Maroc


Accords franco-espagnols sur le Maroc.

Déclaration signée à Paris, 3 octobre 1904.
Accord secret relatif au Maroc.
Convention en vue de préciser la situation respective des deux pays à l'égard de l'Empire chérifien, 27 novembre 1912.

    Au début du XXe siècle, la situation précaire du Maroc attise la convoitise des puissances européennes, notamment la France et l'Espagne, qui, dès 1904, conviennent d'un partage éventuel du pays. La vive réaction de l'empereur d'Allemagne qui se rend immédiatement à Tanger pour affirmer son intention de défendre les intérêts du Reich, conduit alors à la réunion à Algésiras, pour dénouer la crise, d'une conférence des douze puissances intéressées, qui concluent un accord afin de maintenir le principe de la « porte ouverte » et d'imposer au sultan les réformes jugées nécessaires.
    La France parvient néanmoins à obtenir satisfaction : après l'Entente cordiale avec le Royaume-Uni et un accord avec l'Italie ; après le traité du 4 novembre 1911 avec l'Allemagne, moyennant la cession de vastes territoires en Afrique équatoriale, le traité de Fès, le 30 mars 1912, instaure le protectorat français sur le Maroc. Un accord de partage est alors conclu avec l'Espagne, le 27 novembre 1912, qui définit les trois zones d'influence espagnole, au Nord, au Sud, et autour d'Ifni. Par ailleurs, la zone de Tanger est soumise à un régime particulier qui sera plus tard précisé par la convention de Paris du 18 décembre 1923. Ces différents accords régissent le Maroc jusqu'à la reconnaissance de l'indépendance du pays en 1956.

Sources : Revue générale de droit international public. tome XIX, 1912. Pédone, Paris, d. 19. Triepel Heinrich, Nouveau recueil général de traités..., 3e série, tome VII, Leipzig, 1913, p. 323.


Déclaration signée à Paris, 3 octobre 1904.

Le gouvernement de la République française et S. M. le Roi d'Espagne, voulant fixer l'étendue des droits et la garantie des intérêts qui résultent pour la France de ses possessions algériennes, et pour l'Espagne de ses possessions sur la côte du Maroc, et le gouvernement de S. M. le Roi d'Espagne ayant, en conséquence, donné son adhésion à la déclaration franco-anglaise du 8 avril 1904 relative au Maroc et à l'Égypte, dont communication lui avait été faite par le gouvernement de la République française, déclarent qu'ils demeurent fermement attachés à l'intégrité de l'Empire marocain sous la souveraineté du Sultan.

En foi de quoi les soussignés, Son Excellence le ministre des affaires étrangères et Son Excellence l'ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire de S, M. le Roi d'Espagne près le Président de la République française, dûment autorisés à cet effet, ont dressé la présente déclaration qu'ils ont revêtue de leurs cachets.

Fait en double exemplaire à Paris, le 3 octobre 1904.

Delcassé.
F. de Leon y Castillo.


Accord secret relatif au Maroc.

(3 octobre 1904)

Le Président de la République française et S. M. le Roi d'Espagne, voulant fixer l'étendue des droits et la garantie des intérêts qui résultent pour la France de ses possessions algériennes, et pour l'Espagne de ses possessions sur la côte du Maroc, ont décidé de conclure une convention et ont nommé à cet effet, pour leurs plénipotentiaires, savoir :
 
Le Président de la République française, S. E. M. Théophile Delcassé, député, ministre des affaires étrangères de la République française, etc.
Et S. M. le Roi d'Espagne, S. E. M. Leon y Castillo, Marquis dei Muni, son ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire près le Président de la République française, etc. ;

Lesquels, après s'être communiqué leurs pleins pouvoirs, trouvés en bonne et due forme, sont convenus des articles suivants :

I. L'Espagne adhère, aux termes de ia présente convention, à la déclaration franco-anglaise du 8 avril 1904 relative au Maroc et à l'Égypte.

