Titre premier. Du territoire de la République.
Titre II. Des Haïtiens et de leurs droits.
Titre III. De la souveraineté et des pouvoirs auxquels l'exercice en est délégué.
Titre IV. Des finances.
Titre V. De la Force publique.
Titre VI. Dispositions générales.
Titre VII. De la révision de la Constitution.
Titre VIII. Dispositions transitoires.
Au début du XXe siècle, Haïti est l'enjeu d'une tentative allemande pour s'implanter en Amérique et surtout de la volonté des États-Unis de s'assurer le contrôle de la région et de l'accès au canal de Panama, après la guerre contre l'Espagne qui leur permet d'occuper Cuba et Porto-Rico, les interventions au Nicaragua, en Colombie, puis en République dominicaine, et l'achat des îles Vierges danoises (31 mars 1917).
La gabegie et l'instabilité politique chronique du pays favorisent les projets d'intervention des États-Unis. La Constitution de 1889, formellement en vigueur pendant près de trente ans, est devenue lettre morte. La chute du général Antoine Simon, renversé par une révolte paysanne, le 2 août 1911, ouvre une période de troubles, durant laquelle six présidents et autant de gouvernements intérimaires exercent successivement le pouvoir, quelques semaines ou quelques mois chacun. Le dernier de ces présidents, Guillaume-Sam, fait massacrer ses opposants mulâtres, le 27 juillet 1915, et est lui-même lynché par la foule, le lendemain. La marine des États-Unis, le même jour, occupe Port-au-Prince. L'Occupation durera jusqu'au 21 août 1934.
Le pays est alors co-dirigé par un nouveau président haïtien, promptement élu, Sudre Dartiguenave, et le général commandant les forces d'Occupation. Ainsi le président fait disperser par la nouvelle Gendarmerie, créée par les Américains, l'Assemblée nationale qui a refusé d'approuver le projet de Constitution proposé par les États-Unis (rédigé selon certaines sources par Franklin Roosevelt, alors secrétaire à la marine). Cependant le projet de Constitution est finalement approuvé lors d'une consultation populaire le mercredi 12 juin 1918 : 98.294 oui contre 769 non (Bulletin des lois et actes, 1919, p. 45). Cette Constitution est d'inspiration libérale, mais durant la longue révolte paysanne contre l'Occupation, le seul article appliqué fut l'article spécial qui garantit l'impunité aux forces américaines et à leurs agents haïtiens. Ainsi un Conseil d'État dont les membres sont nommés par le Président, remplace le Sénat. Et c'est lui qui désigne le Président !
Le traité du 16 septembre 1915 est l'instrument juridique de cette Occupation. Il place les finances haïtiennes sous le contrôle d'un conseiller financier "proposé" par le président des États-Unis. Les droits de douane sont perçus directement par un Receveur général, également proposé par le président des États-Unis, pour assurer le remboursement de la dette d'Haïti à l'égard des banques américaines et aussi pour financer la création d'une gendarmerie haïtienne, encadrée par des officiers américains, chargée de maintenir l'ordre et notamment de réprimer les révoltes suscitées par l'imposition de la corvée. C'est seulement en 1934 que le président Sténio Vincent obtient de Roosevelt la fin de l'Occupation.
La Constitution est révisée en 1928, puis remplacée par la Constitution de 1932.
Sources : Constitution de la République d'Haïti, Imprimerie nationale, Port-au-Prince, 1918. Bulletin des lois et actes, année 1918, Imprimerie nationale, 1919, p. 45-65.
Titre premier. Du territoire de la République.
Article premier.
La République d'Haïti est une et indivisible, libre, souveraine et indépendante.
Son territoire y compris les îles adjacentes, est inviolable et ne peut être aliéné par aucun traité ou par aucune convention.
Article 2.
Le territoire de la République est divisé en départements, chaque département est subdivisé en arrondissements, et chaque arrondissement en communes
Le nombre et les limites de ces subdivisions sont déterminés par la loi.
Titre II. Des Haïtiens et de leurs droits.
Section première. Des droits civils et politiques.
Article 3.
Les règles relatives à la nationalité sont déterminées par la loi.
Article 4.
Tout étranger qui se trouve sur le territoire d'Haïti jouit de la même protection accordée aux Haïtiens.
Article 5.
Le droit de propriété immobilière est accordé à l'étranger résidant en Haïti et aux sociétés formées par des étrangers pour les besoins de leurs demeures, de leurs entreprises agricoles, commerciales, industrielles ou d'enseignement.
Ce droit prendra fin dans une période de cinq années, après que l'étranger aura cessé de résider dans le pays ou qu'auront cessé les opérations de ces compagnies.
Article 6.
Tout Haïtien âgé de vingt-et-un-an accomplis exerce les droits politiques, s'il réunit d'ailleurs les autres conditions déterminées par la Constitution et par la loi. Les étrangers peuvent acquérir la nationalité haïtienne en se conformant aux règles établies par la loi. Les Haïtiens par naturalisation ne sont admis à l'exercice des droits politiques qu'après cinq années de résidence sur le territoire de la République.
Article 7.
L'exercice des droits politiques sera suspendu par suite de condamnation judiciaire, intervenue conformément aux lois d'Haïti, emportant la suspension des droits civils.
Section deuxième. Du Droit Public
Article 8.
Les Haïtiens sont égaux devant la loi. Ils sont également admissibles aux emplois civils et militaires, sans autre motif de préférence que le mérite personnel ou les services rendus au pays.
Article 9.
La liberté individuelle est garantie.
