Article 31.
Dans le Comptoir de l'État, il y aura à l'avenir un Président particulier & deux commissaires d'État. A ce Collége appartient de disposer & de faire usage des deniers, & c'est à lui que tous ceux qui les ont en maniement doivent se présenter au tems convenable avec leurs états comme les Instructions qui leur ont été données l'ordonnent & le réglent positivement. L'état (des dépenses) doit être dressé chaque année & de bonne heure ; & l'on doit prendre à cet égard pour fondement & modéle l'état de l'année 1696. & faire en sorte que les divers Officiers reçoivent leurs appointemens du thrésor & des revenus de la Couronne. Mais cet état ne doit pas être augmenté ni porté au delà, à moins que le service & l'avantage du Roi & du Royaume ne l'exigent absolument. Dans cet état, non seulement on réservera une certaine somme qui sera au bon plaisir & à la disposition particuliére du Roi, mais on en assignera une autre chaque année pour les dépenses extraordinaires, de laquelle le Roi disposera de l'avis du Sénat, & en cela l'on doit observer que les dépenses soient toujours proportionnées avec les revenus.
Article 32.
Le Collège des mines doit avoir aussi son Président, deux Conseillers des mines, & quatre Assesseurs, qui par leur savoir et leur expérience se soient rendus capables des fonctions de Juge, et connoissent à fonds toutes les parties de la métallurgie, aussi bien que l'art d'exploiter les mines, & l'oeconomie qu'on doit y observer. Et ce point est d'autant plus important que ce Collége a sous son inspection un article sur lequel est principalement fondé nôtre commerce avec l'Etranger, une partie considérable des revenus du Roi, & de la Couronne, provenant , soit de ce commerce, soit directement des mines, & enfin un des plus sûrs moyens de faire fleurir ce pays. C'est pourquoi ce Collége devra conformément à l'instruction qu'il a déja reçû, laquelle pourra de nouveau être revûe & améliorée, prendre tout le soin possible & imaginable de l'entretien des dites mines, & de tout ce qui peut contribuer à les maintenir en bon état & à les améliorer. Et comme l'instruction donnée à ce Collége autorise les membres qui le composent, à juger & à prononcer dans les causes civiles ou criminelles qu'ils auront appellées à eux immédiatement, comme aussi dans celles qui suivant le cours ordinaire auront été portée devant eux des justices inférieures, des mines & forges, ce Collége ayant ainsi sous sa Jurisdiction des juges inférieurs, doit soigneusement veiller sur eux, pour les engager à s'acquitter de leurs fonctions sans acception de personne ; s'il en arrive autrement on doit observer ce qui est expressément ordonné à ce sujet dans l'article 3 en sorte que personne n'use de connivence avec les infracteurs, mais que les fautes soient punies comme la loi le commande, & suivant que l'exige la nature du cas.Article 33.
Le Collège de Commerce a pareillement un président, deux Conseillers de Commerce, & quatre Assesseurs lesquels doivent entendre parfaitement le commerce de mer & de terre : Il doit aussi y avoir dans ce Collége deux Commissaires gagés. Mais toutes les fois qu'il se présentera des affaires importantes, concernant le commerce & les Fabriques, le Collége doit, soit directement, soit par l'intervention des Magistrats, consulter les Bourgeois, Negocians & Fabriquans, tant ici que dans les autres villes, avant que de conclure et d'exécuter rien. Ce Collége doit aussi prendre soin que le commerce s'augmente & s'étende, que les manufactures fleurissent & se perfectionnent, que l'on établisse des Fabriques & qu'on les maintienne, que les exemptions de droit d'entrée, les réglemens & ordonnances concernant la Douane, & les droits établis par ordre des États soient mis en vigueur, & les autres articles compris dans le devoir des membres de ce Collége en vertu de l'instruction qui lui a été remise & que l'on verra & rectifiera pour le plus grand bien, l'avancement, & la prospérité du Royaume.
Article 34.