II. La région située à l'Ouest et au Nord de la ligne ci-après déterminée constitue la sphère d'influence qui résulte pour l'Espagne de ses possessions sur la cote marocaine de la Méditerranée.
Dans cette zone est réservée à l'Espagne la même action qui est reconnue à la France par le deuxième paragraphe de l'article 2 de la déclaration
du 8 avril 1904 relative au Maroc et à l'Égypte.
Toutefois, tenant compte des difficultés actuelles et de l'intérêt réciproque qu'il y a à les aplanir, l'Espagne déclare qu'elle n'exercera cette action qu'après accord avec la France pendant la première période d'application de la présente convention, période qui ne pourra pas excéder quinze ans à partir de la signature de la convention.
De son côté, pendant la même période; la France, désirant que les droits et les intérêts reconnus à l'Espagne par ta présente convention soient toujours respectés, fera part préalablement au gouvernement du Roi de son action près du Sultan du Maroc en ce qui concerne la sphère d'influence espagnole.
Cette première période expirée, et tant que durera le statu quo, l'action de la France près du gouvernement marocain, en ce qui concerne la sphère d'influence réservée à l'Espagne, ne s'exercera qu'après accord avec le gouvernement espagnol.
Pendant la première période, le gouvernement de ta République française fera son possible pour que, dans deux des ports à douanes de la région ci-après déterminée le délégué du représentant général des porteurs de l'emprunt marocain du 12 juillet 1904 soit de nationalité espagnole.
Partant de l'embouchure de la Moulouya, dans la mer Méditerranée, la ligne visée ci-dessus remontera te thalweg de ce fleuve jusqu'à l'alignement de la crête des hauteurs les plus rapprochées de ta rive gauche de l'oued Defia. De ce point, et sans pouvoir, en aucun cas, couper te cours de la Moulouya, la ligne de démarcation gagnera, aussi directement que possible, la ligne de faite séparant les bassins de la Mouiouya de l'oued Inaouen de celui de l'oued Kert, puis elle continuera vers l'Ouest par la ligne de faite séparant les bassins de l'oued Inaouen et de l'oued Sebou de ceux de l'oued Kert et de l'oued Ouergha, pour gagner par la crête la plus septentrionale le djebel Moulai-Bou-Chta. Elle remontera ensuite vers le Nord, en se tenant à une distance d'au moins 25 kilomètres à l'Est de la route de Fez à Kzar-el-Kebir, par Ouezzan, jusqu'à la rencontre de l'oued Loukkos, ou oued El Kous, dont elle descendra le thalweg jusqu'à une distance de 5 kilomètres en aval du croisement de cette rivière avec la route précitée de Ksar-el-Kebir, par Ouzzan. De ce point, elle gagnera aussi directement que possible le rivage de l'océan Atlantique, au-dessus de la lagune de Ez-Terea. Cette délimitation est conforme à la délimitation tracée sur la carte annexée à la présente convention sous le n* 1.

III. Dans le cas où l'état politique du Maroc et le gouvernement chérifien ne pourraient plus subsister, ou si, par la faiblesse de ce gouvernement et par son impuissance persistante à amener la sécurité et l'ordre public, ou pour toute autre cause à constater d'an commun accord, le maintien du statu quo devenait impossible, l'Espagne pourrait exercer librement son action dans la région délimitée à l'article précèdent et qui constitue dès à présent sa sphère d'influence.

IV. Le gouvernement marocain ayant, par l'article 8 du traité du 26 avril 1860, concédé à l'Espagne un établissement à Santa-Cruz-
de-Mar-Pequena (Ifni), Il est entendu que le territoire de cet établissement ne dépassera pas le cours de l'oued Tazerouait, depuis sa source jusqu'à son confluent avec l'oued Mesa, et le cours de l'oued Mesa, depuis ce confluent jusqu'à la mer, selon la carte n° 2 annexée à la présente convention.

V. Pour compléter la délimitation indiquée par l'article premier de la convention du 27 juin 1900, il est entendu que la démarcation entre tes sphères d'influence française et espagnole partira de l'intersection du méridien 14°20' ouest de Paris avec le 26° de latitude nord qu'elle suivra vers l'Est jusqu'à sa rencontre avec le méridien 11° ouest de Paris. Elle remontera ce méridien jusqu'à sa rencontre avec l'oued Draa, puis le thalweg de l'oued Draa jusqu'à sa rencontre avec le méridien 10° ouest de Paris, enfin le méridien 10° ouest de Paris jusqu'à la ligne de faite entre les bassins de l'oued Draa et de l'oued Sous, et suivra, dans la direction de l'Ouest, la ligne de faite entre les bassins de l'oued Draa et de l'oued Sous, puis entre les bassins côtiers de l'oued Mesa et de l'oued Noun, jusqu'au point le plus rapproché de la source de l'oued Tazerouait. Cette délimitation est conforme à la délimitation tracée sur la carte numéro déjà citée et annexée à la présente convention.

VI. Les articles 4 et 5 seront applicables en même temps que l'article 2 de la présente convention. Toutefois le gouvernement de la République française admet que l'Espagne s'établisse à tout moment dans la partie définie à l'article 4, à la condition de s'être préalablement entendue avec le Sultan. De même, le gouvernement de la République française reconnait des maintenant au gouvernement espagnol pleine liberté d'action sur la région comprise entre les degrés 26° et 27°40' de latitude nord et le méridien 11° ouest de Paris, qui sont en dehors du territoire marocain.

VII. L'Espagne s'engage à n'aliéner ni à céder sous aucune forme. même à titre temporaire, tout ou partie des territoires désignés aux articles 2, 4 et 5 de la présente convention.

VIII. Si, dans l'application des articles 2, 4 et 5 de la présente convention, une action militaire s'imposait à l'une des deux parties contractantes, elle en avertirait aussitôt l'autre partie.
En aucun cas, il ne sera fait appel au concours d'une puissance étrangère.

IX. La ville de Tanger gardera le caractère spécial que lui donnent la présence du corps diplomatique et ses institutions municipales et sanitaires.

X. Tant que durera l'état politique actuel, les entreprises de travaux publics, chemins de fer, routes. canaux, partant d'un point du Maroc pour aboutir dans la région visée à l'article 2 vice-versa seront exécutées par des sociétés que pourront constituer des Français et des Espagnols.
De même, il sera loisible aux Français et aux Espagnols au Maroc de s'associer pour l'exploitation des mines, carrières, et généralement d'entreprises d'ordre économique.