Nul ne peut être détenu que sur la prévention d'un fait puni par la loi et sur le mandat d'un fonctionnaire légalement compétent. Pour que ce mandat puisse être exécuté, il faut :
1° qu'il exprime le motif de la détention et la disposition de la loi qui punit le fait imputé ;
2° qu'il soit notifié et qu'il en soit laissé copie à la personne détenue au moment de l'exécution.
Hors le cas de flagrant délit, l'arrestation est soumise aux formes et conditions ci-dessus.
Toute arrestation ou détention faite contrairement à cette disposition, toute violence ou rigueur employée dans l'exécution d'un mandat sont des actes arbitraires contre lesquels les parties lésées peuvent, sans autorisation préalable, se pourvoir devant les tribunaux compétents, en poursuivant soit les auteurs, soit les exécuteurs.
Article 10.
Nul ne peut être distrait des juges que la constitution ou la loi lui assigne.
Article 11.
Aucune visite domiciliaire, aucune saisie de papiers ne peuvent avoir lieu qu'en vertu de la loi et dans les formes qu'elle prescrit.
Article 12.
Aucune loi ne peut avoir d'effet rétroactif.
Article 13.
Nulle peine ne peut être établie que par la loi, ni appliquée que dans les cas qu'elle détermine.
Article 14
Le droit de propriété est garanti.
Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique, dans les cas et de la manière établis par la loi et moyennant une juste et préalable indemnité. La confiscation des biens en matière politique ne peut être établie.
Article 15.
La peine de mort est abolie en matière politique, excepté pour cause de trahison.
La loi détermine la peine qui la remplace.
Article 16.
Chacun a le droit d'exprimer ses opinions en toutes matières, d'écrire, d'imprimer et de publier ses pensées. Les écrits ne peuvent être soumis à aucune censure préalable. Les abus de ce droit sont définis et réprimés par la loi, sans qu'il puisse être porté atteinte à la liberté de la presse.
Article 17.
Tous les cultes sont également libres.
Chacun a le droit de professer sa religion et d'exercer librement son culte, pourvu qu'il ne trouble pas l'ordre public.
Article 18.
L'enseignement est libre.
La liberté de l'enseignement s'exerce sous le contrôle et la surveillance de l'État, conformément à la loi.
L'instruction primaire est obligatoire.
L'instruction publique est gratuite à tous les degrés.
Article 19.
Le jury est établi en matière criminelle et pour délit politique et de presse.
Article 20.
Les Haïtiens ont le droit de s'assembler paisiblement et sans armes pour s'occuper de toutes questions, en se conformant aux lois qui peuvent régir l'exercice de ce droit, sans néanmoins le soumettre à une autorisation préalable.
Cette disposition ne s'applique point aux rassemblements dans les lieux publics, lesquels restent entièrement soumis aux lois de police.
Article 21.
Les Haïtiens ont le droit de s'associer conformément à la loi.
Article 22.
Le droit de pétition est exercé personnellement par un ou plusieurs individus, jamais au nom d'un Corps.
Les pétitions peuvent être adressées au Pouvoir Législatif ou au Pouvoir Exécutif.
Article 23.
Le secret des lettres confiées à la poste est inviolable.
La loi détermine quels sont les agents responsables de cette violation.
Article 24.
Le français est la langue officielle. Son emploi est obligatoire en matière administrative et judiciaire.
Article 25.
Nulle autorisation préalable n'est nécessaire pour exercer des poursuites contre les fonctionnaires publics pour faits de leur administration, sauf les exceptions établies par la Constitution.
Article 26.
La loi ne peut ajouter ni déroger à la Constitution. La lettre de la Constitution doit toujours prévaloir.
Titre III. De la souveraineté et des pouvoirs auxquels l'exercice en est délégué.
Article 27.
La souveraineté nationale réside dans l'universalité des citoyens.
Article 28.
L'exercice de cette souveraineté est délégué à trois pouvoirs: le Pouvoir Législatif, le Pouvoir Exécutif et le Pouvoir Judiciaire.
Ils forment le Gouvernement de la République, lequel est essentiellement civil, démocratique et représentatif.
Article 29.
Chaque pouvoir est indépendant des deux autres dans ses attributions qu'il exerce séparément.
Aucun d'eux ne peut les déléguer, ni sortir des limites qui lui sont fixées.
Article 30.
La responsabilité individuelle est formellement attachée à toutes les fonctions publiques.
La loi règle le mode à suivre contre les fonctionnaires publics pour faits de leur administration.
Chapitre premier. Du Pouvoir Législatif.
Section première. De la Chambre des députés.
Article 31.
Le pouvoir Législatif s'exerce par deux assemblées : une Chambre des députés et un Sénat, qui forment le Corps Législatif.
Article 32.
Le nombre des députés sera fixé en raison de la population sur la base d'un député par 60,000 habitants.
En attendant que le dénombrement de la population soit fait, le nombre des députés est fixé à trente-six, répartis entre les arrondissements actuellement existants, soit : trois Députes pour l'arrondissement de Port-au-Prince, deux pour chacun des arrondissements du Cap-Haïtien, des Cayes, de Port-de-Paix, des Gonaïves, de Jérémie, de Saint-Marc et de Jacmel ; et un député pour chacun des autres arrondissements. Le député est élu à la majorité des votes émis dans les Assemblées primaires de la circonscription, d'après les conditions et le mode prescrits par la loi.
Article 33.
Pour être membre de la Chambre des députés, il faut :
1° Être âgé de vingt-cinq ans accomplis ;
2° Jouir des droits civils et politiques ;
3° Avoir résidé au moins une année dans l'arrondissement à représenter.
Article 34.
Les membres de la Chambre des députés sont élus pour deux ans et sont indéfiniment rééligibles. Ils entrent en fonction le premier lundi d'avril des années paires.