La chambre de Revision [des comptes] a aussi besoin d'un Président particulier, lequel avec les assesseurs ordinaires doit avoir soin que les affaires litigieuses qui y pendent, soient décidées par des sentences & des résolutions conformes aux lois, & terminées entiérement par le moyen des Fiscaux. Cette chambre de Revision doit de plus revoir, éclaircir, & régler définitivement & sans perte de tems, les Comptes annuels de la Couronne depuis le tems où ils ont été présentés à la chambre des Finances, & où il lui en a été donné avis. Ces deux Colléges consulteront ensemble pour trouver quelques moyens d'abréger & de régler tellement les comptes, qu'ils puissent être à un certain tems fixe soldés avec la plus grande justesse & certitude ; en sorte que personne ne soit plus responsable ni sujet dans la suite à de nouvelles recherches ; car autrement il pourroit aisément arriver, d'un côté que le Roi & le Royaume seroient en perte, & de l'autre que plusieurs innocens souffriroient ne pouvant justifier la gestion de leurs proches ou parens décedés. Pour éviter ces inconvéniens, tous les livres de comptes soit généraux, soit particuliers, qui ont été remis à la chambre des Finances avant l'année 1714 inclusivement, resteront & demeureront sans Revision : On se contentera donc de rassembler au plutôt les balances qui sont la conclusion de ces livres, autant du moins que les facultés des débiteurs ou de leurs répondans permettront d'en faire usage, mais s'il ne se trouve rien pour les acquitter, on les effacera dans les dits livres, selon l'ordonnance de la Chambre des Finances. Les livres de compte des Provinces, & les comptes généraux qui n'ont pas encore été remis à la Chambre des Finances, doivent l'être incessamment, & ceux que ce soin regarde, & qui auront été trouvés négligens à tenir & à régler leurs comptes, doivent s'acquitter au plutôt de ce devoir. Ces comptes particuliers & généraux qui n'ont pas encore été remis, aussi bien que toutes sortes de Comptes, depuis l'an 1700, & non au delà, devront être revûs & réglés définitivement & avec la pus grande exactitude.
Article 35.
Le Grand Maréchal est un membre du Sénat qui prend soin de tout ce qui concerne la Cour, le château et la Maison du Roi, régle, ordonne & dispose ce qui regarde sa Table, ceux qui composent sa Maison, & les autres choses qui en dépendent.Article 36.
Le Grand Gouverneur doit veiller sur le Château & la Maison du Roi dans l'enceinte de Stockholm, & en qualité de Chef de la ville & de la Bourgeoisie, il aura l'oeil conjointement avec le Magistrat au Gouvernement de la ville & des Faubourgs, au bon ordre de la Police, aux Priviléges, Bâtimens publics, Revenus, Commerce, & autres choses de cette nature : Il doit défendre la Bourgeoisie contre toutes sortes de violences, oppression, & injustices ; prendre connaissance des Revûes & des armes des Bourgeois, garder soigneusement les effets précieux de la Couronne qui se trouvent à Stockholm, en sorte qu'ils ne soient ni diminués ni déteriorés ; de plus c'est à lui à faire en sorte que toutes les exécutions aient leur plein effet, & à s'acquitter des autres devoirs attachés à cette charge.
Article 37.
Tous les Collèges doivent s'entr'aider réciproquement dans tout ce qui concerne le bien & l'avantage du Roi & du Royaume, toutes les fois que le besoin l'exige, évitant de se causer les uns aux autres de l'empêchement & du préjudice, comme aussi d'empiéter sur leurs droits respectifs, travaillant au contraire chacun de son côté à remplir sa tâche avec activité, soin, application & prudence. Aussi long-tems que les Présidens sont siégeans dans leurs Colléges, ils jouïssent du pouvoir & de l'autorité que leur charge leur donne, mais lorsqu'ils se trouvent absens pour les affaires du Roi, ou pour les leurs propres, en conservant leurs titres, leur rang, & les autres avantages qui y sont attachés, ils cessent d'avoir rien à ordonner ou à commander dans ce qui appartient à leur emploi de Président, jusqu'à ce qu'ils soient de nouveau présens, & qu'ils reprennent l'exercice actuel de leur emploi. Cependant le plus ancien des Assesseurs a le droit & le pouvoir d'expédier les affaires qui regardent le Président. Tous ces divers Colléges seront obligés de donner aux États dans les Diétes, une relation complette de ce qui se passe dans leurs départements, & des fruits que leur travail aura produit, & si en quoique ce soit ils ont agi contre la loi fondamentale, la Forme du Gouvernement, leurs instructions, ou les ordonnances, ils en répondront devant les États. Tous ceux aussi qui dépendent des Colléges, particuliérement les Gouverneurs généraux, le Grand Gouverneur, les Baillifs, Colonels, & autres sont obligés de rendre compte, chacun pour sa gestion, devant ceux de qui ils relévent, aussi souvent qu'on l'exigera. Et comme la peine & la récompense, sont les deux liens qui unissent & affermissent tout l'ouvrage de l'administration publique, celui qui remplit son devoir n'aura qu'honneur & récompense à attendre, mais l'homme négligent & de mauvaise foi, recevra suivant qui l'a mérité, & sans aucune rémission, le châtiment, la honte & la peine.Article 38.