XI. Les écoles et les établissements espagnols actuellement existants au Maroc seront respectés. La circulation de la monnaie espagnole ne sera ni empêchée ni entravée. Les Espagnols continueront de jouir au Maroc des droits que leur assurent les traités, conventions et usages en vigueur, y compris le droit de navigation et de pêche dans les eaux et ports marocains.

XII. Les Français jouiront dans les régions désignées aux articles 2, 4 et 5 de la présente convention des mêmes droits qui sont, par l'article précèdent, reconnus aux Espagnols dans le reste du Maroc.

XIII. Dans le cas où le gouvernement marocain en interdirait la vente sur son territoire, les deux puissances contractantes s'engagent à prendre dans leurs possessions d'Afrique les mesures nécessaires pour empêcher que les armes et les munitions soient introduites en contrebande au Maroc.

XIV. Il est entendu que la zone visée au paragraphe premier de l'article 7 de la déclaration franco-anglaise du 8 avril 1904, relative au Maroc et à l'Égypte, commence sur la côte à trente kilomètres au Sud-Est de Méiilla.

XV. Dans le cas où la dénonciation prévue par le paragraphe 3 de l'article 4 de la déclaration franco-anglaise relative au Maroc et à l'Égypte aurait en lieu, les gouvernements français et espagnol se concerteront pour l'établissement d'un régime économique qui réponde particulièrement à leurs intérêts réciproques.

XI. La présente convention sera publiée lorsque les deux gouvernements jugeront, d'un commun accord, qu'elle peut l'être sans inconvénients. En tout cas, elle pourra être publiée par l'un des deux gouvernements à l'expiration de la première période de son application, période qui est définie au paragraphe 3 de l'article 2.

En foi de quoi les plénipotentiaires respectifs ont signé la présente convention et l'ont revêtue de leurs cachets.

Fait en double exemplaire à Paris, le 3 octobre 1904.

Delcassé.
Leon y Castillo.


Convention en vue de préciser la situation respective des deux pays à l'égard de l'Empire chérifien

(signée à Madrid, le 27 novembre 1912)

Le Président de la République française et S. M. le roi d'Espagne,

Désireux de préciser la situation respective de la France et de l'Espagne à l'égard de l'empire chérifien,

Considérant, d'autre part, que la présente convention leur offre une occasion propice d'affirmer leurs sentiments d'amitié réciproque et leur volonté de mettre en harmonie leurs intérêts au Maroc,

Ont nommé à cet effet pour leurs plénipotentiaires, savoir : Le Président de la République française,
S. Exe. M. Geoffray (Léon-Marcel-Isidore), ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire près S. M. le roi d'Espagne, commandeur de l'ordre national de la Légion d'honneur, etc., et

S. M. le roi d'Espagne,
S. Exe. Don Manuel Garcia Prieto marquis de Alhucemas, sénateur à vie, ministre d'État, chevalier grand-croix de l'ordre civil d'Alphonse XII, décoré de la médaille d'or d'Alphonse XllI, etc.

Lesquels, après s'être communiqué leurs pleins pouvoirs respectifs, trouvés en bonne et due forme, ont arrêté et signé les articles suivants :

Article premier.

Le Gouvernement de la République française reconnaît que, dans la zone d'influence espagnole, il appartient à l'Espagne de veiller à la tranquillité de ladite zone et de prêter son assistance au gouvernement marocain pour l'introduction de toutes les réformes administratives, économiques, financières, judiciaires et militaires dont il a besoin, comme aussi pour tous les règlements nouveaux et les modifications aux règlements existants que ces réformes comportent, conformément à la déclaration franco-anglaise du 8 avril 1904 et à l'accord franco-allemand du 4 novembre 1911.

Les régions comprises dans la zone d'influence déterminée à l'article 2 resteront placées sous l'autorité civile et religieuse du sultan, suivant les conditions du présent accord.

Ces régions seront administrées, sous le contrôle d'un haut commissaire espagnol, par un khalifa choisi par le sultan sur une liste de deux candidats présentés par le gouvernement espagnol. Les fonctions du khalifa ne seront maintenues ou retirées au titulaire qu'avec le consentement du gouvernement espagnol.

Le khalifa résidera dans la zone d'influence espagnole et habituellement à Tétouan ; il sera pourvu d'une délégation générale du sultan, en vertu de laquelle il exercera les droits appartenant à celui-ci.

Cette délégation aura un caractère permanent. En cas de vacance, les fonctions de khalifa seront, provisoirement, et d'office, remplies par le pacha de Tétouan.

Les actes de l'autorité marocaine dans la zone d'influence espagnole seront contrôlés par le haut commissaire espagnol et ses agents. Le haut commissaire sera le seul intermédiaire dans les rapports que le khalifa, en qualité de délégué de l'autorité impériale dans la zone espagnole, aura à entretenir avec les agents officiels étrangers étant donné d'ailleurs qu'il ne sera pas dérogé à l'article 5 du traité franco-chérifien du 30 mars 1912.