Article 35.
En cas de vacance par suite de mort, démission, déchéance ou autres d'un député, il est pourvu à son remplacement, dans sa circonscription électoral, pour le temps seulement qui reste à courir par une élection spéciale sur la convocation immédiate du Président de la République.
Cette élection a lieu dans une période de trente jours après la convocation de l'Assemblée primaire, conformément à l'article 107 de la présents Constitution.
Il en sera de même en cas de non élection dans une ou plusieurs circonscriptions.
Section II. Du Sénat.
Article 36.
Le Sénat se compose de quinze sénateurs.
Leurs fonctions durent six années et commencent le premier lundi d'avril des années paires.
Ils sont indéfiniment rééligibles.
Article 37.
Les sénateurs représentent les départements qui sont au nombre de cinq, soit :
1° Quatre sénateurs pour le département de l'Ouest ;
2° Trois pour chacun des départements su Nord, du Sud et de l'Artibonite ;
3° Deux pour le département du Nord-Ouest.
Les sénateurs sont élus par le suffrage universel et direct aux assemblées primaires des divers départements, selon les conditions et le mode prescrits par la loi.
A la première élection, après l'adoption de la présente Constitution, ces élections auront lieu de la manière suivante :
Dans chaque département, le candidat qui aura obtenu le plus grand nombre de voix sera élu sénateur de ce département pour une période de six ans ; le candidat qui aura obtenu en second lieu le plus grand nombre de voix sera élu pour une période de quatre ans.
Dans chacun des départements du Nord, du Sud et de l'Artibonite, le candidat qui aura obtenu en troisième lieu, le plus grand nombre de voix et dans le département de l'Ouest, les candidats qui auront obtenu en troisième et quatrième lieu le plus grand nombre de voix, seront élus pour un période de deux ans.
Dans la suite et dans les élections régulières, les candidats ayant obtenu le plus grand nombre de voix dans les divers départements seront élus pour la période entière de six années.
Le Sénat se renouvelle par tiers tous les deux ans.
Article 38.
Pour être élu sénateur, il faut :
1° Être âgé de trente ans accomplis;
2° Jouir des droits civils et politiques;
3° Avoir résidé au moins deux ans dans le département à représenter.
Article 39.
En cas de vacance par suite de mort, démission, déchéance ou autrement d'un sénateur, il est pourvu à son remplacement dans son département, pour le temps seulement qui reste à courir, par une élection spéciale sur la convocation immédiate du Président de la République.
Cette élection a lieu dans une période de trente jours après la convocation de l'Assemblée primaire, conformément à l'article 107 de la présente Constitution.
Il en sera de même en cas de non élection dans un ou plusieurs départements.
Section III. De l'Assemblée nationale
Article 40.
Les deux chambres se réunissent en Assemblée nationale dans les cas prévus par la Constitution.
Les pouvoirs de l'Assemblée nationale sont limités et ne peuvent s'étendre à d'autres objets que ceux qui lui sont spécialement attribués par la Constitution.
Article 41.
Le président du Sénat préside l'Assemblée nationale, le président de la Chambre des Communes en est le vice-président, les secrétaires du Sénat et de la Chambre des Communes sont les secrétaires de l'Assemblée nationale.
Article 42.
Les attributions de l'Assemblée nationale sont :
1° D'élire le Président de la République et de recevoir de lui le serment constitutionnel ;
2° De déclarer la guerre sur le rapport du Pouvoir Exécutif ;
3° D'approuver ou de rejeter les traités de paix et autres traités et les conventions internationales.
Article 43.
Dans les années d'élections présidentielles régulières, l'Assemblée nationale procède à l'élection du Président de la République le second lundi d'avril et ne peut se livrer à d'autres travaux, restant en permanence, sauf les dimanches et jours fériés, jusqu'à ce que le Président ait été élu.
Article 44.
L'élection du Président de la République se fait au scrutin secret et à la majorité absolue.
Si, après le premier tour de scrutin, aucun des candidats n'a obtenu le nombre de suffrages requis par l'élection, il est procédé à un second tour de scrutin. Si, à ce second tour de scrutin, aucun candidat n'est élu, l'élection se concentre sur les trois candidats qui ont obtenu le plus de suffrages.
Si, après trois tours de scrutin, aucun des trois n'a été élu, il y a ballottage entre les deux qui ont le plus de voix, et celui qui obtient la majorité des suffrages exprimés est proclamé Président de la République.
En cas d'égalité de suffrages des deux candidats, le sort décide de l'élection.
Article 45.
En cas de vacance de l'office de Président, l'Assemblée nationale est tenue de se réunir dans les dix jours, avec ou sans convocation du Conseil des Secrétaires d'État.
Article 46.
Les séances de l'Assemblée nationale sont publiques. Néanmoins, elle peut se former en comité secret sur la demande de cinq membres et décider ensuite à la majorité absolue si la séance doit être reprise en public.
Article 47.
En cas d'urgence, lorsque le Corps Législatif n'est pas en session, le Pouvoir Exécutif peut convoquer l'Assemblée nationale en session extraordinaire.
Il communique à l'Assemblée nationale, dans un message écrit, les raisons de cette convocation.
Article 48.
La présence dans l'Assemblée nationale de la majorité de chacune des deux Chambres est nécessaire pour prendre des résolutions ; mais la minorité peut ajourner de jour en jour et forcer les membres absents à assister aux séances selon le mode et les peines que peut prescrire l'Assemblée nationale
Chapitre II.
Section première. De l'exercice du Pouvoir Législatif
Article 49.
Le siège du Corps Législatif est fixé dans la Capitale de la République.
Article 50.