L'administration des Provinces roule sur certain nombre de Bailliages ; car à l'avenir il n'y aura plus ni Gouvernement général, ni Gouvernement particulier, & l'on ne donnera plus de Douaire, entrées & fiefs. Voici l'ordre & la division de ces Bailliages :
Le premier est l'Uplande.
2. Roslagen ou la Province de Stockholm, avec celle de Swartsso.
3. La Province de Scarabourg.
4. La Province d'Abo et de Biornebourg.
5. La Province de Cronsberg.
6. La Province de Jonkioping.
7. La Province de Westmanie avec celle de Strömsholm.
8. La Province de Wibourg & de Nyslot.
9. L'Ostrogothie avec la Province de Vadstena.
10. La Sudermanie avec les Provinces de Gripsholm & d'Eskilstuna.
11. Les Provinces de Nylande & de Tavastehus.
12. La Province d'Elfsbourg.
13. La Province de Calmar & l'Ölande.
14. La Province de Kopparberg.
15. La Nericie & la Vermelande.
16. La Norlande Occidentale.
17. La Bothnie Occidentale.
18. La Bothnie Orientale.
19. La Gotlande.
20. La Province de Malmö.
21. La Province de Christianstadt.
22. La Blekingie.
23. La Hallande.
24. La Province de Gothembourg & de Bohus.Article 39.
Les instructions des Collèges, des Gouverneurs généraux, des Grands Gouverneurs, des Baillifs, des Colonels & autres Officiers doivent être revûes, rendues plus conformes à la nature du présent Gouvernement. Tous les Colléges & Officiers qu'on vient de nommer doivent travailler au bien & à l'avantage du pays, concourir avec les Magistrats pour celui des villes, & chercher en toute occasion à s'acquitter des commissions qui leur sont confiées en vertu de leurs instructions, avoir l'oeil à ce qu'il ne soit fait tort & violence à personne, obliger leurs subalternes à se conformer avec probité & application à ce qui leur a été prescrit dans leurs instructions, en sorte que chaque année ils puissent rendre un bon compte de la maniére dont ils auront administré les affaires qui leur ont été confiées, attendant une récompense s'ils ont été bien attentionnés, & une juste punition s'ils se sont montrés avides & négligens.
Article 40.