Le gouvernement de S. M. le roi d'Espagne veillera à l'observation des traités et spécialement des clauses économiques et commerciales insérées dans l'accord franco-allemand du 4 novembre 1911.

Aucune responsabilité ne pourra être imputée au gouvernement chérifien du chef de réclamations motivées par des faits qui se seraient produits sous l'administration du khalifa dans la zone d'influence espagnole.

Article 2.

Au nord du Maroc, la frontière séparative des zones d'influence française et espagnole partira de l'embouchure de la Moulouya et remontera le thalweg de ce fleuve jusqu'à 1 kilomètre en aval de Mechra Killa. De ce point, la ligne de démarcation suivra jusqu'au djebel Beni Hassen le tracé fixé par l'article 2 de la convention du 3 octobre 1904.

Dans le cas où la commission mixte de délimitation visée au paragraphe premier de l'article 4 ci-dessous constaterait que le marabout de Sidi Maarouf se trouve dépendre de la fraction Sud des Beni-Bouyahi, ce point serait attribué à la zone française. Toutefois, la ligne de démarcation des deux zones, après avoir englobé ledit marabout, n'en passerait pas à plus de 1 kilomètre au Nord et à plus de 2 kilomètres à l'Ouest pour rejoindre la ligne de démarcation telle qu'elle est déterminée au paragraphe précédent.

Du djebel Beni-Hassen, la frontière rejoindra l'oued Ouergha au nord de la djemaa des Cheurfa-Tafraout, en amont du coude formé par la rivière. De là, se dirigeant vers l'Ouest, elle suivra la ligne des hauteurs dominant la rive droite de l'oued Ouergha jusqu'à son intersection avec la ligne Nord-Sud définie par l'article 2 de la convention de 1904. Dans ce parcours, la frontière contournera le plus étroitement possible la limite Nord des tribus riveraines de l'Ouergha et la limite Sud de celles qui ne sont pas riveraines, en assurant une communication militaire non interrompue entre les différentes régions de la zone espagnole.

Elle remontera ensuite vers le Nord en se tenant à une distance d'au moins 25 kilomètres à l'est de la route de Fez à El-Ksar-el-Kebir par Ouezzan, jusqu'à la rencontre de l'oued Loukkos, dont elle descendra le thalweg jusqu'à la limite entre les tribus Sarsar et Tlig. De ce point, elle contournera le djebel Ghani, laissant cette montagne dans la zone espagnole, sous réserve qu'il n'y sera pas construit de fortifications permanentes. Enfin, la frontière rejoindra le parallèle 35° de latitude Nord entre le douar Mgaria et la Marya de Sidi-Slama, et suivra ce parallèle jusqu'à la mer.

Au sud du Maroc, la frontière des zones française et espagnole sera définie par le thalweg de l'oued Draa, qu'elle remontera depuis la mer jusqu'à sa rencontre avec le méridien 11° Ouest de Paris ; elle suivra ce méridien vers le Sud jusqu'à sa rencontre avec le parallèle 27° 40' de latitude Nord. Au sud de ce parallèle, les articles 5 et 6 de la convention du 3 octobre 1904 resteront applicables. Les régions marocaines situées au nord et à l'est de la délimitation visée dans le présent paragraphe appartiendront à la zone française.

Article 3.

Le gouvernement marocain ayant, par l'article 8 du traité du 26 avril 1860, concédé à l'Espagne un établissement à Santa-Cruz de-Mar-Pequena (Ifni), il est entendu que le territoire de cet établissement aura les limites suivantes : au Nord, l'oued Bou-Sedra, depuis son embouchure ; au Sud, l'oued Noun, depuis son embouchure ; à l'Est, une ligne distante approximativement de 25 kilomètres de la côte.

Article 4.

Une commission technique, dont les membres seront désignés en nombre égal par les gouvernements français et espagnol, fixera le tracé exact des délimitations spécifiées aux articles précédents. Dans son travail, la commission pourra tenir compte non seulement des accidents topographiques, mais encore des contingences locales.

Les procès-verbaux de la commission n'auront valeur exécutive qu'après ratification des deux gouvernements.

Toutefois, les travaux de la commission ci-dessus prévue ne seront pas un obstacle à la prise de possession immédiate par l'Espagne de son établissement d'Ifni.

Article 5.

L'Espagne s'engage à n'aliéner ni céder sous aucune forme, même à titre temporaire, ses droite dans tout ou partie du territoire composant sa zone d'influence.

Article 6.

Afin d'assurer le libre passage du détroit de Gibraltar, les deux gouvernements conviennent de ne pas laisser élever de fortifications ou d'ouvrages stratégiques quelconques sur la partie de la côte marocaine visée par l'article 7 de la déclaration franco-anglaise du 8 avril 1904 et par l'article 14 de la convention franco-espagnole du 3 octobre de la même année, et comprise dans les sphères d'influence respectives.

Article 7.