Le Corps Législatif se réunit de plein droit, chaque année, le premier lundi d'avril.
La session prend date dès la constitution des bureaux des deux Chambres.
La session est de trois mois. En cas de nécessité elle peut être prolongée jusqu'à quatre par le Pouvoir Exécutif ou le Corps Législatif.
Le Président de la République peut ajourner les Chambres, mais l'ajournement ne peut être de plus d'un mois, et pas plus de deux ajournements ne peuvent avoir lieu dans le cours d'une même session.
Article 51.
Dans l'intervalle des sessions, et en cas d'urgence, le Président de la République peut convoquer le Corps Législatif à l'extraordinaire.
Il lui rend alors compte de cette mesure par un message.
Dans le cas de convocation à l'extraordinaire, le Corps Législatif ne pourra s'occuper d'aucun objet étranger aux motifs de cette convocation.
Article 52.
Chaque Chambre vérifie l'élection de ses membres et juge souverainement les contestations qui s'élèvent à ce sujet.
Article 53.
Les membres de chaque Chambre prêtent individuellement le serment de maintenir les droits du peuple et d'être fidèle à la Constitution.
Article 54.
Les séances des deux Chambres sont publiques.
Chaque Chambre peut se former en comité secret sur la demande de cinq membres et décider ensuite à la majorité absolue si la séance doit être reprise en public sur le même sujet.
Article 55.
Le Pouvoir Législatif fait des lois sur tous les objets d'intérêt public.
L'initiative appartient à chacune des deux Chambres ainsi qu'au Pouvoir Exécutif.
Néanmoins la loi budgétaire, celle concernant l'assiette, la quotité et le mode de perception des impôts et contributions, celles ayant pour objet de créer des recettes ou d'augmenter les dépenses de l'État doivent être d'abord votées par la Chambre des députés.
En cas de désaccord entre les deux Chambres relativement à ces lois, chaque Chambre nomme par tirage au sort, en nombre égal, une commission interparlementaire qui résoudra en dernier ressort le désaccord.
Le Pouvoir Exécutif a seul le droit de prendre l'initiative des lois concernant les dépenses publiques ; et aucune des deux Chambres n'a le droit d'augmenter tout ou partie de dépenses proposés par le Pouvoir Exécutif.
Article 56.
Chaque Chambre, par ses règlements, fixe sa discipline et détermine le mode suivant lequel elle exerce ses attributions.
Chaque Chambre peut appliquer des peines disciplinaires à ses membres pour conduire répréhensible, et peut expulser un membre par la majorité des deux tiers de ses membres.
Article 57.
Les membres du Corps Législatif, sauf le cas de flagrant délit, de trahison ou faits emportant une peine afflictive ou infamante, ne peuvent être poursuivis ni arrêtés en matière de répression pendant la durée de la session, qu'avec l'autorisation de la Chambre à laquelle ils appartiennent.
Dans aucun cas, ils ne peuvent être arrêtés pendant qu'ils assistent à une séance de leur Chambre ou lorsqu'ils s'y rendent ou en reviennent.
Article 58.
Aucune des deux Chambres ne peut prendre de résolution, sans la présence de la majorité absolue des membres ; néanmoins, un nombre inférieur des membres peut ajourner de jour à jour et forcer les membres absents à assister aux séances selon le mode et les peines que peut prescrire chaque Chambre.
Article 59.
Aucun acte du Corps Législatif ne peut être pris que par un nombre de voix égal ou supérieur à la majorité des membres présents, excepté lorsqu'il est autrement prévu par la présente Constitution.
Article 60.
Un projet de loi ne peut être adopté par aucune des deux Chambres qu'après avoir été voté, article par article.
Article 61.
Chaque Chambre a le droit d'amender et de diviser les articles et amendements proposés. Les amendements votés par une Chambre ne peuvent faire partie d'un projet de loi qu'après avoir été votés par l'autre Chambre ; et aucun projet de loi ne deviendra loi qu'après avoir été voté dans la même forme par les deux Chambres. Tout projet de loi peut être retiré de la discussion tant que ce projet n'a pas été définitivement voté.
Article 62.
Toute loi votée par le Corps Législatif est immédiatement adressée au Président de la République qui, avant de la promulguer, a le droit d'y faire des objections en tout ou en partie.
Dans ce cas, il renvoie la loi à la Chambre où elle a été primitivement votée, avec ses objections. Si la loi est amendée par cette Chambre, elle est envoyée à l'autre Chambre avec les objections. Si la loi ainsi amendée est votée par la seconde Chambre, elle sera adressée de nouveau au Président pour être promulguée.
Si les objections sont rejetées par la Chambre qui a primitivement voté la loi, elle est renvoyée à l'autre Chambre avec les objections.
Si la seconde Chambre vote également le rejet, la loi est envoyée au Président qui est dans l'obligation de la promulguer.
Le rejet des objections est voté dans l'une et l'autre Chambres à la majorité des deux tiers de chaque Chambre ; dans ce cas les votes de chaque Chambre seront donnés par oui et par non et consignés en marge du procès-verbal à côte du nom de chaque membre de l'Assemblée.
Si dans l'une et l'autre Chambres les deux tiers ne se réunissent pas pour amener ce rejet, les objections sont acceptées.
Article 63.
Le droit d'objection doit être exercé dans un délai de huit jours de la date de la présentation de la loi au Président, à l'exclusion des dimanches et des jours d'ajournement du Corps Législatif, conformément à l'article 50 de la présente Constitution.
Article 64.
Si, dans les délais prescrits par l'article précédent, le Président de la République ne fait aucune objection, la loi doit être promulguée, à moins que la session du Corps Législatif n'ait pris fin avant l'expiration des délais. Dans ce cas, la loi demeure ajournée.