Tous les emplois considérables depuis Colonel, jusques à Feldt-Maréchal, l'un & l'autre inclusivement, & tous ceux qui leur répondent soit dans l'état ecclésiastique soit dans l'état civil, sont conférés par le Roi dans l'assemblée du Sénat de la maniére suivante : Quand il se fait quelque vacance, le Sénat doit prendre d'exactes informations de la capacité, & des services de tous ceux qui peuvent être mis sur les rangs pour remplir cet emportant emploi, & les représente au Roi ; après que le Roi a bien voulu proposer dans le Sénat celui à qui S. M. a fait la grace de penser pour être promû à cet emploi, le Sénat fait les observations qu'il juge nécessaires, (de quoi il est tenu registre) & l'on s'en tient là, sans aller aux suffrages, à moins que l'avancement du sujet en question ne se trouve contraire à la loi de Suéde, à la Forme de Gouvernement, au bien & au mérite de quelques autres sujets dignes & vertueux ; auquel cas le Sénat doit de nouveau aller aux voix, & le Roi par une gracieuse reflexion sur les raisons alléguées par le Sénat, nomme de nouveau quelque autre sujet, qui par les services qu'il aura rendus au Roi & à la patrie, aura mérité qu'on se souvienne de lui en pareille occurrence, & contre la personne & le mérite duquel on ne puisse rien alléguer avec fondement. Et les Sénateurs ne seront pas seulement responsables, lorsqu'ils auront cherché, en quelque manière que ce puisse être, à avancer leurs parens au préjudice d'autres personnes de mérite ; mais aussi s'il se trouve qu'en pareil cas ils ont négligé de faire les représentations nécessaires, lorsqu'il peut s'être fait quelque chose de contraire à la loi de Suéde & à cette Forme de Gouvernement. Ils doivent aussi se faire une affaire capitale de fournir alors toutes les instructions nécessaires, (à S. M. ) s'ils veulent éviter de se trouver chargés d'un compte à rendre, quand à la Diéte suivante, on jugera nécessaire de s'enquérir, si personne n'a souffert de tort ni de préjudice. Pour tous les autres emplois, les Colléges & autres à qui il appartient, présentent au Roi trois sujets les plus entendus, les plus dignes, & les plus propres à remplir l'emploi vacant qu'on pourra trouver ; sur quoi on observera que l'on peut bien nommer quelque sujet de mérite encore qu'il ne serait pas dans le Collége. Dans les Régimens, la présentation aux emplois vacants se fait conformément à l'ordonnance du feu Roi Charles XII. de glorieuse mémoire, en date du 6. novembre 1716. Si dans cette présentation il se trouvait qu'on eut fait tort à quelqu'un, ou qu'il eut été omis sans raison, les auteurs de la présentation seroient cités pour en répondre. Le Roi choisit & revêt de l'emploi celui d'entre les sujets présentés qu'il juge le plus capable : Et on laisse au bon plaisir de S. M. de conférer ces emplois, ou conformément à l'article 20. ou aussi dans l'assemblée du Sénat, afin d'apprendre le jugement & l'opinion du Sénat touchant les sujets proposés. Mais tous les emplois inférieurs que les Colléges, les Consistoires, les Colonels des Régimens, & autres ont été dans l'usage de donner avant l'année 1680. continueront à l'avenir d'être en leur pouvoir. Nul étranger soit Ducs, soit Princes, ou autres personnes ne seront à l'avenir employées dans aucune des charges du Royaume dans le pays ou hors du pays, dans l'état militaire ou civil. L'on doit aussi dans la distribution des emplois avoir principalement égard à l'expérience, & au mérite éprouvé des personnes qui par leurs études, leurs services à la guerre, & autres utiles connoissances, se sont rendues dignes d'être avancées, mais l'on doit surtout observer que personne ne soit appellé à administrer des affaires auxquelles il n'est point du tout exercé, & qui n'ont aucun rapport à sa premiére vocation ; mais que chacun soit placé conformément à son inclination naturelle, & à son expérience, en sorte que les emplois soient donnés à des personnes qui les méritent. La puissance qu'une personne aura acquise, la faveur & la considération dont elle jouit, ne doivent pas non plus lui ouvrir un accès à des charges pour lesquelles elle n'a aucune capacité, bien moins encore doit-on mépriser un homme parce qu'il est d'une condition ou d'une extraction peu illustre, lorsque son mérite & sa capacité sont d'ailleurs connues. Dans l'Election d'un Archevêque, tous les Consistoires du royaume auront leurs voix, mais dans la nomination des autres Evêques et Surintendans, on procéde de la manière qui suit. Les trois sujets qui ont eu le plus grand nombre de voix dans le Diocése, sont présentés au Roi par le Consistoire, & les importans emplois sont conférés par le Roi de l'avis du Sénat, de façon qu'entre ceux qui sont présentés, celui-là soit choisi qui par son solide savoir, son zèle pour la Religion Evangélique, & une vie exemplaire s'en sera rendu digne. A l'égard des simples Cures, ou Paroisses, elles seront pourvûes de la manière que cela étoit usité avant l'année 1680. Cependant il y aura une commission composée de quelques Sénateurs, Evêques, & autres gens de probité qui sera chargée de chercher & de déterminer les Paroisses qui ont été à la disposition du Roi, ou non, avant l'année 1680. ; au moyen de quoi ceux de la Noblesse à qui appartient le droit de Patronat & de libre élection, en auront à l'avenir la jouissance avec les prérogatives qui y sont attachées : Pareillement dans les paroisses Royales, les droits du Roi, & les priviléges des Consistoires, & des Eglises, seront maintenus dans leur entier, tels qu'ils leurs appartiennent, & de la manière que le régle la loi Ecclésiastique.