La ville de Tanger et sa banlieue seront dotées d'un régime spécial qui sera déterminé ultérieurement; elles formeront une zone comprise dans les limites décrites ci-après :

Partant de Punta-Altares sur la côte Sud du détroit de Gibraltar, la frontière se dirigera en ligne droite sur la crête du djebel Beni-Meyimel, laissant à l'Ouest le village appelé Dzarez-Zeitun, et suivra ensuite la ligne des limites entre le Fabs d'un côté et les tribus de l'Anjera et de Oued-Ras de l'autre côté jusqu'à la rencontre de l'oued Ex-Seghir. De là la frontière suivra le thalweg de l'oued Ex-Seghir puis ceux des oueds M'harhar et Tzahadartz jusqu'à la mer.

Le tout conformément au tracé indiqué sur la carte de l'état-major espagnol, qui a pour titre: « Croquis del Imperio de Marruecos » à l'échelle de 1/100000, édition de 1906.

Article 8.

Les consulats, les écoles et tous les établissements français et espagnols actuellement existants au Maroc seront maintenus.

Les deux gouvernements s'engagent à faire respecter la liberté et la pratique extérieure de tout culte existant au Maroc.

Le gouvernement de S. M. le roi d'Espagne, en ce qui le concerne, fera en sorte que les privilèges religieux exercés actuellement par le clergé régulier et séculier espagnol ne subsistent plus dans la zone française. Toutefois, dans cette zone, les missions espagnoles conserveront leurs établissements et propriétés actuels, mais le gouvernement de S. M. le roi d'Espagne ne s'opposera pas à ce que des religieux de nationalité française y soient affectés. Les nouveaux établissements que ces missions fonderaient seront confiés à des religieux français.

Article 9.

Aussi longtemps que le chemin de fer Tanger-Fez ne sera pas construit, il ne sera apporté aucune entrave au passage des convois de ravitaillement destinés au maghzen, ni aux voyages des fonctionnaires chérifiens ou étrangers entre Fez et Tanger et inversement, non plus qu'au passage de leur escorte, de leurs armes et bagages, étant entendu que les autorités de la zone traversée auront été préalablement avisées. Aucune taxe ou aucun droit spécial de transit ne pourra être perçu pour ce passage.

Après la construction du chemin de fer Tanger-Fez, celui-ci pourra être utilisé pour ces transports.

Article 10.

Les impôts et ressources de toutes sortes dans la zone espagnole seront affectés aux dépenses de ladite zone.

Article 11.

Le gouvernement chérifien ne pourra être appelé à participer à aucun titre aux dépenses de la zone espagnole.

Article 12.

Le gouvernement de S. M. le roi d'Espagne ne portera pas atteinte aux droits, prérogatives et privilèges des porteurs de titres des emprunts 1904 et 1910 dans sa zone d'influence.

En vue de mettre l'exercice de ces droits en harmonie avec la nouvelle situation, le Gouvernement de la République usera de son influence sur le représentant des porteurs pour que le fonctionnement des garanties dans ladite zone s'accorde avec les dispositions suivantes :

La zone d'influence espagnole contribuera aux charges des emprunts 1904 et 1910 suivant la proportion que les ports de ladite zone, déduction faite des 500,000 p. h. dont il sera parlé plus loin, fournissent à l'ensemble des recettes douanières des ports ouverts au commerce.

Cette contribution est fixée provisoirement à 7,95 p. 100, chiffre basé sur les résultats de l'année 1911. Elle sera révisable tous les ans à la demande de l'une ou de l'autre des parties.

La révision prévue devra intervenir avant le 15 mai suivant l'exercice qui lui servira de base. Il sera tenu compte de ses résultats dans le versement à effectuer par le gouvernement espagnol le 1er juin, ainsi qu'il est dit ci-après.

Le gouvernement de S. M. le roi d'Espagne constituera chaque année, à la date du 1er mars, pour le service de l'emprunt 1910, et à la date du 1er juin, pour le service de l'emprunt 1904, entre les mains du représentant des porteurs des titres de ces deux emprunts, le montant des annuités fixées au paragraphe précédent. En conséquence, l'encaissement au titre des emprunts sera suspendu dans la zone espagnole par application des articles 20 du contrat du 12 juin 1904 et 19 du contrat du 17 mai 1910.

Le contrôle des porteurs et les droits s'y rapportant, dont l'exercice aura été suspendu en raison des versements du gouvernement espagnol, seront rétablis tels qu'ils existent actuellement dans le cas où le représentant des porteurs aurait à reprendre l'encaissement direct conformément aux contrats.

Article 13.

D'autre part, il y a lieu d'assurer à la zone française et à la zone espagnole le produit revenant à chacune d'elles sur les droits de douane perçus à l'importation.

Les deux gouvernements conviennent :

1° Que, balance faite des recettes douanières que chacune des deux administrations zonières encaissera sur les produits introduits par ses douanes à destination de l'autre zone, il reviendra à la zone française une somme totale de 500,000 pesetas hassani se décomposant ainsi:
a) Une somme forfaitaire de 300,000 pesetas hassani applicable aux recettes des ports de l'Ouest ;
b) Une somme de 200,000 pesetas hassani, applicable aux recettes de la côte méditerranéenne, sujette à révision lorsque le fonctionnement des chemins de fer fournira des éléments exacts de calcul. Cette révision éventuelle pourrait s'appliquer aux versements antérieurement effectués, si le montant de ceux-ci était supérieur à celui des versements à réaliser dans l'avenir ; toutefois, les reversements dont il s'agit ne porteraient que sur le capital et ne donneraient pas lieu à un calcul d'intérêts.