Article 65.
Un projet de loi rejeté par l'une des deux Chambres ne peut être reproduit dans la même session.
Article 66.
Les lois et autres actes du Corps Législatif sont rendus officiels par la voie du « Moniteur » et insérés dans le bulletin imprimé et numéroté ayant pour titre : « Bulletin des Lois. »
Article 67.
La loi prend date du jour de son adoption définitive par les deux Chambres, mais elle ne devient obligatoire qu'après la promulgation qui en est faite conformément à la loi.
Article 68.
Nul ne peut en personne présenter des pétitions au Corps Législatif.
Article 69.
Chaque membre du Corps Législatif reçoit une indemnité mensuelle de Cent cinquante dollars à partir de sa prestation de serment.
Article 70.
La fonction de membre du Corps Législatif est incompatible avec toute autre fonction rétribuée par l'État.
Chapitre III. Du Pouvoir exécutif.
Section première. Du Président de la République.
Article 71.
La puissance exécutive est exercée par un citoyen qui prend le titre de Président de la République.
Article 72.
Le Président de la République est élu pour quatre ans.
Il entre en fonctions le 15 mai, excepté lorsqu'il est élu pour remplir une vacance ; dans ce cas, il est élu pour le temps qui reste à courir et il entre en fonctions immédiatement après son élection.
Le Président est immédiatement rééligible. Un Président qui a été réélu ne peut l'être pour un troisième mandat jusqu'à ce qu'un délai de quatre ans ne soit écoulé.
Un citoyen qui a été élu trois fois Président n'est plus éligible à cette fonction.
Article 73.
Pour être élu Président de la République, il faut :
1° Être né de père Haïtien et n'avoir jamais renoncé à sa nationalité ;
2° Être âgé de quarante ans accomplis ;
3° Jouir des droits civils et politiques.
Article 74.
Avant d'entrer en fonctions, le Président prête devant l'Assemblée nationale le serment suivant :
« Je jure devant Dieu et devant la Nation d'observer et de faire observer fidèlement la Constitution et les lois du peuple haïtien, de respecter ses droits, de maintenir l'Indépendance nationale et l'intégrité du territoire. »
Article 75.
Le Président de la République nomme et révoque les Secrétaires d'État.
Il est chargé de veiller à l'exécution des traités de la République.
Il fait sceller les lois du sceau de la République et les promulgue dans le délai prescrit par les articles 62, 63 et 64.
Il est chargé de faire exécuter la Constitution et les lois, actes et décrets du Corps Législatif et de l'Assemblée nationale.
Il fait tout règlement et arrêté nécessaires à cet effet, sans pouvoir jamais suspendre et interpréter les lois, actes et décrets eux-mêmes, ni se dispenser de les exécuter.
Il ne nomme aux emplois et fonctions publiques, qu'en vertu de la Constitution ou de la disposition expresse d'une loi et aux conditions qu'elle prescrit.
Il pourvoit d'après la loi à la sûreté intérieure et extérieure de l'État.
Il fait tous traités ou conventions internationales, sauf la sanction de l'Assemblée nationale.
Il a le droit de grâce et de commutation de peine, relativement aux condamnations contradictoires passées en force de chose jugée excepté le cas de mise en accusation par les tribunaux ou par la Chambre des députés, ainsi qu'il est prévu aux articles 100 et 101 de la présente Constitution.
Il accorde toute amnistie en matière politique selon les prévisions de la loi.
Il commande et dirige les forces armées de la République et il confère les grades selon la loi.
Il peut demander par écrit l'avis du principal fonctionnaire de chacun des départements ministériels sur tout objet relatif à la conduite de leurs départements respectifs.
Article 76.
Si le Président se trouve dans l'impossibilité temporaire d'exercer ses fonctions, le Conseil des Secrétaires d'État est chargé de l'autorité exécutive tant que dure l'empêchement.
Article 77.
En cas de vacance de l'office de Président, le Conseil des Secrétaires d'État est investi temporairement du pouvoir Exécutif.
Il convoquera immédiatement l'Assemblée nationale pour l'élection du successeur pour le temps du mandat présidentiel qui reste à courir.
Si le Corps Législatif est en session, l'Assemblée nationale sera convoquée sans délai. Si le Corps Législatif n'est pas en session, l'Assemblée nationale sera convoquée conformément à l'article 45.
Article 78.
Tous les actes du Président, excepté les décrets portant nomination ou révocation des Secrétaire d'État, sont contresignés par le secrétaire d'État en ce qui le concerne.
Article 79.
Le Président n'a d'autres pouvoirs que ceux que lui attribuent formellement la Constitution et les lois particulières votées en vertu de la Constitution.
Article 80.
A l'ouverture de chaque session, le Président, par un message, rend compte à chacune des deux Chambres séparément, de son administration pendant l'année et présente la situation générale de la République tant à l'intérieur qu'à l'extérieur.
Article 81.
Le Président de la République reçoit du Trésor public un indemnité annuelle de vingt-quatre mille dollars.
Article 82.
Le Président réside au Palais national de la Capitale.
Section II. Des Secrétaires d'État.
Article 83.
Les Secrétaires d'État sont au nombre de cinq. Ils sont répartis entre les divers département ministériels que réclament les services de l'État.
Un arrêté fixera cette répartition conformément à la loi.
Article 84.
Pour être nommé Secrétaire d'État, il faut :
1° Être âgé de trente ans accomplis ;
2° Jouir des droits civils et politiques.
Article 85.
Les Secrétaires d'État se forment en Conseil sous la présidence du Président de la République, ou de l'un d'eux délégué par le Président.
