Tchad


Colonie française du Tchad.

Décrets du 5 et du 8 septembre 1900 (Journal officiel du 20 septembre 1900, p. 6265).
Décret du 14 février 1906 portant réorganisation des possessions du Congo français et dépendances (JORF, 14 février 1906).
Rapport au Président de la République française suivi du décret du 15 janvier 1910, portant création du Gouvernement général de l'Afrique équatoriale française (JO AEF 1er mars 1910, p. 115).
Décret du 30 juin 1914 (Journal officiel du 17 juillet 1914, p. 6429).
Décret du 14 mai 1915 (Journal officiel du 21 mai 1915, p. 3226).
Décret du 17 mars 1920 (Journal officiel du 20 mars 1920).

    La France étendant son influence vers le nord à partir du Congo, plusieurs régions progressivement conquises à la fin du XIXe siècle forment en 1900 une nouvelle circonscription, sous le nom de « Territoire militaire des pays et protectorats du Tchad », puis simplement en 1903 « Territoire militaire du Tchad ».
    En application du décret du 14 février 1906, le territoire dépend de la nouvelle colonie d'Oubangui-Chari-Tchad, qui vient d'être formée. L'ensemble est ensuite rattaché au Gouvernement général de l'Afrique équatoriale française, lors de sa création, par le décret du 15 janvier 1910. Le Tchad est enfin érigé en colonie en 1920.
    Le Tchad, entre 1945 et 1960, est représenté dans les assemblées parlementaires françaises et il voit ses institutions évoluer rapidement. Territoire d'Outre-Mer en 1946, puis État membre de la Communauté en 1958, le Tchad devient indépendant le 11 août 1960.
   
   Voir la page sur L'évolution de la France d'outre-mer, entre 1945 et 1960.


Décret du 5 septembre 1900.

RAPPORT AU PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

Paris, le 5 septembre 1900,

Monsieur le Président,

Bien que la situation générale du Congo français ait tendance à s'améliorer, l'administration de la colonie n'a pu apporter encore dans les finances locales tout l'ordre et toute la clarté nécessaires. Le budget de nos possessions,en effet, a été dans ces dernières années et se trouve encore grevé de lourdes charges que lui impose, dans un ordre strictement politique, l'établissement de l'influence française au centre africain. C'est par ces dépenses de souveraineté que se trouve absolument absorbé pour la plus grosse part la subvention annuelle votée par le Parlement et dont la fraction la plus importante devrait normalement être destinée aux frais d'administration du Congo proprement dit ; c'est leur nécessité subite ou leur extension imprévue qui trop souvent a jeté la perturbation dans les finances locales en compromettant l'équilibre du budget.

Cette période de conquête et d'acquisition territoriale, que les récents événements du Chari permettent d'espérer définitivement close à bref délai, se continue néanmoins présentement, pour l'affermissement de notre influence, dans la partie septentrionale de nos possessions.

Dans cette dernière région, où l'action politique ne peut faire place dés maintenant à l'exploitation commerciale, la sûreté de notre établissement exige et doit imposer pendant quelque temps encore, avec le maintien d'une occupation militaire effective, des dépenses relativement élevées.

Tant pour le contrôle de l'État et la sécurité des finances locales que pour la conservation des positions acquises et la protection de nos alliés de l'Afrique centrale, il importe donc de prévoir des dispositions nouvelles. Il m'a paru nécessaire, dès lors, d'organiser ces territoires en une circonscription spéciale prenant le nom de « territoire militaire des pays et protectorat du Tchad». Les dépenses militaires de toute nature figureraient au budget colonial ; les recettes et les dépenses formeraient un budget autonome. Enfin, en raison du l'éloignement, il
est désirable que le commissaire du Gouvernement chargé de la direction du nouveau territoire ait l'ordonnancement des dépenses du budget autonome, sous l'autorité du commissaire général dont il relève directement.

Soustraits de la sorte à toute cause permanente d'incertitude financière et de complication administrative, les territoires du Congo proprement dit, y compris ceux de l'Oubangui dont l'organisation spéciale a perdu sa raison d'être, pourront plus aisément faire face a. leurs dépenses propres avec une subvention de l'État dès maintenant très réduite et que des diminutions successives permettront de supprimer complètement dans quelques années. La situation nouvelle de ces territoires offrira notamment l'avantage de mettre les autorités administratives en garde contre toute mesure inopportune et imprévoyante, assurées qu'elles seront aujourd'hui de ne pouvoir excuser le déficit des finances locales par les initiatives forcées et les imprévisions inévitables d'une action politique, Enfin le Parlement pourra toujours discerner nettement l'importance relative et l'objet exact des concours financiers qui lui seront demandés.