Si la révision ainsi opérée donne lieu à une réduction des recettes françaises relatives aux produits douaniers des ports de la Méditerranée, elle entraînera ipso facto le relèvement de la contribution espagnole aux charges des emprunts susmentionnés ;

2° Que les recettes douanières encaissées par le bureau de Tanger devront être réparties entre la zone internationalisée et les deux autrea zones, au prorata de la destination finale des marchandises. En attendant que le fonctionnement des chemins de fer permette une exacte répartition des sommes dues à la zone française et à la zone espagnole, le service des douanes versera en dépôt à la banque d'État l'excédent de ces recettes, payement fait de la part de Tanger.

Les administrations douanières des deux zones s'entendront par l'entremise de représentants, qui se réuniront périodiquement à Tanger, sur les mesures propres à assurer l'unité d'application des tarifs. Ces délégués se communiqueront à toutes fins utiles les informations qu'ils auront pu recueillir tant sur la contrebande que sur les opérations irrégulières éventuellement effectuées dans les bureaux des douanes.

Les deux Gouvernements s'efforceront de mettre en vigueur à la date du 1er mars 1913 les mesures visées sous le présent article.

Article 14.

Les gages affectés en zone espagnole à la créance française, en vertu de l'accord franco-marocain du 21 mars 1910, seront transférés au profit de la créance espagnole et réciproquement les gages affectés en zone française à la créance espagnole, en vertu du traité hispano-marocain du 16 novembre 1910, seront transférés au profit de la créance française. En vue de réserver à chaque zone le produit des redevances minières qui doivent naturellement lui revenir, il est entendu que les redevances proportionnelles d'extraction appartiendront à la zone où la mine est située, lors même qu'elles seraient recouvrées à la sortie par une douane de l'autre zone.

Article 15.

En ce qui concerne les avances faites par la banque d'État sur le 5 p. 100 des douanes, il a paru équitable de faire supporter par les deux zones non seulement le remboursement desdites avances, mais d'une manière générale les charges de la liquidation du passif actuel du maghzen.

Dans le cas où cette liquidation se ferait au moyen d'un emprunt à court ou à long terme, chacune des deux zones contribuerait au payement des annuités de cet emprunt (intérêts et amortissement) dans une proportion égale à celle qui a été fixée pour la répartition entre chaque zone des charges des emprunts de 1904 et 1910.

Le taux de l'intérêt, les délais d'amortissement et de conversion, les conditions de l'émission et, s'il y a lieu, les garanties de l'emprunt seront arrêtées après entente entre les deux gouvernements.

Les dettes contractées après la signature du présent accord seront exclues de cette liquidation.

Le montant total du passif à liquider comprend notamment : 1° les avances de la banque d'État gagées sur le 5 p. 100 du produit des douanes ; 2° les dettes liquidées par la commission instituée en vertu du règlement du corps diplomatique de Tanger en date du 29 mai 1910. Les deux gouvernements se réservent d'examiner conjointement les créances autres que celles visées ci-dessus sous les numéros 1 et 2, de vérifier leur légitimité, et, au cas où le total du passif dépasserait sensiblement la somme de 25 millions de francs, de les comprendre ou non dans la liquidation envisagée.

Article 16.

L'autonomie administrative des zones d'influence française et espagnole dans l'empire chérifien ne pouvant porter atteinte aux droits, prérogatives et privilèges concédés, conformément à l'acte d'Algésiras, à la banque d'État du Maroc, pour tout le territoire de l'empire, par le gouvernement marocain, la banque d'État du Maroc continuera de jouir dans chacune des deux zones de tous les droits qu'elle tient des actes qui la régissent, sans diminution ni réserve. L'autonomie des deux zones ne pourra pas faire obstacle à son action et les deux gouvernements faciliteront à la banque d'État le libre et complet exercice de ses droits.

La banque d'État du Maroc pourra, d'accord avec les deux puissances intéressées, modifier les conditions de son fonctionnement en vue de les mettre en harmonie avec l'organisation territoriale de chaque zone.

Les deux gouvernements recommanderont à la banque d'État l'étude d'une modification de ses statuts permettant :

1° De créer un second haut commissaire marocain qui serait nommé par l'administration de la zone d'influence espagnole, après entente avec le conseil d'administration de la banque ;

2° De conférer à ce second haut commissaire, pour sauvegarder les intérêts légitimes de l'administration de la zone espagnole, sans porter atteinte au fonctionnement normal de la banque, des attributions autant que possible identiques à celles qu'exerce le haut commissaire actuel.

Toutes démarches utiles seront faites par les deux gouvernements pour parvenir à la révision régulière, dans le sens indiqué ci-dessus, des statuts de la banque d'État et du règlement de ses rapports avec le gouvernement marocain.