Toutes les délibérations du Conseil sont consignées sur un registre ; et les minutes de chaque séance sont signées par les membres présents du Conseil.
Article 86.
Les Secrétaires d'État ont leur entrée à chacune des deux Chambres ainsi qu'à l'Assemblée nationale, mais seulement pour discuter les projets de loi proposés par le Pouvoir Exécutif et soutenir ses objection ou faire toutes autres communications officielles.
Article 87.
Les Secrétaires d'État sont responsables, chacun en ce qui le concerne, tant des actes de leurs départements que de l'inexécution des lois qui y sont relatives.
Ils correspondent directement avec les autorités qui leur sont subordonnées.
Article 88.
Chaque Secrétaire d'État reçoit du Trésor public un indemnité annuelle de Six mille dollars.
Chapitre IV. Du Pouvoir judiciaire.
Article 89.
Le Pouvoir Judiciaire est exercé par un Tribunal de Cassation et des tribunaux inférieurs dont le mode et l'étendue de juridiction seront établis par la loi.
Article 90.
Les juges de tous les tribunaux sont nommés par le Président de la République.
Il nomme et révoque les officiers du Ministère public près le Tribunal de Cassation et des autres tribunaux, le Juges de Paix et leurs suppléants.
Article 91.
Nul ne peut être nommé juge ou officier du Ministère public, s'il n'a trente ans accomplis pour le Tribunal de Cassation et vingt-cinq ans accomplis pour les autres tribunaux.
Article 92.
Le Tribunal de Cassation ne connaît pas du fond des affaires. Néanmoins en toutes matières autres que celles soumises au jury, lorsque, sur un second recours, même sur une exception, une même affaire se présentera entre les mêmes parties, le Tribunal de Cassation, admettant le pourvoi, ne prononcera point de renvoi et statuera sur le fond, sections réunies.
Article 93.
Les juges du Tribunal de Cassation, ceux des tribunaux d'appel et de première instance, jouissent de l'inamovibilité.
La loi règlera les conditions dans lesquelles ils cesseront de jouir du privilège de l'inamovibilité, et le mode de leur retraite par l'âge ou tout autre empêchement ou par suite de la suppression d'un tribunal.
Ils ne peuvent passer d'un tribunal à un autre ou à d'autres fonctions, même supérieures, que de leur consentement formel.
Article 94.
Les fonctions de juge sont incompatibles avec toutes autres fonctions publiques salariées.
L'incompatibilité en raison de la parenté ou de l'alliance est réglée par la loi.
Une loi règlera également les conditions exigibles pour être juge à tous les degrés.
Article 95.
Les contestations commerciales sont déférées aux tribunaux de premières instances et de Paix, conformément au Code de Commerce.
Article 96.
Les audiences des tribunaux sont publiques, à moins que cette publicité ne soit dangereuse pour l'ordre public et les bonnes moeurs ; dans ce cas, le tribunal le déclare par jugement.
En matière de délit politique et de presse, le huis clos ne peut être prononcé.
Article 97.
Tout arrêt ou jugement est motivé ; il est prononcé en audience publique.
Article 98.
Le Tribunal de Cassation prononce sur les conflits d'attributions, d'après le mode réglé par la loi.
Il est compétent dans tous les cas de décisions rendues par un cour martiale pour cause d'incompétence et d'excès de pouvoir.
Article 99.
Le Tribunal de Cassation, sections réunies, décidera de la constitutionnalité des lois.
Les tribunaux doivent refuser d'appliquer toute loi déclarée inconstitutionnelle par le Tribunal de Cassation.
Ils n'appliqueront les arrêtés et règlements d'administration publique qu'autant qu'ils seront conformes aux lois.
Chapitre V. Des poursuites contre les membres des Pouvoirs de l'État
Article 100.
La Chambre des députés accuse le Président et le traduit devant le Sénat pour cause de haute trahison ou tout autre crime ou délit commis dans l'exercice de ses fonctions.
Elle accuse également :
1° Les Secrétaires d'État en cas de malversation, de trahison, d'abus ou d'excès de pouvoirs ou de tout autre crime ou délit commis dans l'exercice de leurs fonctions ;
2° En cas de forfaiture, les membres du Tribunal de Cassation, de l'une de ses sections et de tout officier du Ministère public près le Tribunal de Cassation.
La mise en accusation ne pourra être prononcée qu'à la majorité des deux tiers des membres de la Chambre. Elle les traduit en conséquence devant le Sénat érigé en Haute Cour de Justice. A l'ouverture de l'audience, chaque membre de la Haute Cour de Justice prête le serment de juger avec l'impartialité et la fermeté qui conviennent à un homme probe et libre, suivant sa conscience et son intime conviction.
Quand le Président de la République est en jugement, le Président du Tribunal de Cassation préside.
La Haute Cour de Justice ne pourra prononcer d'autre peine que la déchéance, la destitution et la privation du droit d'exercer toute fonction publique pendant un an au moins et cinq ans au plus ; mais le condamné peut être traduit devant les tribunaux ordinaires conformément à la loi, s'il y a lieu d'appliquer d'autres peines ou de statuer sur l'exercice de l'action civile.
Nul ne peut être jugé ni condamné qu'à la majorité des deux tiers des membres du Sénat.
Les limites prescrites à la durée des sessions du Corps Législatif à l'article 59 de la présents Constitution ne peuvent servir à mettre fin aux poursuites, lorsque le Sénat siège en Haute Cour de Justice.
Article 101.
En cas de forfaiture, tout juge ou officier du Ministère Public est mis en état d'accusation par l'une des sections du Tribunal de Cassation.