C'est dans cet esprit, monsieur le Président, que j'ai préparé et que j'ai l'honneur de soumettre à votre haute sanction le projet de décret ci-annexé,

Je vous prie d'agréer, monsieur le Président, l'hommage de mon profond respect.

Le ministre des colonies,
ALBERT DECRAIS.

Le Président de la République française,

Sur le rapport du ministre des colonies,

Vu l'article 18 du sénatus-consulte du 3 mai 1854 ;
Vu le décret du 20 novembre 1882 sur le régime financier des colonies ;
Vu le décret du 20 octobre 1894 sur l'organisation des territoires de l'Oubangui ;
Vu le décret du 28 septembre 1897 sur l'organisation du Congo français,

Décrète :

Article premier.

Les territoires du Congo français ci-après déterminés sont constitués en une circonscription spéciale dite « territoire militaire des pays et protectorats du Tchad », et qui est placée sous la direct on d'un commissaire du Gouvernement relevant lui-même directement du commissaire général du Gouvernement au Congo français.
Cette circonscription comprend :
1° Le bassin de la rivière Kémo ;
2° Au nord, le bassin du Chari et de ses affluents, à l'exception des concessions déjà accordées, ainsi que les pays placés sous la domination française en vertu des conventions du 14 juin 1898 et du 21 mars 1899, y compris le Baguirmi, le Ouadaï et le Kanem.

Article 2.

Les dépenses militaires de toute nature des pays et protectorats du Tchad figurent au budget colonial.

Article 3.

Les recettes et les dépenses locales de la circonscription formeront, à l'avenir, un budget autonome, arrêté chaque année par le commissaire du Gouvernement et approuvé par le commissaire général du Gouvernement au Congo français en conseil d'administration.

Le commissaire du Gouvernement est ordonnateur de ce budget.

Les recettes comprennent :
1° Une somme à prélever sur les recettes douanières et proportionnelles aux importations et exportations constatées ;
2° Les impôts, tributs et redevances à percevoir sur les populations indigènes.

Article 4.

Le commandant des troupes est chargé de l'intérim du commissaire du gouvernement dans les pays et protectorats du
Tchad, en cas d'absence de celui-ci.

Article 5.

Tous les territoires du Congo français non compris dans la nouvelle circonscription sont placés, au point de vue administratif et financier, sous l'autorité directe du commissaire général du gouvernement au Congo français.

Le budget particulier de l'Oubangui est supprimé.

Article 6.

Toutes dispositions contraires et notamment le décret du 20 octobre 1894, portant organisation des territoires de l'Oubangui, sont et demeurent abrogées.

Article 7.

Le ministre des colonies est chargé de l'exécution du présent décret.

Fait à Rambouillet, le 5 septembre 1900.

ÉMILE LOUBET.

Par le Président de la République française

Le ministre des colonies,
ALBERT DECRAIS.


Décret du 8 septembre 1900.

Paris, le 8 septembre 1900.

Monsieur le Président,

Vous avez bien voulu sanctionner récemment la nouvelle organisation de la région du Chari en un « territoire militaire des pays et protectorats du Tchad ». Comme conséquence de cette mesure, il est indispensable de fixer les effectifs destinés à assurer l'occupation de ce territoire. Nous nous sommes efforcés d'en restreindre l'importance et d'en constituer les éléments de façon à réduire la dépense au plus strict minimum compatible avec les nécessités de la garde et de la défense de la région.

Nous avons l'honneur de vous prier, monsieur le Président, si vous approuvez ces propositions, de vouloir bien revêtir do votre signature, le projet de décret ci-joint.

Nous vous prions d'agréer, monsieur le Président, l'hommage de notre profond respect.

Le ministre des colonies,
ALBERT DECRAIS.

Le ministre de la marine,
DE LANESSAN.

Le Président de la République française,

Vu le décret du 5 septembre 1900, portant organisation d'un territoire militaire des pays et protectorats du Tchad ;

Sur le rapport des ministres de la marine et des colonies,

Décrète :

Article premier.

La force armée affectée au territoire militaire des pays et protectorats du Tchad est placée sous le commandement d'un officier supérieur qui relève directement du commissaire du Gouvernement et qui supplée celui-ci en cas d'absence.