Afin de préciser et de compléter l'entente intervenue entre les deux gouvernements et constatée par la lettre adressée le 23 février 1907 par le ministre des affaires étrangères de la République à l'ambassadeur de S. M. le roi d'Espagne à Paris, le Gouvernement français s'engage, en c« qui concerne la zone espagnole, sous réserve des droits de la banque : 1° à n'appuyer aucune candidature auprès de la banque d'État ; 2° à faire connaître à la banque son désir de voir prendre en considération, pour les emplois de ladite zone, les candidatures de nationalité espagnole.

Réciproquement, le gouvernement espagnol s'engage, en ce qui concerne la zone française, sous réserve des droits de la banque : 1° à n'appuyer aucune candidature auprès de la banque d'État ; 2° à faire connaitre à la banque son désir de voir prendre en considération, pour les emplois de ladite zone, les candidatures de nationalité française.

En ce qui concerne : 1° les actions de la banque qui pourraient appartenir au maghzen ; 2° les bénéfices revenant au maghzen sur les opérations de frappe et de refonte de monnaies, ainsi que sur toutes les autres opérations monétaires (art. 37 de l'acte d'Algésiras), il est entendu qu'il sera attribué à l'administration de la zone espagnole une part calculée d'après le même pourcentage que pour la redevance et les bénéfices du monopole des tabacs.

Article 17.

L'autonomie administrative des zones d'influence française et espagnole dans l'empire chérifien ne pouvant porter atteinte aux droits, prérogatives et privilèges concédés, conformément à l'acte général d'Algésiras, pour tout le territoire de l'empire, par le gouvernement marocain, à la société internationale de régie co-intéressée des tabacs au Maroc, ladite société continuera de jouir, dans chacune des deux zones, de tous les droits qu'elle tient des actes qui la régissent, sans diminution ni réserve. L'autonomie des deux zones ne pourra pas faire obstacle à son action et les deux gouvernements lui faciliteront le libre et complet exercice de ses droits.

Les conditions actuelles de l'exploitation du monopole, et en particulier le tarif des prix de vente, ne pourront être modifiés que d'accord entre les deux gouvernements.

Le Gouvernement français ne fera pas obstacle à ce que le gouvernement royal se concerte avec la régie soit en vue d'obtenir de cette société la rétrocession à des tiers de l'intégralité de ses droits et privilèges, soit en vue de lui racheter à l'amiable, par anticipation, lesdits droits et privilèges. Dans le cas où, comme conséquence du rachat anticipé, le gouvernement espagnol désirerait modifier dans sa zone les conditions générales de l'exploitation du monopole, et, par exemple, s'il voulait réduire les prix de vente, un accord devra intervenir entre les deux gouvernements dans le but exclusif de sauvegarder les intérêts de la zone d'influence française.

Les stipulations qui précèdent s'appliqueront réciproquement dans le cas où le Gouvernement français désirerait faire usage des facultés reconnues ci-dessus au gouvernement espagnol.

La régie pouvant faire objection à un rachat partiel, les deux gouvernements s'engagent dès maintenant à faire exercer dans l'une et l'autre zone, aussitôt que possible (c'est-à-dire le 1er janvier 1933, en prévenant la régie avant le 1*' janvier 1931), le droit de rachat prévu à l'article 24 du cahier des charges. A partir du 1er janvier 1933, chacune des deux zones deviendra libre d'établir, selon ses convenances, les impôts qui font l'objet du monopole.

Les deux gouvernements se mettront d'accord pour obtenir, en respectant le cahier des charges :
a) La création d'un second commissaire nommé par l'administration de la zone d'influence espagnole ;
b) La définition des attributions qui seraient nécessaires à ce second commissaire pour sauvegarder les intérêts légitimes de l'administration de la zone espagnole, sans porter atteinte au fonctionnement normal de la régie ;
c) La répartition, par moitié, entre les deux commissaires de la somme de 5,000 riais makhzani argent versés annuellement par la régie pour le traitement du commissaire.

Afin de maintenir pendant la durée du monopole l'identité du tarif des prix de vente dans les deux zones, les deux gouvernements prennent l'engagement de ne pas assujettir la régie ou ses ayants droit à des impôts nouveaux sans s'être préalablement entendus.

Le produit des amendes prononcées contre la régie pour inexécution du cahier des charges ou abus (art. 31 du cahier des charges) sera attribué au Trésor de la zone dans laquelle les infractions ou abus auront été commis.

Pour le partage de la redevance fixe annuelle et des bénéfices (art. 20 à 23 du cahier des charges), on appliquera un pourcentage qui sera déterminé par la puissance de consommation de la zone espagnole, comparativement à la puissance de consommation totale de l'empire. Cette puissance de consommation sera évaluée d'après les perceptions douanières restant effectivement entre les mains de l'administration de la zone espagnole, compte tenu du reversement prévu à l'article 13 ci-dessus.

Article 18.

En ce qui concerne le comité des valeurs douanières, le comité spécial des travaux publics et la commission générale des adjudications, durant la période où ces comités resteront en vigueur, il sera réservé à la désignation du khalifa de la zone espagnole un des sièges de délégué chérifien dans chacun de ces trois comités.