Article 41.
Si quelque homme en place quel qu'il puisse être, grand ou petit, Ecclésiastique ou Laïque, est convaincu d'avoir recommandé ou avancé quelqu'un par des vûes d'intérêt, après avoir reçu des présens, par des égards de parenté, d'amitié, de faveur, de crédit, au préjudice d'autres personnes qui le méritoient mieux, il doit, après les informations nécessaires, & un procès juridique, être démis sans remission de son emploi, & puni suivant les circonstances du cas.Article 42.
Et afin que les charges ne tombent pas dans le mépris, on ne donnera à l'avenir à personne aucun Caractére (titre), supérieur à celui qui est propre à l'emploi qu'il exerce effectivement. Cependant lorsqu'un homme aura été préféré à un autre pour quelque emploi, le Roi sera le maître de donner à ce dernier un caractére, suivant son mérite, pour le consoler du refus qu'il aura essuyé. Et si quelqu'un qui a servi longtems & avec honneur veut prendre son congé, on peut bien lui donner un Caractére plus relevé, en sorte pourtant qu'un homme qui a reçu un pareil congé, ne doit pas être revêtu de quelque nouvel emploi au préjudice des autres.Article 43.
Comme les Officiers, soit de l'état civil, soit de l'état militaire, perdent entiérement leur zèle & leur émulation, quand on éleve au dessus d'eux d'autres sujets qui ne sont que surnuméraires ou extraordinaires, il n'y en aura à l'avenir aucun dans les Colléges, ni dans les régimens, à moins que ceux à qui ce droit appartient, ne trouvent eux mêmes nécessaires de présenter quelque sujet habile & expérimenté.Article 44.
Quoique ce soit un ancien usage dans ce Royaume, lorsqu'un homme a sçû par sa vertu, ses études, sa valeur & son expérience, s'ouvrir un accès à la faveur & aux récompenses du souverain, de le placer dans l'ordre des Comtes, Barons, & Gentilhommes (lequel droit de récompense demeure attaché à la dignité Royale ;) Cependant comme il y a déja en Suéde plus de Noblesse que le pays ne peut en supporter, S. M. voudra bien ne plus gratifier personne de l'écu de Noble, à la réserve de quelques personnes en petit nombre à son couronnement, lesquelles par des services signalés qu'elles auront rendus au Royaume, s'en seront montrées dignes ; après quoi il ne sera plus fait de Nobles jusques à ce que l'état du Royaume puisse de nouveau le permettre. De même personne ne sera honoré de la dignité de Comte ou de Baron, à cause des emplois qu'il occupe, à moins qu'il ne l'ait mérité par des services signalés.Article 45.
Tous les trois ans, au milieu de Janvier, les États doivent s'assembler, & se trouver tous réunis, soit qu'ils ayent été convoqués par le Roi, soit qu'eux mêmes à la conclusion de la Diéte précédente se soient réservés d'être convoqués. Dans cette assemblée, ils doivent examiner ce qui s'est passé depuis la derniére Diéte, & prendre connaissance de l'état où se trouve la patrie. Il appartient aussi aux États de s'enquérir si le Sénat a travaillé dans ses délibérations & résolutions, à l'avantage de S. M., à l'élévation, à la prospérité du Royaume, & par là même à son propre honneur, & à sa gloire. Les États doivent délibérer & statuer d'un commun accord sur tout ce qui peut être nécessaire pour le soutien, la sureté, l'avantage, & la tranquillité du Royaume. Si le Roi se trouve absent, malade, ou decedé (ce qu'il plaise à dieu de différer encore long-tems), ou s'il survient quelqu'autre accident imprévû dans lequel le salut du Royaume & la liberté des États l'exigent, alors le Sénat assemblé en corps convoque la Diéte. Mais si le throne devient vacant, & qu'il faille procéder à une nouvelle élection, alors les États sont obligés d'eux mêmes, & sans autre convocation, de se rendre à Stockholm le trentiéme jour après la mort du Roi comme cela est plus amplement déduit dans nôtre acte de Réunion, en datte du 24. Mars & cela sous peine de Châtiment, pour celui qui par des intrigues ou des complots oseroit travailler dans ces circonstances à apporter quelque contrainte à la libre élection des États. Dans ces malheureuses conjonctures les Chefs de la maison des Nobles, le Consistoire d'Upsal & le Magistrat de Stockholm doivent notifier sur le champ ce qui vient d'arriver, dans tous les lieux du Royaume, & à tous ceux à qui il appartient d'en être instruits. Et comme tous les Baillifs sont alors obligés, chacun dans son district, de notifier la mort du Roi à ceux qui y sont domiciliés ; il pourra par ce moyen y avoir dans le tems prescrit un assez grand nombre de personnes présentes, pour garantir & défendre la liberté du Royaume, jusqu'à ce que les plus éloignés arrivent aussi pour procéder à l'élection, d'un accord public et solemnel.Article 46.