Article 2.

Les troupes et services militaires comprennent :
Un personnel hors cadres ;
Un bataillon de tirailleurs sénégalais à quatre compagnies ;
Un escadron de cavalerie indigène ;
Une batterie mixte d'artillerie ;
Un personnel du commissariat et de santé.
La composition de ces différents éléments est indiquée dans les tableaux ci-annexés [non reproduits].

Article 3.

Les ministres de la marine et des colonies sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du présent décret.

Fait à Rambouillet, le 8. septembre 1900.

ÉMILE LOUBET.

Par le Président de la République:

Le ministre de la marine,
DE LANESSAN.
Le ministre des colonies,
ALBERT DECRAIS.



Décret du 30 juin 1914.

RAPPORT AU PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

Paris, le 30 juin 1914.

Monsieur le Président,

L'extension de notre action administrative jusqu'aux confins septentrionaux de la zone d'influence française dans le Sahara oriental doit entraîner une surveillance plus immédiate des régions nouvellement occupées.

D'autre part, l'unité de direction dans cette région, tant au point de vue militaire qu'au point de vue administratif, est devenue indispensable afin d'harmoniser nos efforts vers la pacification définitive et prochaine de cette partie de l'Afrique française.

Il paraît donc utile de réunir en un seul groupement administratif toute la région comprise entre les confins de la Tripolitaine et de la Libye, depuis la frontière sud algérienne jusqu'au Darfour, qui, jusqu'à ce jour, relevait en partie de l'Afrique occidentale française et de l'Afrique équatoriale française suivant une ligne de partage, d'ailleurs indéterminée, mais qui, en fait, séparait le Tibesti du Borkou.

Cette circonscription nouvelle qui constituerait provisoirement une marche militaire sous le nom de « Territoire du centre africain» serait ainsi formée par prélèvements sur les territoires militaires du Niger et du Tchad ; elle serait rattachée à l'Afrique équatoriale française dont elle relèverait uniquement. Le reste du territoire militaire actuel du Tchad deviendrait une simple subdivision de la colonie dite de l'Oubangui-Chari.

Si vous partagez ma manière de voir sur cette disposition, je vous serais très reconnaissant, monsieur le Président, de vouloir bien revêtir de votre signature le projet de décret ci-joint.

Je vous prie d'agréer, monsieur le Président, l'hommage de mon profond respect.

Le ministre des colonies,
RAYNAUD.

Décret.

Le Président de la République française,

Sur le rapport du ministre des colonies,
Vu l'article 18 du sénatus consulte du 3 mai 1854 sur la constitution des colonies ;
Vu le décret du 30 décembre 1912 sur le régime financier des colonies ;
Vu le décret du 18 octobre 1904 portant organisation du gouvernement général de l'Afrique occidentale française, ensemble le décret du 7 septembre 1911 portant rattachement du territoire militaire du Niger au gouvernement général de l'Afrique occidentale française et le décret du 5 avril 1912 instituant un commissaire du gouvernement général dans le territoire militaire du Niger ;
Vu le décret du 15 janvier 1910 portant création du gouvernement général de l'Afrique équatoriale française,

Décrète:

Article premier.

A compter du 1er janvier 1915, il sera créé une subdivision administrative dénommés « Territoire du centre africain» relevant du gouvernement général de l'Afrique équatoriale française.

Ce territoire comprendra le triangle formé par :
a) Le lac Tchad pour sommet entre Nguigmi et Kouloa.
b) Les deux lignes ci-après pour côtés :
1° Ligne allant du lac Tchad dans la direction de Rhat en passant à l'ouest d'Agram jusqu'à la frontière sud-algérienne ;
2° Ligne se dirigeant du lac Tchad vers le le point de jonction de Darfour et du territoire civil actuel de l'Oubangui-Chari-Tchad (à déterminer).
c) Le troisième côté sera constitué par la frontière franco-italienne et franco-anglaise.

La région comprise entre le sud de ce territoire et la colonie proprement dite de l'Oubangui-Chari-Tchad deviendra partie intégrante de celle-ci qui prendra le nom d'Oubangui-Chari.

Les limites et le chef-lieu du territoire du centre africain seront fixés conformément à l'article 1er, paragraphe 2, du décret du 15 janvier 1910.

Article 2.

Il sera créé un budget local du territoire du centre africain.

Article 3.