Les deux gouvernements sont d'accord pour réserver à chaque zone et affecter à ses travaux publics le produit de la taxe spéciale perçue dans ses ports en vertu de l'article 66 de l'acte d'Algésiras.

Les services respectifs seront autonomes.

Sous condition de réciprocité, les délégués de l'administration de la zone française voteront avec les délégués du khalifa dans les questions intéressant la zone espagnole et notamment pour tout ce qui concerne la détermination des travaux à exécuter sur les fonds de la taxe spéciale, leur exécution et la désignation du personnel que cette exécution comporte.

Article 19.

Le Gouvernement de la République française et le gouvernement de Sa Majesté Catholique se concerteront en vue de:

1° Toutes les modifications qui devraient être apportées dans l'avenir aux droits de douane ;

2° L'unification des tarifs postaux et télégraphiques dans l'intérieur de l'empire.

Article 20.

La ligne de chemin de fer Tanger-Fez sera construite et exploitée dans les conditions déterminées par le protocole annexé à la présente convention.

Article 21.

Le Gouvernement de la République française et le gouvernement de Sa Majesté Catholique s'engagent à provoquer la révision, d'accord avec les autres puissances et sur la base de la convention de Madrid, des listes et de la situation des protégés étrangers et des associés agricoles visés par les articles 8 et 16 de cette convention.

Ils conviennent également de poursuivre auprès des puissances signataires toute modification de la convention de Madrid que comporteraient, le moment venu, le changement du régime des protégés et associés agricoles, et éventuellement l'abrogation de la partie de ladite convention concernant les protégés et associés agricoles.

Article 22.

Les sujets marocains originaires de la zone d'influence espagnole seront placés à l'étranger sous la protection des agents diplomatiques et consulaires du l'Espagne.

Article 23.

Pour éviter autant que possible les réclamations diplomatiques, les gouvernements français et espagnol s'emploieront respectivement auprès du sultan et de son khalifat pour que les plaintes portées par des ressortissants étrangers contre les autorités marocaines ou les personnes agissant en tant d'autorités marocaines, et qui n'auraient pu être réglées par l'entremise du consul français ou espagnol et du consul du gouvernement intéressé, soient déférées à un arbitre ad hoc pour chaque affaire, désigné d'un commun accord par le consul de France ou celui d'Espagne et par celui de la puissance intéressée ou, à leur défaut, par les deux gouvernements de ces consuls.

Article 24.

Le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de Sa Majesté Catholique se réservent la faculté de procéder à l'établissement, dans leurs zones respectives, d'organisations judiciaires inspirées de leurs législations. Une fois ces organisations établies et les nationaux et protégés de chaque pays soumis, dans la zone de celui-ci, à la juridiction de ces tribunaux, le Gouvernement de la République française, dans la zone d'influence espagnole, et le gouvernement de S. M. le roi d'Espagne, dans la zone d'influence française, soumettront également à cette juridiction locale leurs nationaux et protégés respectifs.

Tant que le paragraphe 3 de l'article 11 de la convention de Madrid du 3 juin 1880 sera en vigueur, la faculté qui appartient au ministre des affaires étrangères de Sa Majesté Chérifienne de connaître en appel des questions de propriété immobilière des étrangers fera partie, pour ce qui concerne la zone espagnole, de l'ensemble des pouvoirs délégués au Khalifa.

Article 25.

Les puissances signataires s'engagent à prêter, dès maintenant, dans leurs possessions d'Afrique, leur entier concours aux autorités marocaines pour la surveillance et la répression de la contrebande des armes et des munitions de guerre.

La surveillance dans les eaux territoriales des zones respectives française et espagnole sera exercée par les forces organisées par l'autorité locale ou celles du gouvernement protecteur de ladite zone.

Les deux gouvernements se concerteront pour unifier la réglementation du droit de visite.

Article 26.

Les accords internationaux conclus à l'avenir par Sa Majesté Chérifienne ne s'étendront à la zone d'influence espagnole qu'avec le consentement préalable du gouvernement de S. M. le roi d'Espagne.

Article 27.

La convention du 26 février 1904, renouvelée le 3 février 1909, ainsi que la convention générale de la Haye du 18 octobre 1907, s'appliqueront aux différends qui viendraient à s'élever entre les parties contractantes au sujet de l'interprétation et de l'application des dispositions de la présente convention et qui n'auraient pas été réglées par la voie diplomatique ; un compromis devra être dressé et il sera procédé suivant les règles des mêmes conventions en tant qu'il n'y serait pas dérogé par un accord exprès au moment du litige.

Article 28.

Toutes clauses des traités, conventions et accords antérieurs, qui seraient contraires aux stipulations qui précèdent sont abrogées.

Article 29.

La présente convention sera notifiée aux gouvernements signataires de l'acte général de la confédération internationale d'Algésiras.

Article 30.

La présente convention sera ratifiée et les ratifications en seront échangées, à Madrid, dans le plus bref délai.

En foi de quoi, les plénipotentiaires respectifs ont signé le présent traité et y ont apposé leurs cachets.

Fait en double expédition à Madrid, le 27 novembre 1912.

(L. S.) Signé : Geoffray.

(L. S.) Signé : Manuel Garcia Prieto.