Si quelque député est attaqué ou maltraité injustement, soit de parole, soit d'effet pendant la Diéte assemblée, en y allant, ou à son retour, après avoir fait connoitre de quelle commission il était chargé, une telle violence sera punie comme un crime capital. Un député ne peut pas non plus être arrêté, à moins qu'il ne soit surpris dans des crimes très graves, & alors on en donnera aussi-tôt connaissance aux États.Article 47.
La Noblesse du Royaume nomme toujours elle-même le Maréchal (de la Diéte) & les autres ordres, leurs Orateurs. Les États n'ont pas seulement le pouvoir de choisir & d'envoyer leurs députés à la Diéte, mais encore d'établir dans leur commité secret, & dans leurs députations, pour les Diétes mêmes ou pour l'intervalle entre les Diétes, des personnes à qui ils puissent confier certaines commissions avec surêté. Mais comme l'ordre des paysans a besoin de quelqu'un qui soit exercé à écrire sur les affaires du Royaume, les Orateurs des quatre Ordres s'assemblent à cet effet, & élisent un Secretaire, qui ayant été ainsi nommé, se charge de cet emploi. Cependant on ne doit pas forcer les paysans à recevoir un Secretaire, que l'ordre entier refuserait d'admettre.Article 48.
Les protocoles ou registres tenus dans quelques uns des Ordres, dans le committé secret, & dans les députations, ne seront livrés à qui que ce soit, mais ils seront conservés, chaque registre dans son lieu, dans leur entier & sous bonne garde.Article 49.
Sa Majesté le Roi maintiendra tous les Ordres de l'État dans leurs anciens et légitimes priviléges, prérogatives, droits et libertés ; & nul privilége nouveau qui regarde un ordre entier, ne sera donné qu'après la participation, les représentations, & le consentement de tous les Ordres ensemble.Article 50.
Sa Majesté voudra bien prendre soin des Provinces Allemandes, & faire en sorte que leurs légitimes priviléges soient confirmés, lorsque quelqu'une de ces provinces sera reprise sur les ennemis.Article 51.
Les villes du royaume conserveront les privilèges & droits légitimes qui leur ont été donnés par les anciens Rois, de sorte cependant que les États les rendent conformes aux circonstances des tems. Les finances particulières des villes sont à la disposition des Magistrats, conjointement avec la Bourgeoisie, qui les employent en appointemens, ou en bâtimens publics conformément à leur état & priviléges. Ils devront cependant en rendre compte au lieu convenable, & s'il y a quelque restant il ne doit être employé qu'à l'entretien, l'ornement, & l'avantage des villes.