S'il s'agit du tribunal entier, la mise en accusation est prononcée par le Tribunal de Cassation, sections réunies.
Article 102.
La loi règle le mode de procéder contre le Président de la République, les Secrétaires d'État et les Juges dans les cas de crimes ou délits par eux commis, soit dans l'exercice de leurs fonctions, soit en dehors de cet exercice.
Chapitre VI. Des institutions communales.
Article 103.
Il est établi un Conseil par commune.
Le Président du Conseil Communal a le titre de Magistrat Communal.
Cette institution est réglée par la loi.
Une loi établira dans les communes ou les arrondissements des fonctionnaires civils qui représenteront directement le Pouvoir Exécutif.
Article 104.
Les principes suivants doivent former les bases des institutions communales :
1° L'élection par les Assemblées Primaires, tous les deux ans, pour les Conseils Communaux ;
2° L'attribution aux Conseils Communaux de tout ce qui est d'intérêt communal, sans préjudice de l'approbation de leurs actes dans les cas et suivant le mode que la loi détermine ;
3° La publicité des séances des Conseils dans les limites établies par la loi ;
4° La publicité des budgets et des comptes ;
5° L'intervention du Pouvoir Exécutif pour empêcher que les Conseils ne sortent de leurs attributions et ne lèsent l'intérêt général.
Article 105.
Les magistrats communaux sont rétribués par leur commune.
Article 106.
Le Conseil Communal ne peut dépenser par mois que le douzième des valeurs votées dans son budget.
Chapitre VII. Des Assemblées primaires.
Article 107.
Les Assemblées primaires s'assemblent de plein droit dans chaque commune le dix janvier de chaque année paire, selon qu'il y a lieu et suivant le mode établi par la loi.
Elles sont pour objet d'élire, aux époques fixées par la Constitution, les députés du peuple, les sénateurs de la République, les conseillers communaux et de statuer sur les amendements proposés à la Constitution.
Elles ne peuvent s'occuper d'aucun autre objet que celui qui leur est attribué par la présente Constitution.
Elles sont tenues de se dissoudre dès que cet effet est rempli.
Article 108.
La loi prescrit les conditions requises pour exercer le droit de voter dans les assemblées primaires.
Titre IV. Des finances.
Article 109.
Les impôts au profit de l'État et des communes ne peuvent être établis que par une loi.
Aucune imposition à la charge des communes ne peut être établie que de leur consentement formel.
Article 110.
Les lois qui établissent les impôts n'ont de force que pour un an.
Article 111.
Il ne peut être établi de privilège en matière d'impôts. Aucune exemption, aucune augmentation ou diminution d'impôts ne peuvent être établies que par une loi.
Article 112.
Aucune pension, aucune gratification, aucune subvention, aucune allocation quelconque, à la charge du Trésor public, ne peut être accordée qu'en vertu d'une loi proposée par le Pouvoir Exécutif.
Article 113.
Le cumul des fonctions salariées par l'État est formellement interdit, excepté dans l'enseignement secondaire et supérieur.
Article 114.
Le budget de chaque Secrétaire d'État est divisé en chapitres et doit être voté par article.
Le virement est interdit.
Le Secrétaire d'État des Finances est tenu, sous sa responsabilité personnelle, de ne servir chaque mois, à chaque département ministériel, que le douzième des valeurs votées dans son budget, à moins d'une décision du Conseil des Secrétaires d'État pour cas extraordinaires.
Les comptes généraux des recettes et des dépenses de la République sont tenus par le Secrétaire d'État des Finances selon un mode de comptabilité à établir par la loi.
L'exercice administratif commence le premier Octobre et finit le 30 Septembre de l'année suivante.
Article 115.
Chaque année, le Corps Législatif arrête :
1° Le compte des recettes et des dépenses de l'année écoulée ou des années précédentes ;
2° Le budget général de l'État contenant l'aperçu et la portion des fonds désignés pour l'année à chaque Secrétaire d'État. Toutefois, aucune proposition, aucun amendement ne peut être introduit à l'occasion du budget dans le but de réduire ou d'augmenter les appointements des fonctionnaires publics.
Tout changement de cette nature ne peut être effectué que par une modification des lois.
Article 116.
Les comptes généraux et les budgets prescrits par l'article précédent doivent être soumis au Corps Législatif par le Secrétaire d'État des finances, au plus tard dans les huit jours de l'ouverture de la session législative.
L'examen et la liquidation des comptes de l'administration Générale et de tout comptable envers le Trésor public se feront selon le mode établi par la loi.
Article 117.
Au cas où le Corps Législatif, pour quelque raison que ce soit, n'arrête pas le budget pour un ou plusieurs départements ministériels avant son ajournement, le ou les budgets des départements intéressés, en vigueur pendant l'année budgétaire en cours, seront maintenus pendant l'année budgétaire suivante.
Titre V. De la Force publique.
Article 118.
Une force armée désignée sous le nom de Gendarmerie d'Haïti est établie pour maintenir l'ordre, garantir les droits du peuple et exercer la police dans les villes et les campagnes.
Elle est la seule force armée de la République.
Article 119.
Les règlements en vue du maintien de la discipline dans la Gendarmerie et de la répression des délits commis par son personnel seront établis par le Pouvoir Exécutif. Ils auront force de loi.
Ces règlements établiront l'organisation des cours martiales de Gendarmerie, prescriront leurs pouvoirs et détermineront les obligations de leurs membres et les droits des individus qui doivent être jugés par elles.
Les jugements des cours martiales de Gendarmerie ne sont sujets qu'à la révision par le Tribunal de Cassation, et seulement sur les questions de juridiction et d'excès de pouvoir.
Titre VI. Dispositions générales.
Article 120.