Le ministre des colonies est chargé de l'exécution du présent décret qui sera publié au Journal officiel de la République française et des colonies intéressées et inséré au Bulletin des lois, ainsi qu'au Bulletin officiel du ministère des colonies.

Fait à Paris, le 30 juin 1914.

R. POINCARÉ.

Par le Président de la République:

Le ministre des colonies,
Raynaud


Décret du 14 mai 1915.


RAPPORT AU PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

Paris, le 14 mai 1915.

Monsieur le Président,

Un décret du 30 juin 1914 avait prévu la substitution au « territoire militaire du Tchad », tel qu'il existe actuellement, d'une subdivision administrative nouvelle désignée sous le nom de « territoire du centre africain ». Cette mesure avait pour effet de préparer le transfert du commandement du territoire militaire à l'autorité civile.

En raison des événements, l'application de ce décret a dû être ajournée.

Or, l'officier général, commandant du territoire militaire du Tchad, se trouve dans la nécessité de rentrer en France pour raisons de santé. Le gouverneur général de l'Afrique équatoriale a pensé que cette circonstance devait permettre de préciser les dispositions existantes, de manière à laisser au Gouvernement la faculté de tenir compte uniquement, pour la direction du territoire, des compétences spéciales du personnel, soit civil, soit militaire, qui se trouve disponible.

J'ai adopté les suggestions de M. le gouverneur général de l'Afrique équatoriale française, et j'ai l'honneur, en conséquence, de vous prier de vouloir bien donner votre approbation au projet de décret que je soumets à votre haute sanction.

Je vous prie d'agréer, monsieur le Président, l'hommage de mon profond respect.

Le ministre des colonies,

GASTON DOUMERGUE.

Décret.

Le Président de la République française,

Sur le rapport du ministre des colonies,
Vu le décret du 11 février 1906, portant réorganisation des possessions du Congo français et dépendances ;
Vu le décret du 15 janvier 1910, portant création du gouvernement général de l'Afrique équatoriale française ;
Vu le décret du 30 juin 1914, portant organisation du territoire du centre africain, dont la mise à exécution a été ajournée par décret du 24 novembre 1914,

Décrète:

Article premier.

La circonscription constituée, au nord de l'Oubangui-Chari, par l'ensemble des régions placées sous l'influence de la France en vertu de conventions internationales et ne dépendant pas du gouvernement général de l'Afrique occidentale française est administrée, sous le nom du territoire du Tchad, soit par un fonctionnaire civil, soit par l'officier commandant les troupes qui y sont stationnées. Suivant le cas, ce fonctionnaire ou cet officier prend le titre d'administrateur ou de commandant du territoire du Tchad. Il relève directement du lieutenant gouverneur de l'OubanguI-Chari-Tchad.

Article 2.

Toutes dispositions contraires sont et demeurent abrogées.

Article 3.

Le ministre des colonies est chargé de l'exécution du présent décret, qui sera publié au Journal officiel de la République française, au Journal officiel de l'Afrique équatoriale française et inséré au Bulletin des lois ainsi qu'au Bulletin officiel du ministère des colonies.

Fait à Paris, le 14 mai 1915.

R. POINCARÉ.

Par le Président de la République :

Le ministre des colonies,
GASTON DOUMERGUE.


Décret du 17 mars 1920

Le Président de la République française,

Vu l'article 18 du sénatus consulte du 3 mai 1854 sur la constitution des colonies ;
Vu le décret du 15 janvier 1910 portant création du gouvernement général de l'Afrique équatoriale française ;
Vu le décret du 14 mai 1915, portant réorganisation du territoire du Tchad ;
Vu le décret du 12 avril 1916, rattachant le territoire du Tchad à l'Afrique équatoriale française ;
Vu le décret du 14 juin 1917, portant réorganisation du conseil d'administration du territoire du Tchad ;

Sur le rapport du ministre des colonies,

Décrète :

Article premier.

Le territoire du Tchad est érigé en colonie relevant directement du gouvernement général de l'Afrique équatoriale française et le lieutenant gouverneur placé à sa tête en assure l'administration dans les conditions prévues par le décret du 15 janvier 1910 pour les autres colonies du groupe.

Article 2.

Le ministre des colonies est chargé de l'exécution du présent décret, qui sera publié aux journaux officiel de la République française et de l'Afrique équatoriale française, au Bulletin des lois et au Bulletin officiel du ministère des colonies.

Fait à Paris, le 17 mars 1920.

P. Deschanel