* *
*Ce sont là tous les Articles que Nous les États du Royaume, présentement assemblés, avons d'un consentement unanime trouvé nécessaire de régler, résoudre, & conclure, afin d'établir un Gouvernement sage & réglé, pour nous, nos frères absents, & nos successeurs, tant ceux qui sont nés, que ceux qui sont à naître. Nous nous réjouissons à juste titre de ce que S. M. nôtre Roi très gracieux a promis de recevoir, de confirmer, & d'adopter cette Forme de Gouvernement, par sa volonté, & son commandement gracieux, de façon qu'elle soit à l'avenir considérée & observée comme une loi fondamentale. Et nous sommes de plus assurés de vivre sous un gouvernement sage & heureux que S. M. est résolue avec l'aide puissante de Dieu, de fonder son pouvoir avec justice & clémence dans le coeur de ses sujets, & de nous gouverner, & régner sur nous avec bienveillance, douceur, & bonté, en quoi consiste proprement la juste autorité Royale. De nôtre côté nous devons, conformément aux engagemens de nôtre serment, & aux devoirs d'une soumission fidèle, demeurer dans l'obéissance justement dûe au Roi, exécuter ses ordres en toute occasion, puisque nous en sommes comptables devant Dieu & devant les hommes, que c'est à lui à ordonner, & à nous à faire, & que nous devons regarder ses droits comme les nôtres propres, ainsi que de fidéles hommes et sujets sont obligés de faire. Pour une plus grande sureté, nous le Sénat, & les États du Royaume du Suéde, avons voulu appuyer & confirmer toutes ces choses par nôtre seing, & en y apposant nos Sceaux.
Fait à Stockholm, le 2 du mois de Mai, l'an mille sept cent & vingt.Au nom de tous les Chevaliers et Nobles du Royaume : Arved Horn.
Au nom de tout le Clergé : Matthias Steuchius.
Au nom de l'Ordre des Bourgeois : Jacob Bunge.
Au nom de l'Ordre des Paysans : Jacob Olsson.* *
*Tout ce qui est écrit dans cette Forme de Gouvernement, nous l'avons soigneusement pesé, & nous l'approuvons pour qu'il soit mis en exécution, & ait la force & l'effet d'une loi fondamentale reçue solemnellement, en sorte que non seulement nous y souscrivons de bon gré, & avec plaisir dans tout ce qui concerne notre personne Royale, nôtre pouvoir, & nos droits ; mais encore nous commandons, & ordonnons que tous ceux qui doivent foi, respect, & obéissance, à nous & à nos successeurs, comme aussi au Royaume, ayent à reconnoitre cette Forme de Gouvernement, à l'observer, à s'y conformer, & à s'y soumettre. Et pour une plus grande sureté nous l'avons confirmée & signée de nôtre propre main, & y avons ci-dessous expressément apposé nôtre Sceau royal.
Fait à Stockholm, le second de May, l'an mille sept cent & vingt.Friedriech.
Notes.
Il y avait à l'époque dans le Royaume quatre Cours de Justice : à Stockholm pour la Suède proprement dite, à Jonköping pour la Gothie, à Abo pour la Finlande et à Wismar pour la Basse-Saxe et les autres provinces d'Allemagne.
Chancelier de justice. La fonction d'ombudsman [högste ombudsman] est créée par Charles XII en 1713 pour le représenter durant son absence du royaume et veiller au bon fonctionnement de l'administration. La charge est mentionnée dans les Formes de Gouvernement de 1719 (article 19) et de 1720 (article 23) sous le nom de chancelier de justice [Justitiekansler], celui-ci étant alors chargé de veiller à l'application de la loi et d'en rendre compte aux États généraux. En 1766, les États décident de nommer eux-mêmes à cette charge. Mais la Forme de gouvernement de 1772 rend au roi le pouvoir de nomination (article 22). La Forme de gouvernement de 1809 institue deux charges différentes : celle de chancelier de justice [Justitiekansler], nommé par le roi, qui exerce la fonction de procureur général du royaume (article 27) et celle de procureur de justice des États du Royaume [Riksens ständers justitieombudsman], désigné par les États, et dont les prérogatives sont indiquées aux articles 96 à 102. C'est cette fonction de procureur parlementaire indépendant, chargé de poursuivre les abus de l'administration, qui a été plus ou moins bien imitée dans de nombreux États, sous la forme d'un médiateur ou d'un défenseur des droits de l'homme, généralement dotés de prérogatives amoindries par rapport à l'original suédois. Le terme suédois ombudsman peut être traduit par représentant, mandataire ou procureur.
Magistrat. Le terme est le plus souvent utilisé ici avec son sens germanique : autorités municipales (par ex. Le Magistrat de Stockholm).
Pour obtenir davantage d'informations sur le pays et sur le texte ci-dessus,
voir la fiche Suède.
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