Les couleurs nationales sont le bleu et le rouge placés horizontalement.
Les armes de la République sont : le palmiste surmonté du bonnet de la liberté, orné d'un trophée avec la légende : « L'Union fait la force. »
Article 121.
Aucun serment ne peut être imposé qu'en vertu de la Constitution ou d'une loi.
Article 122.
Les fêtes nationales sont : celle de l'Indépendance, le 1er janvier, et celle de l'Agriculture, le 1er mai.
Les fêtes légales sont déterminées par la loi.
Article 123.
Aucune loi, aucune arrêté ou règlement d'administration publique n'est obligatoire qu'après avoir été publié dans la forme déterminée par la loi.
Article 124.
Toutes les élections se feront au scrutin secret.
Article 125.
L'état de siège ne peut être déclaré qu'en cas de péril imminent pour la sécurité extérieure ou intérieure.
L'acte du Président de la République qui déclare l'état de siège doit être signé par la majorité des Secrétaires d'État présents à la Capitale.
Il en est rendu compte à l'ouverture des Chambres par le Pouvoir Exécutif.
Article 126.
Les effets de l'état de siège sont réglés par une loi spéciale.
Article 127.
La présente Constitution et tous les traités actuellement en vigueur ou à conclure dans la suite, et toutes les lois décrétées conformément à cette Constitution ou à ces traités constituent la loi du pays et leur supériorité relative est déterminée par l'ordre dans lequel ils sont mentionnés.
Toutes les dispositions de lois qui ne sont pas contraires aux prescriptions de cette Constitution, aux traités actuellement en vigueur ou à conclure dans la suite, sont maintenues jusqu'à ce qu'elles aient été formellement abrogées ou amendées ; mais celles qui y sont contraires sont et demeurent abrogées.
Titre VII. De la révision de la Constitution.
Article 128.
Les amendements à la Constitution doivent être adoptés par la majorité des suffrages de tous les électeurs de la République. Chacune des deux branches du Pouvoir Législatif, ou le Président de la République, par la voie d'un Message au Corps Législatif, peut proposer des amendements à la présente Constitution.
Les amendements proposés ne seront soumis à la ratification populaire qu'après leur adoption par la majorité des deux tiers de chaque Chambre Législative siégeant séparément.
Ces amendements seront alors publiés immédiatement au « Moniteur ».
Durant les trois mois précédant le vote, le texte des amendements proposés sera affiché par chaque Magistrat Communal dans les principaux lieux publics de sa commune, et sera imprimé et publié deux fois par mois dans les journaux.
A la prochaine réunion biennale des Assemblées primaires, les amendements proposés seront soumis au suffrage, amendement par amendement, par oui ou par non, au scrutin secret, distinct, et ceux des amendements qui auront obtenu la majorité absolue des suffrages dans tout le territoire de la République deviendront partie intégrante de la Constitution dès la date de la réunion du Corps Législatif.
Article spécial.
Tous les actes du Gouvernement des États-Unis pendant son occupation militaire en Haïti sont ratifiés et valides.
Aucun Haïtien ne peut être passible de poursuites civiles ou criminelles pour aucun acte exécuté en vertu des ordres de l'Occupation ou sous son autorité.
Les actes des cours martiales de l'Occupation, sans toutefois porter atteinte au droit de grâce, ne seront pas sujets à révision.
Les actes du Pouvoir Exécutif, jusqu'à promulgation de la présente Constitution, sont également ratifiés et valides.
Titre VIII. Dispositions transitoires.
Article A.
La durée du mandat du citoyen Président de la République au moment de l'adoption de la présente Constitution prendra fin le 15 mai mil neuf cent vingt-deux.
Article B.
La durée du mandat des conseillers communaux existant au moment de l'adoption de la présente Constitution prendra fin en janvier mil neuf cent vingt.
Article C.
Les premières élections des membres du Corps Législatif, après l'adoption de la présente Constitution, auront lieu le dix janvier d'une année paire.
L'année sera fixée par décret du Président de la République publié au moins trois mois avant la réunion des assemblées primaires.
La session du Corps Législatif élu commencera à la date constitutionnelle qui suit immédiatement ces premières élections.
Article D.
Un Conseil d'État, institué d'après les mêmes principes que celui du décret du 5 avril 1916 se composant de vingt-et-un membres répartis entre les différents départements, exercera la Pouvoir Législatif jusqu'à la constitution du Corps Législatif, époque à laquelle le Conseil d'État cessera d'exister.
Article E.
L'inamovibilité des juges est suspendue pendant un période de six mois à partir de la promulgation de la présente Constitution.
AU NOM DE LA RÉPUBLIQUE
Le Président de la République ordonne que la Constitution ci-dessus, soumise au suffrage populaire, ratifiée le 12 Juin 1918, soit revêtue du sceau de la République, imprimée, publiée et exécutée.
Donné au Palais national, à Port-au-Prince, le 19 Juin 1918, an 115e de l'Indépendance.
DARTIGUENAVE.
Par le président :
Osmin Cham, Secrétaire d'État de l'Intérieur et des Cultes ;
Dr. Edmond Héraux, Secrétaire d'État des Finances et du Commerce ;
Furcy Chatelain, Secrétaire d'État des Travaux publics et de l'Agriculture ;
Edmond Dupuy, Secrétaire d'État des Relations extérieures et de la Justice ;
Auguste Scott, Secrétaire d'État de l'Instruction publique.
Pour obtenir davantage d'informations sur le pays et sur le texte ci-dessus,
voir la fiche Haïti.
© - 2014 - Pour toute information complémentaire, pour signaler une erreur ou correspondre avec nous,
adressez-nous un message électronique.